HISTOIRE DU LONG-P ARLEMENT CONVOQUÉ PAR CHARLES Ie~ EN 1640; PAR THOMAS HAY, ...
}

HISTOIRE
DU


LONG-P ARLEMENT
CONVOQUÉ PAR CHARLES Ie~


EN 1640;


PAR THOMAS HAY,
, SECRÉTAIRE DU PARLEMENT.


TOME 11.


A PARIS,
CIIEZ nÉCHET AINE, LIBRAIRE-ÉDITEun,


QUAl DES AUGUSTINS, NO. 57;


A ROUEN~
MEl\IE MAISON DE COMJtlERCE,


llUi: GRAND-PONT, NO. ']3.








2 HISTOIB.E


troupes, allait de lieu en lieu, ramassant des 801-
dats ets'effor<;antdes'attirer des partisans. Je dirai
plus tard et de suite, pour éviter la confusion, de
quelle lnaniere iI augmenta, par degrés, ses forces.
Cependant l'ordonnance du parlement pour]a mi-
lice et la commission d'enrOlement du Roi étaient
alors en conflit dans presque tous les comtés. Les
principaux personnages de la noblesse anglaise;
rangés dan s l'un ou 1'autre parti, allaient en per-
sonne s'emparer des lieux qui leur étaient dési-
gnés, soit par le Roi, soit par le parlement. Ni
les ordonnances de l'un, ni les proclalnations de
l'autre, n'étaient plus en état d'arreter cette ca-
lamité générale et contagieuse. Dieu n'avait pas
voulu que le feu de la guerre civile se renfer-
mat dans un seul foyer; il s'en allumait chaque
jour quelque éti~celle dans toutes les parties du
pays.


On ne trouvera donc pas mauvais que je com-
luence par exposer, en peu de mots, dans quelIe
situation les différens co:mtés, ou la plupart d'entre
eux, avaient taché de se placer dan s l'intervalle
qui s'écoula depuisle 12 juillet 1642, époque OU
la guerre avait été clairement déclarée, et OU le
parlement avait nornmé son général, jUSf{U'aU
23 octobre ou elle éclata par une cruelle et
sanglante hataille. Cependant le lecteur ne doit
pas s'attendre.a trouver ici un récit complet et
détaillé de ces faits particuliers; ce qu'on en ra~




DU LONG PARLEMENT. 5
portera a surtout pour objet de faire connaitre
les lords et gentilshommes qui se montrerent les
premiers de chaque coté en plusieurs conltés du
royaume, afin que, dans la suite de l'histoire, le
leeteur se trouve familiarisé avec les noms de
eeux dont les aetions eurent une si grande impor-
tanee dans la guerre qui se préparait alors. On
ne pourrait, dans eette relation abrégée d'un si
court intervalle de temps, donner une idée bien
nette des sentimens et de la situation de chaque
comté; ear a peine s'est - iI trouvé une ville ou
un distriet qui n'ait éprouvé sueeessivement plu-
sieurs vieissitudes d' opinion, soit que ees ehan-
gemens aient eu pour eause l'ineonstanee du peu-
pIe, soit qu'il ait été contraint de se tourner d'un
coté ou de l'autre, seloll que les approehes de l'une
ou de l'autre armée, lorsque la guerre arriva a
son plus haut période, donnaient le dessus a l'un
des d~ux partis.


Dans quelques comtés, il n'y eut aueune lutte,
un des partis s'y trouvant le plus forl et confonne
aux dispositions du peuple. Ce fut ail1si que les
choses parurent se passer d'abord dans le comté
de Lincoln, le premier d' 00. le parlement re~ut
des nouvelles de l'organisation de la milice. Quel-
ques unes des cireonstanees de ce fait sont assez
importantes pour nlériter qu'on en rende un
eoro pte partieuIier. Lord Willoughby de Parhanl
y avait été envoyé par le· parlement en qualité de


J.




4 HISTOIRE
lord-lieutenant du comté. Ce jeune lord, en ar-
rivant a Lincoln, fit connaitre au parlement l'al-
légresse et la honne volonté avec laquelle les
capitaines et officiers de la milice s'étaient soumis
a ses ordres. Illes avait trouvés en beaucoup meil-
leur état qu'il ne pouvait s'y attendre. La ville
était alors aflligée de la peste, ce qui avait em-
peché plusieurs personnes de se présenter; mais
leur ahsence avait été bien compensée par la for-
mation d'une compagnie de volontaires, égaux a
la milice pour le nombre et la bonté de leurs
arDIeS. Cependant les changemens dont j'ai parlé
tout ... a-l'heure se manifesterent d'une maniere
funeste dans ce comté, qui fut, par la suite, aussi
déchiré de divisions qu'aucune autre partie de
l' Angleterre, et devint aussi le malheul~eux théatre
de la guerre, étant souvent occupé et ahandonné
par chacun des deux partis. Mais, pour le mo-
ment, il fut tres-empressé a se soumettre au lord
Willoughby, et ce fut seulement ensuite que ce
lord éprouva quelque résistallce de la part du
comte de Lindsey, qui tenait pour le Roí. Lord
Willoughby instruisit le parlement de ce premier
succes J et lui envoya aussi la lettre qu'il avait
re~ue du Roi et sa réponse. Il sera bon de les in-
sérer ici toutes deux, parce qu' elles sont les pre-
lniers documens de ce gen re , et les plus propres
a faire connaitre l'état des affaÍres.




D U LONG P ARLEMENT. 5


Lettre du Roí au lord W'illoughby de Parhanz.


CHARLES, Ror.


(( A VOUS, notre fidele et bien-armé, salut.Nous
, ,


ce apprenons que vous avez eommenee a rassem ....
c( bler, enrégimenter et passer en revue les mi ...
c( liees de notre eomté de Lineoln, sous prétexte
ce d'une ordonnance du parlement a laquelle nous
(e n'avons pas donné notre eonsenternent; ce qui
({ est contraire non-seulement a la loi, mais a
ce notre eommandement et volonté, signifié par.
c( notre proclamation envoyée a notre grand-
c! shériff de ce eomté. Ainsi done, afin que vous
ce ne puissiez dorénavant prétendre cause d'igno-
c( rance sur notre défense, nous vous ordonnons
c( et commandons, par ces leUres, sur votre alIé-
c( geance, de eesser et de vous abstenir de lever,
ce équiper -' exereer ou assembler aueune des mi ....
c( lices de notre dit eomté, soit par vous-mema
« OU par aueune autre personne sous vos ordres
c( . et agissant par votre autorisation. Et eomme,
c( pour ce que vous avez déja faÍt eoncernant la.
c( milice de notre eomté, vous pouvez vous ex-
ct euser sur ce que vous n'aviez pas encore re«;u
fe un ordre si partieulier, nous fermerons les
(( yeux sur ce qui a déja été faÍt, a eondition
~J (( qu'au rec;u de la présente, vous cesserez ah~o.,..




6 HISTOIRE
« lument de vous entremettre en rien de ce qui
« concerne la milice de ce comté. Mais si vous
{( refusez de cesser et discontinuer toute entremise
( sur ce point, Hons sommes résolus de vous faire
« rendre un compte sévere de la désohéissance
c( dont vous "Vous serez rendu coupable apres tant
« d'ordres spéciaux et légaux auxquels votre al-
« légeance vous ohlige d'ohéir, et nous vous juge-
fe rons et ponrsuivrons COmnle perturhateur de
« la tranquillité du royaume.


c( Donné en notre cour d'York le 4 juin 1642.
( .A notre tres-fidele et hien aimé le lord Wil-
(c loughhy de Parham. »


Lettre du lord Willoughby de Parhaln~ en
r4ponse d Sa Majeslé.


« SIRE,


c( Comme il ne peut m'arriver un plus grand
( malheur que de recevoir de Votre Majesté un
( ordre auquel mes actions ne puissent ohéir,
ce ainsi que j'y suis porté par mes affections, je
~ dois avouer que ce n'est pas pour moi peu d'em-
«( harras que de ne savoir comment témoigner la
« soumission que je dois aux derniers ordres de
( Votre Majesté, sans trahir la ~ommission que
c( m'a confiée votre haute cour du parlement,
f( dont l'ordre spécial m'a envoyé dans ce comté
H pour y orga,niser la nlilice selon l'ord,ollnance




DU LONG PARLEMENT. 7
{( du parlement ,1 passée en chose légale par le
ce vote de milord Littleton et autres membres de
(c la chambre des pairs, mieuxversés dans les
« lois que je ne le suis. Elle a, si je ne me trompe,
{( été confirmée depuis par l'exemple de sir John
c( lJanks, grand - j uge de V otre Ma j esté, e~ de
{( lord Littletol1 lui-meme; car ils ont accepté la
« mission dont elle les a revetus, et ont nOlllmé
« eux-memes leur député-lieutenant. J'ignore ce
C( qu'ils ont pu faire depuis.


« Mais, Sire, si l'opinion de ces grands juris-
« consultes m'a entrainé dans quelque démarche
« gui ait pu déplaire a Votre l\fajesté, j'espere
«( que le défaut d'age excusera roon défaut de ju .
« gelnent; et, puisque j'ai été déja si loin dans
« l' exécution des ordres du parlement que les.
C( ordres sont envoyés pour sommer la milice du
« comté de se réunir aujourd'hui pres de luoi a
{( Lincoln, et ensuite en d'autres lieux, je sup-
« pIie tres-humblement Votre l\fajesté de ne pas
{( m'imposer des comlIlandemens qui m'oblige-
« raient nécessairement a trahir ceux qui ont mis.
« en nlOi leur confiance, et m'exposeraient ainsi
(( aux plus grands malheurs qui puissent m'ac-
c( cabler.


« Je supplie, Sire, tres-humblement Votre
« Majesté de prendre gracieusement ces choses
ce en considération, et de ne vouloir bien ne point
« porter s~r moi, en raison de cette action, aucun




8 HISTOIRE
c( jugement défavorable, puisqu'il ne s'est rien
« fait ici par mes ordres, et ne se fera rien qui
« n'ait pour objet l'honneur et la sureté person-
( neHe de Votre Majesté, le maintien de la tran~
«( quillité de votre royaume, et, je l'espere, la
f( satisfaction de tous les sujets de Votre 1\1"a-
c( jesté dans cette province, parml lesquels je
«( demeure


(e De Votre Majesté,
« Le plus humhle et le plus ohéissant


(C sujet et serviteur,
« FRANCIS WILLOUGHBY.


A la réception de cette leUre , les lord s envoye-
rent un message a la chambre des communes pour
exprimei" leur a pprobation et leur estime de la
conduite de lord Willoughhy , dans une affaire
qui intéressait de si pres la sureté du royaume,
conduite dont le mérite était d'autant plus grand
que les difficultés avaient été plus elnbarrassantes.
Les lords, décidés a faire dans cette occasion leur
propre cause de celle de lord Willoughby, deman-
derent aux communes de se joindre publiquement
a eux. Les communes y consentirent, et adopte-
:vent une résolution semblable a l'égard des dé-
putés-lieutenans , -pour le cOlnté de Lincoln ,
vote auquel, a leur tour, les lords joignirent le
leur~




DU LONG PARLEMENT. 9
Dans le comté d'Essex, OU l'opinion était una-


nime, et qui pour cette raison jouit d'une pro-
fonde paix, le comte de Warwick, dont les soins
ne se bornaient pas aux affaires maritimes, avait
été nommé lord -lieutenant par le parlelnent.
Quand il se rendit dans ce comté, pour passer
en revue la population, il fut re~u avec des trans-
ports de joie. Non-seulement la milice était au
complet, lnais il s'y joignit un nombre prodi-
gieux de volontaires, et ils étaient si attachés a
la cause du parlement qu'au nom de tous les
capitaines et lieutenans des diverses compagnies,
ils adresserent au cOlute de Warwick et aux dé-
putés-lieutenans, une pétition qui fut lue a l'ordre
du jour, et re~ue avec des acclamations univer-
selles. Pour faire counaitre au parlement la sin-
guliere affection de ce comté, le comte de War-
wick lui envoya cette pétition qui était con~ue
en ces termes:


Aa tres-honorable Robert comte de Warwick,
lord-lieutenant du cOlnté d~ Essex, et aax dignes
gentilshomlnes les députés-lieutenans da méTne
comté J rev~tus de cette charge par la tres-hono ....
rabie cour dl/, Parlement. '


( Nous capitaines et lieutenans, ave e le plein
ce assentiment de la milice et des volontaires du
ce comté, maintenant asselnblés, ayant vu, avant
{l l'ouverture du présent parlement, notre reli~




10 HISTOIRE


c( gion, nos lois et nos libertés sur le point de
c( périr, par l'influence des plus détestables COD-
ce seils, nous éprouvons une joie profonde, en
c( voyant la réunion et la permanence de cette
c( grande et fidele assemblée, qui représente le
ce corps du royaume, et nous lui remettons avec
ce une entiere confiance le so in de tout ce qui nous
« est cher.


« Ayant vu aussi récemment les abominables
(c desseins d'un parti de malintentionnés dans' ce
« royaume, et.la sanglante rébel1ion de l'Irlande,
« machinations qui ont pour objet de ralentir
ce la marche, ou de détruire l' existence de ce
« ~igne parlement, pour nous enlever ainsi. nos
fe espérances de réforme, de paix et de bonheur,
« soit dans I'Église, soit dans l'État, nous éle-
ce vons nos actions de graces vers le Roi des Rois,
ce et manifeston~ notre vive reconnaissance envers
f( l'instrument de ses voIontés , eette grande as-
c( semblée, dont les résolutions sont ind01l1pta-
c( bIes, les efforts san s exempIes, et les aetes si
c( utiles au bien commun; nous la remercions
({ en particulier de sa nécessaire et sage ordon-
« nance sur la miliee, qui nous a mis sous le
« commandernent d'un si noble lord et de si di-
(( gnes gentilshommes, pour qui nous désirons
« que ce jour et cette réunion soient une preuve
ce et un gage de notre libre et voIontaire obéis ...
f( sanee.




DU LONG PARLEl\iENT. 1 1


c( eornme nous avons confié notre religion, nos
c( lois et tout ce qui nous touche, a cette augusta
c( et fidele assemhlée du parIelnent, dont le zele
c( et le courage nous sont si bien connus, nous
ce nous désolons de voir le creur et la conduite
«( de notre royal maitre s' écartel~, contre ses
« royales promesses, des conseils de son parle-
c( roent, pour se livrer a d'autres conseils, étran.,.
c( gers a la constitution du pays, et a qui nous
ce ne voulons ni ne pouvons, en ce qui nous con-
« cerne, remettre la garde de notre religion et
c( de nos 10is. Nous sommes meme convaincus
(e que si ces mauvais conseillers pouvaient pré-
ce valoir contre la haute cour du parlernent, qui
ce est apres nieu notre plus ferme boulevart, ils
fe nous pri veraient, malgré leurs helles paroles,
« de notre religion, de nos lihertés ,et nous ré-
c( duiraient a une condition pleine de malheur
« et de servitude.


c( Dans la profonde appréhension de tant d~
« nlaux, nous promettons librement et sincere-
ce ment de soutenir et défendre , de nos personnes.
fe comme de nos hiens, et jusqu'a la derniere ex-
« trémité, la haute cour du parlelnent mainte-
c( nant assemblée, ses memhres, son pouvoir,
c( ses pri viléges ~ et par cela meme, la personne
« et l'autorité de Sa Majesté, ainsi que la paix
.~( du royaurne, contre tout conseil, entreprise ou;
« force armée qui seraient dirigés contre eu~._




1.2 HISTOIRE
c( Nous supplions votre honneur de trans-


« mettre de notre part cette résolútion, qui, nous
ce n' en doutons pas, sera partagée par tous
« nos hons compatriotes, a l'auguste assemblée
ce du parlement, dont nos prieres demanderont
ce tous les jours au ciel la contilluation et le
ce succes. J)


Signé J. KITELEY, H. FARRE, etc., etc.


Le parlement s'empressa de témoigner aux
hahitans ducomté d'Essex son approbation, et leur
adressa une réponse qui finissait par ces mots :


(e Les lords et les cotnmunes non - seulement
ce approuvent, lnais louent grandement votre
(e sage et fidele résolution. lIs vous assurent
ce qu'ainsi que tous leurs efforts ont tendu jus-
c( qu'ici vers la paix et le honheur du Roi et du
ce royaume, de meme ils continueront a s'acquit-
« ter de la grande et patriotique nlÍssion qui
ce leur est confiée; qu'ils surmonteront tous les
« obstacles qu'on tenterait d'opposer au bien pu-
ce hlic, et qu' en toute occasion ils seront dis-


" t t' l' d ce poses a mon ,rer, sur out a vous" es egar s
ce dus a des hommes qui ont donné au parlement
c( tant de marques de zele et de fidélité. »


Le comté de Kent obéit aussi de bonne grace,
du moins san s opposition publique, a l' ordon-
nance sur la milice. Quelques gentilshornmes de
ce comté n'étaie'nt pas, il est vrai , fort aUachés




DU LONG P ARLEMENT.
a la cause du parlement, aussi rédigerent - ils
une pétition désobligeante pOUi' les ehamhres~
Ils la porterent a Londres, aeeompagnés d'Ull
assez grand nombre de gentilshommes du eomté;
mais le parlement en ayant eu avis., envoya des
officiers qui désarmerent les porteurs de la péti ....
tion, avant qu'ils eussent passé le pont de Lon ....
dres; et les deux gentilshommes qui la pré-
senterent a la ehamhre des eornmunes, sir Wil-
liam Butler et M. Richard Lovelace, furent mis
en prison. Les habitans du eomté de Kent, favo-
rables au parti du Roi et a la eommission d'en-
rOIement, n' étaient pas assez nomhreux pour
mettre ce eomté en eombustion. Les amis du
parlement apporterent tant d'aetivité dans 1'0r-
ganisation de la miliee, désarlnerent si bien ce
petit, mais ardent parti de papistes, surent si
bien se pourvoir d'armes, et se taxerenteux-
memes a des sommes si eonsidérables pour le
service des ehambres, que non - seulement ils
maintinrent leur eomté en paix, mais fournirent
aux armées du parlelnent des seeours importans.


L'extrémité orientale du eOluté de Sussex, dis-
triet long et étroit qui se prolonge pendant plu-
sieurs milles le long de la eote, demeura fern1e
dans la cause du parlement, et mit un grand
soin a organiser sa miliee; aussi ce pays eut-ille
bonheur de se maintenir en paix et tranquillité.
Mais la partie occidentale se trouvant etre la




lIISTOIRE
résidence de plusieurs des membres révoltés du
parlement, qui y avaient, de plus, beaucoup
d'alliances et d'amis, leur influence y causa d'a-
bord quelques troubles; a la vérité, ils ne furent
pas de IOllgue durée.


Les cOlntés de Surrey et Middlesex, par le
bonheur de leur situation, se trouverent néces-
sairement faire cause comlnune avec le parle-
ment, et, par conséquent, denleurerent en su-
reté sous sa protection.


Les comtés de l'est, Suffolk, Norfolk, et
Cambridge, cOlnposant autrefois le royaume
d'Est- Anglie, furent heureusement préservés,
des le commencement, de toute grande agitation,
hien que la principale noblesse du pays se fut
en grande partie montrée disposée pour le Roi,
dans l'affaire de la commission d'enrolement.
Mais elle ne formait pas un parti assez fort pour
pousser le pays a la guerreo Les francstenanciers
et les hourgeois tenaient en général pour le par-
lement; ceux des gentilshommes qui essayerent
de lever des soldats, de rassembler des troupes
ou de faire des prov ¡sions d' armes pour le Roí,
se virent bientot réprimés, et tous leurs efforfs
furent, des ce mOlnent , réduits a l'impuissance
par le parti opposé, et spécialement par la haute
prudence et l'infatigable activité de M. Olivier
Cromwell, me~bre de la chambre descommunes,
qui avait re«;u du parlement une cOIDlnission de




DU LONG PARLEMENT.
colonel de cavalerie, et dont les actions nOU8
fourniront bientot un ample sujet de discours.


Le cornté de Southampton fut divisé -' des le
commencement, et continua long-temps de l'etre
et de subir les diverses fortunes des deux partis.
Le colonel Goring, fils ainé du lord Goring,
avait été, l'année précédente, au nOlnbre de
ceux qui avaient aidé a déjouer le complot forJné
pour faire marcher l'armée du nord contre les
chambres, et <;ette action l'avait mis en quelque
crédit dans le parlement. On l'envoya a Ports-
mouth, pour conserver cette place aux pflrle-
mentaires, et il re«;ut trois mille li vres pour la
fortifier; mais, apres avoir re«;u cet argent du
parlement, il manqua a la foi qu'il avait pro-
nlise, et tint la place pour le Roi. Aussitot qu'ol1
eut la nouvelle de sa révolte, on s'assura du
comte de Portland, gouverneur de l'ile de Wight,
homme suspect au parlement, et on le mit en
prisori, a Londres, dan s la crainte que, de con-
cert a vec le colonel Goring, il ne li vrat cette
He au parti du Roi. Le gouvernenlent de l'ile de
Wight fut confié au cOlnte de Pembroke , homme
en qui le parlenlent avait une entiere confiance.


Les parties orientales et nléridionales de l' An-
gleterre jouissaient de quelque apparence de re-
pos; mais les comtés plus éloigués de IJondres,
du coté du nord et de l'ouest, ne partageaient
nullelnent ce bonheur_




16 HISTOIRE
.. Dans le comté de Lancaster ~ le lord Strange, fils
du comte de Derby, et lieutenant pour le Roí des
comtés de Laneaster et de Chester, trouva une
grande résistanee a l'exécution de la commission
d'enrolement. Plusieurs gentilshomlnes du parti
du parlement, sir Thomas Stan~ey, M. Holland,
M. ~oleraft, M. Egerton, M. Booth, ainsi que
M. Ashton et M. Moor, tous deux membres de
la chambre des communes, firent si bien que,
da,ns l'espaee de peu de mois, ils parvinrent a le
chasser tout-a-fait du comté, qu'ils remirent en-
tiere~ent sous la domination du parlement, quoi-
qu'il renfermat plus de papistes qu'aueun autre
canton de l' Angleterre.


Le lord Strange avait fait, le 15 juillet'- une
tentative pour se rendre maitre de Manchester;'
il avait été repoussé par ces gentilshommes. Il
y eut, en cette occasion, un homme tué; ee fut
le premier sang versé dans la guerre civile (1).


(1) Whitelocke (Mémoires, pago 59), en parlant de
l'accusation de haute trahison qui fut intentée ensuite
eontre lord Strange, dit aussi qu'un M. Percival fut tué par
les hommes qu'il avait levés dans le eomté de Lancaster;
mais il parle, peu apres, d'une sortie faite par sir John
Hotham et sir John Meldrum contre des troupes du Roi,
eantonnées aux environs de Hull , sortie OU quelques roya-
listes furent tués; et il ajoute, (( ce fut le premier endroit
« ou le sang eoula dans eette guerreo » Whitelocke semble
done avoir eonsidéré le meurtre de M. Percival cornme




DU LONG PARLEMENT. 17


Ce lord ne fut pas heureux dans ses entreprises
eontre le parlement. Étant revenu peu {le telnps
apres, a la tete d'une troupe de trois mille
hommes, pour attaquer de nouveau Manehester,
il l'assiégea inutilement, bien qu'avee heaueoup
de vigueul", pendant deux semaines entieres, fu.!
~nfin completement battu, et perdít une grande
partie de son monde~ Il n' eut pas une meilleure
fortune dans le eomté de Chester, 00. il était
également 1 ieutenant pour le Roi; iI Y éprou va
une vive résÍstance de la part de sir William
Brereton et de plusieurs autres gentilshommes,
gUÍ l'empeeherent de s'emparer, eorome iI en
avait l'intention, du magasin situé dans ee eomté;
etle eonlte de Rivers, papiste, que le Roi lui avait
assoeié dans la eommission d'enroleme~t, ne put
le seeonder assez dans ses efforts, pour empeeher
que les pa pistes de ee eomté ne fussent tous dé-
.sarmés par les gentilshommes protestan s du parti
du par~elnent.


un meurtre el non un fait de guerreo Cette différenee, tres-
peu importante en soi, n'est remarquable qu'en ce que
l\f. Percival paralt ayoir été un parlementaire tué par les gens
que lord Strange levait pour le Roi. May impute done aux
Toyalistes le premier sang versé dans la guerre , . e'est-a-
dire, la premiere hostilité irréparable que Whiteloeke at-
tribue aux parlementaires. Il paralt qu' on aUaeha, dans le
temps, une grande importanee a eette question quí n'en '-:l
·plus aueune aujourd'hui. (Note de l'Editcur.)


2. 2




18 HISTOIRE


Les pays plus éloignés vers le nord furent en
proie a plus de dissensions. Le comte de New-
castle, a la tete d'une forte garnison, tint, pour
le Roi -' la v ille de N ewcastIe, et le conlte de
Cumberland, lord -lieutenant du cornté d'York
ponr le Roi, y exécuta, avec activité, la COllllnis-
sion d'enrolement; mais ils épronverent une
grande résistance de la parí (le lord Fairfax et de
plusieurs autres partisans du parlement. Nons
passerons légerement, dans ce moment, sur ces
affaires du nord, qui méritent d'ctre l'acontées
plus au long, lorsqu'il sera temps de faire con-
naitre l'élévatiol1 du comte de Newcastle et les
diverses fortunes de lord Fairfax et de son. fils,
sir Thomas Fairfax.


Dans le CODlté de Derby, habité par une no-
hlesse tres-puissante, tant haute que moyenne,
personne de marque ne se déclara pour le parle-
lnent, si ce n'est sir John Gell et son frere, dont
les actions trouveront leur place ailleurs.


Les trouhles ne furent pas moindres dan s les
COlntés de Stafford et de Nottinghanl.


Ils furent encore plus considérables dan s le
comté de Leicester, et ils y cOlnnlencerent de bonue
heure. Le Roi avait nomIné shériff de ce comté et
nlÍs dans la commission d'enroleulent sir Henri
Hastings, second filsducolnte de Huntingdon.Illeva
des forces considérables pour s'emparer des ma-
gasins du comte. Le cornte de Stamford fut envoyé




DU LONG PAR:LEMENT.


conÍl'e lui par le parlement, en qualité de l{)rd-
lieutenal1t, avec un eorps de troupes nombrellx.
Son arrivée arreta les progres de 1\1. Hastings,
et il se Init en possession de la ville de Leicester.


La lutte fut vive dans le eomté de War-
,vick, -entre le comte de Northampton, qui te-
}lait pour le Roi, et lord Brook, pour le par-
lenlent; il Y eut plusieurs chaudes rerlcontrcs
avec perte d'hommes des deux cotés. Le comte,
qui s'était emparé de l'artillerie de Banhury,
marcha, avec une grande impétuosité, a travers
le eomté de \iVarwiek, ravageant le pays qu'il
traversait; mais il fut arreté pa11 la résistanee ·clu
peuple et eelle des troupes de lord Brook.


Le eomtede Pelnbroke avait eu peu de peine
a organiser la miliee dans le eomté de Wilts.;
mais son sueees ne fut pas de longue durée. Le
COtnte de HolIand avait réussi de "neme dans le
Berkshire, malgré la faible résistance du eomte
de Ber~shire, de lord Lovelaee et de quelques au-
tres; Dlais,bientot apres, le eomte de Berkshire,
réuni a sir JOh11 Curson, sir Rohert Dormer et
plusieurs autres membres de la eommission d'en-
rolement, s'étant rendus a Watlington, dans le
eomté d'Oxford, pour s'emparer des magasins de
eeUe portion du eomté, déposés dans eeUe ville,
ils furent faits prisonniers et envoyés au par-
lenlent par le eolonel Hampden et le eolonel


2.




20 11ISTOIRE
Goodwin, lous deux menlbres de la chamllre
des communes et chevaliers du comté de Buckin-
gham.


Plus on s'approche de l'ouest, plus on y trouve
les divisions ardentes et nombreuses, en raison
du grand nombre de lords et de gentilshomlnes
de haut rang, la plupart Dlembres du parlement,
qui tenaient pour le Roi dans ces comtés, etfurent,
par conséquent, expulsés ensuite de la ehambre.
Le chef de ces cOlntés de l'ouest était William,
marquis de Hertford, que le ROÍ, par sa comnlis-
sion d'enrolement, avait nommé chef et lord-lieu.-
tenant-général des comtésde Devon, Cornouailles,
Sommerset, Dorset, 'Vilts, Southampton, ~lo­
cester, Berks, Oxford, Hertford, et de sept autres
comtés de la priQcipauté de Galles.Malgré l'é-
tendue de ce comlnandement, il ne fut jamais en
état d'opérer rien de tres-important pour le ser-
vice du Roi , tant la classe inférieure était alors,
dans l'ouest, aUachée a la cause du parlement,
et les gentilshommes qui l'avaient embrassée,
actifs a la soutenir. Parmi ceux-ci, 1'on doit comp-
ter les fils de sir Francis Popham, MM. Alexandre,
Hugh et Édouard Popham, animés par l'exemple
de leur vieux pere, 1\1. Strode, député lieutenant,
et plusieurs autres, qui s'opposerent constamment
aux fréquentes tentatives du marquis.


Un grand nonlhre des hOlnmes considérahles
de ces provinces se JOlgnirent HU lllarquis contre




DU LO'NG PARLEMENT.
le parlement, et mirent, dans Ieurs différentes
}'ésidences, une grande activité a exécuter la com-
nlÍssion d'eurolement. De ce nOlnbre furent le
lord Pawlet, sir Ralph H{)pton, sir John Stowell,
tous deux melnbres de la chambre des communes
et renvoyés de la chambre ponr ce nlotif; sir
Hichard Slany de Cornouailles, autre membre de
la chambre des comlnunes, renvoyé aussi pour
la meme cause, ainsi que sir Edouard Rodney et
~1. Coventry, tous deux luembres du parlenlent,
et qui seconderent le marquis dans quelques unes
de ses démarches. Sir Bevile Greenville, homme
tres-act¡f et membre aussi du parlement, se mon-
tra tres-ardent a faire exécuter la commission
d'enrolement dans les comtés de Cornouailles el
de Devon; iI réunit ses efforts a ceux du comte
de Bath, quí était venu, poul" cet objet, le trou-
ver chez luí, dan s sa maison de Tastock dans le
Devonsl~íre, et fut secondé de plusieurs gentils-
hOllInes, COll1me 1\1. Culins shériff de ce cOluté ,
M. Bamfield, M. Ashford, :M. Gifford, ]\;1. Sai-
thíl, le baronet Seymour et M. Courtney, au
secours desquels l' écuyer Rogers amena des
troupes du comte de Dorset.


Les entreprises du marquis de Hertford, bien
(1 ue secondées par une si grande pa rtie de la no-
blcsse de ces provinces, 11' obtinrent cependant
(pIe des sucd~s fo!'t diverso Quelquefois ill'empor-
iait; nlais plus souvent, il se tron vai t dans de




22 . HISTOIHE


grancls enlbarras. Vers 1e coml'l1eI1cenlent d'aolit,
le marquis en personne, lord Paw let, sir Ralph
lIopton., sir John Stowell et M. Smith, autre
lllembre de la chamhre des comrnunes, eurent
l'avantage dans une escarmouche contre les
(léputés -lieutenans du cOInté de Sommerset,
ce qui les Fendit maitres de la ville de Shepton-
l\Iallet. Il y eut dix hommes tués et plusieurs
blessés. S'étant ensuite rendu a Wilts, le mar-
~luis courut risque d'y etre assiégé par plusieurs
nlilliers d'habitans qui se souleverent contre lui;
Jnais, averti a temps de leur arrivée, il s'échappa
de la ville par un chemin détourné. Envir~n ce
temps, le comte de Bedford fut envoyé, COl1tre
luí, par le parlement, avec trois cents clIevaux
(Ilui l'assiégerent dans Shel'burne avec le lord
Pawlet, sir Ralph Hopton , le colonel Lunsford et
plusieurs autres personnages considérables. Les
habitan s du pays venaient en grand nombre;
chaque jour, se joindre an comte de Bedford. Ce
siége dura plusieurs semaines. Les assiégés firent
de nOlnbrenses sorties, et, dans plusieurs chandes
rencontres, les deux partis se conduisirent avec
heaucoup de courage. Les parlementaires espé-
raient fermement faire prisonl1iers, a la fin, les
royalistes importans qu'ils tenaient enfermés
daus la ville, et ils y mettaient heaucoup de
prix. n aurait ét.é, en efTet, tres-avantageux pour
leurs afTaires d'avoir entre leurs 11lains tant




DU LONG PARLEMENT.
d'holnmes considérables par leur forlune et leur
courage, et dans lesquels iJs trouverent, parla
suite, de puissans et crueIs enneniis. 1\lais eette


'espérance fut trompée; car, vcrs le cornrnence-
ment d'octobre, ils parvinrent to~s a s'échapper
de Slwl'burne. Le cornte se mit a leur poursuite
et ut prisonnier M. Pallart, sir Henri, sir John et
sir Charles Barclay. Une semaine apres, le comte
de Bath fut pris et conduit prisonnier au parle-
mento


On doit peu s'étonner de voir la division se ma-
nifesler dans des villes de province et,des villages •
si éloignés du parlement, et Oil le peuple était
travaillé en différens sen s par les insinuations et
les craintes des deu! partis, puisque Londres
nH~me, le siége de ce grand conseil et sonprin-
cipal boulevard, n'était pas entierement exernpt
de ces agitatiolls (1). Sans rendre compte de quel-


(1) _L'agitation régnait au sein du parlemel1t ]ui-memc,
el lorsque la chambre des communes vota (15 juilIet JG'I2)
les annemel1S qui étaient considérés comme une déc1aratioll
de la guerre civile, la division éclata parmi les hommes
(lui avaient poursuivi , avec le plus d'ardeur, le redresse-
sement des gríefs publics. Le plus remarquable des discours
prononeés a eette oecasion fut, sans contredit, celui de
sir Benjamín Rudyard, le meme orateur qui, au début da
parlement, avait dénoncé avec tant d'énergie les abl1s OU
gouvernemcnt de Charles Ier, et la néeessité de recourir a
(le vigoureux remedes. lHay qui a cru devoir insérer d:ms
~Oll lIistoire ce prcmier discours de sir Benjalllin Ptudyard ,




HI5TOIRE
ques faits relatifs a des particuliers, et trop peu
considérables pour etre rappelés, on se conten-
tera d'en rapporter un impossihle a omettre,


comme représentant mieux que tout autre l'état de l'opi-
nion publique, aurait da puMier aussi eelui qu'il pronon~a
eontre la guerre civile, au moment OU le parti national
entra -dans la route, peut-elre inévitable, qui devait livrer
le pays en proie aux factions. Nous suppléerons a son par-
tial silence en donnant ici la traduction de ce discours ou
sir Benjamín Rudyard exprimaít probablement, eomme il
I'avait faít déja deux fois, en ¡625et en I6~0, les senti-
mens des citoyens les plus honorables et les plus désinté-
ressés. Il parla en ces termes:


« M. l'orateur, dans la route OU nous sommes DOUS
« avons été aussi loin que des paroles pouvaient nous con-
11 duire; nous avons soutenu, par nos votes, nos propres
ce droits ef les devoirs du R.oi: sans doute il y a des de-
(( voirs réciproques entre un Roi et ses sujets; les sujets
« doivent obéissance au Roi; le Roí doit protection aux
e( sujets. Le déplorable éloignernent de Sa M~jesté tient
« tout le royaume dans un état d'angoisse, a l'aspect
1( des cruelles calamités quí menacent de l' assaillir. Cette
ti chambre est profondément et en conscience intéressée a
e( faire cesser ces sombres dissensions. M. l'orateur, je suis
« pénétré, saisi jusqu'au fond de l'ame, du sentiment de ce
e( qui importe a l'honneur de la chambre et au s ucd~s de ce
« parlement. Le meilleur moyen de prévenir les horribles
« maux qui s'avancent sur nous, c'est d'aplanir toutes les
« voies pour le retour de Sa Majesté; par-la seulement le
« peuple peut etre satisf~it , et notre propre conduite jus-
I( tifiée. M. l'orateu,r, pour bien juger de la situalion OU
\\ nous sommes aujourd'hui ~ l'eportons-nous de tro-is 'lns en




UU LON G PAB.LEl\lEI\ T.
l'emprisonnement du maire de Londresa la Tour,
par ordre du parlement.


Sir Richard Gurney, cette année Iord-maire de


ce arriere. Si quelqu'un nous edt dit alots que, dan s . lrois
ce ans, la Reine, par un motif quelconque, aurait fui
(( d'Angleterre dans les Pays-Bas, que le Roí se serait éloi-
ce gné de son parlement el aurait quitté. Londres pour alIer
ce a York, disant qu' a Londres iI n' était pas en sdreté;.
u qu'une rébellion généraJe couvrirait l'Irlande , que l'Etat
te et l'Eglise seraient, parmi nous, en proie aux discordes
« qui les travaillent! a coup sdr, nous aurions tremblé a
ee la seule }Jensée d'une telle situation; sachons done la


fe ressentir maintenant que nous y sommes plongés. Si,
({ d'autre part, on nous eut dit que, dans trois ans, nous
ce aurions un parlement, c'eut été, certes, une bonne nou-
ce velle; que la taxe des vaisseaux serait abolie par acte du
ce parlement, et si bien déracinée qu'elIe ne pourrait plus
ce renaltre, ni aucune autre semblable; que les monopoles,
« la cour de haute-commission, la chambre étoilée, le
ce vote des éveques dans le parlement seraient supprimés ;
ce que· la juridiction du conseil privé serait réglée et res-
ce treinte; que les forets royales seraient renfermées dans
If leurs limites; que nous aurions des parlemens triennaux;
ce que dis-je? un parlement perpétuel que personne ne
ce pourrait dissoudre, si ce n' est nous-memes : a coup sur


({ nous aurions regardé tout cela comme un re ve de bon-
ce heur! Et bien, nous possédons vraiment tout cela, et
(( nous n'en jouissons pas, quoique Sa Majesté nous aií
ce promis et répete chaque jour qu' elle nous en conservera
(( la jouissance. N ous insistons sur de nouvelles garanties ;
ce la possession actuelle de tous ces biens en est la meilleure
« garanlie, el ils se garalllissellt l'un l'aulre. La dernierc




HISTOIRE


Londres, fut accusé le 7 juillet, par la chambrc
des communes, de chercher a élever des séditions
dans le royaume, en faisant publier dans la cité


(e réponse du Roi nous offre meme des garantiesde plus;
e( l'abolition du vote des lords papistes, l'éducation des en-
« fans des papistes, la révision des 101s contre les récusans,
« toutes choses qu'un comité cholsi dans les deux charnbres
(e pourrait encore étendre et affermir. -l\'Ionsieur l'orateur,
« prenons garde qu'en recherchant, a travers toutes sortes
« de hasards, une prétendue sécurité, nous ne mettions en
« péril ce que nous possédons déja. Gardons-nous de croire
(e que nous n'avons rien parce que nous n'avons pas tont
4e ce que nous souhaitons. L'obtinsslons-nous, nous ne
(e jouirions point d'une sécurité mathématiquement il1fail-
« lible; toutes les garanties humaines peuvent se corrompre
" et manquer. La Providence de Dieu ne souffre pas flu'on
ce l'enchalne; elle veut que le succes demeure en ses mains.
e( Celui qui observe constamment le vent et la pluie nc
« semera ni ne moÍssonnera jamais; s'il ne faÍt ríen avant
(( de s'etre assuré du tcmps, il n'aura qu'une mauvaisc
t( réco}te. 1\1. l'orateur, c'est maintenant qu'il nous importe
« de recueillir tonte la sagesse dont nous sommes capables ;
e( cur nous voila a]a porte de l'incendie et du chaos. Si
ee une fois le sang touche le sang, nous tomberons dans
e( un malheur certain, en attendant un succes incertain ,
.t( que nous obtiendrons Dieu sait quand , Dieu sait lequel!
« Tout homme est ten u , en conscience, d'employer les
,( derniers efforts pour prévenir l'effusion du sang; le sallg
« est un péché qui crie vengeance; iI souille tout un pays.
<t Sauvons nos libertés et nos hiens, maÍs de telle sorre
ti que nous sauvipns aussi nos ames. J'ai claircment ac-
« (Iuitté ma conscience; j'abandonne chacull a la sicnflc. ))


Cet élo(Iucllt et verlueux discours fut aussitot imprimé




DU LONG PARLEMENT.
la proclamation du Roi relative a la commission
d'enrolement, déclarée illégale par les deux cham-
bre (1). L'accusation, revetue de toutesses formes,
fut renvoyée aux lords, afin qu'ils mandassent le
maire pour l'interroger, ce qui fut accordé (2).
et publié a Londres '17 juillet 1642); et la semaine sui-
van le le Roi le lit réimprimer. a York. Charles avait ou-
blié alors les anciens discours de sir Benjamín Rudyard ;
s'il eftt ressaisi tout son pouvoir 7 il aurait , on peut le croire,
oublié également eeluÍ-eÍ. (Histoire parlementaire, tomo ,2,
co1. 1416.) (Note de ['Editeur.)


(1) Cette accusation fut précédée de plusieurs pour-
suites contre des hommes moins importans. Les amendes
d les emprisonnemens commen!;aient a devenir des mesures
d'un usage fréquent et pour ainsi dire familier; il suffisait,
pour les encourir, d' avoir mal parlé d u parlement ou de quel-
qu'un de ses membres. Un homme entr'autres fntcondamné
par la chambre des lords pour avoir dit que M. Pym avait
re~u un présent de trente livres sterling, et pour six ou sept
cents livres de sucre. (Ifistoire parlementaire, tomo 2,
col. 1-405.) (Note de l'Editeur.)


(2) Le lord-maire était, depuis long-temps, odieux au
parti dominant pour la fermeté qu'il avait apportée, bien
qu'inutilement, a tacher de réprimer fes émeutes élevées a
l'occasion du proces du comte de StraffOl·d. Sa maison était
continueUement menacée llar la populace , avec laquelle il
était en lutte constante, voyant sans cesse arracher des
mains de ses officiers les mutins qu'il faisait arreter et con-
duire en prison. Cette cOllduite et cette situation l'avaient
natureUement rendu cher au partí royaliste, vers Jequel
)e portaient, a ce qu'il paralt, ses inclinatiCl'lls. Dans le temp~
de la tentative du Roí contre les cinC{ rnelllbres, ses soin:;




HISTOIRE
Quatre jours apres, tandis que le lord-llmire


était a la ehambre des lords pour y répondre sur
eette aeeusation, on lut eontre lui, dans la eham-
hre des eommunes, une aeeusation additionnelle
portée par le eonseil eommun de Londres, lui
ilnputant plusieurs violations de son serment dans
l'exereice de ses fonetions, eOlllme d'avoir publié
lllusieurs proclamations illégales au mépris des
ordres du parlement. -


eette accusation fut aussitot envoyée et lue a
la ehalnbre des lords. Sur eette lecture, 011 01'-


ponr contenir les mouvemens de la cité furent regardés
comme inspirés par quelque chose de plus fort encore- que
l'amour de l'ordre. Le 25 ou 26 juin iI 6t publier, dans
les formes accoutumées, la proclamation du Roi, por-
tant défen:se de donner de l'argent, des chevaux, etc.,
l)onr le. succes du parlement. Le porte-épée chargé de
l'exécution de l'ordre fut mis en prison, et le lord-maire
sommé de comparaltre a la barre pour rendre compte de sa
conduite; il Y comparut le 27 et dit « que son serment 1'0-
I( bligeait a exécuter tous les writs venant du Roi. » L'ora-
teur lui répondit, au nom de la chambre, le que nul ser-
t( ment ne pouvait l'obliger a exéculer aucun writ contraire
(( a la loi; )) et lui défendit de rien faire publier sans en
avoir averti le }larlement. Le 5 juillet, une ordOJ.!nance du
})arlement défendit a tous maires, shériffs, cllrés, etc., de
}mblier aucune proclamation du Roi; et ce meme jour ,
non pas le 7 comme le dit May, sir. Richard Gurney fut
accusé ponr la publication du 26 juin. (Ilistoirc parlemen-
[aire, tomo 2, col. 1-203 el 1403; State-Trials, tomo 4 ,
col. 159.) (Note de l'Editcllr.)




DU LONG PARLEMENT.


donl1a qu'il serait envoyé a la Tour et sounlis ~l
une poursuite légale.


Plusieurs fOÍs, dans l'espace d'un mois, le lord-
lnaire fut concluit a ]a Tour a Westminster, pOUl'
y etre interrogé par les lords, et plusíeurs foÍs
il revint sans avoir pu etre entendu a cause de
la grande multiplicité des affaires qui occupaient
alors les membres.


Enfin, apres quelques audiences, il fut con-
cluít, le 12 aout, a la chambre des lords, pour y
entendre son jugement. On le déclara déchu de
son offiee de nlaire, incapabJe d'exercer a l'avenir
a ueune fonction dans la cité, 11 i dans la république ~
inhabile a recevoÍr du Roi aucun honneur ou di-
gnité, et on le condamna a demeurer prisonnier
a la Tour, tant qu'il plairait aux chambres (1).


Il ne sera pas hors de propos de faire connaitre
quelles furent, pendant l'intervalle qu'occuperent


(1) Sa condamnation porta principalement sur ]a pubJi ..
cation du 26 juin, et sur ce qu'il avait emptkhé les ap-
prentis de se réunir pour présenter des pétitions au })ar-
lemen!. On lui envoya demander a la Tour l'épée et les
nutres insignes de ses fonctions; iI répondit qu'el1es étaient
chez luí et qu'il ne pouvait les donner. Requis de déclarel'
s'il les rendrait, dans le cas ou elles seraient entre ses mains,
iI dit qu'il ne voulait rendre l'épée qu'au Roi; alors on donna.
ordre que ses portes et serrures fussent forcées, et on prit
les insignes dans son cabinet. (State- Trials) tomo 4,
col. 166.) (Note de I'Edúeur.)




50 HISTOIRE
ces différends, les démarches l)articulieres du
Roí, les moyens qu'il' employa poul' augmenter
successivement ses forces, et les protestations que
s'adresserent mutuellement les deux partis. On
dira d'abord quelques mots des contestations par
éerit; mais, comme ces déclarations, pétitiens et
proclamations, publiées achaque nouvelle cir-
constanee, seraient trop nombreuses et trop lon-
gues pour etre insérées dans une histoire , i 1 fa u t
les chercher dans les registres et dan s les recueils
imprimés des ordonnances. Je fais mention seu le-
ment de quelques unes des principales, et choi-
sirai ce qu'elles contiennent de plus important.


Le parlement, vers'la fin de juillet, avait
adressé une pétition au Roi, pour lui demander de
s'abstenir detout préparatifde guerre etderetirer
ses garnisons. Le Roi répondit au parlement, lui
reprochant de se préparer aussi a la guerre, puis-
qu'il avait 'nommé le comte d'Essex son général,
et le comte de 'iVarwiek amiral. Dans eette ré-
ponse, il s'étend sur un grand nombre de détails,
et ordonne qu'elle soit lue, ainsi que la pétition,
dans toutes les églises. Le parlement répliqua,
comme il avait déja fait, qu'ilne pouvait déposer
les armes, ni transporter ses assernhlées ailleurs ,
conlme on le lui demandait, jusqu'a ee que le
Roi eut renoneé a tous ses préparatifs militaires,
et se flit rendu aux décisions de ee eonseil, dont la
constitution de son gouvernement lui faisait un




DU LONG PARLEl\1ENT.
dcvoir d'écouter les seuls avis. Le parlement 01'-
don na de meme que sa réponse et sa réplique
seraient lues dans toutes les églises.


Les ehoses s'aigrissant ehaque jour davantage,
le Roi, a son retour dans la ville d'York, fit pu-
blier une proclamation pour la répression (telles
sont ses propres paroles) de la rébellion a la
tete de laquelle s'est mis Robert, comte d'Essex.·
Il offrait un entier pardon au eomteet a tous
ceux qui déposeraient leurs arlnes dans les six
jours qui suivraient le 9 aOlit, date de eette pro-
elamation. Il ordonnait aussi au marquis ~e Hert-
ford de lever promptement tout ce qu'il pourrait
de troupes dans leseomtés dont il était lieutenant-
genéral, et de mareher eontre le eomte d'Essex
ponr le tuer ou le faire prisonnier.


En réponse a eette proclamation, le parlemenf
fit une autre déclaration OU iI exposait en peu de
mots toutcequ'avait faitleRoi eontreles ehambres
et le r?yaume, aUribuant, eomme a l'ordinaire,
ces actions aux conseillers pervers qui l'entou-
raient, et prOlnettant de le rendre grand et he u-
reux s'il voulait revenir a son parJement.


Mais, le lendemain de sa premiere proclanla-
tion, le Roi, toujours a York, en publia une autre,
ou il déClara qu'aucun papiste ne serait em-
ployé dans son armée , et que ses soldats s'abs-
tiendraient de tonte rapine cnvers le peuple;
deux jOllrs apres, il pnblia un discours sous le




HISTOIRE
titre de Déclaration ti tous ses affectionnés sltjets,
concernant la conduite duprésentparlement.Cette
déclaration, longue de cinquante pages , grand in-
quarto, contenait une espece de récit historique
de tout ce qui s'était passé entre le Roi et le par-
lement, depuis le commencement de leurs diffé-
rends. Elle se trouve en entier dans le recueil im~
primé des ordonnances du parlement. Vers la fin
tIe cette déclaration, le Roi proteste de son singulier
attachement aux parlemens, ainsi qu'a la paix et
au bonheur du royaume; mais il demande que
certain\ hommes, qu'il désigne comme pertur-
hateurs d u repos puhlic, soient li vrés a la j ustice
pour etre jugés par leurs pairs, et il nOlnme lord
Kimholton, les cinq mernbres de la chainbre
des communes qu'il avait voulu saisir dans la
chambre lneme, M. Hollis, sir Arthur Haslerig,
M. Pym, M. Hampden, M. Strode, et, de plus,
M. Henri Martyn et sir Henri Ludlow, deux
lnembres de la chanlbre des communes, ou ils
s'étaient fait remarquer par quelques discours
hardis (1). Le Roi demande aussi qu'on lui livre


(1) 1\1. Martyn et sir Henri Ludlow, pere de celui doot
notre collection contiendra les Mémoires, étaient amis in-
times et tous deux républicains. On voit dans les Mémoires
de elarendon que M. Martyn lui avait fait connaitre ses
opinioo5 des l'ouverture du parlement, en luí disant : qu'il
nJ" avait point d'homme assez sage pour goul'erner tOllS
les autres. ( Note de l'Édit.)




DU LONG PARLEMENT. 53
l'alderman Pennington , qui avait succédé comme
lord-maire a sir Richard Gurney, et le capitaine
VeDo, un des capitaines de la cité~ Il accuse ces
deux derniers d'avoir excité des tumultes dans
la cité, pour frapper de terreur le parlemeot. Il
désire de plus que, conformément" au statut de
la vingt-troisieme année du regne d'Edouard 111,
une accusation de haute trahison soit intentée
contre les comtes d'Essex, de Warwick et de Stam-
ford, lord Brook, sir Joho Hotham et le major-
général Skippon, soldat habile et pieux que la
cité avait employé pour exercer sa milice, et
qui joua ensuite un grand role dans la guerreo
Enfin, le Roí demande que cette accusation soit
étendue a tous ceux qui exerceront la milice en
vertu de l' ordonnance du parlement.


Les écritures se succédaient rapidement en
toute occasion. Le lendemain du jour ou parut
cette longue d.éclaration, le Roí envoya un mes-
sage au parlement pour reprocher aux chambres
l'ordre par lequel elles venaient de décréter un
emprunt de ceot lnílle livres sterling sur la SOInme
que les preteurs avaient levée pou!" la réduction
des r~bellt!s d'Irlande. Sa sollicítude royal e pour
ce malheureux pays ne lui permettait pas, di-
sait-il, de passer sous silence une telle mesure.
n ordonnait aux chambres de i:étracter cet ordre
injuste et pernicieux (telles sont ses expressions),
sous peIne d' en répondre devant Dieu, devant


5




HISTOIRE


lui-menIe, devant leurs commettans. I.l espérait
que le parlement ne lui ferait pas attendre sa ré-
ponse ni son obéissance, d'autant plus qu'il avait
besoin d'etre rassuré sur l'emploi des 400,000
livres levées ou a lever sur ses bons sujets d'An-
gleterre en vertu du dernier acte du parlement,
et ne voulait pas avoir a craindre que, sous de
faux prétextes, on en détournat de nleme une
portion aussi considérable pour l'employer mé-
chamment a troubler la tranquillité de son
royaume en lui déclarant la guerreo


Les deux chambres, dans leur réponse a ce mes-
sage, firent eonnaitre quelles précautions avaient
été apportées dans l'ordre relatif a cette. con-
tribution, pour qu'elle fut promptement rem-
boursée et ne put etre employée que pour l'usage
auquel elle était destinée. L'ordre fut imprimé
en meme temps; dans cette meme réponse, les
chalnbres firent d'abord observe~'" an ROl que
son message était une violation du privilége du
parlelnent, et a eette occasion elles rappelaieht~
par l'exposé de plusieurs détails, la sollicitude
avee laquelle elles s'étaient occupées a secourir
l'Irlande et les obstacles que le Roi avait mis a
ce que l'Irlande profitatde ces secours. {( eette san ...
«( glante rébellion, disent les auteurs de la décla-
(( ration, est le résultat des memes cOl1seils qui
« ont déja soulevé, dans le setn du royaume, deux
(e armées et deux nations protestantes qu' on a vu




DU LONG PARLEl\IENT. 35
C( pretes a se plonger dans le sang l'une de l'aulre
C( et toutes deux soudoyées long-temps aux dépens
C( dll pauvre peuple d'Angleterre, jusqu'a ce
c( qu'elles aient enfin été paisiblement licenciées.
« Grace a la hénédictiol1 que Dieu a répandue
c( sur les travaux du parlement, ce projet ayant
c( manqué, les memes conseils pervers qui avaient
c( causé cette guerre impie, out soulevé la bar-
e( hare rébellion de l'Irlande, et, pour se mieux
« déguiser, en ont recommandé la répression
« aux soins du parlement qui, par un sentiment
C( de sympathie pou\' les indicibles miseres que
( souffraient en Irlande nos freres protestan s ,
« et ne soup9onnant pas cet horrible complot,
c( m:aintenant trop évident, a de hon creur en-
ce trepris ce grand ouvrage, et dirige réellement
c( ses désirs et ses efforts vers l'affermissenlent
Cl de la religion protestante, s'elnployant égale-
c( ment a rétahlir une paix constante dans ce
ce royaume, pour la gloire de Dieu, l'houneur
« et l'avantage de Sa Majesté, et la sécurité de
( ses trois royaulnes. On verra par l'exposé de
c( quelques faits comment le parlement a été
« découragé, retardé, empeché dans ce grand
ce et pieux travail, par les perfides conseils qui
c( environnent Sa Majesté. »


Le parlement fait ensuÍte mention de son pre-
mier envoi de 20,000 livres en Irlande, et du
lDoyen avantageux qu'on avait trouvé pour sou-


3.




56 HISTOIRE
nlettre ce pays par le secours de preteurs, sans
charger la généralité des sujets, moyen qui, pro-
bablement, aurait procuré un nlÍllion en argent ,
si le Roi était demeuré a Londres ou dans les
environs , et n'eut pas, en quittant le parlement
et en lui faisant la guerre, intimidé et découragé
tellement les preteurs, que ce hill 'si bien combiné
a perdu en quelque sorte son efficacité.


On expose ensuite qu'au moment OU, a la
charge des seuls preteurs, cinq mille fantassins et
cinq cents chevaux avaient été mis sur pied pour
marcher au secours de la province de l\funster,
~ous le commandement de lord Wharton, 10rs-
qu'il ne fallait plus qu'une commission du -Roi
pour autoriser ce lord a en prendr~ le cómman-
dement; tel fut le pouvoir des· mauvais conseils
que cette commission ne' putetre obtenue; ce
qui occasionna la perte de Limmerick et les maux
qui depuis n'ont cessé d'accahler la province de
Munster;


Que des personnes bien intentionnées avaient, a
leur charge et par voie de souscription, équipé
douze vaisseaux et six pinaces , et trois mille sol-
dats de troupes de terre pour le service d'Irlande,
et ne demandaÍent rien qu'une commission de Sa
Majesté. On envoya a York deux fois pour avoir
cette commission; les vaisseaux, prets a mettre a
la voile, atten4irent trois semaines, pendant le-
quel temps il en cmita aux armateurs pres de




DU LONG PARLEMENT.
300 livres par jour. Apres quoi la conllnission
fut refusée , et les armateurs, pluto! que de perdre
leur expédition, furent ohligés de l' entreprendre
sous la seu le autorisation d'une ordonnance des
deux chambres;


Que les lords juges d'Irlande avaient instam-
mellt demandé deux pieces de canon de siége dont
ils avaient ahsolument besoin; mais les officiers
de la Tour re~urent ordre de n'envoyer aucun des
canons du Roi pour la défense de son royaume;


Que Charles Floyd, ingénieur et quartier-maitre
général de l'armée d'Irlande, et employé. dans
ce pays contre les rehelles, a été, par l'ordre ~x­
pres du Roí, rappelé de cet important service;
. Que le capitaine Green, controleur de l'artil-
lerie, en1 ployé dans l' armée et chargéparticuliere-
ment, par le lord-lieutenant d'Irlande, de rassem-
bler et mettre en état le train d' artillerie qui devait
etre envoyé a Dublin, et qui avait re~u pour cela
des sommes considérahles, a été détourné de sa
lnission par un ordre du Roi pour venir le servir
dans sa guerre dénaturée contre le parlement;
et le parlement ayant envoyé a Chester six cents
habillemens' pour les pauvres soldats d'Irlande,
William, Whitaker, qui s'était chargé de les faire
conduire, fut attaqué pres de Coventry par les
soldafs du Roi, qui s'enlparerent des. six cents
hahillemens, ainsi que de la voiture et des che-
vaux de ce pauvre hOlllme, bien qu' on leur dH




-


" 38 HISTOIRE
(lue ces habillenlens étaient pour les soldats d'Ir-
lande, et que le pauvre voiturier eut vu cinC{ foís
le comte de Northampton ponr obtenir qu'on lui
rendit sa voiture;


Que trois cents autres habillemens envoyés de
lueme par le parlement, avec une caisse de mé-
dicamens, ont été enlevés aussi sur la route de
Chester, pour le service du Boi et par la cava-
lerie du Roi, sous les ordres d'un capitaine
Middleton, ainsi que les chevaux et ]a voiture
du pauvre conducteur. Un grand nombre de
chevaux de trait préparés, par ordre du parle-
ment, pour le service de 1'artillerie et des ba-
gages de l'armée irlandaise, et envoyés dans
eette vue a Chester, ou ils attendaient le mo-
ment du passage, ont été mis en réquisition
par le Roi pour son service a'ctuel en Angle-
terre, et ses troupes sont tellemeqt répandues
sur les routes qui conduisent en h~lande, qu'il
n'y a plus aucun luoyen sur de rien faire trans-
porter jusqu'anx lieux OU ron peut s'embarquer
pour y arrl ver;


Que le capitaineKettleby et sir Henri Stradling,
amiral et vice-amiral des vaisseaux destinés a
croiser sur les cotes d'Irlande, pour harceler les
rehelles et les empecher de recevoir ni munitions,
ni secours des pays étrangers, ont été rappelés
par ]e commandement du Roí, et, par suite de
lenr départ des' cotes d'Irlande, les rebelles ont




DU LONG PARLEMENT. 39
re<;u des pays étrangers de la poudre, des muni-
tions et d'a utres seeours.


D'apres ces détails, continue le parlement, on
doitcroire que les rebelles d'Irlande sont sou-
tenus par eeux qui veulent ici seeourir les ennemis
du parlelnent, surtout lorsqu'on voit que ces
insolens rehelles ont osé dernierernent envoyer
une pétition au Roi, 00. ils s'intitulent les sujets
catholiques de Sa Majesté en Irlande, se plaignent
du parl~ment puritain d'Angleterre, et deman ...
dent, puisque Sa Majesté ne peut venir au mi-
líeu d'eux, cornme ils l'avaient espéré, qu'illeur
soit permis de venir en AngIeterre se ranger au-
tour d' elle.


Le parlelnent done, voyant en quel péril l.es
desseins de ses cruel s ennemis ont mis deux
royaumes, a jugé a propos de pourvoir a leur
sureté en préparant une armée suffisante, pour la
défense du Roi et du pays; mais il a considéré
que 1a vaisselle, apportée par un si grand nom-
bre de personnes bien intentionnées, ne pouvait
etre monnoyée aussi promptement que le de-
mandait le serviee, et que, d'un autre coté,
ce n'était point porte~ préjudiee aux affaires du
royaume, dont l'existenee dépend du succes de
cette guerre, que d'enlprunter, sur l'argent dé-
posé par les preteurs, 100,000 livres, dont 11
avait déeidé que le paiement aurait lieu dans un
tres-court déIai; c'est pourquoi il a voté l'ordre




HI8TOIRE
en question; et dans l'intention de faire connaitre
a tout le mOl)de qu'il n'est ni pernicieux, ni ilIé ..
gal, ni injuste, cornme l'a dit le Roi, la chambre
des communes a jugé a propos de l'insérer ici
textuellement, et, au lieu de le rétracter, elle
s'engage á rembourser cet argent avec toute la
promptitude possible.


Ordre, 30 juillet.-


ce Il est ordonné en ce jour, par la chambre
fe des communes du parlement, aux trésoriers
(( nommés pour recevoir l'argent résultant des
« souscriptions pour l'Irlande , de fournir immé-
« diatement, par forme de pret, sur la foi . pu-
c( blique, au cOlnité de la chambre des lords et
ce des comm.une~, chargé de la défense du
ce royaun;:te, la sopu:p.e de 100,000 livres, pour
c( pourvoir aux besoins publics et a la défense du
ce Roí, du parlement et du royaume, pour eette
c( somme etre dument et soigneusement rem-
c( boursée dans un si court intervalle de temps
ce qu'elle ne pourra etre et nesera, en aucune rrla-
« niere, dé~<;>urnée de l'eluploi auquel on l'a des-
fe tinée, et que rien ne pourra invalider les actes
(f déja passés en faveur des preteurs. )


Durant ces discussions par écrit, le Roi avait
souvent ehangé de séjour et visité en personne
peaucoup de vill~s. Il fit, le 20 juiUet, aux gen ....




DU LONG PARLEMENT.


tilshommes de Leieester un diseours rempli, se-
Ion sa nlaniere ordinaire, de protestations d'a-
mour pour son peuple et de sollicitude pour
son royaume. De la, se rendant vers le nord, il
adressa, le 4 aout, un diseours du meme genre
aux gentilshommes du eomté d'York; puis il ré-
trograda vers Nottingham et y planta son éten-
dard royal. Il se rendit peu de monde autour de
lui, et le Roi n'avait meme pas, a eette époque,
un grand nomhre de troupes pour le garder ou
le défendre, si l'on eut tenté de se saisir de lui:
De N ottingham, le Roi envoya, le 25 aout, un
Jnessage au parlement par les eonltes de Sou-
thampton, de Dorset et sir John Colepepper,
membre deja ehambre des eommunes , qui avait
déserté le parlement et s'était rendu a York, OU
le Roi l'avait nommé, peu de temps auparavant,
ehaneelier de l'éehiquier. En voiei le texte:


cc C'est avee une illexprimable douleur de ereur
u que-nous voyons depuis long-temps les troubles
cc de ce royaulne; notre tune est remplie d'an-
c( goisses et appliquée a ehereher quelque re-
ce mede qui puisse prévenir les lniseres dans les-
( quelles une guerre eivile est pres de plonger
ce la natÍon entiere; et bien que tous nos efforts,
¡( pour aeeommoder les malheureux différends
« élevés entre nous et nos deux ehalnbres du
( parlement, l1'aiellt pas eu jusqu'iei, malgré le
( zelc et la sincérité que nous y avons apportés ,




1IISTOIR E


ce le sucd~s que nous en a vions espéré , cependant
ce tel est notre constant et ardent désir de 11lain-
ce tenir la paix publique que nous emploierons,
ce sans nous laisser décourager, tous les moyens
ce capables d'établir soliflement, s'il plait au Dieu
c( de miséricorde, la paix et le bonheur de tous
«( nos bons sujets. A cette fin, remarquant qu'il
ce est résulté plusieurs malentendus des nIes-
e( sages, pétitions et réponses qui ont eu lieu
c( entre nous et nos deux chambres du parlement,
c( et, pensant que ces inconvéniens peuvent etre
c( évités par un autre mode de négociation, dans
ee lequelles sujets de nos différends seront mieux
ee cOlnpris et plus librement discutés,. nous
ce avons jugé convenable de vous proposer de
({ nornmer quelques personnes capables, pour
« traiter en nombre égal avec ceBes que nous
cc aurons chargées de nos pouvoirs, et nous dé-
ce sirons qu' elles portent dans ces conférences
« toute la liberté nécessaire pour amener l'heu--
« reuse conc1usion demandée par tous les horn-
(e mes de bien, la tranquillité du royaume. En
ce conséquence de quoi, comme nous vous pro-
c< mettons, sur nütre parole de Roi, toute sureté
ce et encouragement ,pour ceux qui nous seront
ce envoyés, si vous choisissez, pour les négocia-
ce tions, le líeu OU nous résidons, ce que nous
ce laissons absolument a votre décision, comp-
ee tant, de votre part, sur un süin pareil pour




DU LONG PARLEMENT.


c( la su reté de ceux que nous emploierons si vous
cc désignez un 'autre endroit; de meme nous vous
c( assurons, nous et tous nos bons sujets, qu'au-
(c tant que nous le saurons faire, nous ne man~
cc querons a rien de ce qui peut se~vir a l'avan..,.
« tage de la vraie religion protestante, repousser
c( le papisme et la superstition, afferlnir la loi
ce du pays, sur laquelle est fondée aussi bien
« notre juste prérogative que la propriété et la
« liberté des sujets, confirmer les légitimes pou-
c( voirs et priviléges du parlement et nous rendre,
ce nous et nos peuples, véritablement heureux
(( par un sincere accord entre nous et nos deux
(e. chaulbres du parlement. Apportez, de votre
ce part, une aussi ferme résolution dans l'ac-
ce complissement de vos devoirs, et que tout
« notre peuple s'unisse a nous pour prier le Dieu
c( tout-puissant de répandre sa bénédiction sur
ce eette reuvre.


ce Si vous rejetez eette proposition, nous aurons
c( aeeompli si largement notre devoir, que Dieu
(e nous absoudr~ du sang qui pourra etre versé, et,
(e quelque opinion que les autres puissent avoir
« de notre force, HOUS vous assurons que le pieux
c( et chrétien désir de prévenir l'effusion du sang
c( a été pour nous l'unique motif de eette pro po-
c( sition, étant si bien fournis d'hommes, d'ar-
ce lllCS et d'argent, que nous sommes a l'abri de




44 HISTOIRE
ce toute violence, jusqu'a ce qu'il plaise a Dieu
ce d'ouvrir les yeux de notre peuple. »


A ce message, en date du 25 aout 1642, les
lords et les communes répondirent en ces termes:


ce Avec le bon plaisir de Votre Majesté, les Jords
e( et les communes assemblés en parlement, ayant
ce re~u le message de Votre Majesté, en date du
ce 25 aout, ressentent avec une grande douleur
ce l'état de trouble et les périls qui afRigent ce
« royaume. Nous avons, aufant qu'il a été en
c( nous, travaillé a les prévenir, par les diffé-
« rens avis et pétitions adressés a Votre Majesté,
« Nos efforts ont été non-seulement sans aucun
« succes, mais ont encore produit un résul~at tel
e( qu'on n'avait rien vu de pareil en aucun temps,
ce ni par suite d'aucun mauvais conseil, savoir
« ces proclamati~ns et déclarations contre les
ce deux chamhres, par lesquelles leurs actes sont
« taxés de trahison, et les membres qui les com-
e( posent, déclarés traitres ; ensuite de quoi Votre
c( Majesté a levé son étendard contre le parle-
( ment, mettant ainsi les deux chambres et, par
(( conséquent, le royaume entier hors de votre pro-
c( tection; en sorte que jusqu'a ce que Votre Ma-
ce jesté ait rapporté ces proc1arnations et décla-
« rations par lesquelles sont proclamés traltres
« ou délinquans le comte d'Essex et les deux
(l chambres, leurs adhérens et assista~s , et tous




DU LONG PARLEMENT. 45
« ceux qui, conformément a leurdevoir, ont ac-
(t compli el exécuté leurs commandemens et di-
c( rections ;et, jusqu'a ce que l'étendard élevé en
c( conséquence de ces proclamations ait été abattu,
« Votre Majesté nous a mis dans une telle situa-
ce tion que les priviléges fondamentaux du par-
c( lement, les fonctions publiques qui nous ont été
« confiées, le bien général et le salut de ce royau-
c( me ne nous permettent pas de faire, au mes-
« sage de Sa Majesté, une autre réponse que
{( celle,¡.ci( 1). »


Peu de jours apres, le Roi envoya des instruc-
tions, scellées de son sceau particulier, a tous les
membres de sa commission d'enrolement, répan-
dus dans les différens comtés d'Angleterre et du
pays de Galles, ainsi qu'au marquis de Hertford,
lieutenant-général, pour le Roi, de tous les coro ...
tés de l' ouest, au conlte de Cumberland ,. lord-


(1) Ce fut que1ques jours apres cette réponse, le 2 sep-
tembre, que le parlement donna ordre de fermer tous les
spectacIes en raison des calamités de l'Irlande, et des mal-
beurs qui mena~aient l' Angleterre, décIarant que les temps
d'affiiction publique doivent etre consacrés a la priere et uu
repentir plutot qu'aux jeux et aux divertissemens. (Hisl.
parl., t. 2, -col. 1441.) Le ton de cette ordonnance, bien
qu' extremement religieux, est fort éloigné de cette couleur
de fanatisme ou plutot de bigoterie que prit plus tard le
langage des actes puhlics, et qui distinguait déja depuis long-
temps la secte destinée a devenir momentanément domi-
nante. (Note de l' Editeur. )




HISTOIRE


lieutenant du eornté d'York, et au lord Strallge,
lieutenant des eomtés de Laneaster et de Chester.
Ces instruetions portaient l'ordre de poursuivre
le eorote d'Essex, qu'il eontinue a qualifier du
noro de rebelle et de traitre.


Irnmédiaternent apres, le Roi répliqua a la ré-
ponse qu'avait faite le parlement a son lnessage du
25 aoút; eorome eette réplique est fort eourte,
je l'insérerai textuellernent, afin de rnettre le lee-
teur luieux a portée de se relldre eornpte de la
nature de eet étrange différend.


ee Nous ne reviendrons pas sur les moyens que
(f nous avons employés pour prévenir les périls
c( et les désordres de ce royaume, ni sur la ma-
« niere dont ces moyens ont été interprétés; dé-
{( sirant éviter l'effusion du sang, nous voulons
c( éearter tout souvenir des méeontentemens pas-
(e sés, dans la erainte qu'ils ne nlissent quelque
ce diffieulté a l'acceptation de nos .offres de traiter.
c( Nous n'avons jarnais déclaré et ne sommes nul-
ce lement dans l'intention de déclarer atteintes de
ce trahison les deux ehamhres du parlement, ni
ce de lever notre étendard eontre elles, eneore
ce moins de les mettre, ainsi que ce royaume,
ce hors de notre proteetion. Nous prQtestons abso-
« lument le eontraire devant Dieu et devant les
ce hornmes, el J pour éearter autant que possible
« toute méfianee capable de mettre obstacle aux
« négociations' que nous désirons si vivement,




DU LONG PARLEMENT. 47
c( nous promettons qu'aussitot que vous aurez dé-
« signé un jour pour révoquer les déclaratiollS
« par lesquelles vous inculpez comme traitres ou
« autrement, ceux qui nous ont preté leur assis--
(e tance, nous révoquerolls de bOll creur, le meme
ce jour, nos proclamations et déclarations, et
« abattrons nptre étendard. Nous nous montre-
c( rons prets, dans ces négociations, a accorder
« tout ce qui aura réellement pour objet le bien
« de nos sujets, vous conjurant de mettre autant
« a'ilnportance aux sanglantes calamités de I'Ir-
C( lande et a la dangereuse situation de l' Angle-
« terre, que nous vous déclarons, par ces offres ,
« en mettre nous-memes, et vous assurant que
{( ce que nous désirons le plus en ce monde, c'est
ce de parvenir a 110US ente~dre avec nos deux
f( chambres du parlement, et a établir entre
« nous une mutuelle confiance. »


Le parlement répondit de nouveau au Roi :
« Avec le hon plaisir de Votre Majesté, nous,


C( les lords et communes assemhlés en parlement,
ce ne pourrions, sans donner a cette répol1se une
« étendue trop considérable, rappeler tous les
« moyens que nous avons pris, tous les efforts
« que nous avons employés, tous les discours
« que nous avons adressés a Votre Majesté, pour
«( prévenir ces trouhles et dangers dout nous
« parle Votre Majesté. Nous ferons donc seule-
c{ ment et humhlement connaitre a Votre Majesté




HISTOIRE


c( que nous ne pouvons revenir sur notre pre-
c( miere réponse pour les raisons qui y sont ex-
c( primées,car Votre Majesté n'a pas abattu son
«: étendard, ni révoqué les proclalnations et dé-
« clarations par lesquelles vous avez taxé de tra-
« hison les actes des deux chambres du parlement,
(e et déclaré traitres les membres qui les com-
« . posent. Vous avez meme, depuis votre message
ce du 25 aout, reproduit ces accusationsdans vos
« dernieres instructions a vos commissaires de
c( recrutement. Lorsque votre étendard sera
« abattu, .que vos déclarations, proclamations
« ou instructions seront révoquées, si Votre Ma-
« jesté, d'apres notre humble pétition, quitte son
« armée et vient retrouver son parlement pour
c( recevoir ses fideles avis, Votre Ma jesté sera
« accueillie par de tels témoignages de notre fidé-
ce lité et de notre obéissance, que vous verrez
c( avec certitude que vous ne pouvez trouver
« votre s'ureté, votre honneur et votre dignité,
« ailleurs que dans l' affection de votre peuple et les
« sinceres conseils de votre parlement, de ce par-
ce lement qui, dans ses délibérations etdans ses
« constans et infatigables efforts, a eu a sur-
« monter des difficultés inouies, seulement pour
« préserver votre royaume de la violence des
« maux et des dangers prets a l'accabler; de ce
«( parlement qui mérite mieux de Votre Majesté ,
c( et qui, representant tout votre royaume, ne




DU LONG PARLEl\1ENT. 49
(( pent consentir a etre lnis en balance avec ceux
( dont les conseils et les sentimells furieux réus-
c( sissent tellelnent a déjouer tous nos efforts
« pour secourir l'Irlal1de ensanglal1tée, que nous
« avons tout lieu de craindre que nos travaux et
« nos énormes dépenses en faveur ele ce malheu-
c( reux royaume ne demeurent absolument sans
« fruit. Désirant done humblement que vous
c( nous accordiez votre présence, nous espérons
« du jugement de Votre Majesté, qu'elle corn-
« prendra qu'il n'est point d'autre lnoyen d'as-
« surer le bonheur de Votre Majesté elle-me me
({ et le salut de son royaume. »


Le parlement publiaaussitot apres une décla-
ration portant que, forcé de prendre les armes
pour la conservation du royaume, des lois et de
la liberté, il ne pourrait les déposer jusqu'a ce
que le Roi eut retiré sa protection a ceux que
les chalnbres avaient déclarés délinquansl, et les
eut abandonnés a la justice dri parlcment.


Le Roi , peu de jours apres, fit a cette derniere
réponse du parlement une réplique portant en
substance qu'il neO pouvait rien faire, ni rien
offrir de plus qu'il n'avait fait, et qu'il se re-
gardait COlnme pUl" et innocent du sang qui pour-
rait etre répandu dans cette guerre , priant Dieu
de le traiter, lui et sa postérité, selon la me-
sure de sa sincérité dans le désir qu'il avait té-
Inoigné de maintenir la religiol1, les 10Ís et les


2. 4




50 HISTOIRE
lihertés de ses sujets, et les priviléges du parle-
mento Le parlenlent répondit que, selon son
opinion, le Roi n'avait pas fait tout ce qu'il pou-
vait ou devait faire, tant qu'il mettait son hon-
neur a protéger des délinquans dont le salut
était incompatible avec la sureté du royaume et
le maintien des droits du parlement, exposés a
tomher par la dans le dernier mépris. Le parle-
ment ajoute qu'il est impossible a aucun homme
raisonnahle de croire heaucoup a la sensibilité
du Roi pour les sanglantes calamités de l'Irlande,
quand on voit en me me temps plusieurs des re-
helles Irlandais, et leurs partisans reconnus ainsi
que leurs agens, admis en sa présence avec bien-
veillance et faveur, quelques UDS me me employés
a son service.




DU LONG PARLEMENT. 5r


LIVRE TROISIEME.


CHAPITRE PREMIER.


Le prince Robert et le prince Maurice arrivent
en Angleteterre. Le COllzte d' Essex prend congé
da parlement -' pour se rendre ti' son COlnnzan-
delnent. Les Jorces du Roí s"' accroíssent d
Shrewsbury. Rencontre ti Worcester. Grande
bataille ·de Keynton.


Vers le commence.ment de septembre 1642, le
prince Robert, second fils de Frédéric, prhlce élec-
teuI' palatin du Rhin, long-temps retenu prison-
nier de guerre par l'empereur, et récemment mis
en liberté, arriva en Angleterre, pour offrir ses
services au Roí, son onele, dans la guerre évi-
demment commencée au sein de ce lnalheureux
royaume. Avec lui arriva son frere, le prince
lVIaurice, tous deux jeunes soldats sans expé-
rience, et apportant a l'armée du Roi plus de
valeur qu'ils ne po'uvaient ajouter a ses forees.
Quoique proches, par le sang, de la couronne
d' Angleterre, ils ne l'étaient pas non plus assez





HISTOIR E


pour ajouter quelque chose a la sécurité elu Roí,
en auirant sur eux - menleS la haine du peuple,
quoique plusieurs personnes imaginassent et dis-
sent alors qu'on les avait fait venir dans cette
intention. Leur frere ainé, Charles, prince élec-
teur, aurait été plus propre a rmuplir un parell
role; mais, apres av.oir demeuré long-temps a la
cour d' Angleterre, il avait quitté le Roi deux
lllOis en:viron avant l'arrivée de ses freres. Il ex-
pliqua lui-meme, en partie, les raisons de son
départ, dans un message qu'il envoya ensuite
de Hollanele aux deux chambres, et ou il ex-
primait l'affliction qu'il ressentait des trouhles
tle ce royaume, et protestait que, tant qu'il
avait été a la cour d' Angleterre, il avait fait ce
qu'il avait pu pon!" disposer le Roi en faveur de
son parlement; 11 ajoutait qu'apres la protection
de Dieu, rien au monde ne lui paraissait plus
désirable, pour ses propres intérets et ceux de
la religion protestante en Allemagne , que de
voir prospérer le parleluent d' Angleterre. 11 est
certain .que ce prince l1e quitta le Roi que lo:rs-
qu'il vit sa rupture avec le parlement trop dé-
cidée pour qu'on pil.t les rapprocher. Le Roi l'a-
vaitdéja exposé, jusqu'a un certain point, a la
haine des peuples ,en s'en faisant accompagner
a la chambre des communes, lorsqu'il y villt
pour surprendre les cinq membres, et en l' as-
-sociant a plusieurs autres démarches désagréables




DU LONG PARLElUEN'1'.


au public; en sorte que, pensant comme il le
faisait, le prince put juger que lemeilleur parti
a prendre était de s'éloigner du Roi , tandis qu'il
en était encore temps.


Bientot apres leur arrivée en Angleterre, les
deux jeunes princes furent chargés par le Roi,
Jeur oncle, de commandemens dans lesquels ils
se montrerent tres-ardens et tres-actifs. S'ils y
porterent plus de violence qu'il ne convenait a'ux
circonstances délicates d'un commencement de
guerre civile, il faut en accuser sans doute la
chaleur de la jeunesse et le grand désir qu'ils
avaient d'acquérir les bonnes graces du Roi, dont,
en qualité de soldats de fortune, ils dépendaient
entierement pour leur avancement.


Le prince Robert, l'ainé et le plus emporté
des deux, fut mis, quinze jours apres son ar-
rivée, a la tete d'un petit partí des troupes du
ROÍ, trop peu considérables encore pour Jnériter
le noni d'armée. Il parcourut différens corntés,
essayant de se grossir, comme une boul~ de neige ,
de tont ce qu'il pourrait ramasser en son che-
mino Il traversa ainsi plusieurs parties des comtés
de Warwick, N ottingham , Leicester, W orcester
et Chester., ou sa conduite parut avoir moins
pour objet d'engager par douceur le peuple a se
ranger de son parti, que de l'y contraindre par
une extreme rigu~ur; c'est ainsi que le rapport en
fut fait aux challlbres. 11 pilla plusieurs villes et




HISTOIRE


villages, c'est-a-dire, qu'illes dépouilla de tout.
Ce fut alors, pour la premiere fois, qu'on employa
en Angleterre le mot plunder ( piller ) (1) , né en
Allemagne lorsque ce grand pays fut si miséra-
blement dévasté et mis au pilJage par des ar-
mées étrangeres. Il exer'fa beaucoup d'autres vio-
lences sur les partisans du parlement; il en 6t
exécuter plusieurs, et fit pendre, a la porte de
leurs maitres, les domestiques qui refuserent de
lui découvrir la retraite de ceux-ci. Ces nouvelles
exciterent dans le parlement une sérieuse discus-
sion, et il fut eonvenu qu'on intenterait contre
lui une aeeusation de haute trahison, comme
s' effor~ant a détruire le gouvernement; ce qui
fut déclaré un grand attentat aux lois du royaume,
et une ·violation des priviléges du grand eonseil
qui le représente tout entier.


11 ne sera pas hors de propos de ra pporter ici
un événement de ce temps, qui ne saurait etre
omis vu l'importance qu'obtint ensuite dans eette
guerre la personne qu'il concerne.


Le colonel Goring avait, comme on l'a déja dit,
entrepris de défendre contre le parlement la ville
de Portsmouth. Ne pouvoo.t tenir plus long-temps,
il obtint du capitaine Merrick , d'accord avec le
eomte de Warwick, la permission de quitter


(1) En aUemalJ,d plündern veot dire piller.
(Note de l'Editeur.)




DU LONG PARLEl\1ENT. 55
eette place et de se faire conduire a Brin en 1-101-
lande. Le parlement y consentit, parce que le
capitaine avait été obligé d'accéder a cette con-
vention pour conserver la vilIe et les partisans
du parlement qui s'y trouvaient r~nfermés. Le
eolonel avait menacé de détruire la ville au
moyen de nlatieres inflammables, s'il ne pouvait
sauver sa vie par une composition amicale.


Tandis que le prince Robert agissait si active-
ment avec un parti de troupes légeres, le Roi
était aussi en mouveUlent a la tete de ce qu'il
possédait de troupes; mais il procédait avec plus
de doucenr et de calme, car le respect que les
peuples portaient a sa personne lui faisait trou-
ver moins de résistance; et le vent perd de sa fu-
renr quand il ne rencontre pas d'obstacles. D'ail-
leurs, le Roi voulait agir de telle sorte qu'il put
se donner ponr le pere de son peuple et pour un
prince injnstement attaqué par le parlement. Il
s'effor~ait surtout d'attirer a luí, par des témoi-
gnages d'attachement,. des discours persuasifs.,
des protestatíons d'affection pour le peuple, et
des plaintes contre la conduite et les actes du
parlement. Ce fut ainsi qu'il se conduisit dans sa
marche vers Shrewsbury, dont il comptait faire
son centre d'opérations, attendu que ce lieu lui
paraissait le plus convenable pour y recevoir et
y ulettre en quartier les troupes qui pourraient




56 HISTOIRE
lui venir du pays de Galles. Ses espél'ances ne
furent pas trompées, bien qu'il les poussat beau-
coup plus loin que le parlemen t ne croyait devoir
porter ses craintes. En se rendant a Shrewsbury
a la a~te d'une petite armée, il s'arreta le 19 sep-
teluhre entre Stafford et "\Vellington, pronol1ya
un discours, et fit lire a la tete de son armée
une protestation OU, pour encourager ses soldats
par l' espérance de la victoire, il leur dit, entre
autres choses, qu'ils n'auraient a combaure d'au-
tres ennemis que des traitres pour la pIupart
brownistes, anabaptistes et athées, qui voulaient
détruire l'Église et l'État. Dans cette rneme pro-
testation il exprime avec des sermens solel1nels
et des imprécations sur lui-meme et sa postérité,
comme il avait eoutume de le faire dans tous ses
diseours, l'intention OU il est d'employer tous
ses soins au maintien de la religion protestante,
des lois et des propriétés de ses sujets, ainsi que
des priviléges du parlement.


Le Roi, quelques jours auparavant, avait pris
des moyens plus rudes etplus coereitifs ; cal',
en traversant les COITltés de Derby, Leicester et
Nottingham, il ,~vait ordonné aux milices de
ces comtés de venir lui servir de gardes, et 10rs-
qu'elles avaient été réunies, il en avait désarlué
la plus grande partie. Il prit dans eette occasion
ce qu'il fallait, d'armes pour équiper deux mille




DU LONG PARLEl\'IENT.
hOllllnes, et emporta, en outre, de bonnes SOllllnes
d'argent elnpruntées au pays, non sans quelque
contrainte.


Mais laissol1s un moment le Roi pour revenir
au lord-général du parlement et a l'armée qu'il
avait été chargé de lever et de commander. Au
moment oil le prince Robert s'était mis en mou-
vement, cette armée s'élevait déja a un corps
considérable. On y comptait environ quatorze
lnille hommes tant cavalerie qu'infanterie. Le re n-
dez-vousgénéralétait a Northampton OU plu8ieurs
des principaux chefs comme lord Brook, lord
Roberts, le colonel Hanlpden et d'autres étaient
déjit réunis avec les troupes, attendant l'arrivée de
son Excellence. Le 9 septembre, le comte d'Essex
prit congé duparlement et de la cité de Londres,
et se dirigea sur Northanlpton. Il fut accompagné
jusqu'au bout de la ville avec heaucoup de 80-
lennité par la miliee e~ par un grand nombre de
gentilshommes armés, appartenant a la maison
d'Essex (1). Mais l'affection et les vreux que for-
mait pou!' lui ce peuple qui le suivait, pas-


(1) Le drapeau du comte d'Essex était jaune foncé~
« Quelqp.es uns, dit Whitelocke, pour avoir adopté une
(( autre couleur, furent regardés comme malintentionnés
11 et contraires a la cause du parlement, tant, ajoute-t-il,
,{ au milieu des méfiances que produit la guerre civile on
« fait attention a de petites choses. }) (Mémoires de Whi-
telocke, pago 59-) (Note de ['Editeur.)




58 llISTOIRE
saient de beaucoup ce que pouvaient expriulCr
tous les témoignages extérieurs, et, bien qu'il
partit pour une guerre civile, iI parut alors aux
yeux de tous un aussi véritahle Anglais, un aussi
sincere patrio te que s'il eut marché contre un
ennenli étranger. Ses propres vertuset son hono-
rable conduite avaient inspiré pour lui au peupIe
un amour et un respect fort augmentés encore
par le souvenir de son noble pere, le plus grand
exemple que j'aie jamais vu d'un favori du prince
(fui fut aussi celui du peuple; homme a qui peut
s'appliquer, avee une entiere vérité, ce que Vel-
lcius Patereulus a dit de Séjan, avec la plus men-
songere flatterie, in quo CUln judicio principis
certabant studia popul(, c( en fa veur de qui l' amour
« du peuple s'effor~ait a égaler le jugement qu'en
c( portait le prince. » La cause ou s'engageait
le comte d'Essex était aux yeux du peuple une
cause religieuse, et dont ses prieres devaient de-
nlander au cÍel le sueees; ear le parlelnent, tout
en levant une armée, exprimait le plus humble
respect pour la personne du Roí, et, peu de jours
apres le départ du lord-général, une pétition fut
rédigée du eonsentelnent des deux ehalnhres, pour
etre portée au Roi par sir Philippe Stap]eton,
Dlemhre de la ehalnbre des eommunes, et a eette
époque eolonel dans l'armée du lord - général.
II porta la pétition a Northanlpton an généra 1 ,
afin que, selon .le clésir du parlemcnt, elle púl




DU L01\G PAllLE~lEl\T.
étre présentée a Sa Majesté d'une maniere sure
et eonvenable. Dans eette pétition, conformément
aux premieres déclarations du parlenlent, le par-
lement n'accusait de rien le Roi lui-meme, mais
rejetait sur ses pervers conseillers toutes les
fautes du gouvernement, l'horrible rébellion et
les massacres d'Irlande, la désunion du Roi et
des chambres qui avait suspendu les seeours des-
tinés a ce royaume, et enfin la guerre déclarée
au parlement par Sa Majesté , qu'on voyait se


'1 "d' , d montrer en personue a a tete une armee, es-
tinée a détruire son peuple , et a priver ainsi ses
fideles s}ljets de la p)'otection royale, pour pro-
téger des traitres contre la justice du parlement.


« Nous, les 101'<.1s et communes assemblés au
« parlement pour la juste et nécessaire défense
c( de la re ligio n protestante, de la pe1'sonne, de
c( la couronne et de la dignité du Roi, ,des lois
C( et libertés du royaulue, ainsi que des privi-
C( léges et du pouvoir des chambres, nous avons
« pris les arnles et nommé Robe1't comte d'Essex,
f( eapitaine-général des forces par nons levées,
« le chargeant de les conduire contre ces rebelles
« et ces traitres, pour les soumett1'e et leu1' faire
« subir un juste chatiment. Nous supplions done
c( humblement Votre Ma jesté de retirer a ces
(e ennemis publics l'appui de sa roya]e présence ,
c( afin que, s'ils persistent dan s leu1' coupable et
( iJlégale tentative, Votr,e Majesté ll'apporte au-




60 HISTOIRE
«( cun obstacle aux efforts que doivent [¿tire
c( contre eux les troupes que nous venons d'as-
c( sembler. Nous supplions aussi Votre J\lajesté
«( de ne point partager volontairelnent leurs pé-
« rils, mais de renvoyer ses trollpes, de reve-
c( nir tranquillement et en sureté aupres de son
ce parlement, de mettre un terme, selon nos con-
c( seils, aux désordresqui tourmentent mainte-
c( nant le royaume, et de pourvoir, dans Pavellir,
C( a l'honneur comme a la sécurité, tant de Votre
« J\lajesté elle-rrH~me que de ses descendans et
« sujets. S'il plait a Votre l\'fajesté de céder a nos
« humbles et ardens désirs, nous protestons, an
C( 110m du Dieu tout - puissant, que nous rece-
« vrons Votre Majesté avec tous les respects et
c( toute la soumission qui lui sont dus, que nous
c( nous efforcerons loyalement de mettre sa per-
c( sonne et son trone a l'abri de tout danger, et
ce que nous emploierons tout notre pouvoir pour
c( procurer a Votre Majesté, comme a ses peuples,
«( tous les biens d'un regne heureux et glorieux. »


Les ordres du parlement au général portaient,
conformément a cette pétition, l'injonction de
faire tous ses efforts pour délivrer, par quelque
combat ou autrement, la personne clu Roi, celle
du prince et du duc d'York, des mains des fu-
rieux qui les environnaient. lIs lui prescrivaient
aussi, dans le cas ou Sa Majesté, d'apres cette
humble pétition, consentirait a se séparer de




D U LO NG PARLEMENT.
ceux qui l'entouraient et a revenir vers le parle-
ment, de licencier ses troupes et de ne conserver
qu'une force suffisante pour assistei" et protégel~ le
retour de Sa Majesté. Enfin, le général ret;ut en-
core l' ordre de proclamer un p~rdon général
ponr tons ceux que la séduction avait engagés a
se séparer du parlelnent et du pays, si, dans les
dix jours qui suivraient cette proclamation, ils
rentraient dans leur devoir et n'avaient commis ,
dan s cet intervalle, aucnn acte hostile. Ce pardon
cependant ne donnaít pas aux membres sns-
pendns par le parlement la faculté d'y rentrer
sans avoir satisfait, eomme il convenait, a la
chambre dont ils faisaient partie. En étaient aussi
exceptés tous ceux qui avaient été accusés COlume
délinquans, par l'une ou l'autre chambre, et
tous eeux que le parlement avait chargés de
haute trahison, pour raison de leur active coo-
pération dans les derniers actes de trahison. Ces
personnes, dont les noms furent alors déclarés ~
étaient les eomtes de Bristol, Cumberland, New-
castle et Rivers, le secrétaire Nicholas, M. En-
dymion Porter, M. Edouard Hyde, le due de Ri-
chmond, .le eomte de Carnarvon, le vieomte
Newark et le vicomte Falkland. Tels étaient
ceux qu'a cette époque le parlement avait dé-
clarés traitres. Il y en ajouta. d'autres depuis, et
aussi en retrancha quelques uns de la liste, se-
Ion qu'il y fut dé terminé par les circonstanees.




llISTOIRE


Le parlement don na aussi plusieurs ordres en
faveur de l'armée et pour .I'avantage des provinces
qu' elle neya i t tra Ycrser; luais surtout il ordollna
au général de réprimer soigl1Cl~Sement dans ses
troupes toute espece de désordre, d'impiété et
d'irréligion.


Le général trouva, a Northampton, une nom-
breuse et vaillante armée, bien équipée de tout
point, au nombre d'environ 20,000 hommes, en
y cOlnprenant tout ce qui devait rejoindre dans
l'espace de peu de jours. Il n'y avait pas sur pied,
en Angleterre, de forces capables d'opposer quel-
que résistance a une pareille arrnée, cal' le Roi
n'avait alors que peu de troupes. Ce qu'jl en
avait cOllsistait en cavalerie, qui parcourait le
pays, en partis peu considérables, pour trouver
des vivres et le nlettre a cOlltribution. Le prince
Hobert, en particulier, semblable au mouvelnent
perpétuel, se faisait voir avec la cavalerie qu~il
comnlandait, presquesimultanément,en plusieurs
endroits tres-éloignés. Le comte d'Essex prit done
soin . de diviser sa grande armée ~ en telle sorte
qu'elle put lui servir, en plusieurs endroits, a
harceler les troupes légeres de l'ennemi et a pro-
téger les comtés attachés au parlement. 11 tacha
aussi de s'emparer, soit en personne, soit par ses
lieutenans, des villes qui, dans le cas oil cette
funeste guerre viendrait a se prolollger, pour-
raient luí devénir les plus importantes. De Nor~




DU LONG PAHLEMENT.


thampton, il marcha sur Coventry et mit dalls
cette grande ville une garnison pour le parle-
nlent. Il alla de la a Warwick, et, apres l'avoir
fortifié, ayant appris que le Roi voulait se rendre
a Worcester avcc son armée, il s~ dirigea aussi
de ce coté; cal' il désirait heaucoup de rencontrer
le Roi, et le parlement, auquel il fit part de son
dessein par une leUre, approuva sa marche vers
Worcester.


La ville de Worcester, aussi bien que tout
le comté, avait été le thécitre de heaucoup de
troubles, causés non-seulement par la diversité
d'opinion qui régnait entre les habitans, mais par
les différentes sollicitations qu'ils avaient re<;ues
des deux partis, si ron peut appeler sollicita-
tions ce qui sepropose a main armée. Sir John
Byron était d'abord entré a "Vorcester, pour ga-,
gner cctte ville au Roí, et M. Fíennes, fils du
lord Say, qui tenait pour le parlement, s'était
opposé a ses desseins. Quelque temps apres, Je
prince Robert, a la tete de cinq cents chevaux,.
eut, pres de cette ville, une rencontre avec
M. Fiennes, qui commandait un autre corps
envíron de la me me force. Le combat fut peu de
chose, el', selon le rapport qui en fut fait a
Londres, il n'y eut pas plus de douze hommes
tués. Avant que le comte d'Essex, alors en lllar-
che pour W orcester, y put etre arrivé, i1 s' en
livra encore un autre, plus important par la




HISTOIRE
qualité que par le nombre des personnes tuées
ou blessées. Le prince Robert était a ,v orces ter
avec douze escadrons, lorsque quelques troupes
du parlement s'en approcherent, non pas en
corps lnais éparses; le prince sortit de la ville ,
et mit ses gens en bataiUe dans une prairie,
})our attaquer eeux qu'il pourrait atteindre les
premiers. A un demi mille de eette prairie, se
trouvait la cavalerie du parlement : le colonel
Sandys avec son régiment, le eapitaine Hales et
le capitaine Wingate marcherent vers le prince ;
lnais le passage était dangereux pour eux, ayant
a traverser un chemin étroit, ou ils ne pouvaient
marcher plus de quatre de front. Le colonel.San-
dys, emporté par son trop de courage, ehar-
gea a travers ce chemin, avant que le reste des
troupes du parleluent fut arrivé; outre les ca-
pitaines Hales et Wingate, le capita ¡ne Fiennes
et le capitaine Austin, qui n'étaient pas éloignés,
arriverent en toute hate a son secours. Le co...;.
lsmel Sandys tua cependant quelques hommes au
pri~ce, et soutint le combat jusqu'a ce que les
autres approchassent; mais alors le prince voyant
les deux troupes a peu pres égales en nombre,
eraignit peut-etre de se trouver engagé dans un
trop long combat, qui donnerait le temps a I'ar-
mée du général d'arriver, d'autant qu'une partie
de son avant-garde était déja assez pro che ; il se re-
tira donc dans la ville de Worcester, qu'il traversa




IJV LONG PARLEMENT. G5
le plus rapidement qu'illui fut possihle. Les trou-
pes du parlenlent la traverserent apres lui, et
le poursuivirent jusque sur un pont, aux en-
virons duquel étaient placés quelques uns des
dragons du parlement, qui coupe.rent la cava-
lerie du prince et lui firent trente prisonniers (1).
JI resta treize morts sur le premier champ de
hataille. Les personnes de marque, tuées du
coté du parlement, furent le cornette du colone~
Sandys, qui tOlnha le premier de tous, et le
sergent - major Douglas; le eolonel Sandys lui-
me me fut mortellenlent hlessé, et lnourut en-


(1) Whitelocke donne au contraire eeUe rencontre pour
une défaile des troupes parlementaires : ce' Le eolonel Na-
thaniel Fiennes, dit-iI, a la tete de quelques troupes
levées' par lord Say, et accompagné du eoloDel Sandys,
marcha a Worcester pour en ehasser sir John Byron. Il
s'aUendait que le général Essex viendrait 1'y soutenir; ruais
au lieu. de lui vint le prince Rohert qui défit el mit en
déroute toute la troupe parJementaire; Sandys fut fait
prisonnier et mourut peu de terops apres de ses hlessures. "
(Mémoires de Whiteloeke, pago 61.) Ce fut, selon Whi-
t eIoeke, al' arrivée seulement du eomte d'Essex que le prince
Robert quiUa Worcester. All reste, OD voit déja percer, dans
ce premier réeit , une aecusation de lenteur contre le corote
d'Essex, qui se reproduit dans WhiteIocke presque achaque
nccasion. Ainsi quelques lignes plus has iI reproche au eomte
~on trop long séjour l\ W oreester qui, donnant au Roí une
journée d'avance ,lui facilita sa marche sur Londres.


( Note de l'Edileur. :
2. 5




G6 HISTOIRE
viron un mois apreso On dit que le colonel Wil-
mot, qui se fit ensuite distinguer dans le parti
du Roi, rel,{ut, en cette occasion, une blessure
an. travers du corps, de la main du colonel
Saúdys.


Son Ex-cellence arriva a Worcester avec son
armée, iDimédiatement apres cette rencontre.
Elle résolut d'y demeurer quelque temps, la si-
tuation de ceHe place lui étant favorable pour
envoyer de coté et d'autre des partis, et ponr
surveiller les mouvemens de l'armée du RoÍ.
Nous l'y laisserons ponr nons occuper de ce qui
arriva aux antres armées.


Le prince Robert, apres avoir quitté Worces-
ter, marcha a la tete de ses troupes sur Ludlow,
ville située a deux nlilles de 'distance, et le Roi,
avec un petit corps de cavalerie, entra dans le
pays de Ganes, Ol! il fit aux habitans des comtés
de Denbigh et de FIint un discoursrempli de
prolestatiol1s, qlli lui gagna quelques partisans.
Le lendemain iI marcha vers Shreswbury, 00. il
avait le projet de demellrer quelque temps, pour
y attendre les troupes qui devaient lui arriver
dn pays de Galles et des alltres contrées adja-
centes. Il se fit apporter a Shrewsbury un coin,
et monnoya tout ce qu'il avait alors ret;u de vais-
selle, et ce qu'Ol1 lui en apporta bientot apres;
car plusieurs ,nobles, gentilshornmes et autres
avaient fourni au Roi non-seulement des chevaux




DU LONG PARLEiUENT.
et des armes, mais aussi de l'argent et de la
vais selle , comlne en avaient fourni au parlement
les citoyens de Londres et d'autres gentilshommes.
Ce fut une ehose surprenante que le subit ae-
croissement des forees du Roi, durant le peu de
temps qu'il séjourna a Shrewsbury; il surpassa
ses espéranees eomme les craintes tIu parlenlent.
Peu de jours apres son arrivée, il avait publi-
quement atlressé aux gentilshommes, franes te-
nanciers et autres habitans du pays, un diseours
persuasif et rem pli d'art, dont les engageantes
expressions répondaient parfaitement au desseil1
qu'il avait formé de se présenter aux yeux du
peuple, eomme un prinee injustement attaqué,.
et ele l'émouvoir en sa faveur d'une tendre conl-
passion. J'insérerai iei ce discours tel qu'il a été
connu et imprimé a Londres.


MESSIEURS,


« Je rec;ois quelque dédommagement des in-
« solenees et des malheurs qui me foreent a er-
« rer ainsi dans mon royaume, lorsqu'ils 111e
e( conduisent en aussi hon lieu, et au nlÍlieu
« d'une si fidele portion de mon peuple. J'espere
({ que ni vous ni moi n'aurons sujet de regretter
c( mon arrivée : j'y ferai de ma part tout ce qui
c( dépend de moi, et, en venant ici, j'étais si Ir
« de vous. Le séjour d'une armée est rareInent


5.




68 HISTOIRE
« agréable aux lieux OLl elle se trouve; et la
(e lllienne pourrait inspirer d'autant plus de
« craintes que, comlne on m'a dépouillé de tout
« ce qui m'appartient, et qu'on eluploie toutes
ce sortes de moyens de terreur pour emp(~eher


, .,
« qu aucun ne Vlenne a mon secours, on pour-
« rait penser que je n'ai d'autre moyen d'exister
cc que l'aide et l'assistance de mon peuple; mais
ce ne craignez rien. Ph'it a Dieu que mes pauvres
ce sujets n'eussent pas plus a souffrir de l'inso-
ce lence et de la violence de l'armée levée contre
ce 1l1oi, et que l'abondance nH~me dont elle jouit


t " d l' " ce en ralne ans es exces, que vous n aurez a
ce souffrir de la mienne! cependant je crains- de
c( ne pouvoir prévenir tous les désordres. J'y
c( ferai de mon mieux,' et je vous promets que
« personne ne perdra ríen par Iuon fait, si je
ce peux l'empecher.


cc J'ai ordonné Cfu'on lu'apporblt un coin; je
ce fondrai toute Iua vaisselle et mettrai en vente
ce ou engagerai toutes nles terres, afin d'éviter,
« autant qu'il sera possible, de vous occasionner
C( la llloindre charge. Cependant mon inteution,
le en vous rassemblant ici, a été de vous demander
c( de faire, pour moi et pour vous-memes, pou!' le
C( lllaintien de votre religion et des lois du pays,
c( en vertu desquelles vous jouissez de tout ce que
c( vous possédez, ce qne d'autres font contre Hons.
(e Ne sOIlfI'l'ez pas qu'une,si bonne cause soit per-




DU LO~G PARLEl\lENT. 69
«( ..lue faute des secours que vouspouvez lui pro-
« CUl~er, en sacrifiant ce qui vous serait bientot
« enlevé par ceux qui llW poursuivent avec tant
C(. de violence. Tanelis que ces nléchans emploient
« leur argent, lenr vaisselle et toute leur habileté·
« a détruire la république, ne 'soyez pas moins
( libéraux ponr la défendre. Soyez certains que
«( s'il plait a Dieu de m'accorder le succes, je
« reconnaitrai a vec usure les secours que j'aurai
C( re<,;ns de chacun; et, en meme temps, quelle que
(e soit la frénésie qui possede maintenant l'esprit
ce des honunes, ce vous sera un jonr un honneur
( et une consolation d'avoir, au prix de quelques
e( charges et de quelques inqlliétudes, fait ce qlli
e( aura été en votre pouvoir ponr soutenir votre
« Roi et sauver le Royaunle. »


Le Roi ménagea ses affaires avec tant d'habi-
1eté dans ce canton, et la fortune y couronna
tellemeut ses efforts, qu'avant le milieu d'oc-
tobre, c'est-a-dire environ trois semaines apres
son arrivée a Shrewsbury, son petit corps de
troupes était devel1u une forte arnlée d'environ
six mille honlmes de pied, trois mille hOlnmes de
hrave cavalerie, et pres de deux lnille dragons.
Voulant alors s'éloigner ele Shre'wsbury, il se fit
fournir, sur ses warrants, par les habitan s de
cette v iUe et les autres villes et villages adjacents,
des chevaux et des voitures pour ses transports.


Le Roi marcha jusqu'a la vue de Coventry, nHti~




HISTOIRE
sa!!s aucnne intention de perdre son temps a s'y
arreter, a moins que la ville ne se rendit a -lui
librement; mais le gouverneur de Coventry re-
fusa, bien qu'en paroles tres-humbles, de lui
en ouvrir les portes. 11 continua sa route et campa
~l Southam, dont le lord-général Essex n'était
éloigné que de quelques milles. Les forces du Roi
étaient tellement augmentées que, meme a cette
distance, il répandit quelque terreur jusque dan s
laville de Londres, gui prit alors activement
des lllesures pour se fortifier contre une approche
qu'elle redoutait, bien que le lord-général Essex
f ~ '1 A d' 1 ' out en campagne a a tete une grane e arnlee
pour surveiller la lllarche de celle du Roi. Le
parlement s'occupa lui-metue de ce soin avec-la
plus grande sollicitude, et, regardant la ville
comme exposée a un Janger ilnminent de la part
des troupes du Roi, il ordonna de lever prompte-
ment des milices pour en former une garde, et d'en-
tourer la ville de toutes les fortificatiol1s possibles
a élever en peu de temps. Un comité futchargé d'é-
tab11r des postes et de faire exécuter les travaux
nécessaires pour placer d~s canons en plusieurs
endroits autou!' de la ville et des faubourgs. En
conséquence, plusieurs centaines d'hommes se
nlirent a l' ouvrage ponr creuser des tranchées et
d'autres moyens de défense (1). On ordonna aussi


(1) II Ce fut, dit Whitelocke, une chose merveilleuse que




DU LONG PARLEl\1ENT.
de meltre sur pied les milices de Londres, de l\lid-
dlesex et de Surrey. Enfin, le comité secret eut
mission de s'assurer promptement; avec l'aide dll
lord-maire, de tOtlS les citoyens 111alintentiollUés,.
ou, dU,moins, de ceux: qll'on regardait' comIne l~
plus occupés et le plus en état d~ former un parti
contre le parlement.
Dou~e compagnies de la rnilke de Londres fu-


rent enyoyées a Wind&or pOUl" s'emparer de eette


de voir combien de femmes , d' enfans, et quelle nornbreuse
fouJe de gens se mirent al' ouvrage pour creuser et t rans-
por ter la terre, conlme il était llécessaire pour les nouvelles
fortifieations.)) (l11émoires (le Whiteloeke, pago 60.) Du
reste, pour animer le zele, le par]ement avait ordonné
qu'on désarmat et mit en prison eeux qui se refuseraient
aux eharges imposées. Cet ordre fut exécuté sur pllJ.sieurs
personnes, eutre autres sur un ?tf. Fountaine avo¿~t, qui,
interrogé a la chaJ.)Jbre sur les raisons de son ref~s, apres
avoir prié inutiJement (p.¡'on le dispensat de répondre, dit
enfin que e' était (( paree qu'il j ugeait ces demandes e011-
1\ traires a la pétition des droits. )) (Histoire parlementail'e,
tomo 2, col. 1480.) 11 Mais, dit Whitelocke, luí et Leau-
\( cpup d'autres, qui par la sujte refuserent, pret~rent SJ.,lC-
11 cessivement secours au:x; deux partís, selon qlJ~ ~~urnait
« le vent.)) (Mémoires de Whitelocke, pago 6p.) Selop
Clarendon , l'ordre de désarmer les récalcitrans fut la
source d'une multitud e de vexations et d'abus; 11 les pauvres
11 se mirent a dénoncer les riches ~ et on enleva non-seu-
11 lement les armes, mais la y;¡isseIle et beau~()QP<l'autres
« meuhles de grande valeur.)) (Histoire de la RébelliOll ~
lom. 5, pago 51.) (Note de f$ditellr. )




HISTOIRE
place, et on leva un bon nombre de lllatelots
pour garder les passages de la Tamise.


Le parlement, voyant que les dissensions civiles
s'étendaient sur tout le royaume, décréta qu'il
était permis a tous les comtés de l' Angleterre de
former entre eux une ligue pour la défense mu-
tuelle de leur religion, de leurs lois et de leur
liberté. Peu de telnps apres} les comtés de Buc-
kingham, de Hereford et de N ottingham se confé-
dérerent d'apres ce principe, leverent des troupes
pour le parlement, et avancerent, sur sa demande,
de l' argent et de la vaisselle.


Le danger qui paraissait menacer Londres a
cette époque, bien qu'éloigné sous le point d~ vue
matériel, était prochain aux yeux de la raison.
On croyait l'armée du Roi plus 'Voisine de la ville
que ceHe du lord-général, et il était assez pro-
hable qu'il ferait une tentative contre la cité plu-
tot que de s'engager contre les troupes du parle-
mento Quelques personnes disaient aussi que le
Roi avait a Londres beaucoup d'amis qui, a son
a pproche, feraient éclater leurs sentimens et renl-
pliraient la cité de séditions et de tu multes pour
lui faciliter le succes. Londres était d'ailleurs le
seullieu 00. le parlement put etre détruit d'un
seul coup, et l' arrnée royale enrichie a u gré de
ses désirs; nlais d'autres pensaient qu'une telle
tentative, déja tardive, serait vaine, et que la
cité ne pouvait "etre prise, a luoins que l'armé~




l>LJ LONG PARLEl\'lEl'iT.
lle fut d'abord vaincue. Le parti du Roi, a Lon-
dres, lle paraissait pas assez fort pour réussir , et
on ne pouvait croire qu'illui ftit dévoué au point
de s'exposer, personnes et biens, a la fureur dé-
sordonnée d'une armée licencie.use; d'ailleurs,
ajoutait-on, le lord-général Essex, avec une ar-
mée aussi lorte que celle du Roi , suivrait de pres
sa marche, et, soutenu par les troupes qui sor-
tiraient en foule de la cité de Londres, iI serait
en état d'anéantir l'ennenli. Au milieu d'avis si
divers, iI plut a Dieu d'alnener une hataille a
laqueI1e le Roi se décida probablement dans l'es-
]Joir de profiter de l'absence d'une grande partie
<le l'armée parlementaire.


eette fameuse bataille nommée par quelques
uns la bataille d'Edgehill, par d'autres la ha-
taille de Keynton (Keynton est une petite ville
du cOlnté de Warwick située entre Stratford sur
l'Avon, et Banbury ), fut livrée le di manche 23
octohre. Le samedi 22, le Roi arriva a six lnilles
de Keynton" et la nuit suivante, ii établit a Cro-
})redy et a Egdecot toutes ses troupes formant
quatorze rnille fantassins et quatre mille chevaux.
C'était heaucoup plus que n'avait en ce moment
le cornte d'Essex, bien que la totalité de son arrnée,
si elle el!t été réunie, füt plus considérable. Cette
lnclne Huit, le comte d'Essex campa a Keynton
avec douze régimens d'infanterie et quarante es-
cadrons de ca,'alerie , en tout a peu prcs dix utille




74 HISTOIRE
hommes. Pressé de suivre la marche de l'armée
royal e , il avait laissé en arriere , sous les ordres
des colonels Hampden et Granthalll, deux régimen s
d'infanterie et onze escadrons, qui devaient lui
amener sept pie ces de canon et heaucoup de mu-
nitions; mais elÍes n'arriveFent qu'apres la ha-
taille. Le général avait aussi laissé, pour la
protection du pays environnant, un régiment
d'infanterie et deux escadrons de cavalerie a Here-
ford, sous les ordres du comte de Stamford, pour
empecher les troupes du pays de Galles d'entrer
dal1s le COJJl1é de Glocester. Enfin un régiment
était resté a Worcester, un autre a Coventry, pouI'
la sureté de cette place, et un troisieme se trou-
vait par hasard ,cantonné a Banbury. .


Le général avait le projet depasser le dimanche
a Keynton, pour attendre son artillerie et le reste
de ses troupes; mais, dans la matinée, l'ennemi
fut aperc;u a peu de distance, et lord Essex donna
aussitot des ordres pour mettrc en hataille les
forces qu'il avait so~s la main. Les troupes d~
Roi avaient occupé une colline tres-roide, dite
Edgehill; pres du pied de cette colline, était une
assez large plaine dite la -pallée du chef/al rouge.,
110m bien d'accQrd avec la couleur qu'elle devait
recevoir ce jour-la, car elle fut le principal
théatre de l'actiQn. Le comte d'Essex fut forcé de
se mettre soudain en marche pour cette plaine.
Il 6t halte envirOll a un demi-mille d'Edgehill ,




DU LONG PARLEMENT. 75
rangea son armée en bataille et vit les troupes
du Roi descendre la colline pour venir a sa ren"':
eontre. Elles avaient le double avantage de la
position et du vento D'habiles officiers les com-
mandaient. Le principal eorps de eavalerie était
a l'aile droite, sur l'aile gauche étaient jetés quel-
que s escadrons de dragons.


L' armée du parlement;se forma sur un petit ter-
tre, au milieu de la vallée. La plus grande partie de
l'infanterie se trouvait assez loin de la eavalerie ,
lorsfJue la charge commen~a. Trois régimens de
cavaJerie étaient a l'aile droite; eelui du lord-
général, commandé par sir Philippe Stapleton,
eelui de sir William Balfour, lieutenant-général
de la cavalerie, et celui de lord Fielding plaeé
derriere les deux autres en guise de réserve. La
hrigade de sir John Meldrum formait l'avant-
garde. Le colonel Essex était au centre. Le régi-
ment du lord-général, celui de lórd Brook et
eelui du colonel Hollis couvraient l'arriere-garde.
A l'aile gauehe étaient placés vingt eseadrons de
cavalerie sous les ordres de sir James Ranlsey
cornmissaire-général. Telle était la position des
troupes du parlement, lorsque l'armée du Roí
s'avant;a contre elles, ayant, comnle je l'ai dit, sa
pl'incipale force en eavalerie a son aile droite ,
en faee de l'aile gauehe du eomte d'Essex (1).




/


.. .
.. ' .


• ·~·i


HISTOIRE


Le canon des deux catés cOlluucn<;a le cOlubat
avec de hruyans roulemens, mais non pas avec
un sucd~s égal; car le canon du parlement faisait
un grand ravage parmi ses ennemis, tandis que
le leur causait peu de dommage dans son armée.


IJe comte de Lindsey, général pour le ROÍ, une pi-
que a la main, conduisait son principal corps d'ar-
loée dans lequel était le régiment du Roi, et ({ui sc
trouvaitenface du comte d'Essex. Celui-ci s'exposa
a tous les dangers que peut faire courir une ba-
taille. D'abord a la tete de sa cavalerie, puis de
son régiment d'infanterie, inspirant le courage a
tous, j'usqu'a ce que, par l'avis de plusíeurs per-
sonnes qui luí conseillaient de ne pas s'engager
si avant, il retournat vers le corps d'armée pour
le faire ,avancer. Les principaux régiInens ayant
cOlllmencé la bataille, sir Philippe Stapleton, a
la tete d'un corps de cavalerie composé de gen-
tilshommes et formant la garde personnelle du
général, dont iI avait le commandenlcnt, char-
gea sur le flanc droit le régiment du Roi, armé
de piques, et se retira sans qu'il y eut beaucoup


midi; les généraux des deux armées se conduisirent avcc
un courage tres-brillant; tous deux marchaient a la tete de
leurs troupes la pique a la main; mais 011 leur conseil1a de
prendre une autre attitude, ceHe-la couvellallt mieux a (le
simples soldats qu'~ des généraux. )¡ (MéIllOiI'C8 de '\Yhi-
telocke, pago Ü1.) (Note de l'Edileur. )




DU LONG PARLEMENT. 77
1]e mal, quoique les piquiers se fussent coura-
geusement défendus et que les mousquetaires,
qui étaient bons tireurs, eussent rudement joué
sur eux. La bataille fut chaude a cet endroit, et la
perte si grande du coté du Roi, que le parti du
parlement eut d'abord le dessus~ Sir Edmond
Varney, porte-étendard du Roí, fut tué, et l'é-
tendard royal tomba entre les mains des parle-
mentaires. Le cOlnle de Lindsey, général de
l' armée du Roi, fut grievement blessé et fait pri-
sonnier. L'aile droite du Roi, conduite par le
prince Robert, chargea avec force l'aiIe gauclle
<le I'arJnée du parlenlCnt, en partie composée de
cavalerie, et obIint cOlnpletement l'avantage; cal"
presque toute I~ cavalerie du parlement, de ce
coté, prit la fuite, eL la plus grande partie de
l'infanterie, effrayée de la voir si débandée, se
mit a fuir aussi avant d'avoir soutenu une seule
charge. Le colonel Essex, entierement abandonné
de la. brigade qu'il commandait, se porta a la
premiere ligne de l'armée OU il rendit de grands
services, soit par ses exploits personnels, soit
par ses conseils, jusqu'a ce qu'enfin il rec;ut dans
la cuisse un coup de feu, dont il lnourut bienIot
apreso Ce qui avait le plus contribué a découra-
gel' l'année parlementaire, c'était la trahison de
sir Faithful Fortescue, qui, au commencement
(111 combat, au lieu de charger l'ennemi, tira
son pistolet contre terre, et, faisant volte-face




1IISTOIRE
avec sa troupe, courut se ranger dans l'armée du
Roi qu'il avait auparavant fait avertir de son
projet par son cornette. L'armée du parlement
aurait été, sans aucun doute, entierement dé-
truite ce jour-Ia , et le parti du Roí aurait rem-
porté une victoire définitive si le prince Rohert
et sa cavale:rie, moins ardens a la poursuite et
au pillage, fussent revenus sur leurs pas au se-
cours de leurs amis, qui n'avaient pas été si heu-
reux dans les autres parties de l'armée; mais le
prince Robert ayant suivi les Juyards jusqu'a
Keynton Oll étaient les hagages de l'armée, ses
troupes les pillerent et traiterent avec une grande
cruauté les voituriers et les hommes de peine.
Un grand nombre des soldats du parlement f\lrent
tués dans leur fuite; le prince Robert les poursuivit
jusqu'a plus de deux milles au-dela de Keynton,
ou il rencontra le colon el Hampden, qui marchait
pour rejoindre le lord-général a la tete de l'autre
hrigade de l'armée, lui amenant l'artillerie et les
munitions dont on a parlé. Le colonel déchargea
contre lui et ses soldats cínq pieces de canon.
Quelques-uns furent tuéset le reste, cessant la
poursuite, se retira en toute hate vers le champ
de bataille OU ils trouverent toute leur infanterie,
excepté deux régimens , entierement défaite; car,
dan s le meme temps, sir William Ralfour, lieu-
tenant-général de la cavalerie, chargea, a la tete
d'un réginlent de cavalerie, un régiment d'infan-




DU LONG P ARLEMENT. 79
terie du Roi, et, avant que l'infanterie de son
parti put etre arrivée, ill' enfom;a courageusement
et lui tuaheaucoup de monde; ensuite, aidé de
l'infanterie qui l'avait rejoint, il défit un autre
régiment et se rendit ainsi mai~re de la plus
grande partie de l'artillerie du Roí, prenant plu-
sieurs canon s , coupant les jarrets des chevaux
qui les trainaient, et tuant les canonniers; mais
il fut ensuite ohligé de les abandonner sur le
champ de hataille, pour continuer ses efforts
contre plusieurs régimens d'infanterie du Roí qui
cornhattaient avec heaucoup de résolution, pal'-
tieulierernent eelui de la garde, auquel était con-
fié l'étendard de Sa Majesté. Le régiment de sir
William Balfour, ayant passé a coté de celui-ci,
apres avoir pris les canons, les soldats du Roi
le prirent pour un régiment de leur parti; et,
conlme ils ne l'attaquerent point, cela fut cause
que, l'instant d'apres, au llloment OU sir Willialll
s'approehait du régiment de cavalerie du lord-
général Essex, ee régiment fit feu sur le sien, le
prenant pour un régiment ennemi; nlais ils
se teeonnurent hieniot, et, lorsqu'ils se furent
rejoints, le général lui-meme conduisit le régi-
ment de sir William ~t la moitié du sien contre
le corps de hataille du Roi, OU se livra un ter-
rible et sanglant combato En nleme temps, le
. colonel Ballard, qui conduisait une brigade des
régilllens du lord - général et du lord Brook,




80 Il 1 S T O 1 H E


forc;;a un poste des piquiers du Roí et enfon~a
deux de ses régimens.


Ce fut en ce grand combat que, comme on l'a
dit, l'étendard royal fut pris, sir Edmond Var-
l1ey tué, et le comte de Lindsey fait prisonnier
avec son fils, ainsi que le colonel Vavasor, lieu-
tenant-colonel du régiment de la garde. Le co-
Ion el Monroe fut aussi tué. -


L' étendard fut remis entre les mains du lord-
général qui en chargea son secrétaire, M. Cham-
bers. Le secrétaire, apres l'avoir porté quelque
temps, se le laissa enlever par un inconnu (1), et
ainsi il fut secretement emporté du chaIllp de
hataille. IJord Gray, fils du comte de Stamford ,
et sir Arthur Haslerig rendirent aussi de grands
services et aiderent beaucoup a ramener la for-
tune dujour, en défaisant un régiment appelé le
régilnent bleu.


L'infanterie du Roi, excepté deux régimens,
avait été entierement rnise en fuite, et les par-
lementaires avaient gagné l'avantage du vent et
le champ de bataílle. Les deux régimens du Roi
se retirant et trouvant lenr artillerie abandonnée,
firent halte et se servirent de leurs canons, don t
iIs firent plusieurs décharges contre leurs en-
nemis. r/infanterie du parlement commen~ait a


(1) Celui qu-i l'enleva se nornmait Smith; voír, sur ce
faít, le!; JJlt!moil'~,~ de Ludlow.




DU LONG PARLEl\'lENT. 81
lllanquer de poudre; autrement, eOIDme Fa oh-
servé un des ehefs de cette armée, on aurait pu
charger ces deux régimens avec de la eavalerie et
·de l'infanterie, ce qui, prohahlement, aurait
achevé de détruire l'infanteríe du Roí, dont ils
composaient alors, en quelque 'sorte, la tota-
lité.


Mais l'armée du parlenlent se trouvait arn~tée,
partie par défaut de munitions, et partie a cause
de la fatigue d'un si long combat; car tout l'effort
·de la bataille avait été soutenu par deux de ses
régimens de cavalerie et quatre ou cinq de son
infanterie, en sorte qu'ellene s'empressa pas beau-
coup a ehal'ger de nouveau.


La cavalerie du Roi , apres avoir long - temps
pillé aux environs de Keynton, avait eu alors le
temps de revenir sur les deux ailes, et de se re-
joindre a sOn infanterie; mais au momentou elle
tOlllba sur l'aile gauehe de l'armée parlementaire,
sir Philippe Stapleton, a la tete de sa cavalerie,
. fit sur ceHe du Roi une si terrihle eharge
qu'elle ne put la soutenir long-temps, s'enfuit
a toute bride a tra vers un trou de haie, pour se
rejoindre an reste des troupes royales alor5 en
déroute, et vint enfin se réun ir a l'infanterie au-
tour des canons. Ainsi des deux eotés IR eavalerie
se trouva réunie a l'infanterie', et en eette situa-
tiou les deux armées delneurerent en présence
jusqu'a la Huit. L'armée du parlemel1t en posses-


2. 6




IlISTOII1E


sion lln chump de hataiUe., .Y passa la Huit, et sur
le matin se retira prcs de Keynton, dans un líen
plus ahrilé, Oil elle avait campé la nuit précé-
denfe; cal' les sohlats souffeaient beaucoup da
froid et d'une grande disette de vivres. L'arméc
du l10i s'était retirée sur le haut d'une colJine Ol!
cHe se jugeait plus en súreté; on y lit du fen tonte
la nuit. Le lendemain matin, a l1euf heures dn
luatin, l'armée du parlement sortit en bataiUe
et s'y tint trois heures jusqu'a ce que l'ármée du
Roi ellt entierement (Iuitté la coHine. Alors les
parlementaires rentrerent clans leurs fJuartiers
pres de Keynton et se rapprocherent ainsi de len!'
autre brigade, ele leur artillerie et de leurs nlU-
11itions, qui, sons le comlnandement des colónels
Hampden et Grantham., étaient, conlme on l'a
dit, arrivées a Keynton et s'y étaieot logées. Le Roi
avaÍt fait retirer sa cavalerie sur le revers de la
colline. Il y demeura jusqu'a l'approchede la nnit,
tandís que son infanterie s'éloignait par derriere.
Un peu avant la nuit, la cavalerie se lnit aussi
en marche pour se retirer, et eIlviron une heure
apres, la cavalerie du parlement se retira de son
coté et aUa, avec le reste de l'armée, se repose!' á
Warwick.


Un noble gentilhornnle du parlement a hlfllné
ceite marche vers~Varwick; cal', dit-il, si l'arluée,
au lieu d'aller a Warwick, eút marché a llan-
hury, nous ullrions trouvé plus de vivres, et,




DU LONG PARLEMENT. 85
selon toute probabilité, dispersé toute rinfanterie
du Roi, l)l'is ses canon s et ses bagages , et forcé
sa cavalerie a se retirer plus loin; au lieu que,
ne sevoyant pas poursuivis, bien qu'ils eussent
perdu le champ de hataille et ab~ndonné leurs
quartiers, ils commencerent a mettre en doute a
qui appartenait l'honneur de la journée (1). Qnoi


(1) Selon Whitelocke, la marche du comte d'Essex, apres
la bataille d'Edgehill, fut désapprouvée par plusieurs de
ses partisans; et lord Willouhgby, HoIlis et Hampden, qui
venaient de luí amener trois régimens frais, lirent, ainsi que
Stapleton, tous leurs efforts pour l'en dissuader; mais il
préféra les avis de quelques autres, au nombre desquels se
trouvait le colonel Dalbier. Les premieres nouvelles de cette
bataille arriverent tres-diversement a Londres, et, dans
l' effroi qu'inspirait la marche du Roi sur eette, ville, tous les
bruits étaient aeeueillis avec une inquiete avidité. Le 24 oe-
tohre on reyut, de la route d'Uxhridge, la nouvelle qúe plu-
sieurs officiers et soldats de l'armée du parlement, et, en
particulier, sir James Ramsey, Écossais, qui commandait
un régim"ent de eavalerie sous le comte d'Essex, avaient ra-
pidement traversé Uxbridge, a che val , ce matin meme, et
avaient pris la route de Londres, disant le que l'armée du
(( parlement était baUue et totalement défaite, et qu'il y
{( avait eu beaucoup d'officiers tués et faits prisonniers. II
D'autres messagers apporterent des nouvelles entierement
eontraires et beaucoup plus agréables. lIs les avaient re~ues
de plusieurs personnes qu'on avait rencontrées galoppant
sur la route de Londres, oh elles arrivaient, disant le que
(( le comte d'Essex avait completement mis en déroute }'ar-
« mée du Roi , lui avait tué ou \)ris beaucoup de monde)


G.




1l1STOl HE


<Ill.'il en soit de cette opillion, il est certaill que
le Roi, COlume le parlenlent, prétendit a la vic-
toire et se l'attribua si bien qu'on célébra a Ox-
ford des prieres d'actions.de graces. Le parlement
fit aussi de son coté rendre des actions de graces
pour la victoire qu'il avait obtenue, et, en effet,
chacune des deux arnlées avait obtenu plusieurs
gages de victoire. On avait pris des deux cotés
des drapeaux et des canOl1S a peu pd~s en nombre
égal; et bien qu'ensuite les discours et les livres
de chaque parti, loin de s'accorder sur le 1l0lnhre


« et avait remporté une victoire compl(~te. II Mais, au fait,.
ajoute Whiteloeke , le parlement obtint, en eette oceasion,.
une grande déJivrance et une petite vietoire. (Mémoires de
PPhitel., pago 61.) Ce meme jour, 24 octobre, l'ordre fu
donné a tous les habitans de Londres, Westminster, etc. ,
de fermer leurs boutiques et d'interrompre leur eommerce
pour vaquer uniquement a la défense eommune. Ce fut aussi
ce jour-Ia que la chambre des communes ordonna gue tous
ses membl'es fussent tenus nominativement a une déclara-
tion d'adhésion au comte d'Essex, et a un pret d'argent
eomme gage de eette ,adhésion. Quel qu'ellt été , au reste,
le succes de t'un ou de l'autre coté, ce fut en Angleter~e un
hien grand événement que cettepremiere bataille rangée
de deux armées anglaises. « Aux nouvelles de ceUe bataille,
« dit Whitelocke, toutes les provinces furent remplies d'a-
« larme et d'effroi; car c'était une chose étrange en Angle- .
« terre.)) (Ibid.) C'est'ainsi que les partis se précipitent vers
l' action sans la connaitre , saisis ensuite de terrenr au mo-
llient oi! elle commence a se montrer dans sa terrible réalitéo


(Note de l'Editeur.)




DU LONG PARLEMENT. 85
des morts, aient varié a cet égard, a tel point
que l'histoire a pres que honte de le l'apporter ,
íi est cependant certain que, d'apres les calculs
les plus surs, l'armée du Roi avait perdu plus de
lllonde que celle du parlement. Les gens de qua-
lité qui périrent des deux cotés furent, dans
l!armée du Roi, le cornte de Lindseysol1 général,
le lord Auhigny, frere du d uc de Lenox, sir Ed-
mond Varney, le colon el sii' Edmond 1\1onroy, gen-
tilhomme écossais, et le coloncl Lunsford son
frere, avec d'autresgentilshonlmesetofficiers, sans
compter les soldats, sur le nOlllbre desquels,
comme je l'ai dit, on n'a pu s'accorder. Cepen-
dant j'ai oUl rapporter que les gens des environs
qui enterrerent les corps apres qu'ils eurent été
dépouillés, en trouverent en tout six luille des
deux partis, sans cOlllpter ceux quí mou,rurent
ensuite de leurs blessures. Les prisonniers faits
sur l'~rmée du Roí, furent le lord Willoughby,
fils et héritier du COlnte de Lindsey, le colonel
Vavasor, lecolonel Lunsford, sir Ed,vard Stradlinf)
et quelques autres de moindre rango Outre le
cordon des chevaliers de! la jarretiere, que por-
tait autour de son col le lord-général Lindsey,
lorsqu'il fut tué, un soldat en trouva un autre
sur le champ de bataille. Un capitaine le lui
acheta et l'envoya au parlement, qui, apres qu'il
luí eut été présenté, le rendit an capitaine.


I.le parlement ne pcrdit en personncs de' lnar-




8G HISTOIRE
'lue, que le lord Saint-John, fils ainé du cornte
tie Bolingbroke, le colonel Charles Essex et le
lieutenant colonel Ramsey. On ne lui fit aucun
prisonnier considérable.


Le combat avait été soutenu des deux parts
avec un tres-grand courage, tant par les généraux
et autres officiers, que par quelques régimens, teIs
que le régiInent rouge du colon el Hollis et plu-.
sieurs autres trop nombreux pour etre tous nom-
més dans un récit abréaé .


... ,


On ne peut s'empecher d'observer que le 25
octobre, jour de la fameuse bataiJIe de Keynton ,
était l'anniversaire de celui ou, l'année précé-
dente, avait éclaté la sanglante rébellion de-l'Ir-
lande, .et avait commencé le cruel massacre des
protestan s de ce royaume. Les pertes que la ba-
taille venait de faire éprouver aux Anglais les
avertirent tristement qu'ils avaient trop long-


,telnps différé la vengeance de leurs freres mas-
saerés en Irlande.


Plusieurs des partisans du parlelnent, ne fai-
sant aueun doute que lavictoire ne leur appar-
tint, remarquerent aussi, comme un surcroit de
bénédictions de Dieu sur la cause protestante, que
le meme jour 011 eette bataiUe avait été gagnée
en Angleterre, les Suédois avaient obtenu une
grande et notable victoire en Allemagne sur les
impériaux et les partisal1s de la religion romaine.


l\lais le Roi, supposant qu'il avait été vainqueur




nu LONG P .ARLEME~T. E;7
d KeyuLon, Pllblia Hussitot a pres une décLu';¡ tiOlL
adressée ~l lous ses aff'ectioTlnés sujels ( cal' il COIl-
tinuait a les appeler ainsi), apres sct victoire
sur les rehelles. l~ien que cette déclaration soif
sur un ton tres-amer, iI s'effoFce de paraitre
diriger ses accusations non pas contre le parle-
Juent lui - 111.eme, luais contre quelques UDS de
ses lnembres, qu'il qualifie de malveillans, olal-
intentionnés, ou ele plusieurs autres manieres
semhlahles, et quí ont, dit - i1, travaillé á 1 ni
impute!' des dIOses dont il se déclal'c cntierement
innoccnt. Ces im postures sont, dit- il, de deux
sortes : la pl'emiere est l'accnsaLion de favol'isl'I'
le papisme , et d'employer des papistes dans son
arluée; la secolldc est ecHe (l"avoil' leyé une al'-
mée contre le parlemcnt. 11 s'efforce de les rc--
pousscr toutes tlenx par des récrim inations. Onant
a la premiere, apres de grandes protesta'tiolls de
la sincérité de su religioll , et de ses soins passés,
présclls et a yenir, pour raffermir dans ses états
et en extirpe .. le papisme , il ne peut s'empecher
ll'avouer CJll'il a rec;u a son service quelques
hOlnmes considérables professant cette religion;
ce fJu'il regarde comme excusable dan s un dan-
gel' et desbesoins tels que ceux Oll il s'est trouvé;
l11ais il soutient que l'armée du parleolent con-o
f ient, tant parmi les ofliciers que parmi les 50l-
dats, plus de papistes clue la sienne.




88 HISTOIH.E
Quant ~l la seconde accusation, d'avoir levé


une armée contre le parleJnent, il senlble espérer
qu'aucun de ses bons sujets n'y croira, a moins
de se résoudre a penser qu'une douzaine ou une
vingtaine de factieux et de séditieux puissent etre
regardés comIne la haute - cour du' parlement,
telle qu'elle doit etre, eomposée el u Roi, des
lords el des COffilnunes. Quant aux priviIéges
du parlelnent, iI affirme qu'a moins de lnettre
au nombre des priviléges du parIement le droit
de lever une armée pour tuer son Roi, eelui de
changer le gouvernelnent et les lois par des votes
extravagans de l'une des eha mbres ou de toutes
les deux, celui de forcer les membres de la
chambre a se soumettre aux volontés d'une fae-
tion, et .de leur oter toute liberté de discussion,
on doit avouer que l'armée levée par le Roi
n'est pas moins néeessaire au maintien et a la
conservation du parlement. qu'a la défense du
Roi lui-Jneme.


Le Roi reproche au parlement d'avoir lnallqué
de charité, en s'effor~ant d'élever une haine
implacable entre la nohlesse et le peuple du
royaume, et de rendre tous les gens de qualité
odieux au peuple, sous le nOID de Cavaliers, et
d'avoir v-oulupersuader au peuple que la com-
mission d'enrolenlent avait été formée dans l'in-
tention de lui enl.ever une partie de ses propriétés,




DU LONG PARLEl\1El\"T.


ce que le Roi nie, en tcrnlinant sa déclaration
par des protestations de la fausscté de cette ac-
eusation.


Le parlement répondit a eeUe déelaration en
supposant, eorome a l'ordinaire; qu'elle n'était
pas du Roí, mais qu'elle venaít de ces lnauvais
et pervers invenleurs de faussetés , qui, dit-il ,
a notre inexpri mable douleur, ont aequis assez
de erédit sur Sa Majesté, pour publier de sem-
blables ehoses sous son auguste nomo


Quant a la premiere objeetion, le parlement
n'affirme pas que le Roi lui - meme favorise le
papisme; mais il pro uve que quelques uns de
ceux qui l'environnent out agi en sa faveur,
eomme le manifestent en plusieurs oeeas~ous
leurs préeédentes déclaratiol1s. Le parlement
voit avee une grande surprise l'étrange audaee
avee laqueIle eeux qui ont forgé eette décl~ration
soutiennent qu'il y a plus de papistes dans son
armée qlle dans eeHe du Roi, tandis qu'ils n'en
peuvent nommer, ou du moins n'en nOlnment
aUCUD. Le parlement désire, s'il y en a quelques
uns, qu'on les lui indique, afin qu'illes éloigne;
et en meme temps iI nOlnme, désigne par Ieurs
noms un grand nombre de papistes du premier
rang, qui servent dans l'armée du Roi, et ont
levé pour lui, dans quelques cOlntés, la plus
grande partie des troupes dont se compose eeHe
arJnée. Il cite aussi plusieurs eOIDlnissions ac-




llISTOIH E


cordées par le Iloi lui - nlt~me a des papistes l'e-·
connus pour tels. Il ne peut totnher sons le sens ,
ajoute-t-il, qu'aucull papiste soit favorahle a la
cause du parlement, tauclis que certainement il
n'en est aucun qui, ouvertement ou secretement,
ne seconde la cause du Roi.


Qual1t a la seconde objection, portant sur ce
que les troupes du Roi ne sont pas levées contre
le parlement, nlais cóntre un petit nombre de
séditíeux, c( le parlemeut croit impossible que
C( douze ou vingt séditieux, comnlC OH les appelle,
c( aient le pouvoir de forcer tout le reste de ce
(e corps a obéir a leur faction, et de lui 6ter la
ce liberté de la discussion.


c( La vérité, cOlltinue le parlement, c'est que
ce ce n'est point un petit nombre de personnes,
ce mais le parleluent tout eutier qui gene ces
(e hommes, comme une épine enfoncée daus Jcurs
« flancs. Jusqu'a présent, lorsqu'ils se sentaient
« piqués par cette épine, ils s'en délivraient fa-
« cilement au m:oyen d'une prompte dissolution;
« nlais, maintenant que l'acte de continuité ]'a
ee plus profondément enracinée, ils veulent l'ar-
ee racher par la force des armes.


ce Quiconque lira les discours et déclarations
« faits a l'occasion des dissolutions de parlement
« qui ont en lien depuis le commencement du
« regne actuel? trOllvera ces injustes dissolutions
(e tou j ours fondées sur des lnécontentenlcns par-




nU LONG PARLEMENT.
«( ticuliers eontre quelques ln~mbres désignés
(( eOlnme un petit nombre de factieux et de sé-
« ditieux, et ainsi ce n' est pas une invention
C( llouvelle que de calomllier et d'atteindre le
«( parlement par les coups -portés a quelques uns
u de ses membres. »


On remarque ensuite que toutes ces déclara-
tions faites. jusqu'a présent au llom du Roi ne
sont autre ehose que des il1vectives sans fonde-
lnent, non pas eontre tels ou tels membres,
mais eontre les voteset procédés des deux eham-
hres; eomme eeHe qui déclare traitre le eomte
d'Essex, général des troupes levées par leurs 01'-
tIres, et déclare également rebelles et eoupables
de haute trahison eeux qui lui preteront assis-
tance. Dans eette aeeusation sont nécessairement
eomprises les ehambres, par le eommandement
eL l'autorité desqueUes le eomte d'Essex a été
revetu de ces fonctions (1), preuve suffisante et


(1) Le 3 décembre suivant, sirSidney Montague fut exclus
du parlement et envoyé a la Tour, pour avoir refusé de
souscrire a la décJaration d'adhésion au cornte d'Essex, par
la raison, dit-il , que ]e Roi avait déclaré traltres ceux qui
prendraierít parti avec le cornte, et pour avoir tiré de sa
poche un exemplaire de la déclaration, paraissant ainsi in-
culper ceux qui s'étaient déclarés pour lui. « La chambre
regarda comme un grand crime a l'un de ses membres, de
se laisser diriger dalls son vote par des iiéclarations du de-
hors, ct non par son propre jugement. )1 Du reste, OH




lIISTOIRE


bien claire que l'armée du Roi cst lcvée contre
le parlement, 011 daos l'intention de le dépouil-
ler de ses priviléges.


Les priviléges du parlement sont de trois sortes:
JO. ceux d'un conseil.chargé de donner son avis;
2°. ceux d'une cour de justice; 5°. ceux du corps
représentatif du royaume, ayant mission de faire
révoquer ou changer les lois. Ces priviléges, con-
tinue-t-on dans la réponse, ont tous été, durant
la session actuelle, évidemlnent violés, a la vue
de tout le monde, par les pervers conseillers du
Roi. Les avis du parlement ont été rareIllen! écou-
tés. On .leur a préféré les conseils de gens sans
mission. Les personnes déclarées délinquantes
par le parlement ont été protégées par le Roi; de
quoi l'on cite plusieurs exenlples. Quant au troi-
sieme privilége, relatif a la confection des 10Ís,
le parlement donne pour exemple le refus faít
par le Roi, d'accepter plusieurs bills salutaires
a l'Église et a l'État. Outre les af.teintes portées
a ces priviléges, le parlement cite encore plusieurs
tentatives faites pour le détruire; comme les
moyens essayés pour employer l'armée du nord


pourrait croire que, malgré l'émigration des royalistes, ]a
majorité du partí de la guerre n'était déja plus bien forte
dans la chambre des communes, car la condamnation de sir
S. Montague ne passa qu'il une majorité de 48 contre 45.
(Histoireparlementaire, tomo 3, col. 36.) (Note de l'Edit,)




DD LONG PARLEMENT. 93
Ú lui ímposer des lois, les lcttres et ordres adres-
sés par le l10i a plusieurs Iuembres .des deux
chambres, dans la vue de les obliger a quitter
leurs véritables et légitimes fonctions pour se
rendre pres de lui a York, démarches que ceux
qui ont obéi a ces ordres ont prétendu justifier,
en soutenant faussement qu'ils avaient été chassés
du parleJnent par les tumultes populaires.


Le parlement nie absolunlent toute intention
de violence envers la personne duo Roi, et s'en
réfere aux honlmes impartiaux pour juger de sa
sincérité d'apres ses longues souffrances et les
l1umbles pétitions qu'il a adressées au Roi, dans
le désir de luí éviter ces dangers. Mais, quant a
l'accusation de travailler a exciter une haine im-
placable entre la noblesse et le peuple, elle lui
parait bien étrange, puisque ce serait accuser le
parlement de vouloir exciter la haine du peuple
contre lui-meme; ce car ce serait la le sen s de
e( cette accusation, a moins que ceux qui ont
ce fO~'gé la déclaration ne prétendent nier que le
« parlement ne soit composé de gentilshommes.
« Mais quoique nous sachions qu'il est parmi les
e( gentilshonlmes du royaume un trop grand
(( nombre d'honlmes disposés a satisfaire ra-
«( vidité de leur alnbition, a vendre leurs droits
(( d.e naissance, a se li vrer, eux et leurs descen-
( dans, a un esclavage perpétuel, et a subir un
(!( pouvoir iIlimité, pOllrvll qu'ils puissellt le par-




94 HISTOHl
c( tager duranl leur vie , et le faire, a leur tour,
« subir a d'autres; cependant nous sommes cer-
« tains qu'il ya aussi beaucoup de gentilshornmes
ce pleins d'hollneur qui sont prets, eomme ils
« l' ont récemment prouvé, a sacrifier leur for-
c( tune et leur vie pour l'intéret de leur religion,
« de leurs libertés et de leurs lois. C'est avec
(e ceux-la et tous ceux qui partagent leurs réso-
(( lutions, que nous serons toujours prets a vivre
c( et a mourir. »


Enfin le parlement pro uve , par plusieurs exem-
pIes, que, non-seulement la commission d'enro-
lemens du Roi manifeste l'intention d'enlever aux
citoyens une partie de leurs biens, ma is que cela
a été réellement exécuté en divers lieux. Il justifie
aussi, a plusieurs égards, sa eonduite et ses dé-
clarations précédentes. Tel fut le résultat de ce
combat de plume qui suivit immédiatement la
grande et sangIante bataille de Keynton.




DU LONG PARLEMENT.


CHAPITRE 11.


Le parlement propose au Roí un accOlnnzodelnent.
Combat d Brentford. Autre négocíation com-
mellr,ée avec le Roí el rompue. Reading assiégé
par le général Essex, se rend ti lui. COTJzplot
fonné pour livrer Bri.9tol. Conspiration contre
le parlenzent el la cité de Londres -' découverte
el prévenue.


eette J)utaille avait, au prix de beaucoup de
sang et d'argent, éprouvé, mais non pas décidé
la fortunc de la liberté anglaise. Elle fut done
un malheur lneme ponr le parti a qui semhla
appartenir la vietoire, l'armée du parlement.


Bien qu'elle eilt fort endolumagé les forces du
Roi, eependant il al'riva que sa puissance s'ae-
crut et devint plus forluidable qu'auparavant;
en sorte qu'il remporla une sorte d'avantage, celni
de ne pouvoir plus etre aisément ou entierement
valncu.


I-les gens les plus qualifiés des différens comtés
, , • "1 ,,' , commencerent a penser qu 1 n etalt pas 1m pos-


sible que le Roi l'emportat sur le parlement; et
plusieurs d'entre eux, demeurés jusqu'alors neu-
tres et spectnteurs, dans l'espérance qu'un seul
coup déciderait promptement l'affaire et ]enr




gG HISTOIRE
sauverait le danger de se déclarer ~ furent alor5
disposés a se réunir au parti dans lequel il selll-
blait y avoir llloins a craindre et plus a espérer,
c'est-a-dire au parti du Roi; cal', du cOté du
parlenlent, les espérances n'avaient rapport
qu'au bien publico Il ne promettait rien a ses
adhérens, qu'une entiere jouissance de leur li-
berté native. On n'avait a en aUendre ni honneurs
particuliers, ni avancement, ni confiscation sur
les ennelllis; et de l'autre coté, le parlelllent vic-
torieux, formant -' pour ainsi dire, le corps du
peuple, ne pouvait menacer ses adversaires d'une
ruine égale a ceHe que 1eurferaient subirun prillce
irrité et les avides partisans qui s'amassent d'or-
dinaire autour des princes en de telles occasions.
Tous les livres d'histoire nous enseignent encore
mieux que la philosophie aquel point les intérets
privés l'emportent sur l'amourdu bien public: car,
en ce qui concerne les actions et les penchans des
hommes, ii n'y a rien sous le soleil d'ahsolument
nouveau. On peut consulter sur ce point Dion Cas-
sius, que tous les critiques ontreconnu pour un des
écrivains les plus impartiaux de toute l'antiquité,
dan s son récit de la derniere guerre entreprise
pour la liberté Romai!e, la guerre de Brutus et
de Cassius contre César et Antoine, apres laquelle,
dit-il,le peuplene tourna plus ses regards en arriere
vers la liberté, et si ante hanc pugilclln civilibus
belli ~ etc., bie~ qu'avant cette guerre, dit Diou J




DU LONG PAULEl\IENT. 97
les ROlnains eussent en plusieurs guerrcs civiles,
dans les autres on combaUait a qui opprimel'ait
la liberté romaine; dans ceHe-el un parti COffi-
battait pour les droits de la liberté, l'autre pour
l'établissement de la tyrannie. Cependant le partí
de la tyrannie fut celui qui attira le plus de par-
tisans: le nH~me historien nous apprend de quels
rangs ils étaient 80rtis. Les armées de Brutus
et de Cassius, défenseurs de la liberté, se com-
posaient des dernieres classes du peuple, et ex
,c;ubditis ROlnanOrlUn. Les partisans de la tyran-
nie consislaient, dit-il, ex Ron¡,anis nobiliblts et
fortibus. Brutus et Cassius, les deux chefs de la
premiere armée, dans leurs discours a leurs 50]-
dats, avant la bataille, les excitaient a COlll-
hattre pour leur ancienne liberté et les lois 1'0-
maines; mais César et Antoine prOJnettaient aux
leurs les biens de leurs ennemis, el il7lperill17z in
omnes gentiles SitOS, et le pouvoir sur leurs con-
citoyens. Ce discours fut, a ce qu'il parut, Illeil-
leur et plus persuasif que l'autre. Brutus et Cas-
sius retarderent la bataiHe, paree qu'ils répu-
gnaient a répandre tant de sang, s'ils pouvaient
réussir par quelque autre llloyen; car c'é.tait, dit
Dion, des hornmes de bíen qui avaient compassion
de leurs cOl1citoyens, qU1 aimaient le salut et
défendaient la liberté de ceux meme qui com-
battaient contre eux pour la ruine de la liberté pu-
blique. Ce délai leur fut fatal; car, dans cet inter-


2.




98 HISTOIRE
valle, plusíeurs patricicns les abandonnerent et
se rangerent dan s l'autre parti vers lequel les
portaient leurs craintes et leurs espérances par-
ticulieres. Jc laisse au lecteur a déterminer aquel
point le parallele est ici juste et applicable, et je
retourne a ma nar-ration.


Le lendemain de la bataille de Keynton, le
comte d'Essex se mit en marche avec son armée
pour "\tVarwick, ou il arriva san s obstacle, et
mit dans le cluiteau les prisonniers, les bagages
et les canons dont il s'était rendu Jnaitre, résoIu,
apres avoir laissé prendre a ses soldats quelque
repos, de se rapprocher de l'armée du Roi; mais
le Roí se dirigca vers Oxford et prit en che-mil1
Danhury, ou iL s'empara de quinze cents fusils
ou autres arnles el d'ou il délogea les soldats du
parlelnent.


Son armée, composée surtout de cavalerie,
était partagée en plusieurs corps. Le prince Ro-
hert, a la tete d'une partie de ses troupes, visita
les villes adjacentes, Abingdon, Henleyet quel-
ques autres, et en rapporta un hutin considé-
rahIe (1).


Quelques jours apres, iI s'approcha plus pres


(1) Il ne se boma point a des courses, il établit a Abingdon
le quartier-général de sa cavalerie, et de la envoya un partí
vers Rtading, dOIl:t M. Martyn était gouverneur pour le
p:ulcment. A l'approche de ce corps, le gouverneur et la gar-




DU LONG PAHLEl\1ENT.


de Lonch'es, lnais avec des troupes légeecs qui ne
s'arretaient nulle part et s'étendaient quelquefois
jnsqn'~l Stanes et Egham; en sorte que la cité de
Londres prit so in de se mettre a l'abri d'une in-
cursion soudaine et envoya des. troupes occuper
el fortifier le chatean de 'Vindsor.


En meme tenlps, ponr convrir Londres et ras-
surer cette l)artie dn royaulue contre la craintc
(l'un danger encore plus grand, le comte d'.Essex
s'était rapproché avec son armée et se rendit le
7 novembre a Westminster, ayant logé son armée
a Acton et en plusieurs autres endroits voisins.
Les chambres le re<{urent tres-bien et lui firent
un présent de 5,000 livres sterling, cornme uu
témoignage offert an nOl11 du royaume pour ses
soins, ses peines et la valenr qu'il avait déployée
clans les actions qui avaient déja eu lieu.


l\lais, avant que le cornte d'Essex ellt quitté
Londres, il se pass a un nouvel acte de tragédic
a Brentford ou Brainford, c'est-a-dire, a dix


uison, saisis d'une terreur pani(!ue, s'enfuirent a Londres.
Ce sueees enfla tellement les royalistes , que les vainqueur~
de Reading, en donnant avis au Roi de la prise de eeHe
vil1e, lefirent assurer que s'il voulait marcher en avant,
tout fuirait a son approche, et qu'il ne rencontrerait pa"
un obstacle jusqu'a Whitehall. Ce fut alors aussí que la
t.erreur se répandit dans Londres, et oétermina la demanc1,...
J'un sauf-eonouit pour traitcr oe la paix. (Clarenuon, lhs-
toire de la Réúellioll, tomo 5, pago 120.: : Note" de l'Frf¡'l.)




loa HISTOIRE
mill~s de Londres. Le Roí, en personne, s'y
trouva, ou du moillS n'en était pas tres-élóigné.
Voici, en peu de mots, l'occasion et les détails
de ce combato


Le parlement, témoignant une grande douleur
de eeHe guerre et de ce carnage dénaturé, avait
décidé que, pour sauver le royaume de la ruine
qui le lnena~ait, et pour parvenir a délivrer 1'11'-
lande, il serait fait au Roi alors a Colebrooke, ~l
quinze milles de Londres, une pétition pour de-
mander un accolllmodelnent, et qu'el1e lui serait
présentée par les comtes de Northumherland et
de Pembroke et quatre membres de la cbambre
des communes , le lord Waininan , M. Pierpoint,
sir John Evelyn et sir John Ipsley. On envoya
d'abord sir Peter Killigrew demander un sauf-
conduit; mais le Roi refusa d'achnettre sir John
Evelyn, qu'il avait déclaré traitre le jour précé-
llent. eette exception déplut extremement an par-
ment, et iI vota que c'était une violation de son
privilége et un refus formel du Roi. Cependant
tel était son désir de s'accornmoder que la péti-
tion fut envoyée par "les cinq autres, sir JOh11
Evelyn ayant consenti de hon ereur a ce qu'on le
laissat de coté (1).


(1) Les deuxchambres réunies en conférence, ayantdélibé,ré
sur la question de sav~ir si le sauf-conduÍt seraÍt accepté avec
cettc restriction, ,·oterent pour la négative, et envoyerent




DU LOl\G PARL.El\lEl\'f. 101


Le Roi sembla recevoir la pétition avec heau-
coup de bienveillal1ce et y 6t une réponse favora-


sir Henri Vane et lord Brooke informer le conseil commun de
la cité, de la condition qu' elles regardaient, de la part du Roí,
comme un refus de traiter, et de leur r~solution a cet égard;
ils devaíent demander, en meme temps, J'assistance de la
cité. Le discours de sir Henri Vane, an conseil commun ,
est dal1s le ton ordinaire des discours tenus au parlement ;
mais on voit que lord Brooke a jugé a propos de descendre
a un ton infiniment plus populaire, et en meme temps
moins simple; il veut exciter les habitans de la cité a mar-
cher "ers l'armée du comte d'Essex qui doit sortir le lende-
rnain de Londres; ceignez, leur dit-il, les reins de 1)ot1'('
couragc,; puis iIleur parle du sucd~s de leurs troupes a Edge-
hill, oh, dit-il, elles ont tué deux mille hommes a 1'ennemi,
et n' en ont perdu que cent; « a moins, dit-il , que vous nf'
(( vouliez compter les femmes, les enfans, les charretíers et
« les chiens, car les gens du Roí ont tué les chiens et tont;
« alors, ajoutc-t-il , cela ferait deux cents. )) Pllis illes COH-
jure, lorsqu'ils entendront le lenaemain battre le tambon .. ,
de ne pas dire: II J e ne suis pas de la milice, etceci, el.
II cela, et l'autre, etc. )) eette derniere partie du discours, et
quelques autres passages donneraient lieu de croire que les
commissaires n'avaient pas tronvé les dispositiollS de la cite'
aussi belliqueuses qu'ils les auraient désirées. En eifet, le len-
demain gnovembre, les chambres se déciderent a envoyer an
Roí lenr pétition sans sir John Evelyn, et le meme jour elles
passererit une ordonnance portant que tous les apprentis qui
s'engageraient dans le service rnilitaire, seraient, par cela
seu1, déliés de leur engagement avec leurs maltres , et que
les maltl'cs scraieut dédommagés sur les fonds publics. (Hi ... -
fOú'e jlarlenu:nlairc, tomo 3, col. 5.) Les habitans de la cité




102 HISTOIH E


hle, pl'cnant Dieu a témoin, par un grand nombre
de protestations, de la tendre compassion qu'il
ressentait ponr les plaies de son peuple et du
désir extreme qu'il éprouvait d'arriver a une
prompte paix, assurant que, poury parvenir, en
quelqne lieu qu"il se trouvat a peu de distance de
IJondres, il consentirait volontiers a recevoir
toutes les propositions de paix qui lui seraient
faites, et a traiter avec le parlement.


Aussitot que les membres du parlement eurent
rapporté cette réponse, le Roi, selon toutes les
relations (1), tit avancer son artil1erie et plu-


n'en fournirent pas moins a l'arrnée de tres-braves soldats j
mais quand le danger s'approchait de leurs biens, de leurs
femmes et leurs en fans , ils hésitaient. Cette disposition était
déja bien connue, car lord Brooke, dont le principal objet
est de les engager a sortir de Londres avec le comte d'Essex,
qui le regardera, dit-il, comme unefaveur, leur dit: le C'est
tI une "érité reconnue par tous les soldats, que vous
n devez tellir le danger aussi éloigné que vous le pourrez ,
« qu'il ne faut pas le laisser venir a vos portes, que vous ne
.. devez pas songer a combattre au mílieu des soupirs, des
t, larmes, sous les yeux et dans les embarras que vous don-
{( neront vos femmes et vos enfans. " (Note de tÉditeur.)


(r) Lorsque, le samedi 12 novembre au matin, la réponse
du Roi eut été lue a la chambre des lords, le comte d'Essex
se leva et demanda les ordres du parlement sur la couduite
qu'il a\'ait a tenil', faisant observer que s'il se portait en
avant, cela pourrait etre regardé comme un acle d'hosli-
Jité, ct quc s'il négli3eait (pelqn"tm des mouvemens néces-




DU LONG PARLE~IENT. 103


sieurs corps de cavalerie qui, traversant la ville
de Colebrooke, se dirigercnt vers Londres, et, pre-


saires, 011 pourrait l'accuser de mollesse et de négligence.
La chambre décida, avec I'agrément des ~ommunes, qu'elle
écrirait au Roi pour demander une suspension d'armes; et ,
en attendant la réponse, il fut enjointau comte d'Essex de
s'abstenir de tout acte d'hostilité. On chargea sir Peter Kil-
Jigrew de porter la leUre au Roi; et iI se mit en route sur-Ie-
champ; mais, en arrivant a Brentford, il trouva le combat
engagé, et ne put passer. 11 est probable qu'instruít de la
demande qu'oll venait luí faire, et pour la prévenir,
Charles ayait haté son anaque. Le mauvais succCs qu'el1c
eut pour lui, el le ressentiment général qu'elle excita le
porterent a recourir ensuite, ponr se justifier, a une ruse
maladroite; le 14, la chambre des lords re~ut de luí une
leltre datée du 12 au matín, dans laquelle il disait qu'ayant
appris, la veine an soir, aussitot apres le départ des eom-
missaires du parlement·, que le eornte d'Essex avait faít
sortir ses troupes de Londres, et les avaít fait avancer vers
lui, ee dont il n'avait été informé auparavant, ni par les
eorn~issaires, ni par aueune antre voie, il se eroY:lit dans
la nécessité de marcher sur Brel1tford, ou il altendrait les
réponses du parlemcllt relativement a la paix qu'il désirait
autant que jamais.


On voit dans la réponse du parlement a eette lettre que
I'ordre avait été donné avant }'envoi des eommissaires, et
exécuté avant lenr rctour. (¡lislaire parlementaire, tomo 3,
col. 12 et 14. ) Clarendon prélend qu'en effet un nornmé
White, atlaché a la maison du Roí, avait été dépeché avec
cette lettre au moment de la marche du Roí sur Brentford,
mais que le eomle d'Essex, auquel iI s'était adressé, l'avait
tres-mal l'CS;U, que les challlbres l'avaient fait mettre en




104 HISTO IH E


uallt avantagc d'un grand brouillal'd qui s'éLait
élevé ce venelredi soir, marcherent a Brentford
et tomberent sur les troupes du parlement qui
s'y trouvaient cautonnées. C'était le régiment du
colonel Hollis, fort maltraité a la derniere action,
Inais composé el'hommes courageuxqui s'étaient
tres-bien battus. Les troupes du Roi en tuerent
un grand nombre et les auraient probablement
cxterminés tous, si les régimens du lord Brooke
et du colouel Hampden, logés a peu de distance,
ll'étaient venus en hate a leur secours. Les deux.
réginwus soutinrent contre le Roí un granel et


prison, et que quelques uns nH~me avaient varIé de le fairc
pendre comme espion. Ce récit est dénué de toute vrai-
semblance puisque, certainement, si le comted' Essex et le
parlement eussent reyu celte lettr/e le 12, ils ne se fusseut
pas laissé surprendre a Brentford; mais il est possible en
effet, si White apporta cette lettre le 13 , qu'il ait été fort
maltraité. D'ailleurs Clarendon n'est pas ici d'accord avec
la lettre du Roí sur le lllotif de cette expédition. « Ce fut,
dit-il, le prince Robert, qui, comptant sur la terreur de son
nom et sur ce qu'on lui disait du nombreux parti que le
Roi avait dans Londres, s'étaitavancé sans ordres, per-
suadé qu'il allait tou't terminer d'un coup; et le Roi rece-
vant avis de sa marche, avait été obligé de marcher de son
coté pour le soutenir et empecher qu'on ne lui coupat la
retraite. » Clahndo~ regarde cette affaire comme fatal e au
parti du Roi, surtout en ce qu' elle révéla le petit nombre
de ses troupes que la terreur avait fort grossies. ( Histo¡;'c
de la Réóellio/l, tom .. 5, pago 127- 13 1 .) (Note de l' Éditeur. )


/




DU LONG PAHLEMENT.
sanglant combat, ou il y eut heaucoup d'hommes
tués et beaucoup de prisonniers. Les deux partis,
de meme qu'apres la bataille de Keynton, se pro-
clamerent tousdeux vainqueurs (1). Les nouvelles
de cette rencontre inattendue parvinrent bientot
a Londres, ou, d'ailleurs, on avait fort bien en-
tendll la canonnade (2).


Le lord-général Essex, qui siégeait alors a
'Vestminster dans la chambre des pairs, monta
aussitot a cheval, et avec tout ce qu'il put ras-
sembler de monde en si peu de temps, partit
pour al1er dégager ses régimeus (5); lnais la uuit


(1) SeIon Whitelocke cepcndant les troupes parlemen-
taires quitterent Brenlford a l'approche de la nuit, et ]ais-
scrent le Roi en possession de la vilIe. (Note de l' Editeur. )


(2) « La cité, dit Whitelocke, fut remplie , a cette nou-
velle, de trouhle et d' opiniolls diverses; mais le maire el
les olliciers de milicc nornmés par le parlement agirent
avec tant d'ardeur, que la cité se résoluta ce qu'on désirait
d'elle. )) (Mémozi'es de Whitelocke, pago 62. )


( Note de l' Éditeur. )
(3) Les milices de Londres marcherent sous le commande-


ment du major~général Skippon, C[ui, en chemin, leur adres-
sait continuellement ces paroles et d'autres scmblables : (( AI-
« lons, mes enfans, mes hraves enfans , prions de hon creur et
« battons-nous de bon creur; je cqurrai les mcrnes hasards
({ que vous tous. Souvenez-vous que c' est ici la cause de
« Dieu, et qu'il s'agit de défendre vos femmes , vos enfans
« el v'ous-mcmes. AIIons, mes hons et braves enfans, priez de
., hOH CO;l1l' el. combattez de hOll erenl', ct Dieu nous hénira. \)




lG6 HISTOIRE
avait séparé les conlbattans et le Roi s"était retiré
dans une position avantageuse. Pendant toute la


Whitelocke vante le merveiI1eux effet de cctte harangue,
et de la maniere singuliere dont Skippon parlait aux sol-
dats tout en marchant, s'adressant tantot a une compagnie,
tantot a une autre. Cependailt, les troupes a qui Skippon
parlait ainsi , ne se montrerent pas d'abord bien aguerries.
Comme elles étaient en bataille a Turnham-Green , en face
de }'armée du Roi, soit que les troupes royales fissent quel-
que mouvement, ou par toute autre cause, iI arriva que deux
oa trois cents personnes qui étaient "enues de Londres pour
assister a l'événement, prirent le galop pour retourner a la
ville, de toute la vitesse de leurs chevaux; ce qui jeta un
grand découragement, dit 'Vhitelocke, dans l'armée parle-
mentaire, dont beaucoup de soldats furent pres de quitter
leurs drapeaux pour retourner aussi dans leurs maisons ;
mais les bonnes ménageres de la cité, ajoute-t..;il , pleines de
soins pour leurs maris, envoyerent a Turnham-Green beau-
coup de charettes chargées de vivres, de vin et d'autres
bonnes dIoses, ce qui rafraichit et réjouit fort les soldats,
d'autant qu'ils apprirent que le Roi et son armée se reti-
raient. (lrhitelocke, pago 63.)


Whitelocke, dans cette occasion, accuse lord Essex,
comme al' ordinaire, d'indécision dans ses desseins, et aussi
d'avoir pris le plus mauvais parti, toujours par les conscils de
Dalbier, qui se rangea, dans la suite, du parti du Roí. Oa
voit, dans toutes les relations, quclles méfiances régnaient
entre les partisans de ]a cause parlementaire, et COllllllent les
scissions , qui se prononcerent plus fortement dans la suite ,
comrnenpient des 10rs a se faire entrevoir. Whitc]ocke ac-
cuse aussi les soldats de fortune d'avoÍr détourné Essex de
poursuivre immédiatcment le HoÍ dans cctte dcrnierc rc-




DU LONG PARLEMENT.
durée de cette nuit, il sortit de Londres des troupes
se dirigeant vers Brentford, et tous les lords et
gentilshommes aUachés a l'armée s'y trouverent
réunis le dimanche matin, 14 novembl'e; en sorte
qu'on se voyait en état d'écraser une armée bien
plus considérable que ne l'était cene du Roi; iI
était d'ailleurs entouré de partout, et heaucoup
de gens conc;(urent alors une grande espérance
de yoir enfin arriver le terme de cette funeste
guerre; Mais Dieu n'avait pas encore apaisé sa
colere contre nous. Un fatal passage fut ouvert au
Roi. Trois mille des soldats du parlement, , alors
a Kingston sur la Tamise, a environ dix milles
de Londres, avaient rC(fu l' ordre de quitter Kings-
ton, de marcher par le con1té de Surr'ey, aussi
di1igemment qu'ils le pourraient, et de traverser
le pont et la ville de Londres, pour aller la cou-
vrir du coté de Brentford et empecher l'ennenli


traite, disant qu'il était trop hasardeux de suivre l'ennemi,
ce et que le parlement avait assez fait, pour son honneur et
(( sa sureté, d'obliger le Roí a la retraite. )l Le parti purí ..
tain avait une grande aversion pour ces soldats de fortune
ou de profession, a quileur expérience dans la guerre
avait donné d'abord beaucoup d'importance. Lesroyalistes
avouerent dépuis, selon Whitelocke, que si on les eÜl alors
attaqués, ilsn'avaientpasde baIles pourtenirunquartd'heure.
c< Ce fut la la cause de leur retraite, et Dieu, dit White-
Jor,ke, eut (meore a discuter avec eux. J) lbid., pago 63.)


(Note de I'Ed¡'tcur.)




108 HISTOIHE


d'y arriver. La raison que le général donna en-
suite de cet ordre, fut la crainte de n'etre pas
assezfort pour empecher l'ennemi de s'approcher
de Londres, ne pouvant savoir d'avance avec cer-
titude s'illui serait possible de réunir autant de
troupes qu'il s'en était trouvé avant le jour. Mais
ce qui en arriva, c'est que le Roi fit sa retraite
a travers Kingston, et, laissant quelque cava-
lerie pour faire face a ses ennemis, conduisit son
infanterie et son artillerie sur le pont, ou il les
luit en hataille, ce qui luí donna le temps de
piller les environs et de se retirer saín et sauf a
Oxford, ou il avait intention de prendre ses quar-
tiers d'hiver.


eette action du Roi commenc;a a oter au parle-
Juent toute espérance de réussir a ríen par les
négociátiollS, et il fut résolu que le lord-général"
poursuivrait les troupes du Roi avec toute la di-
1 igence possible et les irai t a ttaquer dans les en v i-
ron8 d'Oxford et de Reading; car on apportait
chaque jour des 110uvelles de l'activité de ses par-
tisans, sous la conduite du prince Robert et de
quelques autres, a piller tous les lieux circon-
voisins (1); et la cité de Londres, pour encourager


(1) Le prince Robert surtout faisait un tres-grand mal
aux parlementaires. A Cirencester, il passa au fil de l'épée
uu grand nombre de ICllrs soldats, entre autrcs , tout le ré-
giment du cornte de Stamford , 6t onze cents prisollnier.; ,




DU LONG PAllLEMENT.


le parlement par des offres volontaires de ser-
vice, lui adressa une pétition ou elle l'engageait
( a ne pas s'occuper davantage de chercher tUl


et prit aussi les magasins du comté. Les prisonniers furent
conduits en triomphe a Oxford, presque nus, attachés deux
a deux, et chassés en avant comme des chiens. Le Roi et les
gentilshommes qui l' entouraient, les regardaient passer avec
une grande indifférence, quelques uns meme , peut-etre,
avec un sourire. Parmi ces prisonniers se trouvait un soldat
de bene tailIe et d'une peau trcs-h/anche, que faisait res-
sortir le sang dont i! était couvert. Comme ses Iarges bles-
sures le mettaient ahsolument hors d'état de marcher, 011.
I'avait placé a cru sur un cheval. 11 s'y tenait droit et d'un
air qui n'avait rien d'abaUu. Au momentou il passaitpres du
Roi, une femme du l)euple lui cria : « Ah! gueux de traitre !
II te voila servi corome tu le mérites. » Le soldat ne lui ré-
pondít que IJar ces mots : Méchante coquine! et, au meme
instant, il tomba mort presque aux pieds du Roí. (lJf(!moires
de Whitelocke, pago 64.) William LilIy, qui rapporte le
mcme fait, ajoute que quelques gentilshommes, choqués de
la durefé que le Roí avaít montrée dans cette occasion, (luit-
terent l'armée pour se retirer, soit chez eux, soit a Londres.
Quant au pillage de Cirencester, iI porta également sur les
amis et les ennemis. Plusieurs citoyens qui se trouvaÍent en
prison, eomme royalistes, furent, en meme temps, dit
C/arendon, délivrés et ruinés, entre autres sir J ohn PIot ,
bon jurisconsulte qui, au sortir de la prison, rentrant dans
sa maÍson, la trouva remplie de soldats, mais y trouya aussi,
de moins, 1200 liv. sterl., dont il ne put jamais rien reeou-
Her. (Histoire de la Rébellion, tomo 5, pag. 319')


(Note de l'Éditeul'.)




J 10 HISTOIRE


« accommodeluent (J), le Roí étant tellement en-
ce vahi par les mauvais conseils, qu'il ne ferait
« que les trompero On savait que ses forces


(J) On ne trouve nulle part cette pétition au nom de la
cité de Londres, en tant que représcntée par le lord-maire
et le conseil commun; mais une pétition qui paralt etre
celle dont parle ici May, fut en effet présentée le 13 no-
vembre par un marchand nommé Shute, au nom, dit-iI,
de plusieurs milliers de citoyens composant la partie pieuse
(god!T party) et active de la cité. Sa pétition, relatée dans
]e journal de la chambre des communes, contient a peu
pres ce que rapporte May, et beaucoup d'autres choses en-
eore; elle est extremement longue, et tout-a-fait dans l'es-
prit le plus populaire du temps. On y parle de trah}sons ,
de ;négligences coupables; on s'y plaint de'la chambre des
Jords, des officiers de l'armée, dc ce qu'on n'a pas encore
indiqué de jour d'expiation pour le sang des martyrs, versé
sous la reine Marie, de ce qu'on ne respecte pas assez le di-
manche, et de ce qu'on n'a pas encore fait hniler, par la
main du bourreau, le livre qui enjoint de consacrer ce jour
a des divertissemens profanes (Book of Sports) , etc. , ctc ..
Shute re~ut en effet des remerdmens ]Jour sa pétition eL
ses offres (Histoire parlementaire, tomo 3, col. 12), et OH
le voit ensuite reparaltre presque tous les jours a la barre
de la chambre des communes, toujours accompagné d'ull
certain nombre de citoyens qui paraissent former son cor-
tége, car lui seul est nommé. e'est toujours au nom du
parti pieux et actif qu'il vient apporter des demandes ou
des plaintes , ou meme des conseils. Il est hahituellemenL
remercié par la chambre; on le voit cependant une fois re-
pris de l'insolence de ses expressions, et admonesté de se
conduire plus resl)ectueusement. (llistoú'c l)(/rl('me7l(ai1'i~,




DU LONG PARLEMENT. 1 1 1


c( étaient peu considérables, et si Son Excellence
c( voulait le suivre et tomber sur lni san s délai,
(( pour ne pas lui laisser le temps de faire arri-
c( ver des troupes étrangeres, les citoyens étaient
« disposés, comme par le passé '. a sacrifier de
« 10n ereur leur v ie et leur fortune pour seconder
« le parlement ( 1). »


tomo 3, col. 38.) Au total, Shute paralt etre un de ces ins-
trumens employés par le parti dominant dans la chambre,
pour provoquer du dehors les mesures violentes auxqueIles
on voulait que le parlement parutpoussé par levreu puhlic.
(Note de l'Editeur.)


(1) La luLte entre le parti de la paix et celui de la guerre
commence a se manifester a cette époque avec une grande
vivacité, ainsi que les efforts de ce dernier pour remonter
et échauffer les esprits. Shute vient le 9 décembre a la barre,
a la tete de ses acolytes ordinaires, se plaindre de ce que les
malintentionnés les accusent de faire des pétitioris contre
la paix, ce qui est assurément hien loin de Ieur pensée, cal'
ils n'ont d'autre intention que d'ohtenir une paix honora-
hle el sure; en meme lemps iI dénonce une pétition pour ]a
paix préparée par ces memes malintentionnés,pour donner an
Roi le temps de rassemhler ses forces et de se préparer a la
guerreo En eITet, le 19 du meme mois fut présentée aux
deux chambres une pétition d'un grand nomhre de citoyens
et d'habitans de Londres, Southwark et lieux adjacens, sup-
pIiant le parlement de prendre en considération les maux
de la guerre civil e , les désordres apportés dans la religion
par les papistes et les sectaires, et de fermer I'oreillc aux
suggestions de ceux qui , sous quelque prétexte que ce soit,
cherchent a fomenter la guerreo Alors aussi fut présentée,




1 r 2 HISTOIRE
La cité fut remerciée de sa pétition et de sa


protestation, et 1'on donna au générall'ordre d'a-
vancer; bien que la saison de l'année ne fut pas
tres-favorable a la marche d'une si grande armée,
il se montra tres-empressé a obéir au parlelnent.
Onjugea que ce qu'il y avait de mieux a faire, c'é-
tait de partager l'armée en plusieurs corps, qu'on
enverrait en divers lieux, CODlnle Buckingham ,
Marlow ,Reading, etc., pourempecher lesennelnis
de piller le pays jusqu'a ce que 1'armée fl\t en
état de quitter Windsor OU elle devait passer
l'hiver, pour Dlarcher contre le Roi. Mais iI ar-
riva, soit en raison du mauvais temps gui sur-


all nom de la cité, une pétition du conseil commun, dans
laquelle était incluse une autre pétition adressée au Roi, que
le conseil commun soumettait a fapprohation du parlement.
Il protestait contre la pétition pour la paix, quoique celle
qu'il adressait au Roi eÜt le meme objeto Mais remontrer au
Roí la nécessité de la paix, ou la remontrer au par1ernent,
ce n'était pas la meme chose. Aussi la _pétition du conseíl
cornrnun fut-elle approuvée et l'autre repoussée; on nomma
un comité ponr en rechercher les fautelll's. Ce fut des 10rs
une hase d'accusation, et les signataires de la pétition pour
13 paix furent regardés comme ennemis du parlement et
traités en conséquence. .


Dans le meme temps cependant, il arriva au par1ement,
des diverses parties du royaume, des pétitions demandant
a grands cris ]a paix; il ne paralt pas qu' elles aient été trai-
tées aussi séverement que cel1es de Londres. (llistOl're par-
lementazi'e, tomo 3, col. ~3 et 46.) (Note de l'Éditellr.)




DU LONG PAl\LEMENT. II3
venait sans cesse, soit par défaut d'argent (1) ou
(les objets nécessaires, que le général et son corps


(1) On revoit en effet continueIlement Shute se présentant
a la barre pour entretenÍr la chambre des moyens d'avoir de
l'argent; mais, pour sa part, il apporte moins des offres que
des conseils, des pIans de réforme, des plaintes sur ce que
p,lusieurs de ceux qui ont souscrit pour le maintien de l'ar-
mée n'ont pas encore apporté le montant de leurs souscrip-
tions; iI prie surtout le parlement d'avoir soin que les
charges ne tombent pas entierement sur le parti pieux,
mais que les malintentionnés en portent aussi leur parto
Il parait que les besoins d'argellt étaient grands a cette
époque. On fit, le 31 décembre, a la chambre des lords,
une nouvclle souscription pour la guerre; chaque lord fut
nominativement requis de souscrire ainsi que les personnes
attachées a la chambre; la chambre des communes fut
invitéea en faire autant, et informée que la cité avait
paru disposée a ouvrir des souscriptions si le parlement lui
en donnait l'exemple. La cité fut aussi invitée a srtivre cet
exemple avec toute la promptitude possihle. On retrouve,
a la da.te du 24 avril, une lettre du comte d'Essex au par-
lement ou il se plaint de ce que l'armée n'est pas payée :
el Nous qui VOUS servons, dit-il, 1l0US sommes dans une
dure situation, nous perdons nos fortunes, tandis que ceux
qui sont les plus violens contre le parIement voient léurs
hiens protégés; mais si I'armée est bien payée, peu importe;
si.ellenel'estpas, il fautqu'eIle se dissolve.)) A la suite de
cette lettre les communes voterent diverses mesures pour
obtenir de nouveau de l'argent de la cité; les lords consen-
tirent a quelques unes, mais se refuserent ,a la proposition
d'obliger les membres des deux chambres a s'engager per-
sonnellcment l)our la sureté des sommes qu'on voulait em-


2. 8




HISTOIRE
d'armée ne se mirent pas en marche avant le prin.-
temps. La premiere opération fut alors de mettre
le siége devant Reading qui était défendu par une
garnison royale forte de trois mille soldats et par
vingt pie ces de canon. Le comte en fit le siége le
25 avril 1645, avec une arnlée d'environ seize
nlille hommes d'infanterie et trois mille chevaux.


Nous laisserons le lord-général devant Reading
avec S011 armée, et expliquerons une des princi-
pales raisons qui l'avaient elupeché de se luettre
plus tot en mouvement. On avait long-temps dé-
baUu les bases d'une autre négociation que le
})arlement avait désiré entamer avec le Roi ( I )


prunter; ils ajournerent aussi la proposition de mettre le
comte d'Essex en possession des hiens de lord Capell, par
forme de dédommagement. (Histoire parlementaire, t. 3,
col. 22-46 et 1 1 l. >


(1) Ce fut pendant ce temp5 que le roí re~ut a Oxford,
le 2 janvier, la pétition de la cité de Londres, soumise au
parlement le 19 décembre préeédent. Les pé titionnai res ,
arrivés a deux heures a Oxford, furent admis vers cinq
heures ehez le Roi , qui, lorsqu'ils eurent lu tout haut leur
pétition, leur répondit: « Qu"il était bien aise de eette oeea-
sion de faire connaltre a la cité plusieurs choses qu'il avait
déja faít imprimer, mais dont iI croyait bien qu'on déro-
hait la connaissanee au peuple de la cité; qu'il était tenté
de croire que les pétitionnaires lui promettaient plus qu'ils
ne pouvaient tenir quand ils se faisaient fort de le défendre
contre les émeutes, car , d' apres ce qu'il avait OUl dire) ils
étaient hors d' état' de maintenir la paix. entre eux. » JI leu,"




DU LONG PARLEMENT.
et qui demeura sans résultat. Les propositions
furent rédigées par le parlement et envoyées él


demanda ensuite ce s'ils avaient aussi adressé des pétitions
aux chambres pour Ieur rappeler leurs devoirs envers luí. ))
I.es pétitionnaires s'excuserent de répondre a cette ques-
tion, attendu qu'ils n'étaient que simples messagers. Deux
jours apres, le Roi les 6t revenir, leur remit sa réponse
écrite, et Ieur demanda quelIe était l'assemblée la plus nom-
breuse d'un conseil comrnun ou d'un common-hall; on lui
répondit que c'était le common-lzall: alors il ordonna expres-
sément au parlement de le convoquer et d'y lire sa réponsc;
puis, faisant rappeler les pétitionnaires qui avaient déja re~u


leurcongé, iI leur dit e< qu'il enverrait dans I'assemblée de la
cité des gens a lui poul' s'inforrner et inforlller la cité de la
vérité des choses; qu'il espérait bien que le conseil les pro-
tégerait puisqu'il protégeait ses ennemis, et qu'il verrait
par-la j usqu'a quel point on était en état de le défendre
lui-meme. JI La réponse du Roí fut mise entre les mains
d'un nommé Heron attaché a la suite du Roi, . et qu'il
chargea d'alIer a Londres avec les pétitionnaires pour
veilIer-a l'exécution de ses ordres. Au jour indiqué pour le
common-hall, le conseil commun demanda au parlement
d'y envoyer des membres des deux chambres pour répondre
aux accusations contenues dans la réponse du Roi. M. He-
ron, requis de la lire sur les Hustings, s'y refusa d'abord,
effrayé probablement et de ce qu'iI avait a dire, et de la
vue des gens devant lesquels il avait a le dire : iI prétendit
qu'il avait été seulement chargé de remettre la lettre du Roí
entre les mains du lord maire; mais on fit observer que, si
cela était, iI n'ei\t pas été nécessaire d'assembler le common-
hall. Il s'excusa aussi sur la faiblesse de sa voix; mais, dit
le rapport faít a la chambre des communes d'ou est tirée


8.




116 HlSTOIRE


OXfOl'd le 51 janvier 164.5 (1) par quatre lort.1s
et huit membres des COliuTIUneS; les comtes de


,cette relation, le conseil commun le jugea plus propre que
personne a remplir cet office, el il fut obligé de lire la leúre
duRoi; mais ille fitsi bas qu'on la lui fit relireune seconde fois
dan s la chambre de l'horloge (clock house), pour ceux qui n' a-
vaient pu l'entendre la premiere. La, dit le rapport, un petit
nombre de personnes placées pres de la porteessayerent
d'applaudir; mais, n'étant pas soutenues, elles rentrerent
dans le silence. La réponse du Roi était longue et amere, et
contenait l'expression de tous ses griefs. Lord Manchestel'
et surtout M. Pyrri Y répondirent en détail; ce fut une
sorte de plaidoirie elevant le peuple de la cité. Apres . le
discours de M. Pym, les cris : nous vivrons el mourrons
avec eux:l s'éleverent, dit le rapport, si géné,ralement que
l'opinion contraire eut été étouffée si elle- avait essayé de
se faire e'ntendre. (Bistoire parlementaire, tomo 3, col. 49
et suiv.) (Note de l'Editeur.)


(1) Ces commissaires se rendirent a Oxford, ou ils furent
introduits par les lords. (( Chaque lord, dit Whitelocke ,
(1 en conduisait deux dans son carrosse attelé de six beaux
« chevaux, et suivi d'un grand nombre de domestiques a
(1 cheva1.)) (Mémoires de Whitelocke, })ag. 64.) CeHe re-
marque de Whitelocke, qui n'était point un homme nou-
veau aux habitudes de la c1asse éJevée, semblerait prOm"el'
qu'en raison de la simplicité affectée des presbytériens , le
luxe de la cour s'accroissait dans la meme proportion; peut-
etre son attention a des honneurs inusités ne vint-elle que
du sentiment qu'ils donnaient aux commissaires du parle-
ment de l'augmentation de leur importance. « Le comte de
Northumberland ,-dit aussi Whitelocke, lut les propositions
au Roí d'un ton grave et ferme, el le Roí l'ayantinterrompu,




DU LONG PARLEME.NT. 117


Northumberland, Pembroke, Sai'um el Holland,
lord Wainman, lord Dungarvan, sir John Hol-
lanel, sir Willianl Litton, lVI. Pierpoint, M. 'Val-
ler, M. Whitelocke, lVr. Winhood. Les proposi-
tions étaient :


l°. Que le Roi accepterait les bilIs préparés
par la chamhre ;


2°. Qu'il passerait un bill pour le rétahlis-
sement des priviléges et des lihertés du parle-
ment;


5°. Qu'il mettrait en jugement les délinquans
accusés par les chambres depuÍs le lUOÍS de jan-
vierdernier; .


4°. Qu'ildéchargerait d'accusation les six lllern-
bres déja. Jnentionnés;


5°. Qu'il rétablirait dans leurs· fonctions tous
les juges, et offieiers publies déplaeés;


6°. Qu'il aecepterait un hill pour le paiement
des eharges de l'État;


7°. Un hill pour un aete d'oubli;
80 • Un aete de pardon général sans exeeptions;
9°. Qll'il y aurait une suspension d'arlnes de


quatorze jours pour débattre ces propositiol1s.
I.le Roi, sans refuser entierement ces proposi-


illui dit sechement : rotre Majesté 'lJeut-elle bien me per-
mettre de poursllivre / Le Roí répondit: oui, oui, et le
comle acheva sa lectufe. » (¡bid.)


(Note dc l'EditClll'. )




118 HISTOIRE
tions, au hout d'une senlaine, envoya les commis-
saires chargés de six propositions faites par lui
aux chambres:


1 0. Qu' on ] ui remettrait entre les mains son
revenu ~ ses magasins, ses villes, forfs et vais-
seaux;


2°. Que tous les ordres et ordonnances du par-
lement, auxquels il n'avait pas donné son con-
sentement, seraient révoqués;


5°. Le Roi devait renoncer a tout pouvoir de
procéder contre ses sujets par voie d'amende et
d'emprisonnement;


4°. Il consentait a l'exécution des lois contre
les papistes, a condition que la liturgie serait
confirmée.
5~. Ceux qui, 10rs de la conclusion du traité,


seraient e:lceptés du pardon général, ne pour-
raient etre jugés que par leurs pairs.


6°. Il devait y avoir cessation d'armes pendant
la durée des négociations.


Lorsque ces propositions arriverent aux cham-
bres, plusieurs furent d'ahord d'avis de n'y pas
répondre. Cependant, a la fin, pour montrer du
respect au Roi, on discuta la maniere de traiter
avec lui sur les propositions faites des deux parts
et sur une cessation d'armes ou le licenciement
des troupes. Il serait sans intéret de rapporter
ici les linlitations et restrictions qu'on jugea a
propos d'apporter .au pouvóir de ceux qu'on de-




DU LONG PARLEl\'IENT. 119


vait charger de la négociation. Enfin, le 20 mars,
le comte de Northumberland (1), sir John Hol-
Jand, sir William Armine ~ M. Pierpoint, et
M. Whitelocke, furent envoyés a Oxforden qualité
de négociateurs. On avait d'abord désigné le lord
Saypour en etre; mais le Roi le' refusa comme
il avait refusé précédelnment sir John Evelyn, et
par les lnemeS motifs. Le parlement, hien qu'é-
galement mécontent de ce nouveau refus, n'en
poursuivit pas moins sa marche. Ces négociations


(1) Le comte de Northumberland se montra a Oxford
cl'une manier~ trcs-splenclide; il Y 6t venir sa maison , sa
vaisselle, son vin : ses provisions de bouche lui étaient ap-
l,ortées de Londres. Les autres commissaires vécurenl tout
le temps chez lui, et, dit Whitelocke, C( avec tout l'éclat
ee ,eL la magnificellce ordinaires au comte de NorLhumber-
.. land, et que ne surpassait guere aucun sujeto » Proba-
hlement ces hahitudes d'un grand seigneur concilierent da-
vantage au comte le Roí et la cour, que ne le pouvaiellt
faire les manieres plus simples des memhres des COIllmunes;
car on voit que, durant tout le temps de ces inutiles négo-
ciations, les relations a Oxford furent extremement ami-
cales; les gens de la COllr étaient habitueIlement a la table
des commissaires , ou la bonne intelligence régnait dans les
enlretiens, et se manifestait dans la conduite des hotes et
des convives. Le Roí les traitait fort bien, et ti leur 6t merne
quelquefois l'honneur, dit Whitelocke , d'accepter de lellr
vin et de leurs provísions, que le comte luí envoyait Iors-
qu'il recevait quelque chose d'extraordinaire.» (Mémoires
de Whitelocke, page64.) (Note del'Edileur.)




12U HISTOIRE


furent vaines (1). Les demandes fUrent jugées des
deux cotés si exorbitantes qu'il parut impossible


(1) Les commissaires du parlement, dit Whitelocke, flrent,
dan s ceUe négociation, une triste expérience de l'un des dé-
fautsdu Roí, qui ont le plus éontribué a gater ses afraires.
Il avait plus de conflance dans le jugement des autres que
dans le sien propre, quoique le sien vahit souvent beaucoup
mieux. Les commissaires demeuraient souvent avec le Roí
jusqu'au milieu de la nuit , débaUant avec lui les divers ar-
tieles du traité. Sur l'un des points les plus essentiels, ils
parvinrent a obtenir du Roi la concession qu'ils désiraient.
Le Roí dit qu'il était pleinement convaincu , et promit de
Ieur donner sa réponse par écrit, selon Ieur désir; mais
comme íI était plus de minui t, il dit qu'il la ferait rédiger
le lendemain matin d'apres les hases convenues, et leu'r or-
donna de venir la chercher. Les commissa~res rentrerent
chez eux p~eins de honnes espérances, carcette réponse devait
faciliter heaucoup le succes du traité, et, a l'heure fixée,
ils se rendiren't le lendemain chez le Roi. Mais, au líeu de
la réponsé convenue , le Roi leur remit un papier contenant
une décision contraire a celle de ]a veiI1e, et· qui devait
amener la rupture des négociations. lis insisterent aupres
de Sa Majesté , réc1amant sa parole royale, et luí représen-
terent les tristes conséquences que devait produire la note
qu'il Jeur remettait; mais le Roi Ieilr dit qu'il avait changé
d'avis, que su derniere réponse était définitive, et ils ne
purent en ohtenir aucune autre, ce qui leur causa un ,'if
chagrin. Quelques uns des amis du Roi , questionnés par les
commissaires sur ceUe brusque transition , Ieur dirent qu'au
sortir de la dernieré conférence, le Roí, en rentrant chez
lui, avait informé quelques personnes de su garde-robe, de
la réponse ql1'il vena.it de prometl.re, et que celles-ci, ne




DU LONG P ARLEi\1E~T. 121
qu'on en vint jamais a s'accorder. Je ne déciderai
point a qui en appartint la faute. Mais le par-
leluent, apres plusieurs lnessages 'cntre Londres
et Oxford (1), donna enfin a ses cOlnmissaires
l'ordre de revenir. lIs arriverent a Londres le 17
avril (2), et ce fut alors que, conime on l'a dit,


vouIant pas du trailé qui devait en résultei', n'avaient cessé
de tourmentei' te Rói, jusqu'a. ce qu'elles eussent obtenu le
changement de ses résoJutions. (Mémoires de Whitelocke ,
pag.65.) (Notedel'Editeur.)


(1) Ce qui détermina le rappel des commissaires , ce fu t
un message du Roí, dans JequeI iI disait, entre autres
cl1oses, (( qu'aussitot que lui et les deux chambres seraient
a l'abri des émeutes, ce qui ne pouvait arriver a moins que
le parlement ne s'ajournat au moins a vingt mílles de Lon-
dres, iI consentirait a licencier son armée et a relourner
au parlement. )) Les commissaires firent ce qu'ils purent
])our l' empckher d' envoyer ce message, lui représentant que
c'était la rupture des négociations, puisque le parlement ne
consentirait eertainement jamais a s'éloigner de Londres;
ils ne' purent rien obtenir. Le message fut done envoyé , et
l'effet tel qu'on l'avait prévu; les deux ehambres déeiderent
qu'il n'y avait pas de réponse a y faire, et rappelerent aus-
sitot leurs commissaires d'une maniere si péremptoire, qu'ils
furent obligés de partir le jour meme, quoiqu'il fut tard ,
et qu'ils ne pussent se procurer que des moyens de voyage
tres-incornmodes. (Mémoires de Whitelocke, p. 65.)(His-
taire parlementaire, tomo 3, coL 107.) (Note de [' Editeur.)


(2) Comme il arrive en temps de guerre, un séjour de
vingt jours dans le camp ennemi, l'accueil que les COffi"""
missaires avaient re!:u du Roi, et probablemcnt lellrS cf-




1.22 HISTOIRE


le lord-général se mit aussitot en marche pour
assiéger Reading.


Reading ne pouvait tenir long-temps. Le lord-


forts sinceres pour obtenir la paix, exposerent plusieurs
d' entre eux a la méfiance et aux soup~ons de leur parti. lIs
avaient été poussés a tel point contre le comte de Nor-
thumberland, que M. Martyn, membre du comité de sure-
té, avait ouvert une des lettres du comte écrite d'Oxford a
-sa femme, espérant y découvrir quelque trahisón, et qu.e,
dit Clarendon, cette insolence ne déplut pas a la chamhre.
Elle déplut cependant beaucoup au comte, si bien que le
Jendemain de son retour, J 8 avril, se trouvant avec
M. Martyn en conférence dans la chambre peinte de West-
minster, iI lui demanda des explications de ce faÍt, el
ceHes que pouvait ou voulait lui donner M. Martyn ne lui
paraissant pas suffisantes, le comte lui donna des coups de
canne en présence de plusieurs personnes. On voit dans les
journaux du parlement cette affaire traitée entre les deux
chambres, ou M. Martyn réclame, comme membre des
communes, son privilége de n'etre point bauu, et le comte
de Northumberland, comme pair, son privilége de n'avoir
point ses lettres ouvertes. Il faut qu'apres quelques discus-
sions cette affaire ait été arrangée a l'amiable, car les
journaux du parlement n'en donnent pas la conclusion.
(Histoire parlementaire, tom. 3,· col. 1 og. j


M. Marty n était, a ce qu'il paralt, partisan des mesures
expéditives; quinze jours apres ceci, un nommé Luke fut
accusé et mandé a la chambre des lords pour avoir forcé
une des écuries du Roi, et y avoir pris deux jeunes che-
vaux. II répondit au messager des lords, en lui montrant un
ordre de M. Martyn qui refusait de rendre les chevaux 1
en disant: « Nous .avons bien pris les vaisseaux el les for-




DU LONG PARLEMENT. 125
général répugnait a prendre cette ville d'assaut,
dalls la crainte de sacrifier tout ce que la ville
renfermait de personnes innocentes."Le parlement
approuva sa compassion. La ville se rendit done
a composition a son Excellence, le seizieme jour
du siége. Les paroles furent portées par le dé-
puté-gouverneur, le colonel Fielding , le gouver--
neur sir Arthur Aston, hlessé par accident peu
de temps auparavant, se trouvant hors d'état de
remplir ses fonctions. Les conditions furent douces.
Les assiégés sortirent avec armes et hagages. Ce
siége n'aurait été d'aucun avantage pour le par-
lement, sans un événement qui arriva pendant
sa courte durée, et qu'on peut aussi regarder
comme une des causes de la prompte reddition
de la ville. Un corps assez nombreux de l'armée
du Roi, composé d'infanterie et de cavalerie, le
Roi lui-nl(~me se tenant a peu de distance, vint
au secours de Reading et atta qua un des quartiers
de l'armée du parlement, posté au pont de Cau-
mam, environ a un mille de ceHe ville. Ce corps


« teresses du Roi, nous pouvons bien prendre ses chevaux
( pour l'empecher de s'en servir contre nous. )~ Il s'en
suivit une discussion assez aigre entre les deux chambres,
et dont la conclusion fut que la chambre des communes
vota que M. Martyn avait bien fait de ne pas rendre les
chevaux avant de l' en instruire, et lui donna ordre de les
garder jusqu'a nouvel ordre. (Histoire parlementairc,
tomo 3, col. 114.) (Note de l' Editeur.)




HISTOll~E
fut repoussé avec une grande perle, qui tomba
principalement sur les gens de qualité dont un
nombre considérable périt en eette oeeasion; mais
je n'ai vu rapporter nulle part le nombre et les
noms de eeux qui resterent sur le ehamp de ba-
taille.


La prise de Reading aurait pu paraitre une aug-
mentation de force pour le parti du parlement ;
nlais il en arriva autrement. On n'avait rien gagné
qu'une ville nue, et ron eut été bien heureux de
ne pas gagner pis ;mais elle était infeetée d'une
lnaladie contagieuse, qui oeeasionna ensuite une
grande mort~lité dans l'armée du parlement. De
plus, les soldats étaient méeontens , paree que,
hien que leut'" paie fut fort en arriere, on ne leu!'
permettaitpas de piller ni de tirer aueun profit
de leurs vietoires; Car le parlement, avanl que
Reading fut remis entre les mains du généraI, en
avait ratifié la eapitulation et avait promis a ses
soIdats, pour les engager a s'abstenirdu pillage,
douze sehellings par homme en sus de leur paie ;
lllais ils ne rec;urent ni la gratification, ni la paie,
l'argent eOlumenc;ant a lllanquer, et le trésor
amassé a \Vithe-Hall étant entierement épuisé.
Tandis qu'ils demeuraient a Reading pour at-
tendre de l'argent, la maladie et la mortalité
s'aeeroissaient ehaque jour, et le lord-général, par
avis de son eonseil de guerre, se disposa a dé-
camper, dans ~'inteDtion de chercher un air plus




DU LONG PARLEl\1ENT. 125
salubre. Mais le défaut" d'argent excita une ré-
volte si générale, que le général, bien qu'il eut
commencé a la réprilner avec heaucoup de cou-
rage et une juste sévérité, jugea , d'apres l'opi-
nion du conseil de guerre, que po~r éviter une
défectiol1 universelle, il était nécessaire de se
désister de son projet jusqu'a ce qu'il fut arrivé
de l'argent de Londres. Malgré cette concession,
son Excellence s' étant rendue a Causham pou!'
éviter la contagion, un grand nOlnbre de soldats
se débanderent et quitterent l'arlnée. Alors un
cours suivi d'il1fortunes commen~a a accahler le
parti du parlement, et on yit sa force décroitre
en nl(~me temps presque partout. Pendant "l'in-
tervalle des six mois qui s'étaient écoulés entre
la hataille de Keynton et les prenlÍers jours de
mars, époque de la détresse ou se trouva a Cau-
sham l'armée du comte d'Essex, la guerre avait
été soutenue avec beaucoup de chaleur et d'inl-
pétuosité dan s presque toutes les parties de l' An-
gleterre, comme OH en yerra bientot les détails
a part pour éviter toute confusion dan s le récit.
Le lord-général re~ut a eette me me époque la
110uvelle d'une grande défaite que sir Ralph Hop-
ton avait fait éprouver aux troupes du parleJJ:tent
dans le Devonshire. Il sut aussi que le prince
Maurice et le marquis de Hertford marchaient de
ce coté, pour se rendre maitres de tout l' ouest.


Je laisserai quelque temps le lord-général,




HISTOIRE


pour rapporter quelques événemens arrlves en
d'autres lieux pendant le mois de mai. Les ar-
lnées du Roi avaiellt alors les plus beBes chances
pour se mettre en possession de tout l' ouest, et
paraissaient en état d'exécnter ce projet par la
force.ouverte, sans le secours des trahisons et
des conspirations. On en tramait cependant qui ,
a la vérité, ne devinrent point funestes an par-
lement, mais aux conspirateurs, comme on le vit
a Bristol, place tres-importante, dont l'armée
du Roi désirait fort s'emparer. Ce fut au cornmen-
cement de mai 1645 qu'on y découvrit un conl-
plot, dont 1'0bjet était de livrer la ville entre les
mains du prince Robert.


La ville de Bristol était alors au pouvoir dl1
parlement, et gouvernée par le colonel N athaniel
Fiennes, second fils du vicomte Say et Sele;
mais un grand nombre des habital1s, comme il
parut par le projet, étaient contraires au par-
lernent.


Le projet était tres-sanguinaire, et aurait conté
la vie a beaucoup d'habitans de Bristol, si les
conspirateurs n'avaient été découverts et pris peu
avant le moment désigné pour l'exécution. Robert
Yeomans, dernier shériff de Bristol, William
Yeomans, son frere, Georges Bourchier et Édouard
Dacres étaient les principaux chefs du complot;
eux et plusieurs autres qui partageaient leur
opillion, s'étaient secr~tement pourvus d'armes,




DU LONG PARLEMENT.
et devaient tuer la nuit les sentinelles, et se ren-
dre maitres du poste principal. lIs avaient aussi
plusieurs autres projets, dont on peut voir le
détail clans leur pro ces, et le recueil des preuves
apportées contre eux. lIs compta~ent ~ par ces
nloyens, contenir la plus grande partie de ceux
qui, dans la ville, tenaient pour l' opinion op-
posée, tuer le maire et un g~and nombre de ceux
qu' on savait etre affectionnés au parlement; en
sorte qu'illeur deviendrait aisé de livrer la ville
a l'armée du Roi. Le prince Robert attendait la
réussite de ce complot a Durdam Downes, a peu
pres a deux lJlilles de la ville OU il s'était posté
avec plusieurs autres chefs et environ quatre mille
hommes de cavalerie et deux mille fantassins;
mais le projet fut découvert, et les conspirateurs
pris et jugés par un conseil de guerreo Les quatre
chefs que j'ai nommés furent condamnés, et deux
d'entre eux, Robert Yeomans et Georges Bour-
chier, -furent pendus a Bristol, malgré tous les
efforts que ron fit pour les sauver, et bien que
le colonel Fiennes eut re~u, a ce propos, d'Ox-
ford une leUre pleine de menaces du général
Riven, créé par le Roi cOlnte de Forth. Cette
leure étant tres - propre a bien faire connaitre
l'espece de guerre qu'on se faisait alors, j'ai jugé
nécessaire de l'insérer ici a vec la réponse.




HISTOIRE


Patricl:, c01nte de Forth, lord Etterick, el lord-
lieutenant de toute,fl les troupes de Sa Majeslé~
au com17landant en chef du conseil de guerre,
ti Bristol.


c( Ayant appris que dernierement vous avez,
(e dans un conseil de guerre , cond&tllné a mort
c( Rohert Yeomans, dernier shériff de Bristol,
« qui a rec;u de Sa Majesté une comlnission poul'
(1 lever un régiment, WiUiam Yeomans, son
(( frere, George Bourchiel' et Édouard Dacres,
{( lesquels ont manifesté leur loyauté envers Sa
ee Majesté, et se sont efforcés de la servir, con-
ce formément a leu:r aUégeance ; instruit en lneme
Cf telnps que vous avez dessein de procéder de la
«( meme maniere contre d'autres personnes, je
ce vous signifie que je me dispose a faire subir le
ce lneme sort a M. George, M. Steevens, le ca-
« pitaine Huntley et autres, pris a Chichester en
(C rébellion ouverte contre Sa Majesté. Je vous
c( avertis, en outre, que si vous osez, selon cel
ce injuste jugement, faire exécuter aucun de ceux
ce que vous avez ainsi condamnés, ceux qui sont
(e en mes mains, savoir, M. Georges, M. Steevens
e( et l~ capitaine HuntIey n'ont a attendre ni
« ti veur, ni merC1.


ce Oxford, 16 lTIai 1645.
( Signé FORTII. »




DU LONG PARLEMENT.
Voici la rép()nse a eeUe leure ;


N atlzaniel Fiennes ~ gouverneur ~ . et le con,f~eil de
guerre de la cité de Bristol.


( Nous avons re<;u de votre seigneurie une
C( lettre qui nous déclare qu'informée du parti
( que nous avons pris eontre Robert Yeomans,
c( William Yeomans et autres, elle se prépare
c( a réduire M. George, M. Steevens, le capi-
« taine Huntley et autres a la nH~me eondition.
« Nous SOlnmes bien surs que ni votre seigneurie,
c( ni aueun autre homme mortelne peut attein-
c( dre un semblable résultat, cal" soit que les
« susnomlnés vivent ou meurent, ils seront
« toujours tenus pour de braves et honnetes ei-
ce toyens, fideles a leur Roi comme a leur pays,
ce et qui, d'une 11laniere franche et publique,
« ont toujours soutenu la cause que, dans leur
C( opinion, guidée par l'opinion de la plus haute
« cour, ils regardaient comIne la plus juste. Les
c( conspirateurs de eette ville, au eontraire, por-
c( terOl1t éternellement, dan s la vie ou dans la
« lTIOrt, la tache de la perfidie et de la trahison.
ce Si Robert Yeomans avait fait publiquement
ce usage de sa commission, il ne serait pas plus
e( durement traité que d'autres qui se sont eon-
({ duits de la sorte; mais les lois de la nature,
«( parnlÍ tous les homnles, et les lois des armes


2. 9




HISTOIRE


«( parlni les soldats, ont toujours fait une diffé-
« rence entre les ennemis déclarés et les espions
« ou les conspirateurs secrets. Si vous ne voulez
(e pas faire cette distinction, nous vous déclarons
« que nous procéderons a l'exécution, non-seu-
(( lement des personnes déja condamnées, mais
te de divers autres conspirateurs a qui nous nous
(( proposions de faire merci. Nous vous avertÍs-
ce sons en outre que si, par quelque sentence
fe inhumaine et indigne d'un soldat, vous faites
c( exécuter les personnes que vous nommez, ou
ce quelque autre de nos amis luaintenant entre
ce vos mains, et qui ont été pris dans le cours
« d'une guerre franche et ouvel'te, alors sir Wa1-
« ter Pye, sir William Crofts, le colonel Con-
« nesby et d'autres, pris en rébellion et guerre
fe ouverte contre le Roí et le royaulne, n'ont a
c( attendre ni faveur, ni merci; et Dieu bénis-
(e sant notre juste cause, nous sommes assez forts
« pour veiller a la sureté de nos amis, sans nous
« inquiéter de ceux de nos ennemis qui se sont
« mis ho.rs de notre atteinte, cal' nous avons re-
« laché plusieurs des votres qui n' étaient pas
« gens de petite condition.


« 18 mai 1645.
« Signé NATHANIEL FIENNES, président ..


ce CLÉMENT W ALKER, etc. »


A la meme ép.oque, le Roí adressa des ordres




DU LONG PARLEMENT. 151


trcs-pressans au maire et aux citoyens de Bris-
tol, leur cornmandant de lever autant de troupes
qu'ils le pourraient, pour empecher une exécu-
tion qu'il appelle le meurtre de ses fideles sujets;
nlais rien ne put leur sauver la ,vie; Robert YeC}-
lnans et George Bourchier furent exécutés. La
découverte de ce complot ne retarda que pour
peu de temps la perte de l'inlportante place de
Eristol; elle fut bientot rendue au prince Robert,
qui eut le bOllheur de s' en emparer d'une ma-
niere plus 11Onorahle, et avec une moindre effu-
sion de sang anglais.


Un autre complot, plus grave et plus mena-
«(ant, fut découvert en meme temps a Londres;
s'il n'eilt été prévenu -' il aurait completement
détruit le parlement merne, en le frappant au
crenr dans les cités de Londres et de Westminster
ou il résidait (1).


(1)' Ce complot fut découvert par un nommé Roe, do-
mestique de Tompkins, qui ayant saisi a la volée quel-
que chose des conversations de son maitre et de Waller,
i ugea qu'il était bon d' en savoir davantage, se cacha der-
riere une tal)isserie un jour qu'ils causaient ensemble tete a
tete, en entendit assez pour penser que la chose était im-
portante, et alla faire sa révélation a M. Pym. Ce fut le 30
mai que Pym re!;ut ce premier avis; mais, soit qu'il eut
besoin de quelques lumieres de plus, ou crut que la chose
ferait ainsi plusd'effet, il attendit au lendemain a I'an-
noncer. Étant done le lendemain au sermon, car c'était





HISTOIRE


Le hut des conspirateurs était de lncUre ilexé-
cution, dans Londres et Westrninster meme, la
cornmission d'enrOlement, et de lever ainsi une


un jonr de jeune,. íI re~ut un billet ou message sur Jeque}
il se levaaussitot, ainsi que plusieurs des membres les plu~
influens de ]a chambre qui s'y lrouvaient avec ]ui, et apr{'~
avoir conféré quelques instan s a voix basse, ils sorlirent lons
ensemble; ce qui jeta un grand lrouble dans les eS})rils. lIs
envoyerent sur-Ie-champ des gardes dans loutes les 1))'1-
sons, avec ordre de faire des recherches sur tous les pri-
sonniers et dans tOU5 les lieux suspects. Les chambres s'él:mt
réunies apres le sermon, on les informa seulement, s:ms
plus de détail, de l'existence d'un complot pnh a s'exécuter,
el lendant a livrer aux cavaliers le parlement et la cité. On
nornma anssitot un comité muni des pouvoirs nécessaires
pour procéde~ a la recherche du complot. Wal1er et Tomp-
líns furent arretés dans la nuit, et les autres le ]endemain.
SeIon le rapport fait par M. Pym au parlement, et ensuÍle
iIinprimé avec ordre de le lire dans toutes les églises eL
chapelles de Londres, de Westminster et des faubourgs,
on avait proposé a Oxford, ou tout se traitait, ce mcme
31 mai pour le jour de }'exécution du complot; mais OH
avait écarté la proposition, et décidé que le choix du jour
serait laissé aux lords que Waller prétendait avoir dans
son parti. Hall chargé des messages entre Londres et Ox-
ford se tenait secretement a Beaconsfield, OU on lui avait
fait dire que le grand vaisseau était arrivé aux Dunes,
})our lui indiquer que tout était prth ; iI en avait donné avis
a lord Falkland , qui avait répondu qu'il fal1ait se hater le
plus posssible. 3000 hommes devaient venir d'Oxford sou-
tenir le mouvemenl qu'on voulait opérer a Londres. (8tn/('-
Trials, tomo 4, col. 630.) (Note de l'Editeur.)




DU LONG PAnLE~lE.NT. 133
torce sutlisante IJour écraser d'un seul coup les
chamhres (1). Beaucoup de citoyens de Londres
étaient dan s le COlllplot, ainsi que quelques gell-


(1) JI est aussi difficile de déterminer le but de ce com-
1,lot que son étendue et le point de malurité auquel il était
parvenu. ti La conspiration était formé e , dit le rapport, du
mélange et de l'union de personnes de diverses sortes : quel-
(lues unes membresdes deux chambres du parlement, d' autres
de la cité, d'autres appartenant a la cour, qui, dans leurs
divers postes et emplois, devaient travail1er a donner la
forme et la perfection a I'<rnvre née des cendres de la
pétition de Londres l)our la paix. )) JI est clair que la vio-
'ence du parti de ]a guerre avait réuni dans un mClllc
mécontentement tous ceux qui voulaient la paix, et comme
le but ostensible, et meme en grande partie réel, des con s-
pirateurs était d' obliger le parlement a la faire , ils étaient
portés a compter sur tous ceux qui la désiraient. Mais
lcur maniere de calculer le nombre de leurs partisans ne
lllarquait pas un dessein encore bien avancé. lIs prenaienL,
d'apres les registres l'ublics de la cité, les noms des ci-
toyens et les rangeaient en trois c1asses, les bicn PCfl-
san s , les cllllcmis et les 111odérés. C'était probablement.
d'apres cet aper~u qu'ils dirigeaient leurs travaux, avcc
cette précaution que cha(lue personne 11' en pourrait cn~
gager, dans la conspiration, plus de deux autres. Mais la
tentaLive de Waller aupres de SeIden et de ses dcux col-
legues, prouve a\'ec quelle légereté les chefs du complot
conce\'aient des espéranccs, que le premier mot suflisail
pour renvcrscr. Challoner dédara, a 5a mort, que \Vallcr
fui ayalll parlé du projet de former daus Londres uu parti
liwdéré pour servir de cOllcilialcUl' cntre le Roi elle parle-
welll, et arretcr aillSí la !~uerrc civilc, luí, Challollcl') avait




HISTOIRE


tilshommes qui s'étaient juré mutuellement le
plus profond secret. l\f. Waller, le principal
d'entre eux, membre de la chambre des com-


dit: « Puissé-je vous l'épondre des trois quarts de Londres,
« personne ne bougerait que nous n' eussions l'aveu des lords
H et des eommunes. )1 A quoi Waller avait répliqué : « Vous
« aurez, pour eette affaire, l'aven de toute la ehambre des
« lords, exeepté trois on quatre, et de plusieurs de la cham-
I! bre des eommunes. )l On lenr promit de lesaboucher
avec les lords, mais eelte entrevue n'avait point encore eu
lieu, et ChaIloner, ainsi que eeux qu'il avait engagés dans
le complot, étaient déterminés a ne rien faire qu'ils n' eussent
res;u, de la propre bouche des lords, l'assurance qu'ils de-
mandaient. ChaIloner est désigné, dans le rapport, comme
un citoyen éminent; iI déc1are, en mourant, que c'est lui
qui a été l'intermédiaire entre Waller et les principaux ei-
toyens engagés dans la eonspiration, et demande a etre seul
chargé de la peine. (1 J'ai prié Dieu, dit-il en montant sur
« l'échafaud, que si ce dessein ue devait pas etre a son hon-
ce neur, il nous le nt eonnaltre; Dieu m'a entendu.))
Tompkins, bien que plus engagé dans le projet et ayant
été, comme iI le dit lui-meme, vingt-deux ans au service
du Roi, ou plutot de la Reine, dit aussi, en mourant,
ce qu'il était bien aise (Iue le complot eut été découvert,
ce paree qu'il aurait pu avoir de facheuses conséquences. ))
( State-Trials 7 tomo 4, col. 62.6 et suiv.) Tous deux expri-
merent leur repentir, et ce ne fut point un acte de fai-
hlesse; ils moururent en hommes de creur, particulierement
Tompkins, mais non point en martyrs, comme meurent
les hommes de parti pénétrés de la justice de leur cause.
Déja pleins d'incertitudes sur la légitimité de l'action
qu'ils entreprenaient, ils auraient senti les ineertitudes s'ac-




DU LONG PAH.LEl\1ENT. 135
lnunes (1), les avait assurés que plusieurs mem-
hres des deux chambres étaient engagés dans l'af-
faire, et les seconderaient en temps et lieu; pro-


croltre, et les auraient vues se répandre atItour d'eux en ap-
prochant du moment de l'exécution. Ce n'était pas la encore


'le temps ou un complot contre le parlement pouvait réussir
a Londres. La cité, apres avoir été si prononcée contre le
roi, n' était pas revenue a lui, mais elle commen~ait 11 se
relourner contre ses advcrsaires. On fuyaít seulement le
mal le plus prochain. Un pareil sentiment ne devient
énergique et ne peut soulever les masses que lorsque le
malheur devient si grand que le besoín meme du repos
force les hornmes d'entrer en action pour échapper a la
souffrance. (Note de ['Editeur.)


(1) Waller le poeie, dont il est ici question, s'c:!tait mon-
tré, des le commencement, favorable au parti du Roi; et
cornIlle il n'avait, dít Clarendon, aucune relation avec ]a
cour, ilu'en était que plus propre a la servir dans le parle-
ment. Ayant quítté le parlement comme beaucoup d'autres,
el y étant ensuite revenu par ordre du Roi, Waller COJll-
lllen!;a probablement des lors a agir de concert avec Oxfurd.
Lorsqu'il s'y rendit a la fin de janvier 1643, avec les autres
commissaires du parlement, pour }Jrésenter au Roi des pro-
positions de paix; comme par son rang il se trouvaít admis
le dernier a baisel' la main du Roi, Charles luí dit: Quoi-
que le dernier, 'vous n' éles point le pÚ'e, ni le moins en fa-
veur aupres de moi. Waller se faisait remarquer par l' ex-
treme liberté de ses paroles en faveur du Roí et conlre le
parlement : liberté qui, comme on le vil plus tard , tenait
beaucoup lJlus sans doule a la chaleul' de son imagi-
nation qu'a la fel'meLé de son courage ; cal', aussítot (!u'il se




HISTOIRE


messe qui les avait remplis d'ardeur, mais (Iue
M. Waller ne fut point en état de tenir (1). Le
complot était horrible et n'aurait pu etre exécuté
sans une grande effusion de sang, comme le prou-


vit arreté, il perdít completement ]a tete, décJara, dit Cla-
rendon , tout ce qu'il savait, tout ce qu'il avait entendu Oll
imaginé, et, apres s'etre probabIement grossi en espérance
le nombre des conspirateurs, iI le grossit également dans
les révélations que lui arracha son effroi, y faisant entrer,
comme nous l'apprend encore Clarendon, et tout ce qu'il
savait par lui-meme, et tout ce qu'il avait soupyonné d'a-
pres les autres ~ et tout ce qui lui avait été dit dans les nom-
breuses sociétés qu'il fréquentait , nommant les personnes
et construisant ainsi un corps de délít de tout ce qu'il avait
prís auparavant pour un corps d'armée.


(Note de l'Edúeur. )
(1) On demanda a Waller, dans ses interrogatoíres, si


SeMen, Pierpoint, Whitelocke et plusieurs autres qu'oll
lui nomma, étaient instruits du complot? iI répondit que
nonj qu'il s'était une foís rendu dans le cabinetde SeMen,
ou celui-ci était avec les deux autres qu'on vient de nom-
mer, lJour Ieur faire part de la chose; mais, qu' ayant abordé
ce sujet en termes généraux, ils parurent si révoItés de la
seule idée d'une pareille perfidie, et de tout le sang qu'elIe
devait faire répandre, qu'il n'osa s'ouvrír a eux, et fut lui-
meme, dit-jI, }Jresque découragé de poursuivre son projet.
(Mémoires de Whitelocke, pago 66.) Il accusa lord Conway,
le comte de PortIand, le comte de Northumberland. On
n'osa trop toucher a ce dernier, dit Clarendon, malgré l'a-
nimosité du parti violent contre luí; les autres furent mis
611 prison et confrontés }llusieurs fois avec Waller ; mais,




DU LONG PARLEMENT.
verent les interrogatoires de MM. W.aller, Tom-
pidns , Challoner , Hasell et autres, qui y étaient
entrés.


Ce qui en parut d'apres la déclaration publiée
par ordre du parlement, fit voir qu'on se propo-
sait, 1°. de s'emparer des enfans 'du Roi; 2°. d'ar-
reter. plusieurs nlembres des deux chambres, le
lord - maire de Londres, et le comité de la mi-
lice , sous prétexte de les traduire légalement en
justice; 50. de saisir les fortins et ouvrages ex-
térieurs de la cité, ainsi que la Tour de Londres,
tous les magasins, postes et autres lieux impor-
tan s ; 4°. d'introduire les troupes du Roi pour
surprendre la cité avec leur secours ; de faire
périr tous ceux qui s' opposeraient a elles, en vertu
de l'autorité du parlement, et de se refuser, a main
armée, a toutes les impositions établies par les
Ghambres ~ pour l'entretien des troupes parle-
mentaires (1).


comme ils })ersisterent a nier, et qu'il n'y avait contre eux
d'autre témoignage que le sien, on les laissa de coté, et,
apres un tres-long emprisonnement, ils sortirent sous cau-
tion. (Note de [' Editeur. )


(1) Le rapport, selon la remarque de Clarendon, con-
tíent beaucoup d'assertions et fort peu de preuves; c'en est
assez dans un temps de troubles. Il suffisait des aveux ou
meme des suppositions de WalJer, pour produire cet effet
d'inquiétllde dont un parti populaire a peu de peine a tirer
1m grand avantage. La décOllvertc de ce complot dcvint l'oc-




138 HISTOIRE
La déclaration racontait encore heaucoup de


détails qu'il suffira d'indiquer; par exernl)le, les
signaux par lesquels la cavalerie du Roi devait
etre avertie, les costumes que les conspirateurs
porteraient pour se reconnaitre. Une cornlnission
d' enrolement que le Roi venait de leur adresser
d'Oxford, avait vivement animé leur courage (1 ).


casíon d'un covenant par lequel on s' engageait a ne pas dé-
poser les armes que les papistes alors en guerre ouverte
contre le parlement ne fussent livrés a la justice. Ce cove-
nant commen~ait ainsi : C( En toute humi]ité et respect
el pour la Majesté divine, je déclare ]a sincere douleur que
(( me font éprouver mes })échés et ceux de la nation, etc. »
Suivaient des promesses d'accommodement, puis les enga-
ge~ens a la guerreo (Note de l'Editeur.)


(1) Il parait que la commissíon envoyée par le Roí n'a-
vait pas originairement un rapport direct au complot de
WalIer; elle s'y rattacha sans doute ensuite, puisqn'elle fut
trouvée enterrée dans le cellier de Tompkins, Leau-frece
de Waller; mais elle n'entra jamais dans cette portion du
plan qui avait été cornmuniquée a Challoner et a ceux au
norn desquels il traitait. Challoner déclara en rnourant qu'il
n'y avait aucune part, non plus qu'au projet de s'emparer
des magasins. Un riche marchand de la cité, nornmé sir.
Nicholas Crisp, vivement poursuivi par le parlement comllle
fauteur de la pétition pour la paix, avait quitté Londres et
s'était retiré a Oxford ~ ou, ainsi que beaucoup d'autres
chassés comme lui par la crainte et par des persécutions
réelles, il attendait impatiemment le moment de rentrer
dans la cité avec le Roi, a main armée. Sir Nicholas, homrue
actif el enlreprenant,. conservait de nombreuses correslJon-




DU LONG PARLE MENT. 159
Elle avait été secretement apportée a Londres par
lady Aubigny, filIe du comte de Suffolk, et veuve
depuis la batailIe de Keynton, OU son mari lord
Aubigny avait été tué. CeHe COffiluission était
adressée a sir Nicholas Crisp, sir o-eorge Stroud,


dances dans la cité, oh son commerce lui avait donné des
reJations tres-étendues, et oh iI avait été officier dans la
milice, jusqu'au moment oh la nouvelle ordonnance l'en
avait expulsé. Il sollicita du Roi une commission pour au-
toriser ses amis de Londres a enroler el organiser des forces
capables de le soutenir lorsqu'il approcherait de la ville. Le
Roí, dít Clarendon , s'y était long-temps refusé , regardant
la chose comme tres-pe u utile a ses affaires, et fort dange-
l'euse pour ceux a qui elle serait eonfiée. Mais enfin les
vives instances de Crisp l'emporterent, et l'affaire se traita
entre lui et le Roi, sans en rien communiquer aux conseil-
lers les plus intimes de Charles. Lady Aubigny apporta la
commission a Londres, dans un petit coffre , sanso savoir ce
que e'était , mais seulement comme une ehose importante
au se~vice du Roi. Crisp avait désigné au Roi tous ceux quí
devaient etre nommés dans eette commission pour exercer
]eurs pouvoirs a Londres, et la plupart étaÍent, comme lui,
des gens réfugiés a Oxford, ce qui rendait la commission
fort peu utile. Clarendon paralt n'y voir qu'une de ces COlll-
binaisons ridieu]es qu'invente , pour se consoler, l'ambition
ou l'oisiveté d'un parti impuissant; quant au projet de Wal-
ler, il penseque tous les fils par lesquels il se rattachait a la
cour d'Oxford se bornaient a quelques avis assez vagues
qu'avait fail donner Waller a lord Falkland, d'un projetlle
se refuser au paiement des taxes , eL de forcer ainsi le }Jar-
lement a faire la paix; a quoi lord Falkltlnd répondit ~




HISTOIRE
sir Thomas Gardiner, et autres gentilshonllnes,
nOlninativement désignés, ainsi qu'a tous eeux
qui, selon les formes preserites, seraient nornmés
généraux, eolonels, lieutenans-eolonels ou offi-
ciers dan s les nouvelles levées. On peut en voir
le texte complet dans les registres du parlement.


Mais le complot fut découvert le 51 mai,
et devint fatal a quelques uns de ses auteurs.
M. Waller, M. Tompkins et quelquesautresfurent
arretés et interrogés eette nuít meme, par un
comité du parlement 00. se trouvait M. Pym. On
les envoya ensuite en prison pour attendre leur
jugement. Le proces eut lieu dans GuildhaIl.
MM.Waller, Tompkins, Challoner, Hasell,White
et Blinkhorne, furent condamnés. M. Tompkins et
M. Challoner seuls furent pendus, tous deux en
face de Ieur maison ( 1 ). M. Hasell mourut en pri-
son, Blinkhorne et les autres obtinrent leur grace
du parlement par l'entremise du comte d'Essex.
M. Waller, le chef des conspirateurs, derneura


« Qu'on se presse done, car la guerre devient tous les jOUf:)
(( plus difficíle a arrcher; 11 réponse plus conforme a SOli
earaetere que eeHe que luí prete le rapport de Pym. (lIú-
toire de la Rébellion et les State-Triáls, tomo 4, col. 628.)


(Note de l'Editeur. )
(1) Au moment de l'exécution de Tompkins, le líeute-


tenant-colonel Washborn luí demanda s'jl reconnaissait que
sa mort était juste; il répondit : « Je l'ai déja dit, je vow;
H prie, laisscz-moi tranquille ; )) el le lllClllC WashhorIl I ti i




DU LONG PARLEMENT.


long-tcmps détenu a la Tour, et un an apres, en
payant une amen de de dix mille livres sterling,
il obtint sa grace et la permission de quitter le
pays. On s'étonna heaucoup que le principal au-
teur du complot, celui qui y avait entrainé
Ml\f. Tompkins et Challoner, comine ils l'avaient
eux-memes déclaré au moment de leur mort, en
fut quitte a si hon marché. La seule raison que


- demandant encore s'il n'avait pas quelque autre complot a
révéler: 11 Laissez-moi tranquÍl1e, je vous prie , répondit en-
11 corc Tompkins , j' aÍ faÍt mon devoir. » Challoner déclara ,
plus cxplicitement et a plusieurs reprises, qu'il mourait
jnstement; au moment de sa mort son pere vint lui ap-
porter le pardon du Roi, qui essayait d'user du droit de
grace pour sauver ceux que faisait condamner le parlement.
ce Voilil ~ lui dit-il, le gracieux pardon du Roi. 11 Mais
Challoner répondit: « Je vous prie, ne m'importunez pas de
11 cela. 11


Tompkins sejustifia de l'accusation de papisme,mais en
termes obligeans pour les papistes. Chal1oner, au contraire,
s'accusa d'avoir eu de l'éloignement pour quelques ministres
du Seiglleur, voulant parler des puritains, et déclara qu'il
avait re !tU d'eux, en cette circonstance, plus de consolation
qu'il n'en avait eu de sa vie. Il mourut assisté de Hugh
Peters. On a dit qu'il n'avait pas été permis a d'autres mi-
nistres qu'aux ministres puritains, d'avoir acces aupres
d'eux; cela est assez dans l'esl)rit du temps, et on ne v()it pas
que Tompkins, probablement plus rebelle aux instructions
de Hugh Peters, ait eu a sa mort l'assistance d'aucun mi-
nistre de la religion. (Stale-Trials ~ tomo 4, col. 632 el
suiv.) (Noie de l'Editeur. )




HISTOIRE


j'en aíe entendu donner, c'est que M. Waller, dans
son premier interrogatoire, avait révélé beau-
coup de circonstances, sans lesquelles on n'eut
jamais bien connu toute l'affaire; ce qui engagea
M. Pym et quelques autres a lui promettre de
faire tout ce qui serait en leur pouvoir pour lui
sauver la vie. Il témoigna d'ailleurs beaucoup de
repentir de son crime, demanda l'assistance de
pieux ministres, et ensuite dans le discours qu'il
pronon~a devant la chambre, ou il parut quand
11 fut mis en liberté, iI déplora anlerement sa
conduite, remerciant Dieu de ce qu'un complot si
funeste avait été si heureusement découvert (1).


(1) Les Jachetés de W aller, en effet , ne se bornerent pa~
a ses révéIations ; iI s'humilia devant tous les pouvoirs, ap-
peJa aut~ur de lui, pour etre témoin de son repentir, ton8
les fanatiques en crédit, subit toutes les insultes de lenr zele,
et acheta leur faveur par ses lihéralités et ses hnmiliations.
ReJaché a la fin, iI se rendit en France, et virit d'abord a
Rouen, puis a Paris, avec toutes les apparenccs de la richesse
et les opinions d'un royaliste, jusqu'a ce qu'il eÜt vendu le
dernier bijou de sa femme. Alors il implora la clémence de
Cromwell, et ohtint, par l' entremise du colonel Scroop, la
permission de revenir en Angleterre, vivre sur les restes
d'une fortune fort diminuée par l'amende qu'il avait été
obligé de payer. Il était lui-meme l)arent de Cromwell; sa
mere, avec qui iI habitait, et qui était fort royaliste , ac-
cablait Cromwell de reproches, lorsqu'il venait la voir; a10r5
Cromwelllui jetait en badinant sa serviette a la figure, di-
sant qu'iI ne voulait pas disputer avec sa tanteo Comme




DU LONG PARLEMENT.
elle se trouva compromisc dans quelque complot royaliste ,
Cromwell se contenta de la tenir prisonniere dan s sa mai-
son, sous la garde de sa filIe. 11 recevait familierement
Waller, et causait avec lui, particuW~rement de l'histoire
ancienne qu'il savait assez bien. Lorsque des gens de son
parti venaient l'interrompre, apres s' et~e entretenu avec
eux dans le jargon de la secte, iI revenait a Waller en lui
disant: (e Cousin W aller, il faut bien parler a ces gens-la
a leur maniere. }) La conduite de Waller fut aussi pI ate
apres la restauration que pendant la guerre civile.


(Note de l'Editeur.)




HISTOIRE


CHAPITRE III.


Affaires d' Etat traítées dans le parlement. As-
semblée ecclésiastique. On faít un nouveau
grand sceau. La Reine est accusée de haute
trahison et autres délits. Le lo rd-gén éral Essex ~
apres quelques marches, revient cantonner son
année malade aux environs de K ingston. Les
troupes du Roí sont en possession de Fouest.
Puissance du comte de Newcastle dans le nord.
Quelques 71lOts du comte de Czanberland et du
lord Faiifax.


Tandis qu'on tramait en seeret des eonspira-
tionspourruiner leparlement, tandisque la guerre
exer<¡ait dans tout le royaume ses plus terribles
fureurs, le parlement avait traité dans sa session
plusieurs affaires d'une nature peu ordinaire.
Les choses en étaient venues a ce point de passer
tous les précédens que pouvaient offrir les anciens
telnps, et les fondemens memes du gouvernement
étaient ébranlés, ainsi que l' exprime ce vote adopté
par les deux chambres, un an auparavant, ce que
ce lorsque le Roi fait la guerre au parleulent,
« cela tend a la dissolution du gouvernelnent. »


Un seul mois, le mois demaiI 643, contient
trois débats sur des choses de eette nature extra~
ordinaire, qui furent décidées, soit alo1's, soit




DU LONq PARLEMENT.


hientot apreso Le premier de ces débats eut lieu
au commencement du lllOis (1). Il eut pour objet
l'assemblée des théologiens a Westmin~ter. ParnIi
les bilIs passés dans .les deux chalnbres et aux-
quels ,jI ne manquait que l'assen~iment royal, il
yen avait un portant, ce qu'on nommerait un sy-
node de théologiens pour travailler au hon et
solide établissement de la religion et pour régler
le gouverneluentde l'Église d' Angleterre. » Ce hill
avait été souvent présenté a l'acceptation du Roi;
¡Dais il l'avait définitivement refusé. On traita
done a fond la question de savoir ce qu'il y avait
a faire, par aut~rité du parlement , en des cas si
inlportans pour le bien du royaume, lorsque le
Roi refusait et s'absentait absolument du parle-
ment. On conclut a la fin que" lorsque le Roí
s'ahsentait et refusait, les lois du pays donnaient
a une ordonnance du parlement, pour ceHe occa-
sion, autant d'autorité sur le peuple qu'en pou-
vait avoir un acte du parlement tnut entier. Les
deux ehambres voterent done que l'aete ponr ras-
sembler les théologiens appelés a affermir la re-
ligion et a régler la forme du gonvernement de
l'Église, si souvent refusé par le Roi, serait changé


(1) L'assembléc des théoIogiens s'ouvrit le 5 juin sui-
vant; dans ce meme mois le parlement lit aussi une Ol'don-
nance pour l'cstrcindre la liberté de la presse.


(Note de l' Edilt~{(r. )
2. 10




lLJG HISTOIRE
en une ordonnanee du parlement, et que l'assenl-
blée, eonvoquéc en eonséquenee de eette ordon-
nance, discuterait les choses relatives a la reli-
gion, et les proposerait ensuite aux chambres;
ce qui fut exécuté peu de temps apreso


Le eas parut sernblable a celui OU se trouva
I'Écosse en l'an 1659, lorsque, sur les délais Dl is
l)ar le Roi a la convocation de leur synode na-
tional, les covenanlaires écossais publierent,
comme on l'a déja dit, un éerit destiné a prouver
que, lo~sque le prince se trouve etre un ennem i
de la vérité ou néglige de travailler au bien de
l'Église, le pouvoir de convoquer un synode ap-
partient a l'Église elle-meme.


Dans le merne luois et peu de jours apres, les
deux chambres prirent en considération une autre
affaire de grande importanee, la confeetion d'un
110uveau grand-seeau au lieu de celui qui avait
été· enlevé au parlement. Cette affaire avait été
amplement débattue dan s la chambre des COIl1-
munes, et le mois suivant, a une conférence entre
les deux chambres, les eommunes déclarerent
aux lords que l'absenee du grand - sceau était
d'un grand préjudice au parlenlent et a tout le
royaulll~, et leur denlanderent en eonséquenee
de consentir promptementa voter pour qu' on en
fit ~ln nouveau. La chose fut dé])aUue et Dlise aux
voix dans la cbambre des pairs, qui se décida
pour la négative. La seule raison que les lords




DU LONG PARLEl\lENT. 1,47
(lonnassent de ee refus, etait que, depuis le dé-
part (lu seeau, ils avaient fait toutes les 'affaires
par ordonnunees du parlement, et pensaient qu'on
pouvait agir de la 11lenle maniere en tout ee qui
eoneernait le bien du royaume ~t sans avoir he-
soin du seeau. Cependant les lords répondirent
avee égard, que, si la ehambre des eommunes
voulait les informer des eas partieuLiers OU l'ab-
senee du grand-seeau eauserait au royaume un
préjudiee qu'on ne pourrait éviter par le moyen
des ordonnanees, ils prendraient la ehose en eon-
sidération pour eonsentir a ee quí paraitrait né-
eessaire.


Les lords ne tarderent pas, sur les raisons
(IU' on leur présenta, a se réunir a la ehambre des
eommunes, qui, vers le eornmeneement de juillet,
leur présenta dans une eon'férenee, ses votes
et les motifs qu' elle avait pour demánder un
nouveau grand - seeau. Les votes étaient ainsi
qu'il suit :


14 et 26 juin, résolu :
10. Que le grand-seeau d' Angleterre doit de-


meurer pres du parlement;
2 8 • Que son absenee a été eause de grands maux


pour le pays;
5°. Qu'on doit apporter remede a ees maux;
4°. Que le véritable remede est de faire un


nouveau grand-seeau.
Les raisons qu'on donna furent divisées en deux


10.




HISTOIRE


parties; dans la preluiere on déclarait les maux
oeeasionnés par l'enlevement du grand-seeau. La
seeonqe expliquait les ineonvéniens et maux qui
résultai-ent de ee que le parlement n'avait plus
le grand - seeau. Les raisons du premier point
étaient eelles-ei :


1°. Le seeau avait été seCl~etement et illégale-
ment emporté par le garde (lu seeau, contre le
devoir de sa plaee qui l'obligeait a demeurer
attaché au parlement et a ne s'en pas séparer
sans congé; et si 1'0n eut déeouvert ses intentions,
on n'aurait pas souffert qu'il l'emportat ;


2°. Le seeau lui avait été oté depuis et remis
entre les mains ~l'autres personnes dangereuses
et malintentionnées; -en sorte que, lorsque le par-
lement f'.vait envoyé au lord garde du seeau des
writs a seeller, iI avait répondu qu'il ne pouvait
le faire, attendu qu'il n'avait pas le seeau entre
ses lualllS;


5°. Ceux a qui 011 en avait remis la garde,
l'avaient elnployé en plusieurs manieres au dom-
luage et a la ruine du royaume, comme a créer
de nouveaux shériffs d'une luaniere inusitée et
illégale, pour en faire autant de généraux ou
commandans de troupes levé es COl1tre le par-
lement, a eonférer illégalement des commissions
d'enrolementet d'autres commissions égale.ment
illégales dans le nH~llle objet, a publier des pro-
clalnations conti'e les deux chambres, a pro-




DU LONG PARLEMENT.


clamer tl'aitres plusieurs de leurs membres, coutre
les priviléges du parlement et les lois elu pays ,
a sceller des commissions d' oyer et ternziner pour
procéder eontre eux et d'antres bons sujets de
Sa l\fajesté attaehés au parlement, en qualité de
traitl'es:- el envoyer des eommissions en Irlande
pour traiter de la paix avee les rehelles eOlltre
un aete du parlement fait pendan't eette session,
sans compter d'autres aetes dangereux auxquels
le granel-se ea u a été employé depuis qu'on I'a en-
levé au parlement, etd'olt sont résultés de grands
lIlaux et ealamités au préjudiee du royaullle.


l/absenee du granel-seean avait en en outre les
ineonvéniens suivans :


l°. Les termes ont été ajournés et le eours de
la justiee interrompu.


2°. Aueun wri t original ne peut etre ,ohtenu
sans aller a Oxford, ce que ne peut faire aueun
des partisans du parlelnent san s péril de la vie
ou de la liberté.


5°. Il ne peut sortir du parleluent aueune pro-
clamation pour SODlmer les délinquans aeeusés de
haute trahison ou autres erimes, de eomparaitre ,
sons peine de eonfiseation, selon les aneicns
usages.


4°. On ne peut rendre en parlement aueun 'writ
d'crreur pour reetifier des jugemens erronés. Au··
eun writ d'éleetion ne peut ctre donllé pon!' ]e
choix de nouveaux memhrcs, a l'occasion de la




150 UISTOIRE


IDort ou de l'éloignernent de quelqu'un d'entre eux,
par quoi le nOlllbre des membres est fort diminué
et les chambres courent risque d'etre dissoutes si
on ne supplée bientot a cet inconvénient, ce qui
serait contraire a l'acte de continuation du par-
lernent.


5°. Toutes les autres cours de justice ont un
seeau particulier, et le parlement, la cour su-
preme de l'Angleterre, n'en a pas d'autre que
le grand-seeau d'Angleterre, et comme celui-ei
lui a été enlevé, elle se trouve nlaintenant n'en
avoir aueun; en raison de quoi il faut faire un
nouveau seeau.


6°. Ce seeau est clavis regni et doit par consé-
quent résider pres du parlement qui, tant que
dure sa session, est le corps représentatif de tout
le royaume, le Roi, aussi bien que le royaume,
étant toujours légalement présent a eeHe ses-
SlOn.


D'apres ces motifs, les lords se réunirent a la
charnbre des COIDlnunes, et on donna ordre de
refaire immédiaternent un Iiouveau grand-seeau,
ce qui fut exéeuté.


Cette action du parlement parut etre peu
agréable au Roi, et l'on en peut juger par ee qui
se passa a Oxford environ un an apres, lorsque
le Roi eut assemblé les lords qui se trouvaient
pres de lui el' les lnembres de la chambre des
COlunlunes qui avaient déserté le parlement de




DU LONG PARLEl.\IENT.


'Vestminster, pour en composer ce qu'il appela
son parlelnent d'Oxford. Illenr proposa plusieurs
sujets de discussion; entre autres choses, on
y débattit eette action sous le titre de contrefa-
«;on du grand-seeau et elle fut déclarée trahison,
et tout le parlement de Westminster, ex facto,
coupable de haute trahison.


eette décision du parlement, relative au nou-
veau grand-sceau, causa une stupéfaction géné-
rale, et plusieurs se demanderent avec étonnement
<{ueUes seraient les conséquences de eette mesure
inouie. Quelques personnes, jusqu'alors ferlne-
mentattaehéesau parlement et qui l'approuvaíent
fort d'une action si convellable et si utile dans le
présent état des choses, la considérerent néan-
Jnoins comme un triste sylnptome des déchire-
mens du royaume, et un signe d'apre$lequel on
pou vait juger il quel point les différends du Roí et
du parlenlent étaient devenus irréconciliables.
Il n'y eut du reste parlni ceux qui ll'étaient point
contraires au parlement, que tres-peu de discus-
sions sur la légalité et la régularité de cet acte ;
et quoiqu'on n'en eut aucun préeédent, direct ou
ahsolulnent applicable, le cas d'un Roí person-
llellement en guerre contre le parlenlent en ses-
sionne s'étal1t pas encore présenté,cependant, par
la comparaison que ron fit du temps présent avec
ccnx ou les néecssités de l'état avaient requis une
ehosepareille, on la regardacommenoll-selllement




IJ2 HIS1'OlHE


permise, Iflais nécessaire. Je ne sache pas que
rien ait été écrit en sen s contrairc par aucun ju-
risconsulte ou autre, des partisans du Roi; mais
run des partisans du parlelnent, M. Prynne, ju-
risconsulte savant et granel antiquaire, a écrit,
pour le justífier, un long traité, sous le titre
de l'Ouvertu~e du Grand-Sceau d~ Angleterre,
ou il le défend et par des argumens et par un
grand nornbre de précédens qui s'en rappro-
chent beaucoup. Ce traité existe et peut etre lu
partous ceux qui sont bien aises de connaitre quel
pouvoir les parlemens ont réclamé et ohtenu en
divers temps sur le grand-sceau, soit en prenant
sur eux de le faire confectionner dan s l'enfance
ou l'absence de quelque prince, soit en en dis-
posant en cas de folie ou d'obstination de quel.
ques autres.


Mais, avant que cette affaire fut entierement
finie, on mit en discussion dans la chambre des
COmlTIUneS une autre chose qui prouva aussi évi-
delnment aquel point la rupture était devenue
irréparable. On se consulta quelque temps avant
de l'entreprendre, et il y eut beaucoup de raisons
données pour et contre. Il s'agissait d'une accusa-
tion de haute trahison contre la Reine. On ]a mo-
tiva sur plusieurs faits d'une grande importance,


, entre autres, sur ce qu'elle avait engagé en Hol-
lande les joyaux; de la couronne, sur ce qu' elle
avait excité la rt!volte d'Irlande, sur ce qu'elle




DU LONG PARLEl\IENT.
s'était efforcée de former un parti en Écosse contre
le parlement, sur ce qu'clle était entrée en An-
gleterre a la tete d'une armée papiste. En effet,
peu avant cette époque, la Reine avait déharqué
dans le nord de l' Angleterre, amenant des Pays-
Ras des armes, des IDunitions et plusieurs offi-
ciers. Elle y avait été re~ue par le comte de New-
castle, qui l'avait conduite au Roí, a Oxford,
avec un nombreux corps de troupes. On rédigea
con-tre la Reine plusieurs autres chefs d'accusa-
tion sur Jesquels, peu de lDois apres, elle fut
accusée de 11aute trahison par les communes, et
J 'accusation fut portée par M. Pym a la chambre
des lords, ou eHe demeura arretée plusieurs
IDois; maís OU elle passa enfin, ainsi qu'on le dira
dans son tem ps.


Les deux chambres avaient également ordonné
auparavant que le revenu du Roí et de'la Reine
re~u par l'échiquier, y serait retel1U et employé
au service puhlic (1), ce qui fut exécuté. Un co-


(1) Le ~ juin suivant, la motion ayant été faite, dans la
chambre des communes, d'ordonner la visite du trésor de
1'abbaye de Westminster , OU étaient gardés les insignes de
la royaufé, on agita ]a question de savoir si, en cas de refus
du doyen et du chapitre de livrer les clefs, on forcerait 1es
serrures; le vote négatif rassa a la majori té de 58 voix contre
37. Le lendemain , la question fut reproduite, en y ajoutant
que 1e cas échéant, il serait fait un inventaire des objets
trouvés, de nouvelles scrrures mises aux portes, el que ríen




HISTOIRE


nlité pris dans les deux chambres fut chargé tI'en
disposerdelanlanierela plus avantageuse. Cefonds
ser'vit a pourvoir a plusieurs des charges néces-
saires du gouvernement; et, entre autres choses,
ce qui parut une sorte de légitiulC représaille,
plusieurs memhres des deux chambres, dont les
propriétés avaient été saisies par les arlnées du
Roi, obtinrent a Londres, sur ses revenus, des
secours qui les mirent en état de subsister tandis
qu'ils remplissaient les fonctions publiques aux-
quelles ils avaient été appelés.


Mais les dépenses nécessaires pour soutenir
une guerre si étendue, étaient devenues tellenlent
excessives que ni contributions, ni tales n'y.
pouvaient suffire. On ~rut devoir proposer, a
l'exemple .des Hollandais, un droit d'excise sur
les denrées, telles que la hiere, le vin, le tabac
~t la viande. La proposition en fut prise en con-
sidération par les deux chamhres et votée dans
le courallt de l'été; mais ceUe excise fut imposée
avec tant de modération, particulierement sur
les denrées de premiere nécessité, que, soit ri-
ches, soit pauvres, personne n'en ressentit que
fort légerement le poids. Cependant elle produisit


lle serait dérangé de sa place sans l'ordre de la chambre ;
alors l'afiirmative l'emporta d'une voix, de 42 contre 41 ..
(Ilistoire paJ'lemellta~'re, tomo 3, col. I 18. j


(Note de l'Editcur.)




DU LONG PARLEMENT.
chaque mois une son1me considérable, bien que
les quartiers du Roi occupassent alors la plus
grande partie de l' Angleterre; mais la ville de
Londres était dans les quartiers du parlement.


Pour revenir au 101~d-général .Essex, Son Ex-
celIence, ayant, comme on l'a dit, re«;{u au mois
de Inai 1645 la nouvelle de la défaite de l'armée
du parlement dans l'ouest, et ne pouvant, dans
l'état ou étaient les choses, la secourir.elle-meme,
envoya ordre a sir William Waller de marcher
pour soutenir les troupes du Devonshire, et elle
écrivit au gouverneur de Eristol de secourir sir
lVilliam. de tout ce qu'il pourrait tirer de sa gar-
nÍson, soit cavalerie ou infanterie; mais cet ordre
ne put recevoir son exécution (1); et, avant que
sir William Waller se fut avancé dans l'ouest, le
princeMaurice, le marquisdeHertfordetsirRalph
Hapton avaient opéré leur jonction. CÓlnme la
cité de Londres, de qui venaient les secours d'ar-
gent, désirait heaucoup que le lord-général 111ar-


(1) Le comte d'Essex, dans sa lettre du 24 avríl, se plaínt
de ce que sir William Waller n'est pas venu le joindre
comme il lui en avait oonné l'ordre, bien que le princc
Mauríce . se soit éioigné de sir William pour se tourner
contre lui, comte d'Essex. (Histoire parlementaire, tom 3,
col. 11 l.) On va voir la mésintelligence s'accrohre entre ces
deux généraux, et leurs partís respectifs dans l'arm~e et
dans le parJement, se rattacher aux deux grandes divisions
du partí de ]a paix et du partí de la guerreo UYole de l'Edil.)




156 IUSTOIRE
chat avec toute son armée VCI'S Oxfol'd, ii Y con-
sentit, bien qu'un peu contl'e sa propre opinion ,
et il se dirigea surThame avec son principal corps
c.l'armée, pour s'y réunir aux troupes que lui en-
voyaient les comtés confédérés pour le secourir.
eomme son commandement s'étendait sur tout le
royamne, actuellement envahi par une guerre
générale et dévasté par plusieurs arméesa la foís,
il délégua, par ordre du parlement, une partie
'tle ses pouvoirs a lord Fielding, alors devcnu
comte de Denhigh, par la mort de son pcre, tué
peu auparavant, dans une rencontre, en cOlnhat-
tant contre les troupes du parlement. Illni donna
la commission de général de quatre cOlntés,
Shropshire, Worcester, Stafford et '\tVarwick-
shire, l'aútorisant a lever des troupes pour les
conduire contre les troupes du Roi, partout 011
l'ordonnerait le parlement ou le lord-général. Il
accorda aussi, en meme temps, une autre COffi-
nlÍssion semblable a sir Thonlas Middleton , pour
le ver des troupes, en qualité de général, dans le
nord du pays de Galles.


A Thalne, la main de Dieu visita l'armée du
lord-général; la maladie en vint a ce point
tl'intensité que des centaines de soldats tOlU-
haient malades, en un jour, d'une maniere déses-
pérée. Le temps y fut aussi étrangement mauvais,
on eut quatorze jqurs de suite de grandes pluies;
et, commc ce líen était situé sur un tcrrain plat ,




DU LONG PARLEl\iENT. 157
humidc el argileux, il devenait impossible d'en
sortir. En lneme temps, la maladie et le départ
de la plus grande partie des troupes auxiliaires
avaient tellement réduit l'armée, qu'on ne pou-
vait plus entreprendre, sans une ruine certaine,
le projet qu'on avait fOrIné ~'abórd ~ surtout si
1'on considérait la situation d'Oxford sur la Ta-
lnise; le lord-général ne jugea pas possible,
comlne ille dit lui-merne, de bloquer cette ville,
a moins d'un corps de troupes deux fois plus no m-
breux que le sien.


Mais lorsque la pluie cessa et que les eaux se
furent retirées pour laisser les passages libres, on
apprit que le prince Robert avait conduit sa ca-
valerie, son infanterie et ses canon s a Buckin-
gham, et y avait fait un appel aux gens du pays,
déclarant que son intention était de livrer ba-
taille au général. Le général marcha avec quelque
diligence vers nuckingham pour le combattre;
mais, en arrivant a deux nlilles de cette ville, il
trouva les choses bien différentes de ce qu'il avait
pensé. Il apprit que le prince avait quitté Buc-
kingham dans une sorte de désordre, que, le soir
d'auparavant, il avait mis son infanterie a cheval
et s' était. éloigné, laissant derri~re 1 ui quelques
prOVISlOl1S.


Le lord-général conlprit qu'avec son artillerie
et son infaJ;lterie, iI lui était impossible d'at-
teindre l'ennenli. S~il eut été alors assez fo!'t en




158 I1ISTOIRE
cavalerie, ii aurait cherché á empecher le prince
Robert de faire sa jonction avec la Heine, {IU i
marchait vers Oxford avec un corps consiLlé-
l'able de cavaIerie, qu'elle amenait des parties
septentrionales de l'Angleterre, ou elle avait dé-
harqué en revenant des Pays-Bas; mais, ne pou-
vant accomplir ce projet, il renOl1(;a a marcher
sur Buckingham, ou ii envoya seulelnent un
parti de cavalerie pour y passer la nuit etenlever
les munitions qu'y avait laissées l'ennemi. Pour
luí, iI Hlarcha avec le reste de son année vers le
grand Brickhill, qui était le lieu ou il pouvait
se poster le plus favorablement pour inter-
cepter la route de Londres., pour défendre, les
comtés confédérés et pour porter secours ou se
se joindre aux forees de lord Grey de Grooby,
de sir Jóhn Meldrum et du eolonel Cromwell,
auxquels il avait écrit d'attaquer, s'il leur était
possible, les troupes de la Reine et de l'empecher
{le se réunir au Roi. Mais iI paralt que la chose
ne put avoir lieu; en sorte qu' OH laissa la Reine
et le prince Robert se réunir avec toutes leurs
troupes .. Sir William Walleravait été long-temps
vainqueur dans l'ouest (1); mais la fortune du


(1) L'éclat des avantages qu'avait remportés sir William
Waller, et qu'il devait á une bravoure peu commune, avait
augmenté en lui une audace naturelle, qui n'était pas, a
<:e fJu'il paralt, exempte de présomption. Apres la victoire




DU LONG PAHLEMENT. 159
parlelnent c<?mmení,{a a décliner presque partout.
Le lorcl-général apprit que sir William, apres


de Lalldsdown , sur le marquis de Hertford, il avait fait
publier, selon Clarendon , des ordres a t9us les j uges de paix
el constables, pour qu'ils eussent a arreter tout ce qui leur
tomberait entre les mains des débris de l'armée du mar-
quis, la croyant tellement détruite qu'il n'y avait plus qu'a
procéder criminellement contre ce qui restait , et contre le
marquis lui-meme, qu'il s'attendait chaque jour a voir
amener prisonnier. Il était done, a juste litre, le héros
de son parti; on ne J'appelait plus que GuilIaume-le-
Conquérant, et c'était sur lui que se tournaient les yeux des
partisans de ]a guerre , mécontens des dispositions modérées
que commen~ait a manifester le cómte d'Essex. Whitelocke
et Clarendon })arlent d'une lettre que eelui-ci avait éerite
nu parlement, pour l'engager a tacher de faire la paix;
conseil qu'il fondait sur le mauvais état de son armée. On
ne trouve, dans l' Histoire parlementaire, aucune trace de
eeHe leUre , mais seulement une lettre fort courte et assez
triste, ou, s~mS'- s'expliquer, le comte demande qu'on ]uí
envoie des commissaires pour conférer ave e lui sur des
choses urgentes. Les eommissaires furent nommés, mais
ne purent parvenir ):1. l'armée du eomte, paree que les.
routes étaient eoupées par les troupes royales. On voit en-
suite une IeUre du eonseil de guerre de l'armée du eomte,
contenant un tablea u déplorable de l'état OU elle se trouve;
mais nulle part un mot de paix. CeUe leUre, dont Clarendon
et Whitelocke parlent positivement, aura probablement
été supprimée. Clarendon en parle eomme de la premiere
clémarehe du eomteen cesens,et, d'apresWhitelocke, iI pa-
ralt qu'elle avaita peu pres déterminé le parti a l'éearter. La
défaite de sir 'VVilliam , a Roundaway, ajourna, a ce qu'il




160 HISTOIRE
s'etrc rcnau maitrc de prcsquc tout l'oucst et
avoir assiégé sir Ralph Hopton dan s Devizes,
ville du Devonshire, avait été attuqué, a l'im-
proviste, par des troupes venues d'Oxford,
sous le commandement du lord 'Vilmot, tota-
lementmis en déroute et forcé de se retirer a
Bristol. Le général, en recevant ces nouvelles,
forma d'abord le pl~ojet de marcher en personne
au secours de l'ouest; mais ayant appris, par les
détails qui arriverent ensuite, que les troupes de


parait, pour quelque temps, les projets contre le comle,
'lui commen!;a, de son coté, a prendre un ton un pCll plus
haut. (Histoire de la Rébellio.n, tomo 6, pago 110, 134,
148. Mémoires de Whitelocke, pago 6'7' Histoire pa,rle-
mentaire, tomo 4, col. 139 et 155.)


Sir William Waller était riche , de bonlle fámille, il avait
'été bien élevé, et avait servi, avant la révollllion, dans
l'étranger, ou il avait acquis de la réplllation. Dans une
-querelle qu'il eut aux portes de Westrninster-HaIl, avec un
parent de sa femme attaché au service du Roí, cellli-ci le
}lrovoqua te~Iement, que sir William se laissa emporter a
lu_i donner un conp sur la figure. La qllestion était de savoir
si le coup avait été donné en dedans ou en dehors de Wesl-
minster-Hall, líen privilégié. Deux témoins ·firent serment
{{U e c"était en dedans; l'affaire devenait grave, l'offensé
avait de grandes protections. Sir William ne s'en tira qu'au
moyen d'une forte amende, que, pour comble de dépit, iI
fut obligé de payer a son adversaire. Clarendon attribue a
ce motif son ardeur dans la cause dll parlement. Elle en
avait probablemen~ beaucoup d'autrcs. (llistoirc de la R(f_
be/lion, lomo G, pago 108.) (Note de l'Editcllr.)




DU LONG PARLEl\'íENT. 161


sir \Villiam avaient été tellClnent défaites qu'elles
ne pouvaient plus lui etre d'aucun secours , il fut
obligé de renoncer a toute entreprise. Voyant
d'ailleurs aquel point son armée était réduite par
l'accroissement continuel d'une violente maladie
et par le défar:.t de paie, de vetemens et des au-
tres choses nécessaires, il résolut de ne pas s'a-
vancer davantage et de ne pas eourir.le risque,
en engageant trop loin une faible armée, de la
perdre et de mettre en danger le royaume, d'au-
tant plus qu'on ne pouvait avec s-ureté éloigner
beaucoup de leur territoire les troupes des comtés
eonfédérés. Il prit done le parti de rétrograder
vers Londres et de cantonner les tristes restes de
son armée a Kingston sur la Tamise et autres lieux
adjaeens. Je laissérai quelque temps cegrand géné-
ral dans l'embarras Olt il se trouve,jusqu'a ce que
quelqucs senlaines lui aient donné le temps de re-
eruter son armée. et les moyens d'entreprendre
sa fameuse et honorable expédition pour secourir
Glocester.


-


Tels étaient, a eette époque, les succes qui, de
toutes parts, eouronnaient l'armée du Roi, qu'elle
semblait assurée d'une victoire entiere, et le
parlelnent menacé d'une ruine totale. D'un coté,
une longué maladie et le manque de tout détrui-
saient ehaque jour l'armée du général. Sir Wil-
liam Waller ,si long - telnps vietorieux clans
l'ouest, venait d'y etre eompletement défait, et en


2. 1 I




162 HISTOIRE


meme temps le lord Fairfax, et son fils sir Tho-
mas Fairfax, bien que la Providence réservat a
celui-ci dan s l'avenir la gloire la plus éminente,
avaient été mis en déroute par le comte de New-
castle, dan s le nord de l' Angleterre, ou ils com-
bauaient a la tete de tous les gentilshommes qui
tenaient pour le parlement. Le pere et le fils
avaient été repoussés jusque dans la ville de HuI!.
De l'autre cOté, les armées du Roi étaient fortes
et au completo Sir Ralph Hopton, a qui son cou-
rage et son habileté avaient valu de la part du
Roi le titre de baron, était dans l'ouesta la tete
d'une brillante armée, a laqueJIe il sernblait ne
rien manquer qu'un ennemi puissant. Les autres
troupes -du Roi étaient en liberté de choisir le
lieu qui leur plairait pour le- thétüre de leurs
exploits. Le prince Robert fut envoyé pour met-
tre le siége devant Bristol, qui avait ponr gou-
verneur le colonel Nathaniel Fiennes, second fils
du vicomte Sayo Dans l'état ou étaient réduites
les affaires du parlement, cette ville ne pouvait
tenir long-temps, et se rendít bientot au prince;
c'était une des places les plus importantes du
royaume. Le prince Maurice vint avec une autre
année mettre le siége devant Exeler , ou le comte
de Stamford s'étaitretiré, apres sa défaite a Stret-
ton, en Cornouailles. Ce lord avait Iong-temps
résisté dans les.comtés de l'ouest, avec des sncces
divers et en de chaudes rencontres, a sir Ralph




DU ·LONG PARLEMENT.
Hopton et a d'autres généraux du parti du Roí;
mais il avait succomhé, a la fin, par la perfidíe
de quelques uns de ceux qui avaient d'abord pris
partí avec lui. Exeter apres un longsiége capi-
tula, faute de vivres.


Mais le nuage qui obscurcissait dans le nord
la fortune du parlement, et menacait melne de
porter la tempete dans les lieux les plus éloi-
gnés, c'était le comte de Newcastle et .sa puis-
sante armée, devenue redoutahle aux comtés con-
fédérés et a heaucoup d'autres lieux du royaume.
Cette armée était alors la plus forte qu'il y eut
en Angleterre, bien entretenue par de grosses'
contributions levées dans le pays, et elle parais-
sait assez puissante, non-seulement pour conte-
nír toutes les troupes que pourrait lui opposer
l'Angleterre, mais pour servir au Roí comme
de boulevard contre la plus forte armée que le
royaume d'Éco8se~put efre ~n état d'envoyer au
secours du parlement d' Angleterre; cal" le par-
~ement s'était adressé aux Écossais, pour leur
demander leur fraternelle assistánce, et avait
résolu de former un covenant avec eux pour la
défense de la religion et de la liberté commune
des ~eux nations (1).


(1) L'état OU étaient les affaires du parlement donnait
aux lords, a ce qu'il p~rait, peu d'empressement a s'enga-
ger, du moins personnellement , dan s cette UOlon avec


JI.




HISTOIRE


Il plut a la divine Providence, dont-Ies voies
sont si souvent hors de la- portée des conjectures
de l'hollllue, qu'avant l'arrivée des Écossais,
cette fortearmée trouvat en Angleterre un en-
nenl"Í digne de ses craintes. La valeur personnelle
et la digne conduite de sir Tholnasl"'airfax, ré-
duit si peu de temps auparavant a la plus triste
situation, devinrent si fatales a l'armée du comte
de Newcastle, affaiblie d'ailleurs par les échecs
successifs que re«;urent plusieurs de ses corps ,
envoyés séparément en divers lieux, que les
Écossais trouverent en Angleterre un passage
.facile.


C'est une chose digne de considération, et im-
possible a passer sous silence, que l'infatigable


l'Écosse. Le comte de Rutland et le lord Grey de Warke
ayant été nommés commissaires pour se rendre en Écosse,
le premier, selon Clarendon, profita d'une indisposition
}Jour s' e"n faire dispenser, et le second, apres s' ctre excusé
sur divers prétextes, et avoir essayé du moins de faire ses
conditions, finit par refuser positivement, et fut mis a la
Tour. Les lords, craignant probablement qu'un nouveau
choix, en ce moment, ne les obligeat a un nouvel exemple
de sévérité, firent prier la chambre des cornmunes, pour ne
pas retarder l'affaire, d' envoyer toujours ses commissai-
res, en attendant qu'ils eussent nornmé Iesleurs. Les com-
missaires des communes partirent en effet tout seuls. (His-
loire de la Rébellion, tomo 6, pago 148. - Histoire parle-
mentaire, t.om. 3 ," col. 148 et 150.)


(N ate de [' Editeu/'. )




DU LONG PARLEl\lENT. 165
constance et le surprenant courage avec lequel
les deux Fairfax, pere et fils, travaillerent a con-
server au parlement les parties' septentrionales
de l'Angleterre, surtout lorsqu'on fait aUention
a la puissance des ennemis qu'il~ avaient a com-
haUre, a tous les malheurs inattendus qui leur
survinrept, et aux secours dont se grossirent
dans plusieurs occas~ons les forees de leurs en-
nemis. Si ron ne peut rapporter ieÍ les détails
complets de leurs aetions, elles y seront au moins


, indiquées d'une maniere générale.
Depuis qu'on avait entrevu la possihilité de


eette funeste guerre, et que la eommission d' en-
rMement avait eommeneé a se trouver en eonflit
ave e les ordonnanees du parlement sur la miliee,
le lord Fairfax avait été tres - aetif a lever des
troupes (1), et s'était réuni, dans eette vue, tres-'


(1) _ Lorsque le Roi eut quitté le comté d'York, les for-
ces des deux partis s'y trouverent si également Lalancées,
qu'ils convinrent de- s'en tenir a la neutralité, sans en-,
voyer de secours ni de part ni d'autre. Le traité fut conclu
entre lord Fairfax et M. Bellasis, fils ainé de lord Falcon-
hridge. Tous les gentilshommes du comté y accéderent ,
sauf le jeune Hotham et sir Edward Rhodes; mais le par-
lement, mécontent de ce traité, reprocha a lord Fairfax
de s'etre laissé duper par le párti ennemi'; d~dara qu'on
Jl'était nullement lié par un' pareil traité, et que les amis
du parlement n'en devaient pas moins continuer a Je ser-
vir de tout leur potlvoir. On essaya de meme dan;; plusieurs




HISTOIRE
intimement avec sir John Hotham et son fils,
M. John Hotham, aussi rnembre de la chambre
des communes, et gentilholnme non-seulement
actif mais heureux dans ses entreprises, tant
qu'il demeura fidele au parti qu'il avait d'abord
choisi. Lorsque la guerre eut éclaté, le lord
Fairfax, seul ou de compagnie avec M. Hothalll,
avait pris et fortifié pour le parlerr"lCnt plusieurs
villes et forts, et avait soutenu plusieul~s com-
bats sal1glans et terribles contre de puissans en-
nemis. Le cornte de Cumherland, nommé d'abord
par le Roí lord -lieutenant du comté d'York,
n'avait pas été en état de les réprimer; a peine
llleme avait - iI pu se soutenir contre eux .. Au
moisd' octobre 1642, ils avaient pris et fortifié,
malgré lui, le chateau de Cawood et la ville de
Selby; ils surprirent aussitot apres la ville de
Leeds, ou était cantonnée une partie des trDupes
du comte, a qui ils firent plusieurs prisonniers,
chevaliers et gentilshonlmf$ de rang, parmi les-
quels se trouva sir Georges Detherick avec toute
sa cOlnpagnIe.


Le comte de Cumberland luí - melne fut re-
poussé peu de jours apres jusque dans la ville.


corntés d'établir la neutralité, mais cela ne servit guere5
qu'a donner a l'un des partis les moyens de surprendre
l"autre. (Memoires de flFhitel., pago 59' - Ilistoire de la
Rébellion, tomo 5, ·pag. :137 et suiv.) (Note de l'Editeur. )




DU LONG PARLEMENT.
d'York, assiégé par lord Fairfax et M. Hotham,
et sommé de se rendre. Cela arriva environ dans
le temps de la fameuse hataille de Keynton.


Mais le comte de Newcastle entra dans York
avec des troupes plus considérahles, tandis que
le lord fairfax et le capitaine Hotham n'en étaient
pas tres-éloignés. Lorsqu'il en sortit, ils l'atta-
querent, malgré sa force, le 7 décembre, a Tad-
caster. Le combat ou plutot les différentes escar-
mouches livrées en cette occasion durerent en-
viron cinq heures, et les troupes du parlement
y surent si bien prendre leurs avantages que,
selon le rapport fait au parlement, elles tuerent
au comte deux cents hommes, et n'en perdirent
que huit, parmi lesquels se trouva le capitaine
Lister dont l~ mort fut fort déplorée dans le pays,
ou il était estimé comme un homme braveet re-
ligieux. Apres plusieurs esearmouches ,. l'armée
du parlemel1t eut le bonheur de faire sa retraite
sur Cawood et Selby, laissant le champ de ba-
taille au comte, dont les forces se lnontaient,
dit-on , a huit mille hommes, tant cavalerie que
infanterie, tandis que le lord Fairfax et le capi-
taine Hothaln n'avaient pas plus de deux mille
cent fantassins et sept compagnies' de cavalerie.
Ils en auraient eu davantage, si sir HughChol-
mley et Je colonel Bainton étaient venus, comme
on les attel1dait, avec leurs' régimens d'infanterie
et deux compagnies de cavalerie.




HISTOIRE


Le comte de Newcastle se trouva alors non-
seulement maitre du champ de bataille, mais
formidable a tous les p~ys adjacens, qui implo-
rerent le secours du parlement. Le parlement
hata l'association des comtés les plus proches
de Londres, afin d'etre en état de s'en servir
pour secourir ceux quí ét~ient les plus éloi-
gnés (1).


Le partí du Roi re<;ut alors une augmentation
de forces dan s le nord, par le dé.barquement du
colonel Goring a Newcastle avec deux cents offi-
ciers venant de Hollande, et des lllunitions de
guerreo


Le conlte de Newcastle, apres avoir qui.tté
Tadcaster, surprit la ville de Leeds, ou il prit
plusieurs ,gentilshommes qu'il for<;a de se rache-
ter tres-cheremel1t; ce qui lui dOl1na ensuite les


(1) L'occupation de Newcastle par les armées royales
était tres-incommode a la vilJe de Londres, paree qu'eIle
rendait plus difficile l'envoi des charbons de terreo Le par-
lement , po.ur exciter le zele des habitans de la eité a re-
eonquérir eette partie ,de l' Angleterre, prit une mesure
pareille a ceHe qui avait été }Jrise pour l'Irlande, et traitant
de me me le nord de l' Angleterre en pays conquis, iI or-
donna que les hiens de plusieurs grandes familles de ces
contrées seraient engagés aux preteurs ( adllenturers )qui
voudraient hasarder leur argent pour eette expédition.
(Histoire parlementaire, tomo 3, col. 118.) (Note dr:
[' Editcur. )




DU LONG PARLEMENT. 169
lnoyens de payer sa grande armée. Ce fut alors
aussi qu'il donna des eommissions aux papistes
de ee eOlnlé, pour les· autoriser a s'armer en fa-
vcur du Roi, ee qu'il justifia par des éerits pu-
hliés a eette oeeasion. En me me tenlps il proclama
traitre le lord Fairfax.


Malgré les sueees du eomte, le lord Fairfax
s'avanc;a a la tete de ee qu'il avait réuni de trou-
pes, et fut heureux en plusieurs oeeasions eontre
différentes portions de l'armée du eomte de New-
castle; une fois a Sherhurne, entre Tadeaster et
Doneaster, et une autre fois a Bradford, eontre
un partí de l'armée du eomte, sous la eonduite
du eolonel Goring, du eolonel Evers, de sir Wil-
liam Savile, et de sir John Gotheriek, qui étaient
venus avee un hon nombre de eavaliers et de dra-
gons, pour surprendre la ville de Bradford; mais
des troupes ayant été envoyées a temps au seeours
de eette ville, ils furent obligés de se retirer ave e
quelque perte. Quoique eette aetion ne puisse
etre regardée eomme une vietoire, ee fut eepen-
dant un sued~s· heureux, puisqu' on repoussa Ull
ennemi tres-supérieur en nombre.




HISTOIRE


CHAPITR,E IV.


Quelques actions de sir Thomas Pairfax dans le
nord. La Reine débarque en Angleterre. Dé-


fection de sir Hugh Chobnley et des deux Ho-
thaln. Étatde la guerredansl'ouest. Situation
des conztés confédérés. Relation abrégée des ac-
tions de sir William Waller, du colonelCrom-
well ~ de sir William Brereton el de sir John
Gell.


Sir Thomas Fairfax 6t de grands exploits dans
les mois de janvier et de février; car aucune sai-
son de l'année, aucune des tempetes de l'hiver
ne pouvaient calmer le furieux incendie de la
guerre civiJe. Le 23 janvier 1643, sir Thonlas
Fairfax partit de Bradford, a six milles de Leeds,
avec six cOlllpagnies de cavalerie et trois compa-
gnies de dragons sous le comnlandement de sir
Henri Fowles haronet, lieutenant-général de sa
cavalerie, et pres de mille mousquetaires et de
denx mille paysans arlnés (clublnen) (1) ~ sons


(1) La dénomination de clubmen répond a eelle de
maillotins , hommes armés demailletsetdemassues.De
meme que les maillotins en Franee , les clubmen furent
des hommes de la classe du peuple , soulevé~ par la souf-
france , et que ]a nécessité de se défendre avait armés des




DU LONG PARLEMENT.
le commandement de sir William Fairfax, co-
lonel et lieutenant-général de' son infanterie. En


grossiers instrumens qui se trouvaÍent sous leurs mains.
Mais ce fut dans París que se soulever-ent les maillotins de
France; les clllbmen anglais étaient les hommes de la cam-
pagne , désolés par les deux partis, et se réunissant pour se
défendre tour-a-tour contre celui qui les opprimait le plus
dans le momento May en parle ici pour la premiere foÍs ,
et sir Thomas Fairfax, dans la relation qu'il a donnée
(voir les Mémoires de Fairfax) de cette campagne du
nord, ne désigne pas sous le nom de clubmen les gens du
pays, dont i1 raconte en effet qu'il res:ut d'assez grands
secours; cependant ce nom est consacré dans les écrits du
temps. Les clllbmen jouerent plus tard un role tres-im-
portant, quoique peu actif, dans la guerre civile. Le but de
leur association, c'était le maintien de la paix et de la pro-
priété; leur véritable ennemi, c'était la guerre et ceux qui
la faisaÍent. Un parti n'obtenait gueres leur alliance que
pour prix de l'assistance qu'ils en recevaient contre un
parti plus pressant; aussi étaient-ils d'ordinaire })our le
parti le plus faible, prets a se retourner ensuite contre lui
lorsque c'était de lui que venait l'oppression. On les voit
cependant paraltre d'abord en général contre le partí
royaliste, ici pour seconder Fairfax; ensuite, au mois de
mars 1645, ils se levent en grand nombre dans les comtés
de Dorset et de Worcester, « en attitude défensive, dit
Whitelocke (Mémoires, pago 130), et refusant de servir le
Roi conformément a sa proclamation. » Leur nombre
s'augmente dans les comtés du midi , a raison des sucd~s
momentanés du partí du Roi a cette époque , et leur colere,
comme iI est assez ordinaÍre, s'accrolt avec Jeur nombre.
1000 se réunissent dans le comté de Dorset et menacent de




172 HISTOIRE
approchant de la ville de Leeds, sir Tholllas
envoya un trompette a sir William Savile, COlll-
mandant en chef de la ville sous les ordres de
lord N ewcastle, et le somlna de la rendre au
nom du Roi et du parlement; mais ayant re.«;u
de sir William une réponse déterminée et assez
insultante, il s'approcha davantage et se prépara
a donner un assaut, bien que la ville fut défendue
par une garnison de quinze cents fantassins et
de cinq cents cavaliers ou dragons, et deux ca-
nons de hronze. Sir Thomas Fairfax prit cinq
compagnies de ses meil1eurs soldats, qu'il pla«;a
dans un endroit favorable sous le commandemellt
du major Forhes et des capitaines Briggs, Lee,
Frank et Palmer; sir William Fairfax, a la tete
de son régiment et en face de l' ennenlÍ, donna l' as-


piller tous ceux qui ne se joindront pas a eux pour extermi-
ner les cavaliers. Le prince Robert essaie inutilement de
les apaiser, et les constables refusent de livrer la liste de
leurs noms (Mémoiresde Whitel. pago 131). Dans le comté
de W orcester, assemblés au nombre de 14,000 , ils font
demander au colonel Massey de se joindre a eux pour assié-
ger Hereford, alors entre les mains des royalistes. Massey y
consent, a condition qu'ils se déclareront entierement pOllr
le parlement. Alors ils demandent quelques jours et ne se
déclarent point (Ibid. pago 133 et 135); ¡mis, lorsque la
fortune se déclarant ensuite pour les parlementaires , livrera
le pays a de nouveaux oppresseurs, on yerra les clubmen
devenir pour eux un,obstacle el un objet d'inquiétude.
(Note de l'Editcur. )




DU LONG PARLEi\IENT. I7~
saut avec beaucoup d'habileté et de courage,
tandis que le lDajor Forbes en faisait autant de
son coté. Sir Thomas en personile conduisait les
troupes, encourageant tous ses soldats et les ins-
truisant a la valeur par son propre exemple.
Apres deux heures d'un combat ti~es-vif, et malgré
la bonne conduite des assiégés, sir Thomas Fairfax,
sir William Fairfax et sir Hehri· Fow]es entre-
rent dans la ville de leur coté, et le major Forhes
du, sien avec le capitaine qui l'accompagnait.
On prit dan s la ville les deux canons de bronze ,
une honne provision d'armes et de munitions,
quatre drapeaux et cinq cents prisonniers, dont
six officiers. Les soldats furent lnis en liberté et
eurent la permission de se retirer, lnais sans
armes et apres avoir preté serment de ne plus
cornhattre dans cette cause contre le Roi et le
parlement. Il y eut environ quarante· hommes
tués, dont la plupart du coté des assiégés. Le
sergent-nlajor Beaumont se noya en cherchant
a se sauver a la nage, et sir William Savile
lui-nlenle, qui ~ dans sa fuite, traversa aussi la
riviere,n'échappa qu'a grand'peine au meme
sort. On rendit publiquement a Londres des ac-
tions de graces de cette victoire. Sir Thomas
Fairfax avec son armée victorieuse marcha aus-
sitot sur Wakefield, autre quartier de l'armée
du cOlute: Sir George Wentworth qui y cornlnan-
dait en chef, prit la fuite et le lui abandonna.




HISTOIRE


Peu de temps apres il marcha vers Tadcaster. A
son approche les troupes du eomte, .bien que
nOlnbreuses, prirent la fuite et abandonnerent
leurs retranehemens.


Depuis eette époque, a peine dans tout le eours
du pril1temps suivant se passa-t-il une quin-
zaine sans que dans eette partie du l10rd les
troupes du Roí ne re«;ussent quelque aeeroisse-
ment de force. Au mois de février, le général
King, habile offieicr éeossais, arriva de Hollande,
débarqua a NeweastIe, se joignit au eomte et
se rendit a York avee des armes pour six mille
hommes. Dans le melne mois, la Reine venant
de Hollande, débarqua aussi a Sunderland (1)


(1) La Reine ayant débarqué a Bridlington, se logea sur
le quai ou l' on avait préparé une maison pour la recevoir;
mais pendant la nuít BaUen, vice-amiral du par]ement,
qui l'avait manquée au passage, vint avec quatre vaisseaux
dans la radc de Bridlington, et vers le matin s'approcha
le plus pres qu'il put de la maison qu'habitait la Reine, sur
laquel1e i1 tira a mitrailIe pendant plus de deux heurcs.
La mitraille pénétra, dans la chambre de la Reine, qui fut
forcée de se lever précipitamment et de s'enfuir dans la
campagne, ou elle se réfugia sous un banco Un homme fut
tué a peu de distance d'elle. Les lords, informés de ce
fait, ordonnerent qu' on écriVlt au comte de Warwick }Jour
qu'il en informat; mais cet ordre n'eut aucunc suite, et la
chambre des communes se c~ntenta d'avertir le comte de
Warwick de prendre ses précautions contre les vaisseaux gui
avaient amené la Reine, et qu' on soupgonnait de quelgue




DU LONG PARLEMENT. 175
avec une grande quantité d'armcs et de munitions,
et amenant avec elle plusieurs ofllciers de mar-
que; elle se rendit a York escortée par le comte
de Ne,vcastle.


Vers le meme temps, le' COlnte de l\:Iontrose,
jeune lord écossais , d'une grande réputation dan s
son pays, et qui dans la guerre d'Écosse s~était
rl1011tré un des })lus actifs et des plus zélés co-
venantaires, abandonna son parti, et accompagné
du lord Oglcsby, s'enfuit d'Écosse avec cent vingt
chevaux, et vint rejoindre la Reine a York; sur
quoí ces tleux lords furent proclamés a Édimbourg
traltres au Roi et au pays, pour s'etre échappés
d'Écosse au mépris de leur covenant, dan s 1'in-
tention d'aider l'armée papiste; cal' c'était ainsi
que les Écossais nommaient l'armée du comte de
Ne"wcastle.


Le parlement re<jut bientot apres un autre
coup bien fAcheux, par la défection de sir Hugh
ChoLmley, melnbre de la chalnbre des cornmunes
ou iI était tres-estilné. Il avait été, comme 011
1'a déja dit, employé par le parlelnent en qualité
de commissaire dans le nord avec le lord Fairfax
et sir Philippe Stapleton, et était alors revetud'un
emploi de confiance, celui de gouverneur de Scar-


dessein contre Hull. (Clarendon, Histoire de la Rébellion ,
tomo 5, pag. 247' -llz'stoire parlemen t aire , tom.· 3, col.
90') (Note de l' Edileur. )




HISTOIRE
:borough, place tres-inlportante. II trahit les in-
tércts qui luí étaient confiés, abanelonna le parti
qu'il avait clnbrassé et rejoignit la Reine avec
trois cents hommes. Il fut alors accusé de haute
trahison par le parlement; Dlais ce crime ne lui
tourna pas si mal qu'a plusieurs autres qui, vers
le meme temps, avaient de mClne trahi les de-
voirs de leur empIoi. La ville de Scarborough
fut laissée entre les mains d'un capitaine parle-
mentaire, connu sous le nom de Browne Bushell.,
que beaucoup ele genscroyaient elisposé a la garder
pour le parlement; mais il se révolta aussi et la
livra a ses ennemis.


Lors du débarquement du général Kinget de ce-
luide la Reine quile suivitaussitotapres, quelques
circonst~nces commencerent a faire soup<;onner
que les deux DlalheureuxHotham, le pere etlefils,
trahissaient le parlement (1). L'active vigilance


(1) Sir John Hotham , homme d'un caractcre hautain et
moros e , s'était fait détester I)ar son avarice et la rudesse
de ses manieres, surtout envers ses inférieurs. Sur CJuel-
ques différends qu'iI eut avec lord Fairfax, dont iI refusait de
reconnaitre l'autorité, le parlement avait formé le projet de
lui oter son commandement; instruit de eeHe résolution
par des leUres qu'il intercepta, il songea a se tourner du
coté du Roi; son fils, contre lequel iI parait qu'on avait
con~u quelques soup~ons, fut arrt!té et mis en prison a
Nottingham; s'étant échappé de sa prison, il traita secre-
tement avec le cornte de Newcastle, el se rendit a. HuIJ ,




DU LONG PARLEl\IENT. 177
tle quelques homnles de' son parti Jéeouvrit
leur trahison; mais on en parla long-temps sans
obtenir plus de cOllfiance que n'en obtenaient les
prophéties de Cassandre; et lorsque la ehose de-
vint év idente , les honnetes gens éprou verent n011-
seuleluent une grande surprise, mais encore une
vive douleur a la vue d'une telle eireo11stance.
On verra plus au long dans la suite les détails
de eette déeouverte et tout le mal qu'elle aurait
causé a~ parlement si elle n'eut été prévenue a
temps. Tous deux furent accusés dan s le parle-
filent, saisis a Hull et envoyés a Londres OU ils
demeurerent long-tenlps prisonniers a la Tour
avant lenr proct~s et leur exéeution.


ou l'état des affaires du parlement en ces cantons, permit
au pere et au fils, san s se déclarer encore ouvertement
ponr le Roi , de se tenir contre le parlement dans une sorte
d'hostilité. (Voir les Mémoires de Fairfax.) Le parlement,
dans éette situation , jugea nécessaire d'user a son tour de
ruse : iI envoya a Hull sir Matthcw Bointon, beau-frere de
sir John, avec le titre secret de colone1 de ]a garnison de
Hull et de membre n'un comité chargé d'avance du gou-
vernement de la place, lui donnant mission de débaucher
les soldats de S011 heau-frere. Il y réussit si bien, que sir
John, s'apercevant trop tard de ce que ron tramait contrc
lui, s'enfuit a Beverley ; ses soldats l'y poursuivirent , et le
ramenerent a Hull, d'ou son beau-frere l'envoya prison-
nier a Londres avec sa femme et ses enfans. Lord Fairfax
fut nommé gouverneurde Hull. (Mémoires de Whitel., pago
67. - Histoire parlementaire, tomo 3, col. 145- 147' )


(Note de l' EditellJ'.)
')., 12




HISTOIRE


Tous ces désavantages, la force cr.oissante des
ennemis du parlelnent, la défection de ses amis,
ne purent abaUre le lord Fairfax et son fils, qui
persisterent avec un granel courage dans leur eu-
treprise; et levant tous les club,nen (1) du pays
pour recruter le petit 1100nbre de troupes gui lenr
restait, se mirent en état de faire, pendant quel-
que temps, une ferlne résisfance et d'agir utile-
nlent, en divers lieux, contre plusieurs partis de
la nombreuse arnlée du cornte de Newcastle.
Sir Thomas Fairfax remporta meme, a 'Vakefield,
une victoire qu'il faut appeler, non pas étrange,
mais miraculeuse , bien que le récit que j'en vais
faire ne renferme rien dont la vérité n'ait été gé-
~éralement reconnue. Une telle victoire, lorsque
l' on considere l' énorme disproportion des forces
et tous les désavantages contre lesquels on eut a
lutter, prouve aquel point le succes peut cou-
ronner les entreprises audacieuses et justifie le
vieux proverhe audacesfortuna javat.


(1) Dans les eomlés du nord, et particulierement dans le
eomté d'York, presque tous les gentilshommes s'étaient
rangés dans le })arti du Roi; iI était done assez naturel que les
paysans, sans défense eontre les royalistes, portassent un


secours un peu plus actif qu'ailleul's aux: troupes par]emen-
taires; cependant iI n'est question en ancun Jieu de faits
d' armes marquans de la part des clubmen. Les secours
qu'en tirait Fairfax consistaient surtout en vivres pour la
subsi.stance de son armée. (Note de l'J!.'diteur.)




DU LONG PAHLEMENT. 179
Le lord -Fairfax, général des troupes du parlc-


rllcnt dans le nore!, ordonna, le 20 mai, que
1'0n tirat des garnisons de Leeds, Bradford, Ha-
lifax et Howley, un parti cOluposé de mille fan-
tassins, de trois eOlllpagnies de dragons et huit
eseadrons de eavalerie, qui furent mis sous les
ordres de sir Thomas Fairfax. Sir Willialn Fair-
fax et le sergent-major-général Gifford COlnman-
daient sous lui l'infanterie. La cavalerie était
divisée en deux eorps. Quatre eseadrons étaient
cOlnmandés par sir Thomas Fairfax en personne,
les quatrc autres par sir Henri Fow-Ies. De How-
ley, qui était le lieu de leur rendez-vous, ils se
dirigerent vers \;Vakefield et arriverent devant
eette ville a quatre heures du matin. Les gens dc
la v iHe étaient IJrets a les reeevoir et envoyerent
eontre eux quelque eavalerie pour les aUaquer,
avee des 11lousquetaires ponr border des haies qui
conduisaient a la ville. Il y avait dans 'Vakefield
trois -l1úlle hommes de pied et sert eseadrons de
eavalerie, sans COlupter le régiment du cololJel
Lampton, qui arriva dans la vilJe apres que les
troupes du parlcment y furent entrées. Mais, des
le prenlÍer choc, les troupes du parlement lnirent
en fuite la eavalerie ennemie, etl'infanterie chassa
tes lnousqnetaires quí hordaiel1t les haies, jus-
([ues dans la ville, qu'elle assaillit en deux ell-
droits l10mmés 'Vrengate et Northgate. Au hont
d'une heure de COlllhat, ils prirent une des pieces


12.




11lSTOIH E
des enncluis, la tournerent cOlltre eux, et, a u
meme instant, entrerent dans la ville l)al' les
deux endroits a la fois. Quand les harricades fu-
rent enfoncées, sir Thomas Fairfax, avec la cava-
lerie, se jeta aussi clans la place et clébarrassa la
rue. Il y eut la un terrible et sanglant cornbat, oi!
le colonel Goring fut fait prisonnier par le lieu-
tenant Mauhew· Alured, mernbre de la chambre
des communes. Cependant il restait sur la place
du marché trois escadrons de cavalerie et le ré-
giment du colon el Lampton. I~e major-général
Gifford leur envoya un trompette pour leur offrir
quartier, s'ils voulaient mettre bas les armes. H
n'en regut qu'une réponse dédaigneuse. Alors il
fit feu sur eux avec une piece de leurs propres
canons, el la cavalerie les chargea aussi avec une
grande impétuosité, en sorte qu'ils furent bientot
chassés de la viUe et tous leurs officiers faits pri-
sonniers. On prit, en outre, 27 enseignes d'in-
fanterie, troi8 cornettes de cavalerie et environ
quinze cents soldats. Les troupes clu Roi furent
également forcées cl'abandonner, dans leur fuite,
quatre piecescl'artillerie et des nlunitions qui tom-
herent au pouvoir de l'armée du parlement. Apres
avoir ainsi occupé la ville, sir Thomas Fairfax
se trouva trop faible pour la garder en me me
telnps que ses prisonniers. Il l'abandonna done
et se retira avee ce riehe butin.


Cettegrandevictoirede 'Vakefield parutconllne




DU LONG PARLEl\'IENT. 18 r
une de ces lueurs ([ni précedent la mort. llen
apres, ces memes tronpes furent completement
battues par le comte de Newcastle, qui occupait
tous ces comtés et ne se laissa jamais aUeindre par
la totalité de l'armée parlementaire. Il avait con-
auit toute sa campagne ave e une g'rande habileté,
et, ne trouvant plus d'ennemis dans la plaine,
il se mit en marche pour assiéger lord Fairfax
dans B ull, ce qui fut, dit-on, une faute de sa
l)art, áinsi que le siége de Glocester entrepris,
peu apres, par le Roi.


Telle fut la triste et continuelle guerre que les
comtés du nord eurent a supporter pendant l'hi-
ver. IJs ne souffraient pas seuls tant de maux.
Presque aucun comté d'Angleterre n'en était
exempt. L'ouest avait été le théatre .des plus
cruelles tragédics. Plusieurs années et de petits
corps de troupes des deux partis y furent aux
majns pendant le meme temps, sans aucune in-
tcrruption.


De tous les officiers qui, dans rouest, combat-
taient po u!' le Roi contre .le parlement, sir Ralph
Hopton était celui qui, par son zele infatigable et
la réputation dont iljouissait, s'était élevé au pre-
lnier i'ang. Il parut constamment, comme on le
yerra dans la suite, a la tete des troupes royales;
mais ses succes furent tres-divers et melés de
continuelles vicissitudes.


Le lnarquis de Hertford, d'un l'ung bien plus




UISTOIIlE


élevé el investi, pal' le Roí, de pouvoirs bien
plus étendus, ne pouvait jQuer, en rase ea m-
pagne, un rOle aussi eonsidérable que sir Ralph
lIopton; eependant il était raremel1t. inaetif et
s'oeeupait soit a inquiéter des villes, soit a lever
de petits corps. Ces deux ofliciers n'eurent a com-
haure, au commencement de la guerre, aueun
général important et qui eut re~u sa commission
du parlement. Ils eurent affaire a de simples gen-
tilshommes de ees comtés. Les principaux étaient
sir Francis Popham et ses fils, 1\'1. Strode et quel-
ques franes tenanciers du pays, qui semblaient
bien comprendre leurs droits et de quel intéret
était pour eux le sort de l'État. Enfin le eomte de
Stamford, homme d'un caractere tres-ferme, et
qui avait été eluployé dans le comté de Leicester
eontre :M. Hastings, en vertu d'une cOlnmissiol1
du parlement, re~ut l'ordre de se rendre dans
l'ouest.


Le eomte de Stamford fut déclaré lord-général
de la partie méridionale du pays de Galles et des
quatre eomtés adjacens, Glocester, ,¡y orcester,
Hereford et Chester. Il avait le droit de lever
des troupes dans ces comtés, d'instituer des of-
ficiers, d'exercer les soldats, et de eombaUre
quiconque s'opposerait a lui. Lord Grey, fiLs et
héritier du comte de Stamford, lui succéda dans
ses fonctions précédentes de lord-lieutenant des
eomtés de Leieester, de Nottingham, de Derby,




DU LONG PARLEMENT. lE):')
de Ilutland et de Lineoln, ou il continua la guerrc
contre M. Hastings, le eomte de Chesterfield et
les autres adversaires du parlelnent.


Le eomte de Staluford) en arrivant dans l'ouest,
ohtint un sued~s contre sir Ralph Hopton, a
quí il lit lever le siége de Plynlouth; mais peu
apres, sir Ralph Hopton:J par une fuite simulée,
fit tomber dan s une embuscade une partie des
troupes du eomte, eonduites par un de ses lieu-
tenans qu'il défitcompletement. Le 15 mars 1645,
il conclut avec lord Stamford une treve de vingt
jours. A l'expiration de eette ~reve, le cOlute
rcprit la campagne, el reluporta d'abord plusieurs
avalltagcs; mais la défection du jeune Chudley,
fiIs de sir John Chudley, qui, dans plusieurs oc-
casions, avait procuré la victoire aux troupes
du parlement, vint bientot la lui ravir. Lord
Stamford fut contraint de s'enfermer dans la villc
cl'Exeter, oil 1I0pton et Chudley vinrent l'assiéger.
Qual1d le princc Maurice fut venu prendre le
commandelllent de cc siége, le comte de Stamford


. lui rendit la place a des conditions avantageuses.
l\lalgré tous ces désastres, le parlement ne dé-


sespéra point, vers la fin de Illai 1643, de reeon-
quérir tous les COll1tés de l'ouest, par l'aetive
valeur de sir William 'Valler quí, a eette épo-
que, y remporta de grands avantages, ainsi que
dans la principauté de Galles, et dont le non1
était devcllu la terreur de ses ennemis. C'était un




HlSTOIHE


hom me a qui ses voyages et ses services sur le
continent avaient fait acquérir une grancle expé-
rience militaire; son jugement était sain, son
activité prodigieuse, et, placé d'abord dans un
l~ang assez obscur, il s' éleva, dans le cours de
la guerre civ ile, au poste le plus éminent.


Vers le temps de la bataille de Keynton, sir
\Villiam Waller fut nommé colonel d'un régi-
ment de cavalerie. Dans le cours de l'hiver sui-
vant, il se fit remarquer par plusieurs beaux
exploits. Il prit le chateau de Farnham, contri-
bua a enlever Portsmouth au colonel Goring, et,
se joignant au colonel llrown, citoyen ele Lon-
dres, qui avait pris les armes au C01nmencement
de la guerre, et s'y comporta glorieusement jus-
qu'lt la fin, il rendit, soit a "\Vinchester, soit aux
environs, d'importans serviees a la eause parle-
Dlentaire. Passant ensuite avec le eolonel Hurrey
et quelques autres dans la partie occidental e du
eomté de Sussex, il mit le siége elevant Chiches-
ter, ville OU s'étaient renfermés heaueoup ele
gentilsholnmes avec une grande quantitéd.'armes
et ele munitions pour le service du Roi.


Arrivé devant Chichester vers le lnilieu de
déeembre, sir William 'Valler y fut joint par
quelques troupes, eavalerie et infanterie, que lui
amenerent le eolonel Morley, memhre fort zélé
de la chambre des eom lllunes , qui avait du eré-
dit dans lec"mte de Sussex, et sir J\1iehel Le~vesey,




DU LONG PARLEMENT. 185
chevalier du comté de Kent. Sir William disposa
ses batteries, et fit tous les préparatifs du siége
avec heaucoup d'art; mais avant de faire hattre
en breche, et pour épargner l' effusion du sang,
du consentement de tous ses offiGiers, il fit som-
mer la place par un trompette a des conditions
que les assiégés repousserent d'abord, les jugeant
trop dures. Cependallt la ville se rendit au hout
de huit jours, sallS autre condition que la vie
sauve et un traitement convenable. Les prison-
niers de marque furent aussitOt envoyés a Lon-
dres. C'étaient sir Edward Ford, grand shériff
de Sussex, sir John l\Iorley, le colonel Shelley,
1\:I. Leaukner, le colonel Lindsey, le lieutenant-
colonel Porter, le Inajor Dawson, le major Gor-
don, le docteur King, éveque de Chichester, soi-
xante officiers, quatre cents dragons et autant
de fantassins. Sir William '¡Yaner eruploya le
luois de mars suivant a lever des troupes dans
les -comtés de Fouest : il avait pour principallieu-
tenant sir Arthur Haslerig, membre de la cham-
bre des communes , qui, dans une foule de ren-
contres, donna de brillantes preuves de bravoure.


Apres avoir rassenlblé des forces assez con sÍ-
dérables, sir William 'Valler partit de Bristol
le 1 9 lnars, et lnarcha vers Malmesbury. Le co-
lonel Herhert Lunsford, fiel' gentilhomme et
brave soldat, en était gouverneur. A l'approche '
.les assiégeans , iI fit sortir sept escadrons de ca-




HISTOIRE


valerie, pour aller a leur rencolltre; mais hol's
d'état de soutenir le choc des cavaliers de sir
\iVilliam, ils prirent la fuite; quelques uns ren-
trerent dans la ville; la plupart, jugeant qu'ils
n'y seraient pas en su reté , se disperserent en
tous sens.


Sir William donna l'assaut le meme jour; ayant
éehoué, il se logea sous les remparts, déterminé
a tenter le lendemain un assaut encore plus rude ;
¡nais les assiégés ne jugeant pas la place tenable,
demanderent un pourparIer, et se rendirent, la
vie sauve. Sir William prit a l\fahllesbury une
pieee de canon, trois eents prisonniers, dont les
prineipaux étaient le eolonel Lunsford , le eolo-
nel Cooke et vingt officiers; il prit aussi de riehes
11lagasins., Cette eonquete ne eOlIta pas heaueoup
de sang aux vainqueurs ni aux vaineus.


Peu de jours apres, il obtint une victoire eon-
sidérable, pres de Gloeester, sur le lord IIerhert
de Ragland, qui avait mis le siége elevant eette
ville avee une grande armée de Gallois. Voici en
})eu de mots le réeit de l'aetion : sir William
s'approeha de Cireneester avec ses troupes, et,
pour déguiser son projet, fit lnille de vouloir
aUaquer eette ville; 11lais c'était a Glocester qu'il
en voulait, et il avait en soin d'avanee de faire
avertir de son dessein les habitans de eette
ville. Ses bateaux plats, propres a servír par
terre et })ar eau,' et qui lui avaiellt été aUlCnés




DU LONG PARLEMENT. 187
en guise de ehariots, devaient transporter ses
troupes sur la Severn, par-deHl Glocester, 011
il devait tomber sur les derrieres de l'armée
galloise de lord HerJJert, au moment OU celui-
ci s'y attendrait le lnoins. Il avertit les troupes
renferrnées dans Glocester d'avoir soin d'atta-
quer l'armée de front, au moment OU il tom-
berait sur ses derrieres. Ce plan réussit aussi
heureusement qu'il avait été sagement combiné.
Au moment OU lord Herbert était occupé ave e la
garnison de Glocester, et pensait, vu l'infériorité
du nornJJre, pouvoir la détruire entierelnent,
~ir lViIliam, avec son armée, s'étant approché
de I1ighnalll, quartier des troupes galloises, atta-
qua subitement les derrieres de l'armée de lord
Herbert avec une telle impétuosité, que tout fut
m is en déroute, et que la fuite aurait été géné-
rale, s'ils eussent euquelque moyen des'échapper.
011 tua sur place cinq cents Gallois; on prit un
lnillier de solclats et tout ce qu'ils avaient d'ar-
mes et de munitions. Le reste fut entierement
dispersé, et lord Herhert lui-meme ne se sauva
que par la fuite, et gagna Oxford.


Apres cette grande victoire, sir \Villiam 'Valler
llwrcha vers Tewkesbury. A son approche, la
garnison de cette ville po nI' le Roi prit la fuite et
l'en laissa lnaitre. De la, s'avan<;ant dan s le pays,
il surprit plusieurs partis de cavalerie , leur prit
f[uclques. artues , des pistolets, des carabines ct




188 HISTOIRE
16,000 livres en argent, puis rapporla son huLin
a G locester.


A peu de temps de la, il prit Chepstow dans le
comté de Monmouth, il Y saisit plusieurs de ceux
qui étaient entrés dan s la conspiration pour lí-
vrer Bristol, et qui, apres la découverte du com-
plot, avaient fui dans ce comté. Il y prit aussi
un vaisseau appelé le dragon de Bristol, apparte-
nant a des gens qu'il regardait comIne ennemis, et
chargé de rÍchesses. Il s'en empara comme d'un
légitime et tres.-.utile butin.


De Chepstow il nlarcha rapidemellt vers 1\1on-
lTIouth. La vine se rendit presqu'aussitot a lui par
composition. Apres y avoir mis une garnison; il
marcha a Ushe et somma les gens du pays de ve-
nir le joindre. Plusieurs se rendirent a son invi-
tatÍon, entre autres le fils de sir 'Villianl1\Iorgan
de Tredegan, qui lui amena cinq cents hornmcs
armés et lui apporta quelque argento 1\1. Herbert
de Colebrooke leva aussi deux n1ÍlIe hommes eL
s'empara d'Abergaine pour le parlemellt.


Au milieu de ce cours brillant de prospérités,
sir William 'iV aller rec;ut rordre de quitter
l'ouest pour rejoil1dre l'armée du lord-général
Essex. L'armée du Roi en ayant eu avis, le prince
1\1aurice entreprit de lui couper le passage. L'in-
tention de sir William 'Valler était de regagner
Glocester avec ses troupes. Ayant donc envoyé
ses canOllS et SOl~ hagage a Aust sur la 'Vye, avec




]) U L o N G PAn L E M E N T. 189
son infantcrie pour le défendre, ii résolut de
tomber, avce sa eavalerie et ses dragolls, sur
l'arnlée du prinee Mauriee et de s'ouvrir un pas-
sage, ce qu'il exéeuta avee un grand sued~s et peu
de perte; puis, poursuivant sa. route, iI coupa
tous les ponts derriere lui, ce qui enlpeeha le
prinee Mauriee de le poursuivre. Si le prinee
avait pris ce moyen le premier, sir \iVilliam 'Val-
ler aurait pu etre retenu dans le pays de Galles
et dan s une situation tres-clésavantageuse; mais,
apres avoir ainsi eoupé les ponts, sir William
'Valler, se trouvant a l'abrí de la poursuite du
prince l\laurice, reprit, avee l'aide du gouver-
neur Massey, plusieurs villes occupées par les
troupes royales, entre autres, Tewkesbury, d' 01,1
s'enfuit sir J\iauhe,v Carew. Sir William y fit
beaucoup de prisonniers, y prit beaucoup d'armes
et de riehesses, y mit une garnison, et de la,
cOl1formérnent a son premier dessein, arriva sain
et sauf a Glocester.


Il n'y demeura pas long-telups; mais, ayant
été dispensé de rejoindre l'arlnée du lord-géné-
ral, il marcha, avee sa célérité ordinaire, sur
Hereford, ou iI arriva au moment 00. ron s'y
attendait le moins. Il prit eette ville par capi-
tulation et y fit plusieurs prisonniers de haut
rang, entre autres le lord Scudmore, avee cinq
{les membres révoltés de la chambre des com-
Jl1unes, sayoir : le fils GU lord SCUd1110re, le co-




19° I-lISTOIHE
lonel Herbert Price -' sir Richard Ca ve, le lieute-
nant-colonel Conisby, 1\1. COllisby, et, outre cela,
sir Walter Pye, sir \iVillialll Crofts, le lieute-
nant-colonel ThOlnas })rice, le sergent-lnajor l\fin-
tridge, sir Samuel Amby, le sergent-lnajor Dal-
ton, le capitaine SOlnmerset, le capitaine Sclater,
le docteur Rogers, le doeteur Goodwin, le doc-
teur Evans, et plusieurs autres qui furent tous
eonduits a Glocester.


Trois jours apres, il surprit la ville de Leiccs-
ter dans le lnelne eornté, a deux nlÍlles de Here-
ford; il Y fit un hon hutin, désarma un grand
llolnbre de partisans du Roi et mit garnison dans
la ville.


Le parti du Roi eommen<;a a eraindre que sir
William W aller -' allant ainsi de sucees en sueees,
ne parvint a surprendre ,V orcester et Ludlow. Le
prince Mauriee partit done d'Oxford avec une
nombreuse eavalerie, pour aller l'attaqucr de
concert avee le marquis de Hertford el tacher de
l'arreter dans ses progres; mais sir \Villialn,
arres avoir halayé, ave e son active armée, tous
les pays environnans et avoir désarmé, dans les
comtés de Wilts et Son1lnerset, un grand nombre
des partisans du Roí, arriva a Bath avee une
année fort acerue en forees et en réputation. Il y
trouva sir Edward Hungerford, sir John Horner
et l\:I. Strode, qui s'unircnt a lui pour rcpousscr
le prince l\faurice 'ct le marquis de Ilertford. Ce




DU LONG PARLEMRNT. 19 I


canton devint le thé:Hre de comhats terribles et
fréquens, soutenus long-telnps et terminés, des
deux cotés, par de savantes et courageuses re-
traites, quand la nuit suspendait la fureur des
comhattans; 11lais sir ';Villialn Waller, dont les
actiolls, dans ce líeu, lnéritent d\~tre rapportées
en détail, obtint le plus souvent la victoire. Il
demeura, a la fin, maitre du champ de hataille
et repoussa les ennemis jusques dans la ville ap-
pelée les Devizes, ou il les suivit et les assiégea.
La perte, clan s ces différentes rencontres, de-
meura tres-incertaine, étant diverseInent rap-
portée par les deux partis, qui eurent en un grana
nombre d'occasions la liberté d'enterrer leurs
lTIOrts. lVfais, du coté du parlement, on perdit
un major, un lieutenant et deux cornettes. Sir
Arthur Haslerig fut blessé, mais peu dangereu-
sement. De l'autre coté, outre les soldats' dont le
nombre est demeuré incertain, il Y eut quelques
hommes de qualité de tués, entre autres, sir
Bevile Greenville, le lieutenant-colonel Ward,
le major Lowre et cinq Oll six capitaines. On dit
que sir Ralph Hopton, le comte de Carnarvon et
le lord Mohun, furent blessés.


Le prince l\faurice et le marquis de Hertford
étaient retournés a Oxford, et sir Ralph Hopton,
assiégé dans les Devizes par sir William "Valler,
commeut¡ait a parler de se rendre, lorsque la for-
tune de la guerre changea tout a coup. L'arlnée




192 IUSTOIRE
tlu lord-général Essex, airaiblie' par la 11laladíe
et d'autres souffrances, ne pouvait, en anenne
maniere, contenir Oxford, ni empceher qu'on en
fit sortir des renforts; en sorte que lord \;Vilmot,
a la tete de troupes fraiches, tomJ)a inopinément
sur l'arlnée de sir 'iVilliam '¡Yaller, qui fut
alors, comme on l'a dit, entierement défaite,
dispersée et détruite. Lui-meme" ehereha sa su-
reté dans la ville de Eristol, d' ou, peu de jo urs
apres, aeeompagné de quelques gentilshommes,
il se rendit a Londres, ou il fut re<;u avee de
grandes marques d'affection et la promesse qu'on
ferait les derniers efforts ponr lui fournir une
autre armée (1).


Les troupes du Roi semhlaient avoir entiere-


(1) Clarendon attribue la défaite de Walter a sa pré-
somptÍon et a son mépris pour l'ennemi qu'il avait si fré-
quemrnent vaincu; quoi qli'iI en soit, si ses précédens
services n'eussent appartenu qu'a la cause natiónale , ils ne
l'auraient peut-etre pas mis a }'abri, dans cette ocr~sion,
des méfiances ou de I'ingratítude popuJaire; mais Waller
avait servi un parti qui avait besoin de lui pour l'opposer a
des ennemis encore plus pres d'eux que les armées du Roi.
Waller, apres sa défaite, fut res u a Londres comme en
:triomphe : les milices allerent au deval11 de luí; iI fut
nommé commandant en chef des troupes de la cité, et,
d'apres les promesses qu'on lui 6t de luí lever promptement
une nouvelle armée, iI paralt qu'on croyait n'avoir qu'a le
consoler. (llistoire de la R¿úellion, tomo 6, pago 185.)


(Note de l'Editcur.)




DU LON G PARLE:\l EN T. 19~
lnent accolnplil' reuvre qu' elles avaiententreprise,
elles se trouvaient presque seules maltresses de
l'ouest et de la plus grande partie dunord de l'An-
gleterre. Les armées du lord Fairfax et de sir vVil-
liam Waller étaient détruites. Cependant, dans
tous lescomtés,lafortune n'était'passemblable. En
plusieurs lieux, les partisans du parlelnent étaient
en état -' non-seulement de se défendre, mais de
gagner du terrain sur leurs ennemis. A la vérité
eette guerre se bornait généralement a des ren-
contres entre des partís peu nomhreux, a des
préeautions pour se maíntenir, et a la prise de
quelques villes sur le parti du RoL C'était ainsi
(lue les ehoses se passaient dans les corntés de
Chester, de Lancaster, de Stafforcl, de Derby,
Leicester, Nottingham et d'autres endroits, dont
je dirai quelques lnots lorsque j'aurai d'abord
fait eonnaitre l'heureuse situation dontjouirent
au contraire les comtés de l'est. Pendant tout
l'hiyer sJ~ivant et rnerne pendant toute la durée
de eette sanglante guerre , ta~ldis que le nord et
l'ouest étaient le siége d'une luUe terrible et
la proie des plus grandes et des plus puissantes
armées des deux partis, tandis que les comtés
dont jeparlerai tout a l'heure étaient sans cesse
tourmentés de mouyemens de troupes et de pe-
tits comhats, et pillés par les deux partís, les
comtés de rest, tels que ccux de Suffolk, Nor-
foIk, Cam hridge, Essex, Herlford, Huntíng<lon ,


2.




194 HISTOIRE
demeurerent entierement exempts de la guerre
civile. lIs s'étaient confédérés sous la protec-
tíon du parlement qui les avait autorisés a se
défendre mutuellement et a lever des forces con-
tre les ennemis de la cause parlementaire. On
doit naturelIement aUribuer en partie le bonheur
et le repos dont iLs jouirent, au concert d'opi-
níon qui les dirigeait tous dahs le meme sens;
et il est vrai que le peuple de cescomtés se
montrait plus unanime dan s ses sentimens que
celui d'aucune autre partie de I'Angleterre; mais
c'ét.ait surtout le peuple, car une grande partie
de la noblesse, et entre autres les hODlmes de
rang, s'y montraient fort mal affectionnés pour le
parlement, et n' épargnaient pas les efforls pour
faire prévaloir le parti du Roi et le seconder
contre les parlementaires. Il eut été possible qu'ils
parvinssent a jeter entierement ceUe partie du
royaume dans le parti du Roi, ou du moins, selon
toute probabilité , ils l'auraieút remplied'autant
de troubles et de calamités qu'aucune autre por-
tion du pays, et auraient certainemel1t empeché
la confédération, s'ils n'avaient été réprimés de
bonne heure par les soins du parlement, et surtout
par les utiles services que rendít a sa cause un gen-
tilhomme, M. Olivier Cromwell, de Huntington,
lnembre de la chambre des communes, homme
dont la sagesse, la valenr et la vigilance ne fu-
rent pas moins utiles en cette inlportante affaire




DU LONG PARLE1.\lENT.
qu'elles ne devinrent ensuíte remarquables par
les plus grands services et les plus hauts faits
d'armes quí aient eu 1 ieu dans tout le cours de la
guerreo Cornme il a pIu a Dieu d'élever ensuite
cet homme aux plus grands commandemens (1)
et de COUl'onner toutes ses entreprises d'un tel
succes, qu'il est devenu en un petit nombre d'an-
nées un des principaux appuis du parlement et la
verge la plus puissante contre ses ennemis, il ne
sera pas hors de propos de rapporter ici la série
de ses actions clans l'intervalle qui s'écoula entre
la batailIe de Keynton et ces temps d'adversité
qui précéderent pour le parIement le siége de
Glocester.


Le premier exploit de Cromwell ent lieu vers
le milieu de janvier, lorsqu'il entreprit d'assurer
au parlenlent la possession de la ville de Cam-·
bridge. Les villes d'université étaient, de toutes,
les plus disposées en faveur du parti du Roi; les
universités regardant tous les parlemens, et par-
ticulierement celui-ci, comme les plus grands en-
nemis des honneurs ecclésiastiques, sur lesquels
se fondent leurs espérances.


(1) (( Je suis un homme, dit Cromwelllui-meme dans une
conférence tenue a Whitehall, qui, des les premiers temps
de mon service, me suis vo. soudainement élevé des petits
emplois a de plus grands. l) (Harris, Yie de Cromwell,
pago 78.) (Note de l' Editeur. )




HISTOIRE


La ville de Cambridge avait done emhallé,
par eette raison, une grande quantité de la vais-
selle de ses colléges pour l'envoyer au Roi, ce qui
lui aurait f~it une sornme considérable. Crom-
well prévint cet envoi; il avait, en vertu d'une
commission du parlement et du lord - général
Essex, levé un escadron de cavalerie (1), a la
tete duquel il se }'endit dal1s le pays avec autori-
sation d'y lever un autre corps de tl"oupes si l'oe-
casion l'exigeait. 11 arl"iva a Calnbridge assez tot
poul" s'emparel" de la vaisseUe qui pal"tait pour
Oxfol"d; mais il avait encore, en chemin, rendu
un autre sel"vice a la cause parlementaire. Sir
Thomas Conesby, nommé récemment grand shériff
du comté de Hertford, avait re~u une proclalnation
du Roi déclarant traitres le lord Essex et tons ses
adhérel1s. n était a Saint-Albal1s un jour de mar-
ché, publiant cette proclamation, lorsque Crom-


(1) On prétend que Cromwell, en levant des soldats pour le
parlement, leur déclara qu'il ne prétendait pas se servir avec
eux des expressions ambigues contenues dans sa commission,
pour les tromper et leur faire croire qu'ils combattraient
pour le R.oi et le parlement; que si le R.oi se trouvait dans
le corps ennemi qu'il aurait en tete, illui tirerait son coup
de pistolet tout éomme a un simple particulier, et que si
leur conscience Re leur permettait pas d' en fairc autant , il
leur conseillait de ne pas s'engager sous ses ordres. (Me-
moirs of the protectoral house, etc., par Mark Noble ~
tomo 1, pago 2,)1, édition de 1787.) (Note de l'Editeur.)




DU LONG PARLEMENT.
well arriva a la tete de son escadron, s'empara
de lui et l'envoya au parlement.


Peu de temps apres, il rasseinbla les troupes
de ce cOlnté (1), et invita les corntés VOlSlns,


(1) Un écrit du temps rapporte , a cette occasion , un faít
remarquable raconté par Cromwell lui-meme , a la confé-
rence dont on a déja parlé; le voici dans ses propres expres-
sions: I( J'avais alors un tres-digne ami, c'était un homme
de tres-grand mérite, et dont je sais que la mémoire vous
est tres-chere a tous, M. John Hampden. Lorsque je com-
men~ai a prendre part a la guerre, je vis que nos gens étaient
battus en toute occasion ; cela était véritablement ainsi. Je
luí demandaí donc d'ajouter a l'armée de mylord Essex quel-
ques régimens, qui, comme je le lui dis , seraient utiles, si
1'on y faisait entrer des hommes animés d'un esprit que je
croyais capable d'avancer la besoglle. Ce que je vous dis
la est tres vrai, Dieu sait que je ne mellS pas. V os cava~
liers, lui dis-je, sont pour la plupart d'allciens domesti.;.
<lues hors d'age, des gar~ons de cabaret et autres de la
meme sorte; et , dis-je, les leurs sont des fils de gentils-
hommes, des cadets et des gens de qualité. Pensez-vous
que des gens de si basse et de si vil e espece aÍent dans
l'ame de quoi tenir tete a des gentilshommes soutenus par
I'honneur, le courage, la résolution? V éritablement, je
luí parlais ainsi en conscience, et, véritablement aussi,
je lui dís : iI faut que vous ayez, et ne prenez pas mal
ce que je vous dis, et je sais que vous ne le prendrez pas
pas mal; il faut que vous ayez des hommes animés d'un
esprit capable de les faire aller aussi loin que peuvent alIer
des gentilshommes, ou autrement je suis sur que vous
serez toujours battus. Je le lui dis ainsi, en véritéje le lui
diso C'élait une digne et sage personlle, et il pensa que mon




HISTOIRE


d'Essex, SufroIk et NorfoIk, a se joindre a luí
pour repousser une invasion du lord Capell, qui,
secondé par le prince Robert, voulait empecher
l'association de ces comtés, projet qu'ils auraien t


,exécuté s'ils n'eussent été prévenus a temps;
mais cette mesure prise si a propos' les obligea a
renoncer a cette invasion et a se retirer ailleurs.,


idée était juste mais impraticable. Je lui dis que vraiment
j'y pouvais faire quelque chose, et je le fis; el en vérité je
dois vous dire, et répétez-le a qui iI vous plaira, je levai
des hommes qui avaient la crainte de Dieu devant les
yeux, et apportaient quelque conscience a ce qu'ils fai-
saient; et, a compter de ce jour , je dois vous le dir~, ils
ne furent jamais baltus; et quelque part qll'ils en vinssent
aux mains avec l'ennemi, ils le battaient sans cesse. )) (Har-
ris, J7i(3 de Cromwell, vago 78.) On convient allssi géné-
ralement qu'il avait eu soin de ne composer sa troupe que
d'hommes d'une intclligence plus éIevée que ceHe du com-
mun des soldats, et auxquels il avait promptement fait
comprendre les avantages de la discipline, en meme temps
qu'il les pénétrait de l'importance de Ieur action person-
nelle. ((' Il est probable, dit un de ses admíratellrs , que
Cromwell comprit tout cela, et comprit aussi que les plus
religieux seraient nécessairement les plus vaillans. Cepen-
dant je conjecture que lorsqu'il choisit de pareils Ílommes,
il Y fut porté principalement par son estime et son amour
pour les gens religieux. ll(Ibid.) L'anecdote précédente donne
líeu de penser que la prudence humaine eut aussi sa part
dans la détermination, mais elle prouve en meme temps que
Cromwell connaiss~it toute la force d'une croyance.


(Note de fEditeur.)




DU LONG PARLEMENT. 199
Vers le commeneenlent de mars, Cromwell


ayant levé un régiment de cavalerie composé de
mille hommes, lnareha avec une grande eélérité
sur le eOIuté de Suffolk, OU il avait appris qu'il
se formait une grande et forte confédération de
gentilshommes attachés au parti du Roi. Le siége
de la confédération était dans une ville du comté
appelée Lowerstost, ville tres - iluportante. Bies
surprit a l'improviste, p:l'it la ville avec tres-peu
de difficulté et sans tirer un seul eoup de fusil.
Il y fit prisonniers sir Thomas Barker et son frere
sir John Pettus, 1\1. Thomas Knevet, deux des
Catlines, le capitaine Hammond, 1\1. Corey ,
M. Turrill, M. Preston et environ vingt autres,
considérables par le rang et la fortune. Il prit
aussi dans ceUe ville une grande quantité de mu-
nitions, de selles, pistolets, poudre, eartouehes
et plusieurs articles d'un lnatériel de guerre suf-
fisant pour une armée considérable. Il est certain
que -si CrOlnwell ne les eut pas surpris au point
juste OU ille fit, le pays eourait de leur part un
grand danger; cal" le lendemain meme un grand
nombre de gentilshOlumes et de ehevaliers, déja
inscrits, devaient se réunir au menle lieu. Ce fut
un service tres-important pour le parlement ~ et
qui jeta un grand découragement parmi les par-
tisans du Roi dans les eorntés de Suffolk et de
Norfolk.


lVlais vers le commencement d'avril, IOl'sque




.20a HlSTOIHE


le printemps plus avancé perlnit d'entreprendre
de plus longues marches, Cromwell ayant réglé
l'association des cOlntés dans l'i.ntéret du parle-
lnent, et ne bornant pas ses soins et' ses services
a cette seule partie du royaume, leva un corps
plus considérable composé de tous ceux qUÍ vÍn-
rent librement et volontairement se joindre a luí.
Il marcha a la tete de ce corps vers le comté de
Lincoln pour y porter secours a ceux de son parti
qui soutenaÍent la guerre eontre Newark. Newark
était une des plus fortes villes que possédat alors
le partí du Roí. Elle était remplie de beaueoup
de gentilshommes du eomté de Lincoln et autres
comtés, et de quelques soldats expérimentés ·qui
levaient sur les pays adjaeens de grosses eontri-
hutions , et poussaient souvent leurs exeursions
jusques sous les murs de Lineoln. Le colonel
Cromwell, dans sa marche a travers le eomté de
Huntingdon, y désarma un grand nombre de per-
sonnes mal affeetionnées au parlement, et par-la
augmenta tellement ses forees, qu'il se trouva a
la tete de plus de deux milIe homnles, et avant
d'arriver a Newark il re«;ut du eapitaine Hotham
un renfort de eavalerie. Il fut rejoint aussi par
quelques troupes du eomté de Lineoln. En ap-
prochant de Newark, il eut le bonheur de rendre
un grand serviee a son parti. Le eapitaine Wray,
a la tete de la. eavalerie parlementaire de ce
comté, ayait imprudemmcnt campé trop pres




DU LONG PARLEMENT. 20 [


tie cette ville. Il fut surpris dans la SOlree par
un fort parti sorti de la ville, et apres quelques
combats, hors d'état de résister au nOlnbre, il
fut pris avee tout son escadron; nlais le bruit
du combat étant arrivé jusqu'a Cromwell, i1 s'a-
van~a, et a dix heures du soir tomba sur les ha-
bitans de Newark, délivra l'escadron du capitaine
Wray, en prit trois des ieurs et leur tua beaucoup
de monde.


Ayant ensuite mis le síége devant la ville, il
repoussa avee tant de vigilance et de sueees toutes
les sorties des assíégés, qu'il leur prít en diffé-
rentes oecasíoIls beaueoup d'hommes et de dra-
peaux. Toujours pret avec sa cavalerie a saisir
toutes les oceasions, ii défit une fois pres de Gran-
tham un fort parti des habitans de Newark, si
supérieur en nombre que la vietoire parut pres-
que ID iraeuleuse. Une autre fois il tomba sur
un partí de l'arm'ée du comte de New-castle, ell-
voyé vers Newark et campé entre eette ville et
Grantham. Illui tua beaueoup de monde, prit
cent ehevaux et fit quarante prisonniers (1).


(1) (( Les exploits de Cromwell contre les troupes du
comte de N ewcaslle furent , dit Whitelocke, le cornrnen-
cernent de sa grande fortune, et ce fut alors qu'il se 6t
connaltre au monde. 11 Le meme écrivain confirme ici ce
([ue nous apprend Cromwell du choix de ses soIdats , et de
l'avantage qu'il en retira: (1 11 avait , dit Whitelocke, u~




~02 HISTOIRE
Ce furent la les eommencemens de Cronlwell


a sa premiere entrée dans le métier de soldat;
ce qu'on peut appeler ses exploits, s'aeeomplit
dans les années sui van tes de eette 111alheureuse
guerre, et demande un récit plus eomplet et plus
détaillé. Dans les autres eomtés dont j'ai parlé
d'abord, la fortune de la guerre avait été durant
ces mois de printemps extremement diverse.
De petits partís s'y livraient des eombats jour-
naliers pour assiéger, prendre et reprendre des
villes et des forts. Dans le eomté de Chester, sir
'Villialn IJrereton, homme prudent et vigilant,
qui, des le eommeneement des troubles, s'était


hrave régiment de eavalerie eomposé d'habitans de son
cornté , ]a, plupart franes - tenaneiers, et fi ls de franes - te-
naneiers, et qui par motif de eonseiellee avaient })ris parti
dans la cause et sous les ordres de CromweIl. AiusÍ, bien
armés au dedans de ]a eonviction de leurs consciences, et
au dehors de bonnes armures de fer, ils étaient unis eomme
un seul homme a tenir ferme et a charger en désespérés. )
(Mémoires de Whitelocke , pago 68.) Ceux qu'ils battaient
tachaient de se conso]er en se moquant: (( Quant a Noll
Cromwell, dit Marchamont Needham, iI est venu dans la
puissance de son esprit, avec toute la suite de ses disciples ;
chacun d'eux est un David, un homme de guerre et un
prophete, tous hommes doués du Seigneur, accomplis-
sant ]eur reuvre mieux qu'aucun des fils de Lévi, et qui
parcourent tout le pays de Galles avec Ieur épée a deux
tranchans pour convertir les gentils. )) (Harris, Fie de
Cromwell, pago 80. ') (Note de l'Editcur.)




DU LONG PARLEMENT. 203


chargé de ce comté qu'il représelltait dallS le par-
lement en qualité de chevalier, s'était employé
avec tant de succt~s contre le cOlnte de Derby,
nommé par le Roi lord-lieutenant des comtés de
Chester et de Lancaster, qu'il étajt·un de ceux qui
avaient le plus contribué a tirer le cornté de Ches-
terdeses Jnains et a leconserverau parlement, bien
que la plupart des gentilshonlmes du conlté adhé-
rassent au parti du Roi;. mais i1 plut a Dieu d'ac-
corder a sir William Brereton plusieurs victoires
contre eux.


Il ohtint, au commencement de mars, une
grande victoire contre les partisans du Roí a l\lid-
dlewich dans le comté de Chester. Apres un rude
combat sous les murs de cette ville, il finit par la
prendre et y faire cinq cents prisonniers, dont plu-
sieurs étaient des officiers et des gentilshommes de
marque. Cette victoire avan<;a beaucoup les af-
faires du parlement dans le pays.


Il- résista avec grand succes a lord Cholmeley
et a sir Thomas Aston, deux hommes puissans et
zélés pour la cause du Roi. Apres a voir affermi
jusqu'a un certain point, par sa sagesse et sa vi-
gilance extraordinaires, les affaíres du parlement
dans son propre conllé, et y avoir levé un bon
nombre de soldats détertninés et bien armés, il
se porta activement au secours des autres, et s'á-
van(jant dans le Shropshire contre lord Capell, il
surprit une ville appelée Dreyton, dans laquelle




HISTOIRE
s'était logé sir Vincent Corbet, officier du parti
du Roi. Mais sir William Brereton entra dans la
ville apres une courte résistance, et y prit deux
escadrons complets de cavalerie, et six compa-
gnies de dragons. Sir Vincent Corhet échappa
par la fuite.


De la il marcha a travers ces comtés, et prit
plusieurs placesd'une grande inlportance, vul'état
actuel des affaires.


Sir William poursuivit ses succes, et peu de
temps apres prit 'Vhitchurch, vilJe sur les li-
lnites du Shropshire. Il y trouva heaucoup d'armes
et de munitions, et fit plusieurs prisonniers sur
l'armée du lord Capell.


Il rendit de plus de tres-grands et de tres-utiles
services a la cause qu'il avait embrassée, en se
joignant a d'autres troupes , ou bien venant a
propos au secours de ses alnis, particuliereJnent
lorsqu'il se joignit a sir John Gell du comté de
Derby qui s'employa constamnlent et avec succes
pour le parlement.


Le comté de Derby, rempli de gens de qualité
et de gentilshommes, fut dominé, des le com-
mencement des trouhles, par le parti contraire
au parlement; car, exeepté sir John Gell, a peine
un des gentilshommes du pays se rangea-t-il d'a-
hord parmi les parlementaires. Mais eelui - ei,
aidé de son frere et de quelques uns de ses pa-
rens, et secondé 'par les paysans et francs-tenall-




DU LONG PARLEMENT. 205
ciers disposés a se déclarer pour le parti du par-
lement, se cOlnposa un parti capable de résister
a ces grands personnages. Une telle action, dans
un temps pareil, suffirait pour iIlustrer son cou-
rage et sa constance. 11 plut a Dieu de le faire
réussir dans cette grande et hasardeuse entre-
prise, et de le souteB.Ír pendant túute la durée
de la guerreo


Apres la bataille de Keynton, il demanda une
commission au comte d'Essex, et s'étant pourvu
d'armes a grands frais et avec beaucoup de peine,
il saisit a propos la ville de Derby, qu'il fortifia
si bien, qu'eIle devint une défense suffisante con-
tre les assauts des puissans ennemis du parlement,
et, en toute occasion, un refuge pour ses amis. Il
donna par la l'exelnple a plusieurs comtés voisins
qui se procurerent un menIe moyen de défense.


l\fais les murs de Derby ne pouvaiel1t rel1fer-
mer sir John GelI, ni l'empecher d'agir au dehors.
Il se- joignit en plusieurs occasions, et non sans
d'heureux succes , avec sir 'ViIliam Brereton et
le colon el CrOlnwell; illnarcha plusieurs fois de
COIlcert avec le lord Grey de Grooby, lord-lieu-
tenant de ces conltés , contre M. Hastings et contre
la ville de Newark.


Dans le courant du mois de février, il marcha
avec ce qu'il avait de troupes, sous la conduite de
lord Brooke, dans le coroté de Stafford, pour pren-
dre Lichtfield, OU était une garnison du Roí. Étant




HI5TOIRE
entré daos la ville, ils reocontrerent une vive
et apre résistance daos uo lieu tres-fort, appelé
le clos ou la cour de la cathédrale, cndroit fa-
meux daos la suite de la guerre , pour avoir été
souvent pris et repris avec heaucoup de perte
des deux cotés.




DU LONG PARLEMENT.


CHAPITRE V.


Mort de lord Brooke et du cOlnte de Northamp-
ton. Rencontres dans divers cOlntés. Triste
condition du parlelnent ti cette époque. Siége
de Gloces.ter.


Pendant que l'armée parlementaire poussait le
siége du dos de Lichtfield, son général, lord
Brooke , re«;ut une halle dans la tete, en regar-
dant d'une fenetre, et mourut sur le coup.
C'était un homme d'une piété, dJune valeur et
d'une fidélité remarquable; sa mort causa au
parlement les plus vifs regrets (1).


(1) « Ceux qui le connaissaient le regardaient, dit Cla-
rendon, comme un homme hon et droít, plutot séduit par
un faux jugement que pervers et coupahle dans ses inten-
tions; mais soit qu'il fut égaré par ses passions ou sa cons-
cience, c'était sans aucun doute un de ceux qu'on autait le
plus difficilement ramenés a l'ancien gouvernement de
l'Église et de l'État. )) (Histoire de la Rébellion , tomo 5 ,
pago 257') Il ajoute que sa perte inspira de vifs regrets a
son partí qúi ne se fiait en personne autant qu'enlui. Le
matin de sa mort, dit-on, faisant, comme il avait coutume,
sa priere en puhlic , iI pria le ciel, « si la cause qu'il ser-
11 vait n'était pas juste et légitime , de le, faire périr sur-le-
t( champ. » (lbidem.) Dans un temps OU chaque événe-




HISTOIRE


Sir John Gell lui succéda dans le commande-
ment; il prit le clos au commencement de mars,
avec tres-peu de perte. Les mines étaient déja
préparées ponr faire sauter les remparts, et l'on
y avait jeté des grenades. Les assiégés se déter-
minerent alors a demander qnartier, et l' obtin-
rent, les soldats ne jugeant pas honorable de
venger la mort de leur général, en les passant au
fil de l'épée. L'arluée fit la un riche butin en
argent, meubles et bagages. On prit aussi un
millier de fusils, et un assez grand DOlubre de
gentilshommes , entre autres, le comte de Ches-
terfield et son fils.


Vers le milieu de mars, sir John Gell avec
_ quinze cents hommes, tant cavalerie qu'ínfan-
terie , march~ de Lichtfield sur Stafford. II ren-
contra'sur la route, a un lieu dit Cranockgreen
ou Saltheath, a quatre milles de Stafford, le
cornte de N orthampton et ses troupes, au nombre
de douze cents chevaux. Le comte chargea avec
fureur l'armée parlelnentaire, for~a la cavalerie
a se retirer en désordre" et prit quelques hom-
mes avec deux pieces d'artillerie; il tourna en-
suite deux fois autour de l'infanterie, cherchant


ment était invoqué comme un témoignage du jugement de
,Dieu, les royalistes n'ont pas manqué, apres la mort de
lord Brooke , d-e croire a l'efficacité de sa priere.


(Note de [' Editeur.)




UU LONG PARLEi\lENT. 209


de tous cotés a l'entanlCr; luais sir John Gen el
ses officiers disposerent si hien leurs soldats, (PW
l'infanterie tint ferme et repoussa les assaillans,
apres la plus chaude IneIée.


Dans eette vive rencontre, le eOlnte de Nor-
thampton fut tué, ainsi que IVI. Lucy, le eapitain~
Ibgot et plusieurs autres officiers, dont OH n"a
pas su positivenlent le nombre. Un cornette de-
menra aussi sur le champ de bataille, et on prit
son drapeau, portant une couronne et eette ins-
cription: Carolas Rex. Deux autres eorl1ettes fn-
rent faits prisonniers : l'un était le eornette du
prinee, cal' les escadrons du Roi et du prillee
se trou vaient la. Un jeune fils du eOlnte de Ches-o
terfielcl fut également fait prisonnier, et sir Jol11;
Gell, soutenu par sir 'Villiam Brereton, qui vint
a son secours avant la fin du combat, resta mal-
tre du ehamp de bataille. :1\1. Hastings, qui avait
été successivemellt pris et délivré, s'enfuit grie-
velllent blessé.


Ainsi les deux prerniel's pail's qui, a l'originc
de eette guerre civile, s'étaient disputé l'un a
l'autre un comté, a l'occasion de l'ordonnance
du parlement sur la milice et de la cOillinission
d'enroleOlent du Roi, le eomte de Northamptoll
et lord Brooke périrent a peu de distanee et d'in-
tervalle l'un de l'autre, tons deux hommes de
talent et de eonrage, bien que de mreurs et de




210 llISTOIRE


caractere tres- différens (1); ils furent vivement
regrettés, chacun par son partí.


(1) Le comte de Northampton avait eu, ainsi que la plupart
des grands seignellrs de cette époque, une jennesse assez disso-
lue. Lespremiers troubles l'éveíllerent, dit Clarendon, comme
d'une Jéthargie, et révélerent en luí un caractere auqucl il
n'avait manqué qu'un intérch digne de l'occuper. Il se dévoua
avec ses quatrefils a la cause du Roi,embrassadanstoute leur
rigueur les habitudes et les devoirs de la vie militaire, en
supporta les fatigues el les souffrances comme s'il n'avait ja-
mais connu les aisances de la ,"ie. Ardent a ehereher le dan-
ger, il disait SOllvent que (( s'il survivait a ces guerres, il ne
retrúuverait jamais une aussi noble mort. » Dans une charge
sur la eavalerie lJarlementaire, qu'il avait mise en déroute,
il eut son cheval tué sous lui, et comme, selon la coutume
des braves de ce parti, toujours livrés aux caprices "d'une
impétuosité naturelle, iI s'était laissé trop emporter a la
poursuite, il tomba presque au milieu de l'infanterie enne-
mie. 11 eut cependant le temps de se relever, et tua le colo-
nel parlementaire qui était accouru sur luí. Mais son casque
ayant été enlevé d'un eoup de crosse, on lui offril de luí
faire quartier; il le refusa avee outrage, traitant eeux qui
le luí proposerent de l'ebelles et de "ils coqlllilS. Alors il fut
tué d'une blessure au visage et d'un coup de hallebarde qui
luí entra derriere la tete. Clarendon rapporte que son fils
ayant fait redemander son eorps, Gell et Brereton préten-
dirent qu'on leur rendit en éeh:mge leurs prisonniers, leurs
IDllnítíons et les canons qu'ils avaíent perdus dans la bataille;
et qu'alors le jeune comte s'étant borné a demander au.
moins la permission d'envoyer un chirllrgien pour embau-
mer son corps, ils le lui refuserent. (Clarendon, llistoli'e
de la Rébellion, to~. 5, pago 201 et slliv.) (Note de I'A'di-
teur. )




DU LONG PAHLEl\1ENT. 2IT


Le zele de sir 'Villiam Brereton et d'aulres
gentilshommes conserva au parlelnent le eomté
de Chester, bien que rempli de papistes , et mit
ce comté en état de résister au eomte de Derby,
lieutenant du .Roí. Ce eomte at~aqua tres-vive-
luent le comté de Lancaster, olIles papistes étaient
encore plus nOlnbreux, et 011 il avait lui - luelne
heaucoup de crédit; mais il en fut enfin chassé
par le eourage des gentilshommes protestans.
J'indiquerai en peu de mots les principaux faits
de cette Jut.tc Iocale.


Au milicu de I'hivcr, et pendant que le comté
de Lancaster était en proie aux plus violentes
agitations, le parlement y envoya sir .John Seaton,
officier distingué, en qualité de major-général ,
et pour diriger la valeur novice du peuple. Pres-
ton fut le théatre de ses premiers exploits. Au
eomUlencement de février, sir John Seaton avec
dix compagnies et environ deux mille e/abllwn,
Dlarcha sur eette place qui était forte et brave-
lnent défendue. Elle fut si vivement attaquée
qu'apres deux heures d'assaut, les troupes du
parlement s'en emparerent: la perte des assaillans
De fut que d'un ofJicier et sept ou huit soldats; les
assiégésperdirent plus de ¡llonde. On leur prit
deux cents hommes, trois pie ces d'artillerie, beau-
coup de fusils et deux ou trois drapeaux. La prise
de cette place était importante, soit pour as-
surer l'entretien des troupes du parlement, soit


14·




212 HISTOIRE


pour fernler la route de Newcastle a Chester et lt
Shrewsbury.


Peu apres, le sergent-major I1ireh fut envoyé
de Preston a Laneaster. Il entra dan s la viBc sans
grande opposition, et les eitoyeus l'aiderent ell-
suite degrand ereur a s'elnparcr dufort, doul ils
prirent possession pour le parlelllent.


Sir John Seaton , avee le secours des eitoyens
de Manchester, et d'autres volontaires de la COlIl-
pagnie, prit également la v iBe de Wiggon.


Le eomte de Derhy ne eessa eependant point
ses efforts pour la réduetion de ce eOlnté. II se
porta avec des forees considérahles sur 'Vhaley,
dont iI était sur le point de s'eluparer, 10rs(jll'il
fut repoussé par les habitan s des environs.


II était entré dans 'Varrington, et yavait laÍssé
une garnisol1; nlais au conllnencement de juin,
les troupes de l\lanehester reprirent ectte place
avee huit pieces d'artillerie et einq ou six eents
prisonniers. Tout le eOlnté de Laneaster parut
alors soulnis au parlement, et le eomte de Derhy
n'y conserva plus que quelques bourgs de peu
d'importanee.


Le lord Grey de Grooby , depuis long - tcmps
en possession de Leicester, en avait fait son quar-
tier général. Il résista de la, avec des Bucees di-
vers, a ]\'1. Hastings qui tenait garnison a Ashby
de la Zoueh, et cOlnbaUait avec heaucoup {l'o-
piniéltreté pour'la cause du Roi.




DU LOj\iG PAHLE:\lEi\T.
Les dcux partis se disputaient violemlllent le


Hmnpshire. l\lais les garnisons que le Roi avait
placécs a \Vinchester et a llasiug-House, rési-
dence du mar(luis dc 'Vinchestcr, dominaient
le pays et y le"aicnt a leur VO~Ollté des contri-
IHltions. Ile pays de GalJes appartenait au Hoi
t IresfJuc tout entier. Un pctit 1l00nbrc de places
el: qllclques gentilshol1uJlcs, comme les colo-
ucls Glynn, l\iitten et Langhorne, y tenaient a
srancl'peine pour le pal'lclUcnt. A tout prendre,
la cause dll parlcluent étai t alors en décadence ;
ii n'avait, a la fin de juillet 1645, que hien peu
de tl'OUpCS pour tenir la calnpagnc. Ses grands
corps d'armée étaient détruits, et iI ne pouvait
snórc cspércr que de conserver les vi Hes et les
places fortes qui lui restaicnt; encore ne pouvait-
i I cspércr de les eonserver long-temps, a llloins
«ue le SOl't des armes He vint a changcr~


AillSi le parlclnent paraissait perdu sans res-
:-;ource, et teUe était en eHet l'opinion de heaucoup
de gens. Le Roi possédait tout l'ouest jusqu'a l'ex-
irémité du eOluté de Cornouailles, et de la il s'é-
tendait clans le nord jusqu'aux confins de l'Écosse.
Ses armées étaient au com.plet et en hon état,
libres de marcher partout OU iI lui plaisait -' et
assez J10lnhrcuses pour sufiire a la fois en diffé-
rens licux. On en dirigea une partie sur Exeter Oll
le comte de Stamford était renferlné et hors d'état
de teuir lOllg-tcrups. Le Hoi llwrcha en personnc




HIS1'OIHE
a la tete <.r'une brillante armée vers Glocester, la
seute ville considérable de ces cantons qui tint
encore pour le parlement. Plusieurs écrits de ce
temps-Ia font connaitre l'opinion qu'on se formait
dans le parti du Roí sur la situation du parlc-
¡Dent. On fit sur ce sujet a Oxford une épigramme
Jnaligne, que je erois digne d'etre rapportée iei par
le tableau énergique qu'elle présente de la triste
eondition du parlement a eeHe époque (1). Elle


(J) La situatÍon intérÍeure du partí parlementaire offrait
un délabrement au moÍns égal a celuÍ de sa sÍtllalÍon exté-
rieure; le découragementet le trouble d'esprit s'étaient géné-
ralelllent répandus dans cette foule d'hornmes engagés dans
une révolution, les uni sans le savoir, les autres sans savoir
ce que c'était qu'une révolution; ils s'étonnaient de tant de
maux a la place des hiens qu'ils s'étaient promis, et arrivés
a moitié de la route, les uns voulaient rétrograder, renon-
~ant au hut qui déja leur avait c011té si cher; les autres
cherchaient a se hercer encore du va in espoir de l'atteindre
sans de nouveaux malheurs. C'était a ces ressentimens, par-
venus <IU plus haut degré de ferrnentation, qu'ils se flat-
taient de pouvoÍr apporter le remede de la paix. De cet avis
était presque toule la chambre deslords, effrayés des vio-
lences de leur partí el des succes de l'autre. Les lords cé-
daíent tard el de mauyaise grace aux mesures lranchantes
des meneurs de la guerre, el se pretaient timidement et
inefficacement aux désirs conciliateurs des partisans de la
paix. Le 22 mai, le Roí avait, par un message a la chambre
des Jords, demandé une réponse a celui qui, au mois d'anil
précédent, ayait oC,casionné la rupture des négociations.
Tout en refusant les Ilfopositions du Roi , les lords , a ce que




DD LONG PARLEMENT.
est écrite dans un style bizarre, et les noms des
généraux du parlement, Fairfax et Waller, y sont


nous apprend Clarendon, reyurent le message avec toutes
les formes du respect, et parurent en youloir faire l'occa-
sion de nouvelles ouvertures; mais les communes firent
mettre le messager en IJri$Pn, et déc1arerent l'intention de
le traduire devant un. conseil de guerre comme espion , pour
etre venu sans UD sauf-conduit du général ni des chambres.
(Clarendon, Histoire de la Rébellion, tom. 6, pago 55. ) En
meme temps elles procéderent a l'accusatíon de la Reine.
Le 9 juin, apres avoir preté le nouveau serment exigé a
l'occasion de la conspíration de "\'Yaller, les lords se hatent
de voler une déc1aration de loyauté a l'égard du Roí, et
huit jours apres ils posent les bases d'une pétition pour la
paix; cependant, le 26, })ara1t la déclaratíon du Roí por-
tant défense d'obéir au l)arlernent. Les lords se croient oblí..,.
gés de })fotcster en raveur un i)ademcnt ~ qu'ils 1)romettcnt
de soutenir de lenr vie et de leur fortune; mais, tout en
reconnaissantqne le Roí, par sa déclaration, semble armon-
cer qu'iI ne rccevra de leur part aucune proposítion, iI ne
parait ras qu'ils songeut a dissoudre le comité chargé de la
pétition pour la paix, car on le retrouve ensuite , le 4 aout,
faisant son rapport sur ce projet de })étition. En meme temps
les lords rejetlent 011 éloignent les propositions répétées des
commuues ponr la confection d'un nouveau grand sceau,
l'une des mesures les plus décidémcnt lLOstiles du parlelllellt
coulre le Roi. (llisloire parlementaire, tomo 3, col. 115, 13o,
132, etc.) A ceHe conduite équivoque et dilatoire des lords
vcnaient se rattacher les indécisiollS du parti pacifique de la
cité, et par mament ceHes du comte d'Essex, placé, p~r sa
situatioll de général, a la h~te d'une agression qu'il hésitait
égalerncn!' a poursuivre el a rctcnir, pcrsollnell~lllCllt hlessé




HISTOIRE


désignés par des rébus, de n}(~nle que ceux des
généraux du parti du Roi, le rnarquis de Hert-
ford et le cornte de Newcastle (1).


par les accusations et les invectives du parti violent, effrayé
d'avoir a suivre sa marche et son sort, mais continuellement
partagé entre le soin de rétablir sa réputation outragée dans
le parti, et ce1ui de s'en séparer; embarrassé ainsi entre sa
mission et ses lJrincipes, entre les devoirs de la soumission
et ceux lIe la résistance, le comte d'Essex affaiblissait sa
eause par ses plaintes el ses mécontentemens au líeu de la
diriger par son aetion, eL n'avait pas meme a10rs a lui offrir
les avantages de son courage militaire, á peu pres inutile ~l
la tete d'une armée presque détruite par la maladie et le
lIénüment. C'est par eette disso]ution graduelle du }Jart,i, au
milieu des besoins d'argent sans cesse renaissans, et des em-
barras de fous gen res , que les affaires du parlement étaient
arrivées a 'ce point de détress~ ou elles se trouvaient a la fin
de juillet 1643. (Note de l' Editellr.)


(1) La voici sans tradllction ni eommentaire, cal' elle
n' en est pas susceptible.


Extincta Castro Fax )Julchl'll /lOVO esl;
Nec N aula! pOS lea nec militi
Sic nota Pharos : Austerdi:,parcm
Haud tulit caSU177 : 111úrus cui addiLa esl
Canina littera ~ mersa eSl, SllZs
Cwn tllrmZs, mper Leporis vado.
Euri EapOo-'T/HH Brislollia
Leporinos horrescens vorlÍces.
Allglica Clalldii timet pares
Cl'bs caSllS; Herois Teulonici
11lyTmidOlies adstallt magllo Cl/m duce,




DU LONG PARLEl\'IENT. 217


Londres était alors entierement dépourvu de
fortifications. Aucnn ouvrage n'était encore élevé
autour; et si les ennemis, maitres de 'la cam-
pagne, étaient venus l'assiéger, elle n'avait d'au-
tres lTIUrS a opposer ponr sa défense que ceux
(Ju'employa antrefois Sparte, les creurs de ses
courageux citoyens. Mais ce fut alors que Londres
commen«;a le large retranchement qui entoura
non-seulement la ville, mais cncore tous les fau-
hourgs, et forma un circuit d'environ douze nlÍl-
les. Ce granel ouvrage, grace au nombre de 1ras
qui s'y employerent, fut terminé en peu de temps.
Chaque jour des lnilliers de personnes venaient
travailler a creuser les fossés. Les diverses pro-
fcssions, les divers corps d'artisans et de lnar-
chands, s'y rendaient tour a tour, chacun son
jour; et non-seulement les honlmes de la classe
iuferieure, mais des gentilshOlnmes du 'plus haut
l'ang et des <.lames elles- mClnes se relldaient tons
les júurs sur les travaux, non pas pour y assister,
mais pour y ,coopérer, aLin d'ellcourager les au-
tres, portallt des pioches, des piques et autres
ll1strumens du lucnle genre; de sorte que c'était
llOUI' Ijondres un spectacle agréable, que de les


Pacata Thule est; nec Noto timor
Popello aut Regi. Nihil relictum est


\


Britalllzicum domare Ccesarem
]Vi V E 0fGCl.1V 0fG E YOV preces Gregis.
[Ja.'e SpluilgCS 1'1Iptim OEdipo SllO.




~n8 HISTOIHE
voir passer ponr s'y rendre en grand nomhre et
en bon ordre, avec des tambours a leur tete. Le
peuple abaUu sentait relever son courage a eette
vue, augurant bien de voir que, dans une si triste
situation , on ne désespérait pas encore du sa-
lut (1). :Mais tres - probablemcnt ce travail au-


(1) Ce fut dans cette extrémité que, le 5 aont, les lords
proposerent a la chambre des communes la pétition pour
]a paix , dont les points principaux étaient, (( la remise all
Roi du commandement de l~ milice , des forts, etc., pour en
disposer avec l'agrément des deux chambres ; les amlÍres de
la religion réglées par le Roi sur l'avis d'un synode et du
consentement des chambres; le rétablissement des membres
du parlement expulsés pour avoir rejoint le Roi. )1 Apres
un débat qui dura tout le jour , a dix heures du soir, l'avis
de prendre en considération les propositions des lords l' em-
porta a une majorité de 94 contre 65. Mais le lendemain,
bien que ce fut un dimanche , le lord maire Penniugton
convoqua a Guildhall le conseil commun et y fit rédiger
une pétition contre la paix, qui devait etre présentée ]e
lendemain a ]a chambre des communes ; car, bien que la
proposition de la paix vint de la chambre des lords, on ne
parla point de s'adresser a eux. Ce n'était plus avec euxque le
parti pouvait el voulait établir allcune relation. Durant toute
cette journée des imprimés répandus avec profusion invi-
terent ]e peu}1le a se transporter a 'Vestminster le len-
<1emain 7 aout. Tandis qll'une foule en lumulte occupait
tous les abords du parlement, et que les lords demandaient
á ]a chambre des communes une conférence pour se
plaíndrc de cette violation de privilége, une députatioll
des aldermcn , se (aisant faire passage a travcrs l'émculc,
<lllporta a la barre la pétitioll dlt conscil COIlll11U/1. En




DU LONG PARLEMENT.
rait été inutile et trop tardifpour sauver Londres,
si le Roi, au lieu d'assiéger Gloeester, eut marché
sur eette ville.


termes assez impérieux elle rappelait au parlement 1'enga-
gement qu'il avait pris de mourír, s'ille fallait, pour le main-
tien de ]a cause, et lui enjoignait de passer dans un bref
délai une ordonnance en ce sens qu'on avait eu soin d'an-
nexer a la pétition. Lecture faite de la pétition et de 1'01'-
donnance, et apres avoir remercié ]e conseíl commun de
ectte haute preuve de son zele pour le bien public, on
eomrnens;a a discuter les propositions des lords , tandis que,
s'jl en faut croire Clarendon, le peuple amassé aux portes
disait aux membres qui lJassaient pour entrer a la
ehambre, que « si on n'obtenait pas une bonne réponse
on reviendrait le lendemain en nombre double. » Cepen-
dant, la question mise aux voix , l' avis de la paix l' emporta
encore a la majorité de 81 voix contre 79' Une différence
si légere donna lieu de soutenir qu'il y fallait regarder de
plus pd~s; on recommen~a un nouveau scrutin. M. Hollis
était un de ceux quí comptaíent les voíx pour la paix , elles
se trouvercnt cncore au nornLre de 81 ; mais , chose assez
étrange, les voix pour la gnerre monterent a 88. Les vain-
queurs parurent penser qu'ils avaient quelque chose a mé-
nager apres une pareilJe victoire; des précautions de po-
litesse furent employées pour adoucir aux lords le rejet
de lellrs propositions , et on vota qu 'il serait recommandé
[lU lord-maire de prendre quel<lues moyens pour empe-
eher les émeutes ; en conséquence de quoi iI publia les
ordres les plus séveres contre tous rassemblemens illégaux ,
<:listributions d'imprimés, etc.


n était temps, cal' le surlendemain deux ou troÍs mille
femlllcs, (lui s'accrurent hicntot nu nombre d'environ cinq




220 HISTOIRE


Cet orage d'adversité suffit pour enlever un
certain JlOlnhre des feuilles lnal aUachées qui
selnblaient tenir encore a l'arbre parlementaire,


mille, apporterent a la chambre des communes unepétition
en contre-partie de celle du conseil COlIlmun, et qu'on
avait eu soin de rendre aussi respectueuse que l'autre. élail
péremptoire. L'année précédente avait offert de meme le
spectacle d'ul1 attroupement de femmes décidées a se faire
.:ntendre de la chambre dont elles venaient alors exciter
le úle a la réforme des abuso Elles avaient été remerciées
et renvoyées avec de bonnes paroles par 1\1. Pym, mais iI
11' aurait pas eu si hon marché de celles-ci: moins révé-
rellcieuses dans leurs discours ímprovisés que dan s leurs
Jiscours écrits, elles criaient a la porte des communes,
dOllllez-nous ces lrallres qui sont c01ztrc la paix, que
nous les mettions en pieces, donnez-nolls ce glleux de
p).,n, étc. En vain leur envoya - t - on deux ou trois
ll1embres de la chambre pour les apaiser par l'assurallcc
tJlle la chambre n'était point coutraire a la paix, eL qu'elle
cspérait bientol y parvenir , iI fallut empIoyer la force ponr
les repousser. La milice ess~~ya d'abord de leur faire peur
en tirant a poudre , mais elles crierent, ce n'cst quc dc la
poudre, et se mirent a jeter des briques anx soIdats quí
tirerent alors sur elles a baIles ;selon Clarendon, 011 les
tit charger par un escadron de cayalerie qui en tua et hIessa
lll1 aSSeZ graua nombre. Clarendon les donne pour des
femmes de citOYCllS aisés; Ruslnvorth pour des femmes de
la derniere classe , ce qui paralt plus vraisemblable. lleau-
coup d'hommes déguisés en femmes se lrouvaient , dit-on,
melés parmi elles. Toules portaient a leur coiffure des
rubans blancs, ce qui était le signe de la paix. Que1s (lue
fusselll les faulcurs de ccHe délllarche , ce n'élait (lu'ul1f.:




nu LONG PARLEl\lENT. 221


et éhranler les résolutions de ceux qui n'avaient
pas pris assez fernlement racine dans la cause
qu'ils avaient ehoisie. l)lusieurs homlnes de haut
rang, menlbres des deux ehalnbres, quelques
lords et un grand nOlnbre de mernbres des eom-
munes ahandonnerent alors le parlelnent, pour
se rendre a Oxford. On taira ici leurs noms, bien
qu'on ait donné eelui des premiers lords qui s'é-
loignerent du l)arlement, paree que eette derniere
aetÍon porte vraiment une couleur eriminelle;
ear ils n'avaient point, pour s'éloigner, les mo·-
lifs de COllscÍence qu'alléguerent les prcmiers
pour leurjustífication, et n'agirent prohahlemellt
que par faihlesse et paL' erainte de compromet-
tre leurs ¡ntérets particuliers (1). Ils perdirellt


imitation; elle ue réussit pas, le sucd~s demeura auxinven-
teurs. ( Histoire parlementaire , tomo 3, col. 156 et suiv. -
Histoire de la Réúellion, Clarendon, tomo 6, pago 185. )


(Note de l'Editeur.)
(1) Clarendon nous apprend, qu'apres l'émeuteduj aout,


un grand nombre de pairs et de membres des cornmunes
avaient résolu de se retirer a l'armée du comte d'Essex,
dont ils se croyaient alors assurés , et d'obliger de la le par-
tement a faire la }1aix; mais que le comte, soit par timÍ-
dité, soit plutot par scrupule , refusa de concourir a ce de;~­
sein, contre lequel il se }1rOnOnya ensnite assez fortemenf.
Obligés done de renoncer a toute espérance de ce coté, el
peut-etre craignant qu' on ne découvrit le projet qu'ils aV31cllt
formé, les principaux de ces membres prirent le partí de se
rendre aupres du ltoi. Les premiers furent le lord Lovclacc.




222 HISTOIR E


donc beaucoup de leur considération dans les
deux partis, et servirent seulenlent a faire res-


secretement attaché au partí du Roi, et demeuré a Londres
pour le servir, et le comte de Portland, puis le lord Con-
way: ces deux derniers, mis en prison a I'occasion du com-
plot de Waller, avaient été rel3.chés peu de temps apres;
puis le comte de CIare. Tous furent bien re!;us par le Roi.
L'admission des comtes de Bedford et Holland, qui s'échap-
perent ensuite de Londres, non sans peine el sans dauger,
éprouva de grandes difficultés. On les 6t attendre plusieurs
jours a Wallingford , tandis que le conseil délibérait a Ox-
ford sur la question de savoir s'il leur serait permis de se
présenter devant le Roi. lIs étaient du nomhre de ceux dont
la conduite avait le plus irrité Charles et ses parlisans; et
si, meme au moment des revers, les raisons de prtidence
l'emportaient rarement dans les conseifs du Ptoi sur les pré-
ventions de parti , la prospérité ne leur donnait pas beau
jeu pour se faire écouter. Les débats de ecHe affaire pré-
senterent, dit Clarendon, une aigreur et une vioJence de
déraison dont on n'avait pas encore eu d'exernple. Cepen-
aant l'on se décida a recevoir les deux comte..; , rnais apres
les avoir fait aUendre assez long-temps a Wallingford , pour
que ce délai de plusieurs jours , et ce qu'ils apprirent de la
discussion élevée a ¡eur sujet, les préparassent d'avance a
ressentir les dégouts qu'on leur appretait, et qui ne man-
querent pas de porter leurs fruits. lis devaient etre d'autant
plus sensihles au comte de Holland que, des le déharque-
ment de la Reine, il avait fait négocier pres d'elle par le
lord Jermyn, et que, soit par le désir de l'obliger et de I'at ..
tirer, soit qu'il eut en effet reyu de la Reine l'ordre d'en-
courager son repentir, lord Jermyn avait porté au comte
des paroles favorables que l'accueil de la conrfnt ensuite




DO l,ONG PARLElUENT.
sortie la constance de ce peu de membres dn par-
lement, qui oserent lui demeurer fideles, et res-
t<~rent invariablement attachés aux principes qu'ils
avaient professés d'abord, el a l'intéret public ,
sans se laisser décourager par des dífficultés et des
dangers quí passaient de beaucoup ce qu'avait ja-
mais eu a SUrlTIOnter aucun parleluent précédent.


lIs ne laisserent apercevoir aUCUl1 signe d'a-
hattement, comnle le purent remarquer ceux qui
furent témoins de leur conduite (1); et les hahi-


loin de confirrner. C'était sur les espérances qu'elIes luí
avaient fait concevoir que le cornte de Holland avaít engagé
le cornte de Bedford et le cornte de CIare a se déclarer, ainsi
que luí, pour le ¡toi. Ce détaíl, exposé fort au long dans
Clarendon, Bistoire de la Rébellion~ tomo 6, pago 188,
192, 204, etc., offre une peinture tres-vivante de l'intérieur
d'un parti de cour. (Note de l'Editeur.)


(1) On ne saurait nier la grandeur du spectacle qu'ofi'rit
alors le partí révolutionnaire réduit a ses propres forces par
la désertion des ti mides , des inconstans, des désabusés,
enfin, pal' celle des hornmes moraux que l'importance du
but ne pouvait réconcilier avec l'injustice des moyens.
Sans doute, parmi les premiers soutiens du parti, quel-
ques nns pouvaient tirer leur énergie du désespoir; vic-
times dévouées a devenir le prix de la réconciliation, ils
combattaient l)our leur existence. Mais le nombre de ces
hornmes n'était pas assez grand, ni leur situation assez
puissante pour entrainer un pays qui n'aurait pas voulu
les suivre. Dix-sept ans plus tard, la révolution avait
créé de bien antres intércts de défense el de conser-




HISTOIR.E


tans de la cité de Londres Jllontrercnt beaucoup
'd'elnpressement et de zele ~l renforcer de len l'


vation, et le parti de la ré\"olution succomha sous les
})remiers efforts du premier homme (PÚ voulut ¡;rendre en
main la cause des royalistes. En 1643 la réyolution ét;1it
forte de sa jeunesse , ses espérances animaiellt tOllt le corp~
du peuple; le courage et le talenl de ceux c¡ui la voulaicI11
fut de dérneler toutes ses ressources et de les employcl·. J\
Oxford, dit Clarendon , la malheureuse disposition du líe¡:
et de ceux qui s'y réunissaient était de tomber, a la moindre
perte ou au moindre malheur, dans l'ahattemellt le plus
désespéré, et de se rejeter a la moindre victoire dans mI(;
ivresse d'espérances c¡ui ne permettait plus de croire a }'im-
)lortance d'un obstacle c¡uelconc¡ue.)) (IIistoire de la R(J-
bellion, tomo 6, pago 195.) A Londres au contraire,-quall<l
le danger approchait, les mesures }llus hostiles annons:aient
une volonlé plus opinic1tre; apres la victoire on redouhlait
les demandes d'argent el de soldats. C'est le 4 juillet, que
sur le refus des lords de concourir a la confection d'Ull
nouveau grand sceau, les communes décident qu'eJles en
feront un a elles seules. (llistoire parlementaire , tomo 3 ,
col. 142. ) C'est le 19 que l'assemblée des théologiens vient,
au nom de la col ere de Dieu déclarée par les malheurs de
la cause, demander la sévere animadversion des lois cOlltre
le relachement, la eorruption , le papisme et l'idoJatrie de~'
signes extérieurs du euIte. (/bid. col. 148.) C'est le 27 :lOtlr.
c¡u'une ordonnance du }Jarlement abolit dans toute l'Au-
gleterre les autels et les irnages. (Ibid. col. 162.) Les
ecclésiastic¡ues membres de la chambre des cornmunes SOlle
envoyés dans leurs cures pour y animer l'esprit du peuple
a la défense des doctrines: en meme temps le parlement
oruollllc la presse des soldats, qu'un acle <le ce lllcmc par-




DJj LONG PARLEMENT.
pcrsonne et de leut' argent l'armée du comte (l'Es ..
sex; ce qui ne les ralentit pas dans leurs efforts
pour le ver une autre armée a sir William Wal-
ter, afin que, dans la circonstance importante
ou I'on se trouvait, elle put servir de réserve a
l'autre.


Le comte de Manchester, a son éternel hon-
neur, prit ce moment pour comUlencer son ser-
vice militaire (1). II leva des troupes dans les


lement avait déclaré illégale (Histoire de la Rébellion,
tomo 6, pago 186); et la presse exécutée rigoureusement ,
injllstement, n'a/faiblit point l'autorité du parti sur le
peuple, dont elle était un des gríefs contre le Roí. Waller
vaincu est re9u comme le sauveur de la cause pour qu'il en
puísse demeurer l' espérance. Le comte d'Essex est, a la foís ,
stimulé, flaUé, inquiété, apaisé; des forces sont re-
crutées pour tous deux , et un mOlS apres la date de la lettre
ou le conseil de guerre du cornte d'Essex mandait au par-
lement que {Jans queIques jours iI n'aurait plus meme
la forme d'une armée (thejace ojan army), le comte d'Es-
sex a. la tete d'une armé e renouvelée avait faít lever le
siége de Glocester et livré la batailIe de Newbury. (His-
toire parlementaire, tom. 3, col. 155 et 172.) (Note de
l'Editeur. )


(1) Ce fut le jour meme OU le parlement re~ut la lettre
du conseil de guerre du comte d'Essex, qu'en s'occupant
des moyens de recrutcr l'armée du comte, on vota la for-
mation d'une autre armée sous les ordres du comte de
Manchester. Clarendon paralt regarder cette nomination
comme un coup de partie qui rengagea le comte d'Essex,
pn lui donnant un objet d'émulation , et en lui montrant


2. 15




HISTOIRE
comtés de l'est, confédérés, comlne on l'a dit, par
les soins et la prudence du colonel Cromwell, et
dont il fut alors nommé général par le parlement,
auquel il rendít, cette année et l'année suivante,
de grands services a la tete de ses soldats.


Tandís que le parlement et la ville de Londres
s'occupaient activement a recruter leurs arnlées
affaiblies, Glocester, place tres - inlportal1te ,
comínen<;ait a devenir un des principaux théatres
de cette tragique guerre civile, et fut le lien OU
la fortune recommen«;a a challger de face. La
ville de Glocester avait alors pour gouverneur le
colonel Edward Massey, homme singulierelnent
habile a la défendre, si courageux qu'aucune
menace d'un ennelni puissant ne pouvait l'ébran-
ler, si fidele qu'aucune des promesses d'un Roí


qu'on pouvait avoir, dit - il, un autre comte et d'autres
généraux que lui. En meme temps aucun moyen ne fut
négligé pour }'adoucir et l'exciter: on exalta la reconnais-
sanee des chambres , on lui promit toutes les satisfactions
possibles, on l'assura qu'aucune armée ne serait recrutée
avant la sienne; et tandis que le Roi, au milieu de ses
succes, avait a combattre les dissensions, les jalousies, les
exigeances et l'insubordination de tout son parti, tout se
ralliait de l'autre coté pour soutenir une cause dont ceux-
memes qui semblaient pnhs a l'abandonner, ne pouvaient
sans effroi entrevoir la ruine prochaine. (Histoire de la Ré-
bellion, tomo 6, pago 167,187, J91, 196, etc.) (Note de
l' Editeur. )




DU LONG PARLEl\IENT. 2~>'''''
lle pouvait le eorrompre (1). l\fassey avait éü;
anlené a Gloeester par le eomte de Stamford.
sous lequel iI avait servieomlne Iieutenant-eolo-
nel, et eommandait depuis plusieurs mois la ville
en quaIité de lieútenant du eomte.


Comme il n'y avait plus lie:u de eroire que le
eomte rev!nt a GIoeester, l\lassey fut, du eOllsen-
tement eommun des soldats et des eitoyens,
llOlnmé gouverneur de la ville, eomme l'homme
le plus propre a eette fonetion. Une eommission
du général l'éleva au grade de eolonel.


Dristol s'était rendu aux troupes du Roi beau-
coup plus promptemellt qu'on ne l'avait imaginé,


(1) Selon Clarendon, Massey s'était d'abord rendu a
York, dan s l'intention de servir le R.oi; mais ne s'y voyant
pas assez remarqué, iI passa dans le parti du parlement, ou
son mérite miIitaire, et, dit dédaigneusement Clarendon,.
des talens de conversatioll assez passables pour le renore
agréable au peuple, lui procurerent un avancement facile.
Si l'on peut compter sur }'exactitude du récit de Clarendon,
les éminens ser vices que rendít ensuÍte Massey a la cause
qu'il ernbrassa n'en donneraient que mieux a connaitre
l'inhabiJeté du parti de]a cour pour attírer etepc9urager
les hornmes de mérite. Clarendon nousapprend a~ssi qpe
ce fut l'espérance qu'on avait con!tue de rengager Massey
daps leparti du R.oi qui détermina le siége de Glocester. La
pbrase de May sur la fidélité de ce gouverneur sembJerait
'en effet destiné e a détruire un bruit ou un soups:on de ce
genre. ( Histoire de la Rébellion, tomo 6, pago 171 et suiv.)


( Note de l'Editeur. )
15.




HISTOIRE


tellement que M .. Fiennes, gouverneur de eette
place, fut ensuite jugé et eondamné pour ce fait
par un eonseil de guerreo Cet événement avait
lléeessairement jeté une grande terreur dans
Gloeester, qui demeurait eomme abandonné et
sans aueune espéranee de seeours, au milieu d'un
grand pays sounlÍs a un ennerni vietorieux.


On ne saurait nier que la résolution prise par
eette ville de résister au Roi ne flit admirable a
une telle époque, avec le peu de foreesqu'elle
avait pour se défendre, tous les 1110tifs de dé-
eouragement qu'elle voyait a l'extérieur, et l'é-
loignernent des lieux d'ou elle pouvait attendre
quelque secours. Elle ll'avait pas dan s ses murs,
tant eavaliers que fantassins, dragons, hommes
de l1Iilice, en y eomptant les eavaliers et dra-
gons qui étaient inopinément arrivés du ehateau
de Barclay, beaucoup plus de quinze cents sol-
dats. Les munitions de guerre eonsistaient en
quarante barils de poudre et une tres-pauvre et
mauvaise artillerie. Les ouvrages {[ui l'environ-
naient étaient fort étendus, et gueres plus qu'a
moitié achevés, lorsque eette terrible tempete
était venue l'assaillir.


Le pays environnant, au lieu de soutenir la
résolution des habitans de Gloeester, ne travail-
lait qu'a l'ébranler et a l'affaiblir, en leur repré-
sentant le danger qu'ils couraie~t, et en taehant
de les engager a f~ire la paix avec un ennemi si




DU LONG PARLEMENT. 22~)
puissant; Car tout ce pays avait abandonné la
cause du parJement, ou était décidé a l'abal1-
donoer, et les habitans, pour leur propre il1té-
ret, désiraient voir le Roi paisible possesseur de
la ville; cal' i]s sentaient bien que si Glocester
résistait, l'arrivée d'une grande armée leur en-
leverait nécessairement leur blé, leurs bestiaux
et tous leurs autres moyens d'existence, et que
si, enfin, il arrivait que le Roi ne réussit pas a
prendre la ville, ils auraient perpétuellement a
supporter le fardeau de deux partis ennemis, qui
les réduiraient a la plus désastreuse misere;
uu líeu que, si l'armée du Roi l'emportait, ils
demeureraient tranquilles et en sureté , dans l'in-
térieur d'un pays dont elle serait maitresse, a
l'ahri du pillage, et, au moyen d'une légere con-
tribution, jouiraient librement d'ul1 COlnlnerce
avantageux.


Glocester ne pouvait attendre de secours que
de Londres, et on a déja vu aquel état étaient
réduites les armées du parlelnent. Nlalgré tous
ces motif s , les citoyens de Glocester ne s'occu-
perent qu'a examiner leurs forces et les raisons
qu'ils pouvaient avoir de persévérer. Ils tinrent
un conseil commun auquel assisterent les o1llciers
de la garnison. On y rappela et 011 y lut leur
derniere protestation , par laquelle ils s'étaient
ohJigés a ne jamais se soumettre a la faction en .....
nemie. Ce souvenir ranilna leur courage, et ils




230 HlSTOlHE


résolul'ent, a l'unanilnité, de refuser les otfres
de paix qui leur étaient faites. Toutes les affaires
parLieulieres furent interronlpues, et non-seule-
ment les hornmes, lnais les felnmes et les enfans
se miren! a réparer les fortifieations.


Telle était la situation de Glocester, quaJld le
Roi en personne, a la tete d'une grande et bril-
lante arniée, Oll se rénnissait l'élite de la haute et
nlOyenne nohlesse, vint y rnettre le siége, le 10
aoilt 1643.


Une partie de ces troupes s'était Iaissé aperee-
voir, quelques jours auparavant, sur les som-
nlets des collines environnantes, et le prinee Ro-
hert avait envoyé sommer la ville de se rendre;
a quoi le maire répondit qn'il tenait la ville au
non1 de Sa Majesté et ne pouyait la rendre. eette
réponse fut tournée en ridienle par l'arlnée du
Roi, mais elle parut juste an luaire, qui se re-
gardait eOllllne ehargé de conserver la ville a Sa
J\!Iajesté, d'une nlaniere conforme aux volontés du
parlement.


Le Roi fut indigné qu'une ville anssi dénuée
de tont secours prétendit tenir contre lui; eepen-
d~nt, comme il désirait la conqnérir sans effusion
de sang et san s perdre un temps préeieux dans
le rapiele conrs de prospérités OU il se trouvait
alors, il vint camper en personne elevant ses
:murs, espérant vaincre les hahitans par le resped
on la craillte qne lenr inspil'erait sa présence, el,




DU LONG PARLEMENT.


aussitot qu'il fut arrivé, illeur envoya, par deux
héraults d'armes, eeUe honorable sommation :


CHARLES, ROl.


« Rempli d'une tendre compassion pour notre
« ville de Glocester, et pour éviter les maux que
e( nous ne pourrions l' empecher de souffrir, de la
c( part de notre armée, si nous étions obligés de
« l'emporter par la force des armes, nous sommes
« venus en personne devant ses murs pour re-
(! quérir son obéissance et voulons gracieuselnent
« faire connaitre a tous ses habitans et a tous
ce ceux, soldats ou autres, qui se trollvent ren-
ce fennés dans son enceinte, que s'ils se soumet-
ce tent immédiatement et remettent la ville entre
« nos mains, nous leur accorderons a tous sans ex-
ce ception un pardon volontaire et absolu, et les as-
ee surons sur notre parole de Roi qu'aucun d'euxne
« recevra le nloindre dommage ou préjudice du
(e séjour de notre armée, soit dans sa personne ou
(e dans ses bien s; que le gouverneur que nous leur
« nommerons et la garnison peu nombreuse que
({ nous laisserons dans la ville n'auront d'autre
ce objet que de maintenir sa sureté et sa trallquil-
« lité, ainsi que celle de tout le pays; mais s'ils
(e rejettent eette offre de grace et de faveur et
fe nous forcent a les réduire par le pouvoir de
( nos annes, ce quí, avec l'aíde de ])ieu, ne 110US




HlSTOIHE


(e sera ni long ni difficile, c'est a eux-memes
(e qu'ils pourront s'en prendre des miseres et des
« calamités qu'ils se seront attirées. Nous aUen-
c( dons une réponse claire et positive dans les
( deux heures qui suivront" ce message, et par
t( les présentes, tlonnons perluission, a tous ceux
c( de la ville qui voudront s' em ployer ~ eette
c( affaire, d'aller et venir en su reté de notre camp
(( a la ville, et requérons tous les officiers et
« soldats de ~otre armée de les laisser passer sans
( les inquiéter en aucune maniere. »


Ce message, apres quelques débats, re~ut la
réponse suivante, rédigée du consenteJnel1t conl-
mun des citoyens et des soldats. Elle fut pré-
sentée au Roi par le sergent~major Pudsey et par
un citoyen de Glocester ( J ).


(1) Voiei e9rnrpent Clarendon rend eornpte de eette eir-
constance. « Avant le ternps preserit, on vit sortir de la ville
avee le trompette deux hornrnes a visages pales, longs,
maigres et sinistres; en vérité des figures si étranges, qu'elles
égayerent a la fois les plus séveres physionornies, et aUris-
terent les creurs les plus joyeux, ear iI était irnpossible (Iue
de pareils envoyés apportassent autre ehose que la guerreo
Ces hornrnes, san s aueune marque de respeet et de civiJité,
dirent d'un ton sec, clair et intrépide, qu'ils apportaient
au Roi une réponse de ]a pieuse ville de Glocester; et, sur
toutes les questions qu'on leur fit, se rnontrerent si prornpts
a des réparties insolentes et séditieuses, qu'on eut dit que
l~ur principal objet était de provoquer le Roi a violer son
~~uf-conduit. ( Histoire de la Rt1hcllioll, tomo 6, pago 75.:'


( JVNe dI' l'Edileur. :




DU LONG PARLEl\IENT. .233
{.( Nous, les habitans, magistrats, officiers et


c( soldats enfermés dans cette viUe de Glocester,
{( répondons hUlublement au gracieux message
( d.e Sa Ma jesté, que llOUS gardons cette ville
«( conformélnent a notre serment et, allégeance ,
C( pour l'usage de Sa Majesté et de sa royale pos..,
ce térité, et, en conséquence, nous nous regardons
« comme absolument obligés a obéir aux ordres
« de Sa J\'1ajesté, signifiés par les deux chambres
« du parlement, et sommes résolus, avec l'aide
« de Dieu, a conserver notre ville, conformé-
c( ment a eeHe obligation. ))


Le Roi re«;ut cette réponse san s montrer ni co.,.
U~re ni indignation. Il parut seulement s'étonnel-;
d'une telle confiance et chercher quelles espé-
rances de secours pouvaient la faire naitre. Il em-
ploya devant les messagers ces propres. expres ...
sions: Waller est fini et Essex ne peut venir.
Pen~ant ce temps, l'armée du Roi avait été ran.,.
gée dans les canlpagnes qui environnaient Glo-
cestero Le prince Robert et le général Riven "mi-
rent le siége, d'un coté, avec six lnille hommes
environ, tant infanterie que cavalerie, et de
l'autre, avec deux lnille chevaux. Aussitot apres
cette réponse, ils s'avancerent dans les faubourgs
a l' est de la ville; mais ils eurent a y essuyer une
tres-vive escarmouche et en furent chassés par
la flamnle; car, aussitot apres le re tour des mes-




HISTOIRE


sagers, OH mit le ftm aux faubourgs, qui, brulant
de tous cotés, répandirent une grande terreur~
eette vue senlhla engager les citoyens a soutenir
encore plus constamment leur résolution et dis-
posa l'armée du Roi a prendre tous les moyens
d'emporter par la force ce qu'elle ne pouvait es-
pérer d'obtenir autrement;


Le soir meme, l'arInée du Roi commen<;a ses
tranchées de deux cotés de la ville et a porté e de
mousquet, profitant, pour se couvrir, de quel-
ques maisons que la flamlne n'avait pas aUeintes.
Les travaiLleurs furent cependant aper-;us et les
nl0usquetaires tirerent sur eux de dessus les mu-
railles, mais ne purent leur causer que tres--peu
de mal, ce qui les obligea a faire plusieurs sor-
ties sur' ces tranchées, envoyant de petits partis,
qui, en plusieurs endroits, chasserent les tra-
vailleurs, leur prirent des armes et des prison-
niers, et rentrerent ensuite dans la ville sans
etre inquiétés.


Sir Willianl Vavasor s' était avancé, a l' ouest,
avec les troupes galloiseset s'approcha de la
ville de ce coté, dans l'intention de se rejoindre
aux troupes qui venaient de Worcester et qui
s'étaient campées au nord-ouest. Le général Ri-
ven avait établi son quartier au sud, prenant
avantage d'un terrain élevé , derriere lequel il se
nlÍt a couvert· du feu des assiégés. Sir Jacob




DU LONG PARLEl\'lENT.


Astley, qui avait été blessé dans la premlere
l'encontre, carnpa avec une fortebrigade a l'est
de la ville.


Glocester était aussi bloqué de tous cotés, et
l'on s'aUendait a des affaires furieuses et san-
glantes. Les officiers du Roi, dont plusieurs étaient
tres-habiles et tres-expérimentés dans la con-
duite de la guerre, avaient fait leurs approches
el placé leursbatteries, ainsiqu'ils l'ontavoué, avec
toutl'avantagepossible.Leurssoldatssemontraient
également actifs et infatigables dans les travaux
de la tranchée et courageux dan s leurs attaques
sur la vil1e. Les assiégés ne leur cédaient pas
pour le courage, la patience et l'activité, ce qui
fut bien prouvé non-seulenlent dans leur défense,
mais dans leurs fréquentes sorties. Le gouverneur
lVlassey faisait l'admiration des ennemis par son
habileté et sa dextérité en toute occasion. Je don-
nerai _quelques détails sur ce fameux siége, dont
l'importance a été si grande et dont l'événement
devait avoir de tels effets sur la situation de tout
le royaume.


Trois jours apres le commencement du siége,
150 mousquetaires, sous la conduite du capitaine
Gray, sortirent des retranchemens pour attaquer
les troupes de Worcester que les Gallois n'avaient
pas encore rejointes, tomberent sur leurs quar-
tiers, luarcherent sur leurs prelniers postes, tue-
rent un capitaine et huit ou neuf soldats, fireut




~36 HISTOIRE
cinq prisonniers, prirent des arnles, brulerent
le poste et se retirerent sans avoir perdu per-
sonne. IJe capitaine Mallery, avec un meme
nombre de mousquetaires, recut ordre, le jour
d'apres, d'aller enlever quelques pieces de ca-
nons que I'on croyait d.éposées dans un certain
endroit; mais, ne les trouvant. pas, il se retira
sans aucune perte, apres avoir tué quelques
h0111111eS et fait quelques prisonniers aux ennemis
et avoir brulé une partie de leurs quartiers. La se-
rnaine d'apres, un autre parti de cent cinquante.
mousquetai~~es, commandé par le capitaine Crispe,
fit une sortie et tOlnba sur les tranchées que fa i-
saíent les ennemis sous les murs de la ville. U
marcha jusqu'au mílieu d.e ces tranchées, dans
les rangs des ennemis, se battit avec une ·valeur
extraordinaire et leur tua, selon I'aveu de quel-
ques uns d'entre eux, plus de cent hornmes; ell-
suite, protégé par les lnousquetaires qui tiraient
de dessus les remparts, il rentra dans la ville
sans avoir perdu personne et seulement avec deux
homnles blessés (1).


(1) Clarendon prétend que les prisonniers qu' on faisait quel.
quefois dans ces étonnantes sorties se trouvaient toujours
ivres, et avouaient ensuite, lorsqu'ils revenaient dans leur bon
sens, que le gouverneur donnaittoujours au détachement des-
tiné a la sortie autant de vin et de biere forte qu'il en pou-
vait boire. Cepen'dant il reconnalt comme une chose digne
de remarque, el la }lreuve d'une excellente discipline, (Iue ,




DU LONG PARLEMENT. .237
Les assiégeans se montraient fOl't habites dans


la disposition de leurs batteries, ainsi que dans
les travaux de la lnine; mais ces travaux furcnt
rendus inutiles en plusieurs lieux par des sources
d'eau; en d'autres, l'extreme dureté de ce terrain
rocailleux les rendait impossibles·, et la CtU ils
étaient plus faciles, l'habileté du gouverneur les
prévenait par des contre-mines. Les assiégeans
lancerent dans la ville plusieurs grosses grenades;
mais la main de la Providence les guida d'une si
singuliere maniere, qu'elles tomberent dans des
endroits ou elles firent tres-peu de dégat. Il se
passa une chose digne de remarque. Les troupes
Galloises et ceHes de Worcester s'étant avan-
cées, amenerent quatre pieces de canons a une
distance convenable devant la partie de la ville
qu' elles assiégeaient, et une de ces pieces fut
placée en batterie. Un partí d'environ quatre
cents mousquetaires, comlnanclés par le major
Pudsey et le capitaine Gray , assistés du capitaine
Faulkrier et du capitaine Massey, fit une sortie
hors de l'une des portes. Dalls le meme temps,
un lieutenant avec cinquante mousquetaires,


durant tout le eours du siége, il ne déserta pas un seul
offieier de la garnison, et pas plus de trois soldats. (Histoire
de la Rébellion, tomo 6, pago 219') Quand on songe a
tout ce qu'eut a souffrir eette garnison, son courage s'ex-
plique par une toute autre sorte d'ivresse que eelle dont a
parlé Clarendon. (Note dr. l' Editeur. )




llISTOIRE


futenvoyé contre lenrs onvrages ponr lenr donner
une fausse alarme, tandis que l'autre troupe pas-
sant derriere les canons et les tetes d'ouvrage,
tOlnba sur le poste principal, tua plusieurs offi~
ciers, deuxcanonniers, tua ou blessa mortellement
environ une centaine de soldats , prit un lieute-
nant, en fit quatre autres prisonniers, en leva le
canon et se retira avec la perte seulement de deux
hommes tués et de quatre prisonniers.


On fit peu de temps apres deux autres sorties
({ni, moins hien conduites, ne réussirent pas éga..;
lement. Cependant, daos ces deux occasions , les
assiégés parvinrent a se retirer sans beaucoup
de perte. J\fais c'en fut assez pour frapper de stu-
peur lenrs ennemis, de voir l'audace de ces 'petits
partis a venir attaquer leurs principaux quartiers,
tuer leUrs hommes et pouvoir ensuite se retirer
de cette nlaniere. Ceux qui entendent la guerre
ont observé qu'il avait faUn une protection plus
qu' ordinaire de la providence, pour faire réussjr
les entrcprises de ces nonlbreux partis, dont un
seul, par sa défaite, aurait pu mettre la ville daos
les plus grands dangers; toute la garnison étant
obligée de se tenir jonr et nuit sur les travaux,
excepté environ cent vingt hornmes de réserve
laissés au quartier-général de la place; en sorte
qu'il n'y avait ponr soutenir la telnpete qu'une
senle ligpe faible et point soutenue. Cependant
les lneilleurs lnilitaires pensaient que le salut de




DU LONG PARLEMENT.
tons demandait ces fréquentes sorties, comme le
plus· sur relnede qu'on pllt employer dans une
situation aussi désespérée. N on-seulement elles
retardaient les travaux des ennemis, mais elles ré-
pandaient la terreur parmi eux en leur Inontrant
aquel point se soutenait le courage des assiégés,
et en meme temps la chaleur de l'action ne lais-
sait pas a ceux-ci le temps de se refroidir. Le
rOle du gouverneur était de fatiguer et d'épuiser
les ennemis en les fon;ant, par de continnelles
alarmes, a se tenir sans cesse sur leurs gardes.


Les assiégeans se préparaient a un assaut gé-
néral, et en 11leme temps s'effor<;aient d'épuiser
les magasins de la ville, dont ils espéraient venir
hientot a bout. Ils emploY!lient leurs propres mu-
nitions a répandre la terreur parIni les assiégés;
ils leur lan<;aient des grenades et des pots a fen,
et une seule de leurs batteries jeta, en une seule
nuit, dans la vine, plus de yingt boulets rouges
qui traversaienf les airs comIne autant d'étoiles
tombántes, quelques uns du poids de dix - huit
livres, d'autres de vingt-deux. Quelques unS t1'a-
versant les écuries et les llleules de foin, ne par-
vinrent pas a les enflamlner, a cause de la ra pidité
de leur mouvement; et, ce qui parut extraordi-
naire, ils ne mirent le feu a aucune maison. On
creusait chaque jour plusieurs In in es et contre-
mines. On travaillait des deux cotés avec une
grande activité. Le gouverneur Massey s'effor<;ait




HISTOIRE


de soutenir le courage de ses soldats et d'empe-
cher la ville de tOlnber dan s le désespoir en leur
faisant espérer un prompt secours. Il a joutait de
plus qu'une soulnission si tardive leur obtien-
drait peu d'indulgence de la part de l'armée da
Roi; de l'autre coté, le Roí semblait répngner
a leur adresser des sommations solenneIles et pu-
hliques, de peur d'avoir l'air de se relacher de
ses premieres menaces. Cependant on agissait S'ous
main aupres des habitans en les mena«;ant de la
colere du Roi; OH travaillait en outre a leur per-
suader de se rendre, et on leur faisait entrevoir
la possibilité d' obtenir leur grace.




DU LONG PARLEMENT. 241


CHAPITRE VI.


Expédition du cOlnte d~ Essex pour la délivrance
de Glocester. Récit de la grande bataille de
Newbul;Y.


Pendant que le siége de Glocester était ainsi
poussé avec tant de vivacité qu'aucun messager
n'y pouvait pénétrer ,le parlement qui, apres
de longs débats, s'était déterminé a tout tenter
pour secourir cette ville , d'ou dépendait le salut
du royaume, ne savait COInment s'y prendre ponr
lnener a bien une felle expédition. Le recrnte-
Inent d'une armée aussi réduite que l'était ceHe
du lord-général eut entrainé trop de lenteurs;
il fallait donc absolument se servir de la milice
de IJondres et des volontaires. Ceux qui étaient
dévoués au parlement s'encourageaient récipro-
quement a cette entreprise; les malveillans , au
contraire ~ s'efforc;;aient dans tous leurs discours
de la représenter comme impossible, et, pour
elllpecher le lord-général de se mettre en mar-
che, on répandait chaque jour, dans Londres,
la fausse nouvelle de la prise de Glocester. Le
COlnte d'Essex était a quatre- vingt milles, sans
armé e disponible; il avait a traverser des cOlntés
déja occupés par l'el1nemi, en sorte que, tout


2. 16




HlSTOIR E


bien considéré" c'est une question de savoir la-
quelle des deux choses fut plus merveilleuse de
l'entreprise lUeme ou du succes. Leparlement était
tombé si bas a ceHe époque, soit en force, soit
en crédit, et les hornmes qui suivaient sa fortune
se pressaient tellement de l'abandonner, qu'une
providence spéciale pouvait seule le releyere Non-
seulenlent la cause, mais l'existence lneme du
parleluent était en question; de cette expédition
devait résulter ou sa chute totale ou son rétablis-
semento Il plut el Dieu que les résolutions des
honlnles convinssent el une telle extrémité. Les
réginlCns de milice de la cité et les volontaires
se présenterent de bonne grace pour faire le_ser-
vice, et les débris de la v ¡eille armée d u général
furent r~crutés en toute hateo On projeta aussi
de lever une autre arluée, quí marcherait, el
titre de réserve, sous les ordres de sir 'iVilliam
lValler; mais ce projet ne put aller aussi vite
que }'occasion l'exigeait. S'il etlt été accompli ,
et que sir 'iVillialu fut arrivé a Newbury avec
des troupes fraiches, beaucoup de gens pensent
que le parti du Roi eut re<;u alor8 le dernier
coup.


Le 24 aout, le conlte d'Essex passa en revue
ses troupes el Hounslow Heath, el dix nlÍlles de
Londres. Presque tous les 111embres du parlement
1l10nterent a cheval a vec lui, pou!' assister el ceHe
revue , et, vers le soir, ils prirent eongé du gé-




DU LONG PARLE)lEl\T. 243
'néral , quí aUa couche'l~ eette nuit ~eme a Cole-
brooke.


Sur la nouvelle de l'approche de cette armée,
le prince Robert, avec la plus grande partie de
la cavalerie du Roí, quitta Gh~cester pour s'op-
poser a la marche du cornte d'Essex; mais le Roi,
avec le gros de son armée, continua le siége,
résolu de le pousser jusqu'au dernier moment,
et dans l'espoir que chaque minute pouvait en
amener la fin ~ soit par le défaut de nlullitions
dans la place, soit par quelque autre circons-
tance; cet espoir n'était pas sans fondement.
Tel1e fut la singuliere fortune de cette viUe, qu'a
l'instant 00. elle fut délivrée, il ne restait dans
ses magasins que trois barils de poudre.


Le samedi 26 aolit 1645, lord Essex marcha
de Colebrooke a Beaconsfield, puis de H.l a Berr-
ton, ou il fit équiper ses troupes, et d' Olt il pal'tit
sur-Ie-chanlp. La nlilice de Londres et les volon-
tai-res ne rejoignirent l'armée du 10rd-général que
le 1 er septembre, au rendez-vous donné a Brack-
ley Heath. Avant cette jonction , un petit partí de
quatre cents chevaux du Roi s'était trouvé en tete
d'ul1 corps de l'armée parlementaire; il s'en suivit
quelques escarmouches aux environs de Bicister,
lnais les troupes royales se retirerent bientot, a
l'approche d'un corps nOlnbreux de Jnilice. Lord
Esscx prit son quartier-général a Ayno\V, et Cl1-
voya un régilllcnt cn (luartier á Deddington, sous


16.




2,44 HISTOIRE
Jes ordres du colonel Middleton. Celui-ci ayant
appris qu'il y avait la deux régirnens de la cava ..
lerie du Roi, poussa en avant deux cOlnpagnies
de dragons, pour reconnaltre la place; rnais la
cavalerie royale se retira sur la route d'Oxford,
qu'occupait lord Wilmot avec cinquante autres
escadrons. Le lendemain, deux régirnens parle-
mentaires, conduits par Middleton et sir James
Ranlsey, s'avancerent par cette route; ils y aper-
c;urent leurs ennemis divisés en deux grands
corp~ , et, apres une légere melée, ils forcerent
le passage, et y laisserent des dragons pour le
garder. Les troupes du Roi revinrent bientot, et
furent rec;ues avec une résistance qui, apres avoir
duré plusieurs heures, les déterlnina enfin a se
retirer; mais voyant que le lord Middleton , con-
formément aux ordres du 1ord-général, se repliait
sur le gros de l'arrnée, les royalistes pousserent
contre son arriere - garde un parti de ca valerie ,
qui la suivit jusque dans les rues de Deddington,
d'oll il fut ensuite chassé en désordre. Ces escar-
lnouches couterent peu aux deux partis; mais
sans connaitre exactement les pertes réciproques,
le parlement présuma que ceHes des ennemis
étaient les plus grandes.


IJC lord-général, cantonné a Adderbury avec
son propre régiment de cavalerie, et ave e celui
du lord Gray, ayant su que quelques escadrons
du Roi s'étaient répandus de Banbury dans la




DU LONG PARLEl.\'lENT. 245
campagne, envoya contre eux un petit corps,
qui les poursuivit jusque dans Banbury, et leur
fit plusieurs prisonniers, sans que les troupes
royales, renfermées dans le fort, osassent sortir.
Le général se porta de la sur Chi pping N orton ,
ou quelques c0l11pagnies de l'armée royale paru-
rentencore, mais pour se retirer bientot, cOlume
elles firent chaque jour, pendant toute cctte
lnarche.


IJe 4 septembre, le lord-général marchant vers
Stow, sur rOld, envoya en avant, un peu sur
sa droite, le colonel Harvey avec son régiment
de cavalerie et deux régimens d'infanterie, et sur
sa gauche la milice de la cité, cOlumandée par
le lieutenant-colonel Raily. Le prince Robert se
lTIOntra alors avec quatre mille chevaux, cam-
pés sur les collines, et il envoya un fortparti de
cavalerie dans une vallée vuisine de Stow, pour
cerner les régirnens du colonel Harvey. Ce mou-
vement ayant été aper«;;u, trois réginlens de l'a-
vant-garde de l'armée parlementaire se nlÍrent
en Inarche pour délivrer le colonel, et obliger
la cavalerie royale a se replier sur les siens. Il y
cut la quelques escarmouches peu sanglantes.


Le général avanc;;a a la tete de son infanterie,
sir James Ramsey commandant l'arriere-garde, et
sir Philippe Stapleton l'avant-garde. La cavalerie
du Roi se lnoutra de nouveau, et en vint pln-
sieurs foi8 aux luains avec sir Philippc Stapleton




HISTOIRE


et d'autres corps ; mais elle se repliait toujours ,
tantot reparaissant, tantot reprenant sa re traite ,
et cette manoouvre continua durant un espace
de sept milles.


Le 5 septemhre, le lord-géneral avanc;a jus-
qu'aux collines de Preshury ; la , iI déploya toute
son armée en vue de la ville de Glocester, et fit
faire une décharge de quatre I)ieces de canon
de gros calibre, pour donner avis aux habitans
de son approche. Bientot apres il aperc;ut les
quartiers du Roi en feu; car en apprenant l'ar~
rivée du Iord-général, les troupes royales avaient
ahandonné le siége, et avaient marché toute la
nuit (1). L'arriere-garde de l'armée du lord~gé-


(1) Jamais dans l'armée du .rl.oi on n'avait vouIu se per-
snader que le eomte d'Essex osat entreprendre de venir se-
courir Gloeester; on repoussait toutes les nouvelIes de sa
marche; en 80rte que, quand la cavalerie royale chargée de
J'inquiéter se reptia sur les postes d'infanterie, eelle-ci, for-
cée de lever le siége, se retira, dit Clarendon, plus en dé-
sordre et plus effrayée qu'on n'aurait dli l'attendre. (His-
toire de la R(Jbellion ~ torn. 6, pago 223 et sui". ) Avant
de s'éloigner, le Roi envoya au eornte nn trompette avec
quelques propositions d'aceommodernent; mais Essex, sa-
ehant tres-bien qu'elle5 avaient pour uniquc ohjet de retar-
der sa marche, répondit sur-le-ehamp H qu'il n'avait point
(( de pouvoirs pour traiter, qu'il était chargé de délivrer
(( Glocester, qu'il le ferait, ou laisserait 5a vie 50ns les murs
« de la place. 1I Les soldals entendant elire qu~un trompette
t~tait arrivé avcc des propositions, crÍerent pcndant long.."




DU LONG PARLEMENT. 247
néral, quelques canons et quelques munitions
demeurerent sur la colline, difficile a descendre
en ce moment en raison de la roideur de la pente
et de l'obscurité de la nuit, qu'augmentait un
teJl1pS orageux; l'armée avait,. d'ailleurs, de-o
puis trois jours, beaucoup souffert de la di-
sette, en traversant un pays presque entierement
dévasté par l'ennemi. L'armée du lord - général
lllarcha vers Cheltenham; ceHe du Roi le har-
cela pendant sa nlarche, et atta qua plusieurs fois
ses quartiers, durant l'espace de deux jours qu'il
séjourna a Cheltenham. Le 8 septembre, iI se
dirigea avec toute son armée vers Glocester, Ol!
iI fut reºu avec beaucoup de joie el de grandes
lnarques d'honneur par cette ville, long-tenlps
assiégée et maintenant délivrée. Le général donna
beaucoup d'éIoges a la courageuse habileté et a
l'activité infatigahle du colon el l\Iassey, ainsi
qu:a la patjente constance des habitans. De leur
coté" iIs célébrere~lt hautement Son Excellcnce,
pour leur avoir apporté secours a travers tant
de difficultés, de peines et de désavantages. Tous
se réunirent dans de communes actions de graces
envers le Tout - Puissant, pour les bienfaits de
sa divine providence et la núséricorde dont il


temps :lVCC les plus bruyantes c1ameurs: Point de proJlosi-
Ún!1s! l'0int de propositiollS! et le trompetle futrcnvoyé.
(ilIél71oires de '7Vhitelocke) P[lg. 69' ) (Note de l'Ed/tcllr. )




HISTOIRE
avait usé envers eux ~ en les secourant si a-propos.


Le lord-général coucha deux nuits a G-Iocester,
et fournit la ville de munitions, d'argent et de
tout ce qui lui était nécessaire. De la il marcha
a Tewkesbury , dans l'intention de séjourner a
Cheltenham; mais il fut averti qu'un corps d'ar-
mée du Roi, qu'on lui dit etre celui du prince
Maurice, était a Cirencester ou ron avait dé posé
une grande quantité de vivres pour l'armée. Sur
cet avis, le général, dont les troupes souffraient
tous les jours davantage de la disette de vivres et
des autres choses nécessaires, fitunelongue marche
a la tete de son avant-garde pour tomber sur ce
corps, ce qu'il fit environ a une heure de la nuit. Il
envoya un parti de cavalerie s'enlparer des senti-
nelles, tandis que lui-rrj(~me, avec le reste de sa
cavalerie, entoura la ville. Un corps de fantas-
sins en enfans perdus , accompagnés du régiment
d'infanterie du général, for«;a la ville et y surprit
deux régilnens de cavalerie appartenant a sir Ni-
cholas Crispe etau colonelSpeneer, destinés, selon
l'aveu de quelques prisonniers, a exciter un sou-
levement dans le comté de Kent. Le lord-général
prit dans la ville de Cirencester quarante charges
de vivres, qui, apres l'aide de la Providence ~
furent le salut de son armée , qu'elles soutinrent
jusqu'aujour de la grande bataille de Newbury.
Il prit aussi six étendards, tous les officiers , ex-
cepté les deux colonels qui étaient absens, pIn-




DU LONG P ARLEl.\'lENT. 249
sieurs autres hommes de rang, plus de cinq cents
soldats et quatre cents chevaux.


De Cirencester, le général se rendít a petítes
j ournées d'environ cinq mílles a Cricklade , et de
la a Swinden, d'olt il comptait aller a Hunger-
ford; mais l'avant-garde et le gro's de son armée
étaient déja presque entierement arrivés a Au-
hurne-Chase, lorsqu'une brillante troupe d'en-
viron six mille cavaliers royaux atta qua vive-
ment son arriere-garde, qui, ne se trouvant pas


. en nonlbre suffisant pour résister, hlcha de faire
sa retraite en hon ordre vers le corps d'armée;
mais les cavaliers royaux serrerent si vivenlent ,
sur les derrieres et sur les flancs, la cavalerie par-
lementaire, qu' elle fut contraillte de se retirer en
désordre et avec quelque perte. Arrivée au corps
d'arnlée, cette cavalerie se remit en ordre et tint
tete a l'ennemi, tandis que l'infanterie s'avan«;ait
pour la secourir. Cependant la cavalerie du Roi,
ayant chargé une seconde fois, rompít encore la
cavalerie parlementaire; mais enfin, quelques
régimen s du général étant arrivés a la rencontre
de l'ennerni, ils chargerent les enfans perdus des
troupes royales, forInant un corps de cinq cents
chevaux, et les mirent totalement en déroute,
puis ils chargerent les deux régimens qni soute-
naient ces en fans perdus, etles défirent également.
Alors la cavalerie royale, revenant courageuse-
nlCnt avec des troupes fraiches, arreta la pour-




2::>0 . IlISTOIRE


suite, et aussitot apres , deux des régimens par-
lementaires chargerent bravenlellt les troupes du
Roi qui les re({urent avec une égale bravoure, en
sorte que des deux cotés OH se retira en meme
temps. Quelques autres régimens de l'armée par-
lementaire, tenterent aussi une charge , mais ils
furent repoussés avec tant de valeur qu'ils furent
obligés de regagner le corps de l'armée. En ce
JllOment sir Philippe Stapleton J qui commandait
ce jour-Ia l'avant-garde,de l'armée parlementaire,
étant revenu a dessein sur ses pas pour secourir
ses amis, obligea les troupes du Hoi a se retire!'
aussi. La nuit luit fin a ces comhats. Le partí du
Roi perdit dans cette chaude rencontre le marquis
de Vieuville et plusieurs autres officiers de mar-
que quí avaient donné d'éclatans témoignages de
leur valeur, quoique leurs noms n'aient pas été
lnentionnés. On perdít aussi beaucoup de soldats
et un lieutenant-eolonel. Du eoté du parlement,
on perdit en officiers, les eapitaines Middleton et
Hacl\et. Plusieurs officiers furent hlessés, quel-
ques soldats tués, et le eolonel ShefJield perdít
un étendard. Le lord-général Essex marcha ce
Jll(~me soir avee son armée a IIungerford. Sir
l)hilippe Stapleton qui avait eu le cOlnmande-
llICnt de l'avant-garde conduisait a10rs l'arriere-
gell'de.


Le lendemain se livra la fameuse bataiJJe
tle Newhnry, clont l'événenlcnt fut si impoPlant




DU LO~G PARLEl\1ENT. 2:JI
pon!" tout le royaume, qu'elle mérite d'etre rap-
portée en détail; mais n'ayant rien trouvé sur
cette bataille dans les éerits des partisans du
Roi, je me servirai du réeit exaet, publié par
quelqucs eolonels de l'armée du p~rlement, hom-
Ines de grande et irréproehable réplltation, et j'aí
entendu quelques uns de leurs ennemis memes
reeonnaitre que ceHe narration était, non-seule-
rnent remplie de modestie, mais vraie dans sa
plus grande partie. Si 1'0n déeouvrait ensuite quel-
que chose qui présentat eneore plus le earaetcre
de la vérité, anenn honnete hOl1une ne pourrait
s'affiiger de le voir publier; nlais ce n'est pas une
chose sans exemple que les hornmes aient éerit
]eurs propl'es actions avec une impartiale sineé-
rité; Jules· César est reeonllU pour avoir éerit
ses commentaires, non-seulenlent de la guerre
des Gaules, mais aussi de la guerre civile, avec
une véracité tellement exempte de soup~ons, que
ses erhlCmis memes n'y ont rien trouvé a blamer.
Je rapporterai done textuellement la relation de
ces eoloneIs.


Le mardi 19 septelnbre 1645, nous nous diri-
gefunes de Hungerford vers :r\ewhury. Arrivés a
deux milles de la ville, HOUS pUlnes déeouvrir les.
troupes de l'enneIni sur une coHine. Leur armée
toute entiere 110US ayant prévenus, était arrivée
a Newbury eten possession de la ville. Lelende-
lllain matin rncrcredi, un point du jour, l'ordrc




252 HISTOIRE
fut donné de· nlarcher sur une colline nommée
Biggs-Hill, située proche de Ne,vhury, et qu'il
fallait gagner comme le seul endroit d'ou nous
pussions avantageusement fenter de forcer le pas-
slge; lnais, lorsque Son Excellence s'aper(jut que
les ennemis occupaient cette colline, elle se mit en
personne a la tete de son régiment et des brigades
du colonel Barday et du colonel Holborne, et
chargea l'ennemi avec tant d'impétuosité, qu'elle
le chassa de la colline dont elle demeura maitresse
tout le reste du jour, gagnant plutot que perdant
du terrain. Tant que le régiment de Son Excel-
Ience et les deux autres brigades qui l'acconlpa-
gnaient demeurerent dans ce poste, ils furent
vivement chargés par la cavalerie et l'infanterie
de l'enn.emi , et 1'on déploya heaucoup de valeur
des deux cotés. Le général se portait en personne
partout oil il avait a donner des ordres, et tou-
jours présent partout ou était le danger, il relU-
plit les devoirs d'un excellent général. Les ennenús
cux-nH~mes lui ont rendu ce ténl0ignage. Il parut
oublier entierement les périls auxquels iI était
exposé dans ce poste, qu'il s'effon;ait de conserver
comme émÍnemluent favorable a ses desseins. Il
fit aussi avancer les deux han des de 111ilice de
Londres, qui soutinrent avec un invincible cou-
rage les fréquentes attaques de l'infanterie et de
la cavalerie ennelnie.


L'infanterie ayant ainsi conunencé le combat;,




DU LONG PARLEl\IENT. 255
sir Philippe Stapleton, a la tete de la garde et
des réginlells de eavalerie de Son Exeellence,
s'avan~a sur le plateau de la eolline. Aussitot que,
secolldé par le régiment de eavalerie du eolonel
Dalbeir, le seul qui se fut avancé avec lui, il
eut déployé ses troupes hors de l'extrémité du
ehemin, l'ennelni reconnaissant l'avantage de
cette position, et déja rangé en plusieurs gral1ds
eorps de cavalerie, en fit avancer aussi une par-
tie pour charger la notre; mais nous les rec;umes
si bien, ayant soin de ne pas faire feu qu'ils ne
fussent entierement sur nous, qu'ils furent mis
totalernent en déroute. Nous les poursuivitlles,
en leur tuant beaucoup de lllonde, jusque pres
de l'endroit OU était réunie toute leur cavalerie,
puis nous regagmimes en bOll ordre notre prc ...
miere position; ce qui donna le temps de laisser
arriver le reste de notre eavalerie, qui faisait ce
jour-Ia l'avant - garde. Alors l'ennemi détaeha
quelques nouveaux régilnens de cavalerie, qui
s'avancerel1t avec toute la rapidité possible sur
sir Philippe, mais ne furent pas mieux traités
que la premiere fois; il les mit encore en dé-
route. Comme il commenc;ait a rétablir l'ordre
dans son régiment, eeux de Ramsey, Harvey
et Goodwin, vinrent se joindre a lui = la cavalerie
entiere de l'ennemi les ehargea alors avec cou-
rage, et fut rec;ue de meme. Sir Philippe Stapleton
fut pris a la fois de front et en Hane; tous ses




HISTOIRE


eavaliers avaient tiré Ieul's deux eoups de pisto-
lets, et se trouvaient tellement entourés, que
l'ennemi et les natres étaient sur toute la lignc
entierement nH!lés et confondus. Il y eut heau-
coup de monde tué des deux catés. Les natres
furent a la fin repoussés jusqu'a l'extrémité du
ehenlin par lequel ils étaient venus; comme i1 s
se trouvaient alors pres de notre infanterie, l'en-
nemi fit ses efforts pour se dégagel', et rejoilldre
son corps d'armée. Ceux qui entrerent avec les
natres dans le chemin furent tués, pour la plu-
parto Nous primes tous les drapeanx de troÍs ré-
gimens de cavalerie, et un drapean d'un autre.
Le colonel Dalbeir et le commissaire Copley fu-
¡-ent blessés dans la premiere charge , OU ils com-
naUaient vigollreusement. Les capitaines Ham-
mond, Fleetwood, Pyln et le eornette Doily furent
blessés dans la troisieme charge. Le capitaine
Draper, a la tete d'un corps des enfans perdus
de sir Philippe Stapleton, se conduisit avcc
beaucoup de valeur; autant en firent avec leurs
dragons les eapitaines Abercronlhy et Shibborne.
L'aile gauche de notre cavalerie, eomnlandée par
le eolonel Middletol1, et l'aile droite de la eava-
lerie ennemie ne purent, a cause des haies, C0111-
hattre que par petits corps.


Apres avoir ainsi, pour plus de clarté, rap-
porté de snite toutes les actions de la cavalerie.,
uous retournel~ons a l'infanterie. Dans la matinée,




DU LONG PARtEl\iENT. 255
tandis que Son Excellence était engagée sur la
coHine, le major- général Skippon se hata de se
rendre sur le haut de cette meme coHine, 011
combaUait notre avant - garde. Il a vait d'abord
donné ses ordres pour faire avancer notre artil-
lerie, et pour que les troupes qui eil dépel1daient,
savoir la brigade de lord Roberts et la sienne,
ceHe de sir WiHiam Springer et du eolonell\lan-
,varing, ainsi que les régimens auxiliaires, bleu
et rouge, se rendissent pres de Son Excellence.
En regardant du haut de la eoIline, du eoté de
Newhury, il aper«;ut une grande partie des trou-
pes ennemies, tant cavalerie qu'infanterie, qui
se dirigeaient en plusieurs corps vers le ehemin
par 011 devait nécessairement passer notre artil-
lerie. Il supposa que l'intention de l'ennemi était
de tomber sur notre artiHerje, ou sur les der-
rieres de ceux qui cOlnbaUaient sur la colline,
ou bien de s'emparer de l'autre colline, située
derriere nous, et OU nous avions passé la nuit.
Enfin, il comprit que nous avions tout a craindre
de ce lllouvenlent, et se hata, eotnme il en reyut
aussi le eommandelllent de Son Excellence, de
disposer ses troupes dan s les lieux OU elles étaient
le plus nécessaires. En meme temps, comme le
général delnandait qu'on lui envoyat plus d'in-
fanterie, on fit marcher de ce coté la brigade
dans laqueUe étaient le régiment du major et
celui de Springer, auxquels on joignit les auxÍ-




!l56 HISTOIRE
liaires rouges, puis on pla«;a la brigade de lord.
Roberts avee quatre petites pieees précisément
sur le ehelnin par OU s'avan«;ait l'ennelni. Elle
le re«;ut de telle nlaniere qu'il prit la fuite, et
que lord Roberts se remit en possession du ter-
rain sur lequel s'était avancé l'ennemi. Son lieu-
tenant-colonel re«;ut un eoup de feu dal1s la figure.


Les enfans perdus que ce lieutenant - colonel
avait commandés la soirée précédente, renforcés
de trois cents mousquetaires, et conduits par le
major Forteseue, furent placés par le major-
général Skippon a la gauche de la brigade de
lord Roberts, sur le grand chemin qui conduisait
de Newbury a l'endroit OU nous étions. On pla«;a
sur ce grand cherp.in quatre canons, qui furent
vaillamment défendus; -cependant l'ennemi s'ap-
procha tellement qu'il emmena un des mulets
d'une de nos pieces; mais il lui en eOlita plu-
sieurs hommes.


Le régilnent du colonel MaJ1waring fut placé
a la droite, entre la coHine et la brigade de lord
Roberts. Son Excellence fit marcherqrielque temps
apres ce régiment au secours de son propre ré-
giment, et des brigades du colonel Barclay et du
colonel Holborne, qui avaient été quatre heures
exposés aux plus chaudes attaques. Il arriva que
ce régiment ne fut pas plutot éloigné, que les
autres furent attaqués par deux grands corps de
cavalerie et d'infanterie, quí les forcerent a se




DU LONG PARLEMENT. .257
retirer, et leur enleverent le terrain dont ils
avaient pris possession ; le colonel Holborne s'en
aper<,{ut, fit une charge sur l'ennemi, et aussitot
sa brigade, ce He du colonel Barday, et le réSi-
lnent du général revinrent sur l'ennemi, le mirent
en fuite, regagnerent le terrain, et s'y maintinr-ént
tout le reste de la journée.


Le régiment auxiliaire bIen re<,{ut ordre d'aller
secourir les enfans perdus, qui, a leur tour,
avaient été trois ou quatre fois au feu. Le
combat dura daos la vallée, sur un espace de
plus d'un mille et demi de long, aussi long-
temps que dans aucune autre partie de l'armée,
c'est-a-dire, jusqu'a dix heures du soir, heure a
laquelle l'ennemi fit une hOllne charge sur les
postes du colol1el Barday et du colonel Holhorne.
Apres avoir donné ses ordres dans la vallé e , le
lnajor-général remonta la coHine, d'ou il apercut
qu'il serait avantageux de tirer huit ou neuf coups
de d~mi- couleuvrine sur l'ennelni, qui, d'une
111aison, tirait de fort pres sur les colonels Bar-
cIay et Holborne. Ayant donc rassemblé en un
corps deux régimens de milice, il les rangea eu
hataille et les pla<;{a devant l'endroit que devait
ensuite occuper le train d'artillerie sur le somlnet
de la colline. Il engagea le lnajor Boteler a rallger
les mousquetaires de son régiment sur la droite,
elevant les deux denlÍ-couleuvrines qu'on playa
aussi sur le SOlumet de la colline et a l'entrée du


2.




258 BISTOIRE
chenlin. Il mit les auxiliaires rouges a la gauche des
pieces qui, auparavant, étaient assez peu gar-
dées. L'artillerie fut tres-bien conduite ce jour-
la par l'habileté et les soÍns de sir John Mer-
rick.


Tandís que cela se passait, deuxpieces appar-
tenant au régiment du nlajor-général, et un petit
canon de celui de sir 'Villiam Brooke, furent
repris par le régiment du général, sous les 01'-
dres du major Boteler, secondé de deux cents
lnousquetaires. L'ennelni tira de ses piquiers,
qui demeuraient en arriere ave e les drapeaux
gardés par des corps considérables de cavalerie,
cinq ou six cellts 1110usquetaires, et, en outre., des
dragons pour prendre les notres par la droite, au
nlÍlieu des haies, précisément au 1110ment OU Son
Excellence avait fait demander trois cellts mous-
quetaires des enfans perdlls, pour les envoyer au
secours des régimens du colonel Barclay et du
colollel Holhorne. L'ennerni, t0111bant sur eux par
la droite, les arreta clans leur route; luais aidés de
plusieurs autres de nos mousquetaires, qui se
trouvaient sur le terraiu, ils le repousserent et
l'empecherent de nous faire beaucoup de mal.
Cela se passa vers les quatre heures de l'apres-
luidi, tandis que toute notre infanterie se trou-
vait engagée dans le combato Le général fit aussi
placer une partie des auxiliaires rouges plus
pres el u poste du colonel Rarclay, qni le deman-




DU LONG PARLE~lEl"1T.


dait. A la fin, la nuit arriva , et l'ennemi, cava-
lerie et infanterie, denleura, en hon ordre, a
l'extrémité de la prairie, OU 0011S pensions qu'il
tieodrait jusqu'au lendemain matin, croyaot,
comme 00 nous 1'a vait rapporté., qu'il s'occupait
a y placer ses canons pour en faire usage contre
HOUS au point du jour. Nous travaillames a soute-
nir le courage de nos soldats pour le combat au-
quel nous nous attendions, résolus, avec l'aide de
Dieu, de nous ouvrir, le lendemain, un passage
ou de mourir; mais il plut a Dieu que ce passage
nous fut ouvert sans coup férir; l'ennenú dé-
campa pendant la ouit. Ainsi, le lendemain l11a-
tin, nous nous nlimes paisiblement en possession
du terrain sur lequel s'était livrée la bataiUe et
<{uiétait d'ahord resté a l'enuelni (1). Le jeudi


(1) La hataille de Newbury fut SOl1tenue desdeux cütés
avec une valeur extraordiuaire. Parmi les traits de courage
auxquels elle donna líeu, Whitelocke en cite un assez plai-
sant d'un valet de sir Philippe Stapleton. DaJ;ls une charge
ou il suivait son maltre, il avait eu son cheval lué; il se tira
pourtant d'affaire, el revint a pied trouver sa cornpagnie.
Alol's il se souvint avec regret qu'il avait laissé la bride et la
selle de son cheval. C'était, disait-il, une selle el une bride
neuves, et lllulot que d'abandonner ce profit aux cavaliers,
il était résolu de retonr'ner les chercher. Vainement on
'{ouIut le détourner de ce projet, lui r~présentant que Son
cheval.était tumbé tout pres de l'ennemi; vainement son
malLre lui promit une selle et unebride neuycs; iI ne put
t~onsentir a Iais:>cr aux cavaliers un vareil butin , iI retourna


17·




HISTOIRE


matil1 'de bonne heure, Son Excellence donna
ordre a l'arnlée de Inarcher vers Reading. On la
rangea, dans cette vue, sur la brllyere OU s' était
livrée la bataille, et, lorsque Son Excellence cut
donné ses ordres pour qu' on enterra t les morts,
nous nous mimes en marche vers les dix heures.
Le colonel Middleton conduisait l'arriere-garde,
formée de son régiment et de troís autres, ceux
du lord Grey, de Sheffield et de Meldrum, et
de quatre cents mousquetaires sous les ordres
du colon el Barday. Durant la marche, l'ennemi
tira plusieurs fois sur nous, a de grandes dis-
tances et derrierc les haies; maÍs il ne nous
6t aucun InaI. Arrivés sur une 10ngllc hruyere,
HOUS rangealnes plusieursfois l'armée en bataille
sans qu~il parut personne; mais, vers le soir, a
l'entrée d'un chemin étroit, l'ennemi tomba sup
nous avec huit cents mousquetaircs et une grande
partie de sa cavalerie; en sorte que notre ca-
valerie, alors a l'arrierc-garcle, se retira confu-
sénlent et tres en désordre; lnais le colonel Miel-:-
dIeton avec les autres officiers de l'arriere-garde,
s'étantempressésdevenir, ala b~tede l'infanterie,
attaquer l'ennemi, le fOl'cerent, a son tour, de


<:hercher sa bride et sa selle, et les rapporta au milieu des
halles qui pleuvaíent sur luí sans avoir resu la moindre
blessure. (Mémoir.es de Whitelocke, pago 71.) (Note det
[' Editeur.)




DU LONG PARLE~IENT.


l~culer jusqu'a la bruyh-c, avec autant de con-
fusion qu'iI en avait d'abord causé parlni nous.
Le lieutenant Browne fut faÍt prisonnier.


Apres cela, le mClne soir, le lord-général con-
duÍsit son armée a Theale, d'ou, apres avoir pris
<Iuelque repos, il partit, le lend~main vendredi ,
avec toute l'arlnée, pour Reading, '00. iI denleura
le sanlediet fit rendre de publiques actions de
gl'aces de cette grande victoire.


Personne ne songea a la disputer a u parlement( 1 ),
hien que le lord-général Essex cut été forcé, par


0) Elle lui ful au contraire Jispulée, et les Jeux partis
:,e l'auribuerent; mais a Londres tout était joie, actions de
waces, re<:1oublement de vigueur ainsi que d'espérance;
;1 Oxford, la mésintelligence, les accusations lIlutuelles ame-
naient ou attestaient le déconragement, el la lutte toujours
plus acharnée des petits intérets de con)' embarrassait d'en-
lrayes sans cesse renaissantes la difficile conduite des plus
graves el des plus dangereuses afiaires. Peu de temps apres
la bataille de Newhury OU il avait payé de sa personne, le
<..:orute de Holland quiLLa la cour OU iI avail déplu par la
hauteur de ses prétentions, et oh on l'avait irrité par des
insultes et une sévérité imprudentes; il retourna au parle-
ment qui le res;ul en grace, bien qu'a la chambre des
communes iI y eut cinqu:illte-huit yoix contre cinquante-
neuf pour l'envoyer a la Tour. Le eomle de Bedford qui,
~insique le eornle de CIare, avait aussi combattu a Newhury,
suivit bientot son exern})le; le duc de Northumberland, <¡ni
t.i'était retiré dans ses terres, n'attendant que ]e succes de
la démarehe du comte pour se rendre aupres du Roi, re-
1.lOus:a a son projet el revinl a Londres, oh 1'011 con sen lit de




HISTOIH.E
(léfaut de vivres, a eontinuer sa marche, au lieu
de s'arrcter a tirer avantage de son succes. Le
nombre des hommes tués dans eette hataílle fut
j·ugé, par les plus modérés, quatre foís plus
grand du coté du Roi que de eelui du parle-
lnent; maÍs quelques autres ont porté bien plus
haut la différenee. Les parlemcntaires perdirent
plusieurs eapitaines, entre autres le eapitaine
Massey et le capitaine Hunt, mais peu de per-
sonnes d'un rang plus élevé. Il périt du coté du
Roí troís nobles, le eOlnte de Carnarvon , le lord
Speneer, nouvellement eréé par le Roi eomle de
Sunderland, et le lord vieomte Falkland (1).


Apres eette victoire, le lord-général fut re~u
a Londres ave e une grande joie et heaucoup de
marques d'honneur (2). Les milíces et les auxi-
honcccur a ignorer ce qu'il ne voulait pas qu'onsut; plusíenrs
autres Jords , pret5 a se déclarer, aimerent mieux courir les
chances de ]a fortnne de lenr partí, que la certitude d'un
accueiI méprisant dans le partí contraire. (Clarendon, His ..
toire de la Rébellion, tomo 6, pago 255 et suív. - Histoire
parlementaire, tomo 3, col. 180.) (Note de ['Editeur.)


(l) Parmi les drapeaux prís sur I'armée royale a ]a ha-
taille de Newbury, on en trouva un qui représentait l'exté-
rienr de la chambre des communes , avec deux tetes de eri-
minels plantées au sommet , et au dessous ces denx mots :-
ut extra, sic in.fra. Le parlement ordonna que ce drapeau
serait exposé en public eomme tous les autres. (Mémoires
de 'Vhitelocke, pag.)I.) (Note de I'Editeur.)


(2) La chamhre des communcs se rendit avec l'orateur a.




D U L o N G PAR L E ~I E N T.
liaires de Londres rentrerent dans eette ville en
bon ordre, et furent bien aeeueillis par leurs
amis. Le lord-maire et les aldermen vinrent a
leur reneontre, a Temple-Bar. La faee des choses


Essex-House ponr le féliciter. Le maire et les aldermen en
robe rouge, allerent complimenter le sauveuret le protecteur
de leur vie et de leur fortune, de leurs femmes et de leurs ell-
fans. (Mémoires de Whitelocke, p. jO.) Le comte, a ce qu'il
parait, voulut profiter de cette occasion pour se faire donDer
une satisfaction qu'il n'avait pu obtenir jnsqn'alors; huit ou
dix joUl'S apres cet éclatant triomphe, iI vint a la chamhre
des lords demander sa démission , et la permission de passel'
la mer, se fondant sur le:> dégOlits qu'il avait continnellemcnt
reyllS dan s ses fODctions de général , et, en particulier, sur
ce que la commission accordée a sir William VValIer était
incom})atible avec la sienne. Tandis que la chambre des
lords, prenant celte affaire en considération, décidait qu'elle
demanderait a la traiter dans une conférence ayec la cham-
hre :les communes (J1istoirc parle771entaz're, t. 3 , col. 177),
cclle-ci, par un message, 6t connaltre que sir William of-
frait de renoneer a la commission qu'il tenait direetement
des ehamhres , et demandait qu'un comité flit nommé pou!'
régler l'affaire d'apres les conseils de Son Excellenee et en
vue de la sÜrelé publique. Le comité fut sur-le-charnp nOlll-
mé , et l'affaire terminée s(;ance tenante. Waller se soumit
eutierernellt; il lut décidé qu'au lieu de recevoir ses ins-
tructions uu parlement, comme le portait sa cOIDruission ,
iIles rcccvrait du général en chef. Ce fut, au parlement, un
dernier éclat de la grandeur monrante du eomte d'Essex ,
et, dans son armée, un nouvel aliment aux divisions <[ui
devaient finir par le détruire.


(Note de l'~'dilcllr. )




HISTOIRE


parut alors fo!'t changée , et la réputation du par-
lernent eommenc;a a s'élevel'.


A l'époque de eette expédition, entreprise poul'
secourir Glocester, le Roi avait condu une eessa-
tion d'armes avec les rebelles Irlandais. On en
parlera plus au long dans la continuation de eette
histoire, ainsi que des grandes victoires qu'a-
vaient auparav~nt obtenues des troupes anglaises
peu nombreuses, contre des nlultitudes de ces
rebelles, et qu'on a omises ici pour ne pas inter-
rompre la suite du récit des guerres d'Angle-
terreo On y parlera aussi du eovenant condu, a
eette époque, avec les Écossais, par le parleluent
et la portion de la nation qui tenait son parti, pour
le maintien de la religion , des lois et des libertés
des deux roya Ulnes (1).


Les Écossais promirent au parlement ,qui
avait envoyé a Édimhourg des commissaires pour
eette affaire., qu'ils ameneraient a son secours
une armée de vingt-un luille hommes, tant in-
fanteríe que eavalerie , et le parlement s'engagea
a payer aux Écossais 100,000 livres pour les dé-


(1) Ici s'arnhe l'Hl:stoir~ dll Long-Parlement de May
publiée en 1647- Ce qui suit est traduit de l' Abr(Jgé qu'il
publia en 1650, et qui ya jusqu'au proces du Roi. On a vu,
dans la notice Sur Thomas 1\'Iay (llistoire dll Long-Parle-
ment, tomo I ) , qu~lIe fut l'origine de ces deux ouvrages, et
quelles différences s'y font remarquer. (Note de I'EdlÚ'l/r.)




DU LONG PARLEi\lENT.


penscs que leur occasionnerait la levée de cette
arnlée.


I..le Roi ne traita pas si ouvertement avec
les sanguinaires Irlandais. Il acheta leur secours
eu consentant a une suspension .d'armes, qu'il
prétendit leur avoir accordée pour le salut des
Anglais protestans qui habitaient encore ce
royaume (1); mais elle fut surtout avantageuse


(1) S'il en faut eroire une leUre du eonseil d'Irlande, rap-
pOl'tée par Clarendon, les protestan s d'Irlande étaient en
effet réduits a10rs aux dernieres extrémités. CeUe lettre, en
date du 4 avril 1643, adressée simultanément au Roi et au
parlement, réclamait des seeours de vivres, d' argen,t et de
~llunitions, attendu qu'apres avoir ruiné les pauvres mar-
chands, el etre descendus a des choses bien au dessous de
la dignité de leur emploi, les lords-juges el le eonseil d'lr-
lande déclaraient qu'ils n'avaient plus moyen de fournir du
}Jain aux soldats que pour un mois, et tout au plus pour un
mois de poudre. lIs ajoutaie~t que, foreés de renvoyer les
bouches inutiles , ils allaient faire partir pour l' Angleterre
des milJiers de pauvres anglais dépouillés de tout , et termi-
naient en demandant de nouveau, dans le plus bref délai,
quelques vivres pour soutenir leur existenee, en attendant


, que le reste put arriver. A eeUe lettre était annexé un éerit
présenté lemalin meme au eonseil par les officiers de l'armée
d'Irlande,qui, apres avoir dépeint leurmiseredans les termes
les plus énergiques, demandaient, si on ne pouvait les sauver
du désespoir ou ils étaient pres de tomber, qu'on leur per-
mll d'aller ehereher aille~rs une existenee plus supportable ,
sans quoi ils ll'éeouteraiellt plus d'autre loi que lapremiere
de toutes , ceHe que Dieu a donnée a l'hoJl1me , de veiller a




lilSTÚl R E
aux Irlandais rebelJes, qui, pOUl' recounaitl'e
cette favenr, donnerent an lloi trente milJe li-
vres.


Telle fut la suspension d'armes contre laquelle
s'éleverent si hautement, a Londres, les hOl1netes
gens (1), se fondant principalement sur ce qu'elle
était contraire a une loi et a la promesse du lloi;
cal' il avait été décidé par l'autorité du parle-


s<t propre conservation. (llistoire de la Rébellion, tom. 7,
pago 9.) On ne trouve point de traces de cette lettre dans
l'llistoire parlementaire faite sur les journaux des dCl1x
chamhres, et en tont il y est singulierement peu question des
a {faires d'Irlande; ce qui donne lieu de croire que le parle-
ment n'aimait pas a s'en occuper, et surtout a les laisser
transpirer dans le publico Clarendon donne cette lettre })onr
un des motifs qui déterminerent le Roi a eonc1ure la SllS-
pension d'armes. Quoi qu'il en soit, on ne saurait douter (iue
eeHe occasion n'ait été saisie et grandement exploitée par la
Reine et par les eatholiques. Le com te de Holland, en reve-
nant au parti du parlement , déc1ara (fue sa conscíence ne
lui avait ras permis de demeurer a Oxford arres la suspen-
sion d'armes. (Mémoires de Whitelocke, pago ¡3.) Il Y a.
lieu de croire que ce motif ne fut qu'un poíds légei' ajouté a
eeux qui déterwincrent son retour. (Note de l'Editeur.)


(1) Il Y eut a eette oecasion plusieurs pasqnínades ; une
entre autres disait que « l'armée des Frans;ais et Wallons
}wpistes de la Reine et }'armée des Anglais papistes du Roi,
\'cnaient avee les rebelles d'Irlande ponr étahlir la religion
protestante et les li~ertés de l'Angleterre. 11 (Mémoires de
·Whitelocke, pago 71.) (Note de l'Editcur.)




DU LONG PARLEMENT. 2G7
mellt, en 1641, et le Roi en avait signé l'acte :1
(e (Iue la guerre, contre ces sanguinaires rehelles
(( irlandais, continuerait jusqu'a ce qu"il fut dé-
«( cIaré par·le,parlelnent que I'Irlande était eo-
a tierement soumise, et qn'il ne. serait conclll
ce avec ces rebelles ni paix, ni suspension d'ar-
~( mes, sans le consentement des deux charnhres
ce du parlement. »


L'avantage que le Roi tira de cette treve fut
de pouvoir faire revenir en Angleterre, contre le
pal'lenlent, l'armée anglaise, quí, depuis pres
d'un an, comhaftait vaillamlnent et victorieuse-
ment les rcbelles; c'était la ce qui avait le plus
contribué a l'y déterminer. L'armée rentra, en
cffet, en Angleterre cinq mois apres ~a suspen-
sion; mais, en changeant de cause, ces soldats
changerent de fortune. lIs n'eurent aucun succes
en Angleterre (1). Pcu de temps arres leur ar-
rivée, l'armée entiere fut completcment défaitc,
et sir-Thomas Fairfax leur prit tous leurs prin-
cipaux officiers et lnille sept cents soldats.


L'hiversuivanf, vers le milieude janvier, l'armée
écossaise passa la Tweed et entra en Angleterre.
Elle avait pour généralle comte de Leven, et SOll


(1) Quelques uns meme, entre autres ceux qui vinrent
sous le commandement de Vavasor, refuserent de combattre
les parlemenlaires, et. se j'oignirent a l'armée du comte d'Es-
sexo UI1'(tmoires de Whitclocke, 11ag. 73.) (Note de l'Ed/t.)




HISTOIRE
parent David Lesley cOlnnlandait la cavalerie. La
terre était alors couverte de neige a une épaisseur
extraordinaire, et toutes les rivieres étaient prises;
mais l'ardeurdecombattreétaitencore plus grande
que la rigueur de l' air, et la pa tience des soldats sur-
nlOntale mauvais temps. Le comte de Leven mar-
cha avec ses troupes contre le comte de Newcastle,
qui, a la Í(~te d"une grande armée, tenait pour le
Roi tout le nord de l'Angleterre. La. guerre ne
se poussait pas lnoins vigoureuseOlent sur d'au-
tres points. Au COlumencement du printemps, les
deux partis leverent de grandes arlllées gui jete-
rent la terreur daos le pays (1), et l'été suivant,


(1) Des le commencemellt de l'hiver on s'était préparé,
surtout du coté du parlement, a de grands efforts pour la
campagne proehaine. Le zcle des partisans du parlement
était Ioin de se refroidir. Le partí du comte d'Essex, grossi
par la vietoire de Newbury, quoique porté a désirer]a
paix, semblait ne vouloir l'obtenir que du sueees deJa
guerreo On voit Hollis, le chef de ce parti daus le parle-
ment, aUer au eonseil COmml111 exciter ]'ardeur de la cité, el
ies eitoyens répondre a son appe!. (Whitelocke, llago 80.)
Whiteloeke parle du granel lIombre de gens riches, qui, dé-
terminés a eombattre j l1sqn' a la derniere extrémité pro ar/s
et focis, se joignirent alors a l'armée du eOlnle d'Essex; il
cite entre autres le colonel Wilson qui l'alla joindrea la tete
de deux mille hommes. Ce eolonel Wilsoll était fils unique d' un
tres-riche marehand de la cité, associé lui-meme au COIll-
llleree de son pere , et appelé en outre a un héritage de
2DOO livres sterlíng en tcrres. (Whitelocke, pago 72.) Du.




DU LONG PARLEMENT.


qui fut celui de l'an 1644, elles combattirent des
deux cotés avec une fureur égale, et des succi~s a


coté du Roí deux régimens se formaient des étudians de
}'uníversité d'Oxford et des domestíque5 d~s gentilshommes
aHachés a la cour. Les lords promirent aussí oans les
occasÍons importantes de faire monter leurs domestiques a
che val , et tinrent parole. (Ilistoire de la Rébellion~ tomo ¡.
pago 114.) En général cependant le úle ne paraíssaít pas sí
granel de ce coté que de l'autre. Le Roí avaít de nou~ean.
levé son étendard a Marlborough, mais íl y était venu si
l)eu de monde qu'il l'avait faÍt oter sous prétexte que le
parlement préparant des propoélitions de paix , iI n'avait pas
hesoin pour le momentdenouveHes levées. (Whitelocke, pago
82.) (( D'aílleursles soldats du Roi, dit Clarendon, tombaient
insensiblemellt dans toute la lícence, les désordres, I'impiétt;
qu'ils avaíent reprochées aux rebenes , et ceux-cí croissaieni:
en discipline, en vigilance , en sobriété ; en telle sorte que
d'un coté on semblait combattre pour la royauté avec les
armes de l'anarchíe, et de l'autre travailler a détruíre le
Roí et le gouvernement avec tous les príncipes et la régu-
larité qui apparliennent a la monarchie. ,) (Histoire de la
Rébellioll, tomo 6, pago 292.) Cette différence se faít éga-
lement remarquer dans les moyens employés par les chefs
pour effrayer leurs ennemis. Du coté du parlement on
rencontre un grand nombre d'injustices et de vexations,
mais elles sont conduites avec une sor le de régularité; des
amendes, des confiscations, des emprisonnernens ou autres
peines dont le plus souvent on se rachete a des prix énor-
mes, el donl le gouvernement dispose toujours , soit pour
les besoins publics, soit en faveur de ceux de ses agel1$
qu'il veut gratífier, tels sont les moyens elllployés contre
ceux qui seCOUl'ent le Roí ou. se refusent aux demandes d'A




HISTOIRE


peu pres halancés (1); en surte que l)ar eeHe
hésitation de Ja fortune entre les deux partis , c.t


parlement. Mais si le prince Robert veut qu'un pays le
fournisse de vivres, ce qu'il annonce en cas de désobéis-
sanee, c'est « le pillage et l'incendie des maisons, et toutes
« les autres peines que pourront infliger des soldats affa-
~( més lívrés a eux-memes. )) Une proclamation de ce genre
fut faite dans les comtés d'Oxford, Buckshire et Berksbire ;
ces trois comtés s'associerent pour leur propre défense, et
un comité du parlement fut chargé d'y lever des troupes et
<le l'argent par le moyen des compositions avec les délin-
quans. On voit un coloneI Smith, ({ui avait passé du parti
du }Jarlement dans le parti du Roí, qui, fait prisonnier,
ne peut obtenir son échange , paree qu'il est accusé d'avoir
dit « que le seul moyen d'assurer le succes des troupes du
« Roi, c'étaít de tuer tout ce qu'on rencontrerait de labou-
e¡ reurs, afin de détourner le peuple de labourer les terres,
« et d'á.ffamer ainsi les tetes rondes. )) (Whitelocke, pago
73, 82 et 123.) On voit aussi sans doute des plaintes
adressées au parlement sur quelques désordres de son
armée, mais I'on savait a qui s'en plaindre, et un comité
était nommé pour l'examen et le redressement des gríefs.
( 'VVhitelocke, pago 120.) Enfin la régularité était la pré-
tention d'un partí, l'autre se faisait gloire de la licence ; il
est aisé de comprendre qui devait réussir.


(Note de l'Editeur. )
(1) Cependant l'híver avait été généralement malheureux


pour le Roi, et la Reine, alors grosse de la princesse Hen-
l'iette d'Angleterre, fut tellement saisie de la terreur de se
voir assiégée dans Oxford, que les désÍrs ni les instances
Ju Roí ne purent obtenir «'elle qu'elle y restat, et elle alla
accoucher a Exeter. Ces crainles étaient alors chimériqnes ;




D U L o N G PAR L E ~I E N T.


le sang que coulerent alternativement a }'un et a
1'autre ces déplorahlcs vicissitudes, l'Angleterre
fut réduite a une condition bien malheureuse.


mais a ]a fin de mai , les affaircs du Roi se trouverent dans
un état si facheux que le hruit courut a Londres, tantot
que le Roi éttiit pris, tantot qu'il formait le proiet de se
rendre a Londres. Les meneurs du par]ement eurent une
grande frayeur qu'i] ne vint "se mettre entre les mains du
comte d'Essexdont ils tramaient déja la ruine. Le comité
des deux royaumes, alors a ]a tete du gouvernement, écri-
vil a la hate au comte une lettre pleine d'alarmes, oh,
dans ]a supposition que le Roi vouhit venir a l'armée, on
luí enjoignait de ne rien faire a cet égard avant d'aroir
re~u les ordres des chamhres. Le eomte répondit: « qu'il
n'arait entendu parler de ríen de pareil, et que, dans le
cas ou le Uoí aurait un semblable projet, il serait proba-
blement le dernier a le savoir. )) Le ton de sa lettre, quoique
respectueux, donne líeu de penser qu'il avait compris le
motif d'une pareille précaution, et qu'il ]a trouvait assez
ridicule. Ses diíférens aree le par ti dominant commens:aient
a se manifester sous des formes plus claires et plus \ posi-
tives; ii avait éprouvé déj:" un grand mécontentement d'une
pétitíon de la cité pour ]a réforme de l'armée, et du refus
fail au comte de Holland, qui avait demandé la permission
de l'aecompagner dans l'expédition sur Oxford. Waller, le
eomle de Manchester, devenaient chaque jou!' pour lui des
rivaux plus inquiétans et plus incommodes : on voulait
qu'il s'affranchit d'une pareille situation. « Sir Philippc
(( Stapleton el Hollis , ses amis et ses confidens intimes, luí
« donnaient souvent, dit Whitelocke, des avis avantageux
( pour luí et pour le parlement, mais il n'était pas bien
« arrc~t~. Il dósirait la paix, dit encore Whitelocke, mais




:272 HISTOIRE
Les sueees du Roí furent soutenus dans l'oues!


par de hraves armées sous le comlnandement des
prínees Robert et Maurice; dans le pays de Galles
sous le eommandement de Gérard et de plusieurs
autres; dans les comtés de l'intérieur sous le com-
luandement de sir Jacob Astley, ancÍen soldat.
D' a utres armées étaient cOlumandées par s ir Ral ph
Hopton et le eolonel Goring. Dans le nord était
la grande armée du comte de Newcastle.


Les forces du parlement n'étaient pas infé":'"
rieures a ceBes du Roi. La prineipale armée était
sous le commandement d~ général'Essex. Waller
en commandait uneautre. Le cOlute de l\tIanchester,
de coneert avec Cromw~ll, heureux et intrépide
soldat, conduisait une forte armée du coté du
nord '. ou le lord Fairfax et son fils étaient a la
tete d'un hon nombre de troupes, et dont sir John
Meldrunl n'était pas éloigné. Le comte de Den-


« ne la vou]ait poillt a des conditions injustes et déshollO-
1\ rantes; iI aimait la monarchie et ~a haute noblesse, qu'il
1\ soupyonnait a quelques uns le dessein de détruire, ainsi
1\ que la moyenne noblesse, le clergé et la magistrature; il
CI était déterminé a les soutenir, et ne manquait pas de con-
I( seiIs qui le poussaient en ce sens; mais honnete et galant
(( homme, et serviteur d11 pubIic, il avait l'esprit grande-
11 ment troublé des méfiances que l'on concevait contre lui. )l
(Mémoires de Whitelocke, pago 76, 83 et 103.) Les démelés
avec le comte d'Essex ont été a cette épocfue la grande
affaire des menetirs parlemcntaires. ( Note de i'Éditcul'.)




DU LONG PARLEl\1ENT.


high, officier d'un granel courage, occupait a ]a
tete d'un parti assez considérable les environs de
Stafford. Il faut ajouter a ces troupes celles de
l'arlnée écossaise.


Au cOJnmencement de cet été ~ le parlement
tenta une entreprise tres -importante. Il voulut
assiéger Oxford (1) ou au moins renfermer le Roi
dans cette ville. L'armée du comte d'Essex l'en-
toura d'un coté, et ce He de "Valler de l'autre.
Le Roi les trompa tous deux (2), et, s'échappant
de la ville avec quelque cavalerie légere, aBa
joindre ses grandes armées.


(1) Le danger fut si grand pour le Roi que quelqu'un lui
proposa en effet alors de se rendre au comte d'Essex. JI re ~
jeta, dit Clarendon, la proposition avec heaucoup d'indi-
gnation', et dit « qu'il n'était pas impossible qu'on le trouv~lt
« effectivement entre les mains dn comte d'Essex, mais
« qu'alors il serait mort. » Il résolut de s'échapper, laissant
a Oxford le dnc d'York ponr rassurer ses partisans, et leu/"
promettant, en cas de siége, un prompt secours. Ces pro-
messes les tranquilliscrellt si peu que heaucoup de gell')
de qualité, dit Clarendoll, quí n'avaiellt pas été désignés
pour accompagner le Roi, se trouvcrellt, au moment de SOI1'
départ, faire partie de sa suite. (Ilistoire de la Rébellioll ,
tomo 7, pago 128. ) (Note de l'Editcur.)


(2) Il sortit d'Oxford le 3 juin a neuf heures du soir.
Depuis denx jours, des marches el des contre·ll1arche~
amusaíent les deux arrnées; elles continuerent le lendemain
de son départ. Cependant Waller en fut informé asse:r, tot
pour le suívre de tres-prcs. Le Roí fit rompre un pout der-:-


2. 18




IHSTOIRE


Le général Essex s'a van«;a davantage dans
l'ouest (1); mais l'expédition fut lualheureuse


riere lui; ce qui se 6t si précipitamment que trois ou quatre
officiers et une vingtaine de soldats de son arriere-garde
tombererit daos la riviere. ( Bist. de la Rébellion, torn. 7,
pago 129 el suiv.) (Note de r Edileur. )


(1) La cornmeufa la plus vive querelle que le comte
d'Essex eut encore eue avec le parlement. Ses prdres lui
enjoignaient de suivre les mouvemens du Roi, el, daos le
cas ou les deux armées viendraient a se séparer, ceBe de
WaIler était destinée pour J'ouest. Mais, ]orsque le Roi se
fut échappé, le comte d'Essex, lui voyant deux journées
d'avance, assembla un conseil de guerre, OU il fut décidé
que l' armée de W al1er, composée de trou pes et d' artil leríe
légeres, était la plus Jlropre asa poursuite, et que le comte
se chargerait d u service de l' ouest. En vaio WalIer réclama
contre cét arrangemellt, invoqua les ordres du parlement;
il faUut obéir. Alors , tout en exécutant avec vígueur et eé-
lérité I'entreprise qu'on lui imposait, iI se plaiguit amere-
ment au comité des deux royaumes , de qui le eomle d'Essex
re~ut une leUre de reproches, et ]'ordre positif de déférer
aux premicrs ordres, et de laisser Waller marcher dans
l'ouest; e( ce qui , dit Whitelocke, n'était pas du goÜt dn
général; et on trouva étrange, ajoute-t-il , que le comité
voulüt de si loin prescrire a ses généraux leur marche. It
Mais ce qu'il y eut de plus étrange encore, c'est que, pour
la premiere fois, le comte d'Essex désobéit. Bien qu' encore
fort peu avancé, il continua dans la meme direction, ré~
pondit au comité ft qu'illui était impossible de reculer ou
de s'arreter sans faire ]e plus grand tort aux affaires; »
donna toutes les ra~sons qu'il crut propres a justifier le partí
qu'il ávait pris,.et termina sa lettre en 11 disant que si on )'0-




DU LONG P ARLEMENT. 27 5
pour lui et ponr le parlemellt (1). 'Valler suivit le
Roi, mais en vain ; cal' il ne pllt cacher sa marche,


bligeait a retourner en arriere, comme n' étant pas propre
a conduire llne si importante affaire, il reviendrait siéger
au parlement, ne voyant rien qui mérit:1t sa présence dans
les comtés confédérés, tous soumis a des commandemens
inférieurs. )\ Le partí, avee cette prudence constante qui le
conduisait a travers toutes les difficultés, céda pour le mo-
ment, et le comte d'Essex re~ut l'ordre de faire ce qu'il avait
fait contre les ordres. (Histoire de la Rébellion, tomo 7,
pago 131 et suiv.-Mémoires de Whitelocke, pago 86 et8¡.)


( Note de l' Editeur. )
(1) Les ennemis du comte d'Essex avaient promptement


trouvé l'occasion de prendre lenr revanche. Une demande
d'argent et de munitions avait presque immédiatement suivi,
de sa part, la lettre qui annon~ait au parlement sa désobéis-
sance fonneHe aux ordres qu'il venait d'en recevoir; elle lui
avait attiré, au commencement de j uillet, une letltre d' admo-
nition, ou, en 1 ui promettant les secours nécessaires, on lui
reprochait fort séverement de les avoir rendus l)lus difficiles ,
en meme temps qu'on relevait comme incollvenantes plu-
sieurs expressions de sa correspondance. Bientot la situation
du comte devint critique; des embarras, qu'il aurait da pré-
voir avant de prendre un partí hasardeux, le plongerent dans
les plus grandes détresses. Le comte de Manchester, sir
William Waller, Middleton, regurent rordre d'envoyer
a son secours. Sir William écrivit qu'il était excessivement
pressé d'aller au secours du généraJ, et demanda pour
cela de l'argent et des hommes, prenant Dieu a témoin
11 que ce n'était pas sa faute s'il n'y allait pas plus vite ,
ce appelant la honte et le sang sur la tche de ceux qui obs-
ce truaie~t sa marche, et déclarant que, si l'argent n'arrivait


18.




IlISTOIRE


et ily eut plusieurs pe tites rencontres entre leurs·
différens partis; mais il ne se fit rien d'inlportant
jusqu'a ce que "Valler avec ses tronpes retourmit
faire face aux ennemis en d'autres lieux. Les suc-
ces furent divers pendant le cours de cet été,
dans la plus grande partie du royaU111c. Dans
l' ouest, le lnidi el' les conltés de l'inlérieur, les


" pas, iI. iraít sans argento » Cependant il nc marcha poínt.
Nliddlefon écrivit de son coté ce qu'il ne désirait ríen autant
« sous le ciel que d'etre en état de marcher et qu'on ne le
( trouyerait pas en faute; » et iI ne marcha pas davantagc.


11 n'arriva point de secours du comte de Manchester. Enfin,
abandonné de tous, Essex quitta soudain son armée, dont
la eavaleríe se fit jour a travers les ennemis ; maís son infan-
terie, son artillerie et ses bagages resterent en 3JTiere,
sous les ordres du major général Skippon qui fut obligé de
capituler. (Voir les Mémoires de Ludlow.) Le comte s'en-
fuit par mer et débarqua a Plymouth , d'ou iI informa le
parlement de son désastre; il était apparemment assez hu-
milié, et peut-etre ses ennemis ne voulaient-ils pas alors,
par un trop long acharnement, attirer un examen trop
sévere sur les causes de sa défaite; cal' la Iettre qu'on luí
écrivit a ceHe occasion ne renferma que des consolations
et des assurances de la confiance du parlement; mais l'his-
toire parlcmentaire nous apprend que le comité fut tres-
long-temps a préparer eette réponse, et les journaux des
ehambres ne contiennent aucun détail sur les circonstances
qui la précéderent. Quoi qu'il en soit, on se hata de réparer
l'échec qu'avait souffert l'armée du comte d'Essex; mais
pour lui cet échec était irréparable. (Mémoircs de WhiteL
pago 97 et suiv.-Histoire parlementaire, tomo 3, col. 270)
273 , 289' ) (Note de [' Editeur. )




DU LONG PARLEi\lENT. 277
troupes tln Roi l'elllportCl'ellt sur ~elles du pHr~
leluent, dont les affaires cóu~'aient grand risque
d'eLre ruinées si elles ne se fussent relevées dans
le nord par d'importans exploits ct le gaind'une
grande hataille.


Le comte de Leven, en entra~lt en Angleterre
dans ]e courant de l'hiver précédent, a la tete de
ses troupes, avait non-seulement pris quélques
yilles et quelques forteresses, lnais avait fort af-
faibli et dinlÍnué l'armée el II comte de Newcastle,
moins par des cOluhats que par l'aptitude de ses
troupes a soutenir les rigueurs de l'hiver, ce que
He pouvaient anssi hienles autres. Lorsque la ville
de Selby eut été prise si núraculeusement par le
vaillant sir ThOluas Fairfax, le lord li'airfax se
i'éunit avec toutes ses trollpes a 'ecHes du eomle
de Leven, et le eOluLe de Manchester, apres son
expédition de Lincoln, vint aussi les rejoindre
a vec Ulle ]JOllne armée.


Ces trois éU'Juées du parlemellt sous ]eurs trois
généraux , l,even, l\lanehester et Fairfax., ious
trois d'aceord et parf::lÍtement unis, s~étaient
avancées ensemble et avaient assiéaé de coneert la


v


grande ville d'York, dont était gouverneur le
eOlnte de Ncwcastle. Le prince Robert était venu
__ In nlÍdi avec une armée nOlubreuse pour faire
lever le siége. Les trois généraux le quittercnt en
effet ponr combattre le prince, sous les ordres --tu-
(fuel conl~attait aussi le eOlnte de Ncwcastle, q ui




1-U~TOIl\H
avaitf~lit sortirses troupesdela villed'York. Cefnt
daos une grande plaine appelée Marston - Moor,
flu'ils livrerent bataille aux trois généraux.


Ce fut l'action la plus importante de toute
la guerre civile. Jamais, durant le cours de ceHe
guerre, 011 ne vit conlbattre deux armées plus
puissantes, soít par leur nombre ou leur valeur ;
janlais un seul combat ne couta tant de sango
La victoire fut d'ahord presque gagnée par les
royalistes, dont l'aile gauche défit et mit en dé-
}'oute l'aile droite des parlementaires, cornmandée
par Fairfax, et postée sur un terrain désavanta-
geux; mais cette défaite fut plus que compensée
a l'autre aile ou Cromwell, qui combaUait sous
le comte de Manchester, chargea avec tant de vi-
~ueur et d'impétuosité l'aile droite des royalistes,
(IU'il rompit les meilleurs régimens du prince
Robert et les mit tous en fuite. Cl~mwell, de con-
cert avec David Lesley, les poursuivit, et, faisant
le tour du champ de hataille, vint a propos au
secours de ses amis baUus a l'autre aile, ou ils ne
cesserent pas de revenir a la charge jusqu'a ce
qu'ils eussent remporté une victoire complete, et
que tous les canons, transports et bagages du
prince Robert fussent tombés an pouvoir des par-
lementaires.


Apres ceUe victoire, le prince Robert, avec le
reste de ses tl'oupes, s'enfuit dans le midi. Quel-
que cavalerie de l'armée victorieuse le poursuivit




DU LONG PARLEiUENT.
inutileluent pendant plusieurs milles. Le eOlule
de Newcastle, accompagné de quelques amis par-
tieuliers, quitta York dont sir Thomas Glenhanl
prit le gouvernement, et se rendit a Searborough,
Oil, peu de temps apres, i1 s'enlbarqua pou!'
l' AJIemagne.


Les trois généraux, Leven, Manch~ster et Fair-
fax, retournerent apres eette grande victoire ~on­
tinuer le siége d'York, qui se rendít bientot apres
par capitulation. Apres quoi ils se séparerent, et
Leven, retournant dans le nord 1. la tete de son
armée éeossaise, prit vers la fin de cet été la rjche
ville de Newcastle, a peu pres dans le nleme temps
Da le général Essexconduisaitsi malheureusement
ses affaires dans l'ouest, qu'il fut forcé de re-
tourner a Londres apres avoir perdu tou,te son
artillerie.


Dans le courant de cet été , la Reine passa en
l:rance ([), et fit les plus grands efforts pon!'


(1) Elle s'embarqua a Falmouth le 14 juillet; elle étaít
accouchée le 16 juin précédent. Quelques jours avant son
départ elle avait faít demander au comte d'Essex un sallf-
concluít pour se renclre a Bath pour sa santé. Illui répou-
dit ce (Ine si Sa Majeslé le désirait, iI lui douuerait uu sau{:'
(( concluit }lour Londres oh elle trouverait les meilleurs
t( Illoyens }lossible5 de rétablir sa santé, qu'il u' en con-
1( naissait pas d'autres. 11 (Mémoires de Whitel., pago 88. )
Elle fut "ivement poursuivie par la fIotte du cOIDje de
\Vanvick, don! une fré¡ate l'approcha et tira rJusieUl'li fois




HISTOIRE


obtenir des catholiques romains de secourir le
Roi son nIari. Elle n'y put réussil'; mais, sans
le secours des étrangers, la guerre était en An-
gleterre hien assez furieuse et sanglante.


Au milien de ces calamités de la guerre, on
recommen~a a concevoir quclques espérances de
paix qui s'évanouirent bientot. Le Roi et le par-
lement avaie1ü en menIe temps pro posé des con-
ditions (1), et, dans le mois de février suival1t,


sur elle; elle échappa par la supériorité de marche du vais-
seau flamand qu'elle montait et (lui ayait été remis a neuC
pour eette occasion. On s'était, de plus, pourvu d'une
galere a seize rames sur laquelle la Reine devait se sauver
en cas que son vaisseau mt pris. (Hisloire parlementaire ,
tomo 3 , col. 283.) (Note de l' Editeur. )


(1) Jamais on n'avait cessé de parler de paix; le Roi ,
entre autres, renouyelait sang cesse ses démarches ; mais le
plus souvent elles n'étaient pas failes sur un ton ou dans des
formes que le parlement put ou vouh\t agréer. Les meneurs
dn parI!ment ne voulaient. point de la paix, et les patriotes
du part.í royaliste n'out jamais cru qu'tt cette époque du
moins, et tant qu'il put espérer de I'emporter par la force, le
Roi la désirat siucerement. (Voir les lettres du comte de
Sunderland dans la ¡Tie de Charles Ier, par Harris, pago 441
et suiv. ) Malgré cette mallvaise yolonté mutuelle, on par-
vint a convenil' du moíns qu'on essaierait de traiter, et les
commissaires du parlemeut partirent le 20 novembre pour
porter au Roí les propositions de paix. Le compte rendn de
Ienr voyage par Whitelocke, un des commissaires, donne
quelque ídée du désordre de ces temps et de l'anarchie hru-
tale qui régnait surt'Out dans le pDrti du Roi. A Walling~




DU LONG PAH.LEMENT. tl 20I


011 entama, eOffilne je le dirai bientot, des négo-
eiations sur ces bases. La fin de eette année et le


ford, ou on leur avait dit clu'était le Roi , le colon el Blake,
gouverneur de la vilIe, les tit attendre deux heures avant
de leur permettre d'entrer, et les res:ut avec assez de hau-
teur. IlJeur fit cependant apporter du vin; nwis, en buvant
avec eux, iI en vint a discuter avec le comte de Denbigh ,
l'un des commissaires, quelques faits de guerre auxquels
tous deux avaient eu part; comme ils se trouverent diffé-
rer sur un point de fait, tous deux s'emporterent, et les
regards ainsi que les paroles de Dlake devÍnrent si mena-
s:ans, que les commissaires, daus le dernÍer efTroi, crai-
gnant a tout moment de voir la garnison tomber sur eux,
se Idlcrent de regagner leurs voitures, ou iJs n'arriverent
pas sans beaucoup de peine. Le Roi était retourné a Oxford;
ils s'y rendirent , et altendirent encore deux ou trois heures
sur une colline voisine de la ville. On vint enfin les intro-
duire en leur faisant une sorte d'excuse de ce délai, causé,
dit-on, par la difficulté de leur trouver des logernens, la
viBe étant pleÍne de monde et de troupes. On leur dit aussi
que le Roí n'avait su leur arrivée que lorsqu'illes ayait aper-
!tUS de son jardín qui avait vue sur la colline, et qu'il s'était
mis fort en colere de ce qu'on les avait fait attendre. En
traversant les rues d'Oxford ils furent insultés par la popn-
lace, qui les accabla d'injures et ]eur jeta des píen-es et de
Ja boue. lis arriverent enfin a leur aubcrge quí , selon Whi-
telocke, ne valait guere miCLlx qu'un cabaret h hierre. IIs
y étaient depuis fort peu de temps , lorsqu'on vint les 3Yer-
tir d'une rixe qui s'était élevée dans la salle de l'auherge
entre leurs gens el quelques oillciers de l'arméc du Roí, qui,
Jes traitant eux, leurs mallres et le parlement, de coquins,
de rebelles et de traltres, ne voulaiellt pa5 les laisscr appro-




IlISTOIRE


commencement de la suivante dOnnel'ellt le tra-
gique spectacle de la punition et de la mort


cher du feu. lIs y coururent. Hollis et Whitelocke furent
obligés de colleter et de désarmer chacun un de ces tapa-
genrs; apres quoí ils lirent fermer )a porte de l'auberge,
dans la crainle d'une seconde attaque. Le gouverneur, au-
({uel ils envoyerent porter leurs plaintes, leur 6t faire que!-
qnes ,excuses, envoya en prison les deux hornmes qu'ils
avaient désarmés, et mil une garde a )a porte de leur an-
herge. De)a part de quelques hornmes considérables de )a
cour, l'accueil fut au contraire obligeant, et )e Roi les re~ut
bien. Le comte de Denbigh ayant lu tout haut les propo-
sit.ions, au nom des princes Robert et Maurice exceptés tous
denx du pardon général qui devait elre une des con~itions
de la paix, les deux princes se mirent a rire, et un mouve-
ment s'éleva parmi les courtisans. Le roi se facha, el 6t
',aire; máis ensuite, ayant demandé aux commissaires s'ils
avaient pouvoir de traiter, comme ils eurent dit que non t
(Ju'ils étaient simplement chargés d'apporter les propositions
el de recevoir sa réponse: ft alors, dit le Roí, un courrier de
la poste en auraít pu faire tout autant que vous. )) Le cornta
de Denbigh ayant relevé celte réponse avec quelque ressen-
timent, le Roi répéta a peu pres les memes paroles, el la
conférence {¡nit d'une maniere assez aigre. On vint ensuite
tacher de raccornrnoder les choses aupres des commissaires;
mais les discussions recomrnencerent sur la réponse. Le récit
de Whitelocke el eeluí du comte de Denhigh dans son rap-
port au parlement offrent ici quelques différences. Se)on
'VVhitelocke (pag. 107 et suiv. - Histoil'e parlementaire ,
t. 3, col. 310. - Histoire de la Rébellion, t. 7, pag. 267 ) ,
le Roi remit sa réponse cachetée et lians suscription; les,
eOll1missaircs en 'ayant demandé comUluuication, le Roí




DU LONG PARLEMENT. .283
d~hommes ilnportans, les deux Hotham, pere et
fils , condamnés CODlme traitres pour avoir violé
Icur foi envers le parlement, et avoir formé le
projet de livrer aux ennemis la ville de Hull ,
ainsi que pour plusieurs autres ~rimes. Apres
a voÍr été emprisonnés plus d'un an a la Tour de


répondit que, puisqu'ils n'a,'aient point de pouvoirs pour
t raiter, cela devait leur ctre indifférent; et , comme ils insis-
taient, il leur dit et répéta plusieurs fois que, queIJe que
fut sa réponse, fut-ce rrH~me une des hallad es de Robin-Hood
et du Petit-Jean, ils étaient ohligés de la recevoir. Selon
le comte de Denhigh, le Roí leur lit lire la réponse ; mais ,
comme ils demanderent la permission de se retirer pour y
répliquer, le Roi leur dit: le J e recevrai tout ce que vous
" aurez a me dire de Londres, mais rien de toutes les chi-
,( meres et de toutes les imaginations que vous aurez pu
ti amasser a Oxford. Avec votre permission, ajouta-t-il,
u vous ne m'attraperez pas. )1 Sur les réc1amations des
commissaires, il reprit: « Vous m'avez dit que vous n'aviez
t( pas pouvoir de traiter, ma mémoire est aussi honne que
« la vÓtre. 11 Puis iI ajouta ce que rapporte Whitelocke. Le
lendemain M. Ashburnham vint de la part du Roí excuser
les paroles un peu vives qui avaient pu lui échapper, et les
commissaires, apres en avoir délihéré, résolurent d'appor-
ter la réponse telle ([u'elle leur avait été remise. Elle con ..
tenait la demande d'un sauf-conduit pour le duc <le Rich-
mond et le cornte de Southampton, que le Roi devait charger
de sa réponse délinitive. Il fut accordé; mais on conseilla
aux deux lords, dit Clarendon, quand ils seraient a Lon-
dres, de sortir tres-pe u , dans la crainte d'etre insultés par
le peuple: Tout annon~ait l'aigreur tous les jours plus irré ..
conciliable des deux partís. (Note de [' Editellr.)




284 HISTOIR E
Londres, ils furent décapités tous deux dans le
lnoís de uécembre (1 ). Sir Alexal1ure Carew, con-
danlné pour le meme crime, avait souífert peu
de jours auparaval1t la lllelne punition (2). Cette


(1) Ils furent jugés par une cour martiale. Sir John
Ilotham, condamné avant son fils, demanda et obtint un


,assez grand nombre de sursis, bien que les communes
restreignissent souvent a cet égard la bonne volonté des
lords. L'un de ces sursis était fondé sur ce que les théolo-
giens qui l'assistaient avaient déclaré que son ame était
beaucoup trop troublée el qu'il n' était pas en état de mourir.
Sur ce motif, les lord s avaiellt accordé (Iuinze jours que les
communes réduisirenL a une semaine. Une aulre fois l'é-
chafaud était préparé sur Tower-Hill , mais les lords firent
surseoir a l' exécution; sur quoi les communes ~'oterent
1( qu'aucun officier nommé par les deux chambres ne pour-


,Joait retarder l'exécution de la justice, sur l'ordre d'une
seule des deux chambres. » Enfin le capitaine Hotham
demanda sa grace, et sir John demanda qu'on épargnat
sa vie ou ceHe de son fils; il demanda encore la vie apres
}'exécution de son fils quí mourut un jour avant lui. Les
lords étaient d'avis de luí pardonner, les communes s'y
refuserent; il attendit jusqu'a deux heures sur l'échafaud,
espérant toujours sa grace; iI lJarla tr(~s~brievell1ent au
peuple. Hugh Peters pria avec lui el parla en son nomo Il
rapporta que, lorsque sir J ohn Hotham était entré au sel'-
vice, son })ere lui avait dit que ,quand la COUI'Ollne d'An-
gleterre serait en question, iI allraÍl beallcolljJ tl combattre.
H II avaít, dit WhiteIocke, un peu penr de la mort. »
( llisloire jJar!emelltaire, tom. 3 , col. 2.2.0. - VVhitelocke,
pago 114, 116, LIj.) (lYotcdel'Editeur.)


(:>.) Sir Alexandre Carew avait "ouIu rendre au Roi l'il~




DU LONG PARLEMENT.
lnelne époque fut remarquable par la"lnort de
William Laud, archeveque de Cantorbéry. Les
crimes qu'on lui reprochaitétaient trop nombreux
et trop divers pour qu'on puisse les rapporter
ici. Ce malheureux vieillard avait été en prison
pres de quatrc ans, et n'avait pu y jouir meme
du repos de la prison; car il avait été conduit
pres de quatre-vingts fois de la Teur a Westmins-
ter, pour y subir son proces devant la chambre
des lords, comme si les destins avaient voulu,
par une triste compensation, égaler, me me en
longueur de temps, son adversité et sa pros-
périté (1).


Il fut décapité an mois de janvier, et, comme
l'observerent plusieurs, sa vie se prolongea jus-
qu'a ce qu'il eut pu voir, peu de jours avant sa
mort, le livre de la liturgie aboli, et le directoire
formé par le synode de Westminster établi.


Quoique le Roi et le parlement s'occupassent
tous deux de négocier la paix, ils ne négligeaien t
pas le soin de la guerreo Le Roi meUait toute
son activité a se procurer des secours étrangers,


de Saint-Nicolas dont il était gouverneur ; il fut découvert
et livré par ses propres soldats. On eut de la peine a l'ar-
racher a la fureur des femmes de la ville. Sa femme avait
obtenu 1Jour lui un sursis sous prétexte d'aliénation. (M(J-
moires de Whitel., pago 68, 109. ) (Note de l'Editeur.)


(1) Voir les Eclaircissemens et pi(~ces historiques.




IIISTOIRE


et le parlement a réorgulliser son armée sur un
nouveau plan. Les lords et les COlnmunes furent
quelque temps en discussion sur ceUe affaire, qui
}Jaraissait de la plus haute importance. Les lords
s'opposaient él ce changement, disant qu'il n'était
nullenlent nécessaire de meltre de nouveaux chefs,
puisque on n'avait rien a reprocher aux anciens;
que les hommes d'un rang élevé étaient les plus
propres a comluander les armées, et qu'une mé-
thode contraire meUrait la confusion dans le gou-
vernement. La chambre des communes, de son
coté, bien qu'elle témoignat de grands égards
au comte d'Essex et a ceux des autres pairs quí
commandaient les armées, soutenait cependant
que les armées du parlement avaient été sauvent
troublées par les rivalités des chef s , d'ou iL était
résulté que quelquesplans biencombinésn'avaient
pas eu de succes. Elle ajoutait que l'armée serait
mieux disciplinée lorsqu'elle se trouverait sous le
commandement d'lln seul chef (1).


(r) La différenee d'intentions qui existe entre l' Bistoire
de May et son Abrégé, et le earaetere heaueoup plus par-
tíal de ce dernier éerit, se réveJent iei par la rétieenee la
plus extraordinaire. L'affaire de la nouvelle organisation
de l'armée n'était pas la seule qui oeeupat a eette époque
et divisat les ehamhres ; ou plutot elle n'aurait pas rempli
les intentions du parti dominant san s une autre mesure
dont May ne parle point, l'ordonnance du renoncement ti
soi-méme, par laquelle tout membre de l'une ou de l'autre




DU LONG PARLEMENT.


A la fin, lorsque les deux cllalubres furent
d'accord, on nonuna, pour commander la 110U-
velle a rmée, sir Thomas fairfax, hom me d'une émi·
nente valeur et d'une égale moclestie (1). II était


chambre était exclus de tout emploi civil ou militaire. Ce
fut le coup décisif pou .. le parti indépendant qui com-
mens:a alors a se faire eonnaitre sous son véritable nom
et son véritahle jOllr. On eomprendra facilement en lisant
les Mémoires de Hollis pourquoi May ne prononce seule-
ment pas le nom de eeUe ordonnanea que que)ques uns ,
dit Whiteloeke , par opposition a son nom de self den-
ying ordlizance, désignerent sous celui de self ends prl-
vailing, (lile ron pOllrrait traduire par le triomphe de l'a-
mour de soi-mi!me (Iittéralement des huts personnels).
( WhiLelocke, pago 115.) (Note de ¡'Editeur.)


(1) Ce que May ne dit pas ici, e' est qu' en nommant sir
Thomas Fairfax général de l'armée nouveJIe qu'on allait
lever, on laissait le comte d'Essex en quelque sorte 'général
en chef; mesure hizarre si elle n'eftt eu pour objet d'arriver
a oter bientot au comte ceUe derniere apparence de com-
mandt"ment. On y procéda en reportant tous les avantages
accordéi a l'armée sur eelle de sir Thomas Fairfax, a qui
on donna en meme temps le pouvoir de composar son
infanterÍe de soldats tirés de eelle du comte d'Essex. Le
choix des deux armées était, a ce qu'il parait, laissé 11 leur
volonté; mais ils étaient re!(us comme recrues dan s l'ar-
mée de sir Thomas, et recevaient en cette qualité quinze
jours de solite, et étaient habillés. 11 n'est pas difficile de
comprendre que, comme le dit Whitelocke, presque toute
l'infanterie du comte passa a Fairfax. Celui-ci fut..,a l'oc ...
casio n de sa nominatien, complimenté dans la chambre




HISTOIRE


alors dans le nord; mais une si grande affaire ne
pouvait se faire sur-Ie-champ, et le temps appro-
chait ou allaient s'ouvrir les négociations d'Ux-
bridge. 011 y devait traiter de trois choses:


1°. De la religiol1 et du gouvernement de
I'Église;


2°. De la milice d' Angleterre ;
5°. Des affaires d'Irlande.
lVlais le Roi, avant le COlTIlnencement des né-


gociations, avait employé toutes sortes de lnoyens
pour s'assurer des secours étrangers. Il pressait
par lettres la Reine, qui était alors en france,
d'engager le roi de france et les autres catholi-
quesa venir a son secours, et de solliciter laReine
régent~ de reten ir en France les vaisseaux du


des communes OU on lui avait préparé un siége; mais il
refusa modestement de s'asseoir. L'orateur, dit 'Yhite-


)ocke, lui dit sur Agamemnon et les anclens Romains
quelque chose que j' ai oublié. Le discourstcl qu'il est rap-
porté dans le journal de la chambre ne contient rien de
pareil, et on n'y voit pas de réponse de Fairfax. Celui-ci
était en effet presque aussi remarquable par sa modestie
que par ses talens miIitaires : ses inlentions étaient droi-
tes; mais iI était telIement dénué d'esprit , et livré si avcn-
glément a Cromwell et aux indépendans, qu'il était néces-
sairement un sujet de dérision aussi bien que d'antipathie
pour le partí presbytérien, composé en général des hommes
les plus éclairés du temps. (WhiteIocke, pago 127, 131.-
Histoire parlementaire, tomo 3, col. 343.)


(Note de ['Editeur. )




D U L o N G PAR L E M E N T. 289
parlement. Il dClnandait instamment aussi les
secours (Iu tIuc de Lorraine, et tenait beaucoup
a pouvoir introduire en Angleterre l'odieuse ar-
luée de ce duc, si détestée en Allemagne et en
Flandre, pour toutes les horreurs qu'elle yavait
eommises; armée dont on peut dire COlnme de
eeHe de Marius quand elle entra a ROlne :


......... Nulli gestanda dabantur
Signa dllCis, nisi qui scelerllm jam fecerat usum,
.Attuleratque in castra nifas.


A la fin, le dnc de Lorraine lui lit espérer qu'il
lui enverrait dix mille hOlumes, et Goffe fut en ....
voyé en Hollande pour négocier le transport de
ces soldats en Angleterre.


Le Roi chercha aussi a obtenir des secours des
sanguinaires révoltés d'Irlande, et commanda
par ses lettres a Ormond de faire la paix avec les
rebelIes, de lenr promettre et de leut" accorder
le libre exercice de la religion papiste, et de les
assurer que si, par leur secours, il pouvait ter-
miner la guerre en Angleterre, iI abrogeraít tou-
tes les loÍs qui avaient été faítes jusqu'alors contre
les papistes de ce pays. n atlressa aussi des re-
1uercimens a Muskerry, Plunkett et plusieurs
autres de ces rehelles, et promit le pardon de
tout ce qui s'était l)assé. Mais ils furent fort in-
quiets des négociations du Roí avec le parlement,
sachant bien qu'une des conditions nécessaires


2.




.29° HISTOIRE
de cette paÍx sernit de eontinue1' a leur faire la
guerreo Le Roi done, elésirant lever les obstacles
que luí opposaient leurs craintes, écrivit a 01'-
mond ce qu'il ne pouvait refuser de faire la paix
ce avec son parlement, dans eette unique vue de
ce demeurer en état de favoriser les Irlandais;
ce et que eependant, si Ormond nlénageait bien
({ les dIoses, il pouvait, de cette crainte meme
( de la paix, se faire un moyen pour engager les
ce Irlandais a hater la leur. Ii était facile de leu!'
ce faire"'comprendre le danger OU ils étaient de
e( se voir a jamais pl'ivés par le parlement de
ce tout espoir de pardon; cal', disait le Roi, si
ce le parlement et moÍ parvenons a nous entendre
ce sur le reste, je ne pourrai refuser de m'ac-
e( corder avec lui uniquement sur ce- qui ~oncerne
(( les IrlandaÍs; qu'ils acceptent done, tandÍs
ce qu'il en est encore lemps, ce que je leur pro-
ce pose, et se hatent de faire leur paix. Quand
c( une fois ils auront n1a parole, aucune force
ce hUlnaíne ne pourra ln'obliger a y In~ll1quer. »


La Reine, alors en France, marquait aussi dans
ses leures a son marí un graüd chagrín de ce que
le point de la religioll était le premier qu'on dílt
traiter 'a Uxbridge. Elle disait ce que sí ron con-
e( venait de quelque mesure sévere contre les ca-
c( tholiques, et qu'ensuite la paix ne se fit pas,
« le Roí ne pourrait plus espérer aucun secours
« des princes catholiqües ni oes Trlandais, qui




DU LONG PAB.LEMENT.


« cl'aindraieilt, apres avoir fait tout ce qu'ils
( pourraient pour lui, de s' en voir en fin aban-
e( donnés (1). ») Elle recommande aussi tres-
souvent au Roi, dans sa correspondance, de ne
jamais ahandonner ni les éveques, ni les catho-
liques, ni les fideles amis qui 1'0nt servi dans la
guerreo Le Roi lui promet qu'aucun désir de paix
ne lui fera jamais abandonner ses amis, et l'en-
gage a hater autant qu'elle le pourra les secours
de la France, en lui disant c( que dans ce moment
ce ou Londres est divisé entre les preshytériens
( et les indépendans, on peut venir a hout de
« détruire les deux partis. ))


Au mois de février, les commissaires des deux
partis se rendirent a Uxhridge pour y négocier la
paix. Ceux du Roi furent le duc de Richmond, le


(1) L'influence que ce genre de crainte donnait au parti
catholique dans les conseils d'Oxford, était pour le parti
protestant royaliste un grand sujet de découragement. On
voit dans les lettres du comte de Sunderland , écrites a la
:fin de 1642, qu'il croit avoir tout a craiudre des papistes,
si le ROl triomphe par laforcé; en sorte qu'iI s'affiige "ive-
ment de ne pouvoir se retirer, ce qui, dans ses idées
d'honneur militaire, lui paralt impossible tant que la
guerre dure, a moins de combattre pour le parlement; et
pour ma part, dit-il , faimerais mieux étre pendu. 11 se 6t
eu effet tuer pour le Roi, cornrne volontaire, a la batail1e
de Newbury : il était agé de viugt-tro¡! ans. (J7ie de
Charles ler, par Harris , pago 442.)


(Note de l'Editeur.)
19-




292 llISTOIHE


Jnarquis de Hertford, les comtes de Southampton,
de Dorset et de Chichester , les lords Dunsmore el
Capell; ScynlOur, Colepepper, Gardiner, Hyde,
Lane, Bridgenlan, Pahner et plusieurs autres.
Ceuxdu parlelnent furent les comtes de Northulll-
herland, Pembroke, Salisbury et Denbigh; de la
chalnhre des COnllnUneS, 'Vainman, Vane, Pier-
point, Hollis, Prideaux, Sto John, Whitelocke et
Crew. Il Y eut, outre cela, six cOllllnissaires de
la haute et moyenne noblesse d'Écosse.


Mais ces négociations ne menerent a ríen. Le
Roi ne voulut jalnais consentir a la destruction
de l'épiscopat, ni souffrir qu'on lui retirat la InÍ-
lice ,qu'il,regar~l~it cOIOlne un des principaux
fleurons de sa .couronne. Cependant il consentait
a ce que, pendant trois ans, elle fut sous le gouver-
nement de vingt personnes choisics par lnoitié
dans chaque parti. Enfin il ne put consentir a ce
flu'on poursuivit la guerre contre les Irlandais,
ayant conclu avec eux une suspension d'armes
fIue son honneur ne lui perlnettait pas de rOlnpre.


La paix ne pouvant se conclure, c'était a la
guerre a décider. Le parlement hata la l10uvelle
organisation de l'armée, el les conltes d'Essex,
Warwick, ~fanchester et Denhigh rendirent vo-
lontairement et de bonne 'grace leurs cornnlis-
sions (1).


(1) Le comte d'Essex la aOllua le premier, les aufre~




DU LONG PARLEMEN1'.


L'armée du parlement, dans sa nouvelle orga-
nisation, se composait de vingt-un luille hornmes,


suivirent son exemple. La querelle étaitalors plus échauíl'ée
que jamaís entre les lords et les communes. L'ordonnallce
du rcnoncement a soi-méme, vivement poursuivie par les
comrnunes, était repoussée par les lords avecune égale
opini:itreté. Le comte d'Essex était en ceci le point de mire
des deux partís; pour parvenir a l'écarter, les cornmunes
allaient toujours augmentant l'importallce de Fairfax;
enfill, le 29 mars, une onlonllallce qui avait pour bl1t
d'ajouter a ses attributions aux dépens de ceHes du comtc
d'Essex, porta la divisioll au plus haut degré, san s ([ue 7
dans la chamLre des lords, la question ¡Hit se décider, les
deux partís se trouvant a égalité de voix; le (cr. avríl le
comte d'Essex donna sa démission. C'était la ruine de son
}1arti; illc savait lui-meme, car il avait dit anpa~avant
que sa cornmission de général était le seul oLstacle a l'ac-
ceptation de l'ordonnance du renollcement ti soi-m{1me.
En cffet, le 3 avril, elle pass a a. la chamLre des lor<.15.
Quelques jours auparavant, sur quelques discours violen~
tenus dans la chamLre des cornmunes contre ceHe des ]ora~.
]e Lruit se répandit qu'on avait intention d'attaquer les
privilégcs de la pairie; mais les communes adresserení:
aux lords une déclaration formellc de l'intentionoh elle;
étaient de respecter et soulenir leurs priviléges. Ce com-:
mellcement de raccommoocmcnt, si prcs du dénol)ment d"
la querelle, pourrait donner lieu de croire que ce dénot'l-
ment ne tÍnt pas tout-a-fait a la volonté ou comte d' Essex •
dont les amis commens:aient probahlement a s'effrayer, ct
le ton du discOUl'S qu'il pronons;a- a ceUe occasion indique
assez ([u'il cédait a des conseils (Iue peut-ctre il n'étalt pas
le maltrcoc refuse!'. Quoi qu'il en soit, les loros remcrCierCfl¡t




IlISTOIR E


dont quatorze mille d'infanterie, six mille che-
vaux et nlille dragons. Sir Thomas Fairfax en fut
110mmé généraJ, et sir Philippe Skippon , excel-
lent militaire, en fut fait major-général. Les eo-
lonels des régimens de pied étaient Holhorne, For-
fescue, IJarcIay, Crawford, Ingoldsby, l\fountain,
Pickering, Ra insborough, W eiclen, Aldridge; ceux
des régimens de cavalerie, sir 1\iichel Levesey,
Sheffield, Middleton, Sidney, Graves, Verma-
(len, Whaley, }~leetvood, Rossiter et Py. Le
Roi, de son coté, avait un grand nomhre de
troupes sous différens commandans, auxquels il
distrihua plusieurs provinces. Les princes Robert
et l\iaurice , a la tete d'un corps nombreuxo, te-
naient une partie du l1ord; le reste était confié
au comte de Derby etO a sir l\larmaduke Langda~e;
sir John Byl'úl1 et Géranl étaient chargés du payso
(le Galles et de quelques cOlntés adjaoens. L'ouest
était entierement occupé par trois armées du Roí,
sons le commandement de sir Ralph Hopton, sir
Richard Greenville et du colonel Goring, tous
trois généraux effectifs, mais donnant les ordres
au llom de Charles, prince de Galles, revetu du
ti tre de génél'al en chef.


es communes de leur déc1aration; la réconciliation fut
parfaite, c'est-a-dire que les indépendans, maitres de tout~
purent marcher désormais a visage découvert. (Histoire
parlementaire, tomo 3, col. 350 et suiv. - Mérnoircs de
Whitelocke, pago °133.) (Note de l'E:1úcllr.)




DU LONG PARLElVIENT. 295
Le Roi, non content d'avoir sons ses ordre~ un


si grand nombre de troupes anglaises, était plus
empressé que jamais de s'attaeher les papistes
irlandais, avec lesquels il avait chargé Ormond
de conclure une paix définitive; mais, lorsque
le Roi s'aper~ut que ees Irlandais ~vaient de trop
}lautes prétentions , el que toutes les négociations
d'Ormond, durant un si long espaee de temps,
n'avaient nuHement avancé la paix, il se servit
d'un autre moyen; ee fut d'employer a ee traité
le lord HerJJert de Ragland , fiIs du enrnte de
'Voreester, pariste zélé, et, par l;'t, plus propre
a plaire aux révoltés (rIrlande. Le Roí fit conlte
ce lord IIerbert, sous le titre de eOlUte de Gla-
nlOrgan, et lui donna pIein p01;lvoir de eonelure
la paix avee les Irlandais, et de leur aecorder tOnt
ce qui serait néeessaire. Lorsque ces choses furent
eonones, ce qui arriva avant la fin de rannée, il
parut étrange a tout le monde que cette affaire
eut pu etre eonduite a l'insn du lord Dighy , alors
seerélaire du départenlent d'Irlallde, et du eornte
d'Ormond, le lord-lieutenant aux soins duquel
elle avait d'ahord été entierement relUlse.


l\lais le l\oi, lorsqu'il vit qu'il était trop difli ...
cile de conclure autrement une paix qui put l'as-
surer des seeours des révoltés, en chargea GIa-
lllorgan a l'insu des autres, afin de PQuvoir en
rejeter sur lui tout l'odieux. Il espérait (lu'aillsi
les rebelles, séduits par les grandes prolllesses qui




.296 HISTOIRE
leur seraient faites san s qu'Orrnond en Stlt rien ;
consentiraient plus facilernent a adluettre des
conditions raisonnables en apparence et faciles a
justifier, et que, par ce moyen, il tirerait d'tr-
lande des soIdats qui s'attacheraient invariable-
ment a son parti, et qui, étant les plus grands
ennemis des protestan s anglais, et ne pouvant
espérer de pardon, lui preteraient contre le par-
lement un fidele secours.


Il donna done a Glam"organ une autorisation
con~ue en ces termes :,


c( Charles, par la graee de Dieu, roi d' Ang]e-
" terre", d'Écosse, de France et d'IrIande, dé-
« fenseur de la foi, etc.;


« A notre fidele et hien-aimé cousin Edward,
«( comt~ de GIamorgan, salut.


(c Plein de eonfiance dans votre sagesse et votre
« fidélité, nous vous aceordons par ces lettres,
f( aussi entierement que si elles étaient scellées
c( du grand-sceau, pIein pouvoir et autorité de
( traiter et de eonclure avee les catholiques ro-
c( mains eonfédérés d'Irlande , et de leur accorder
(e tout ce qu' exigera la nécessité, et que nous ne
« pourrions faire aussi convenablement par notre
« lieutenant, ni avouer publiquement pour le pré-
f( sent. Nous vous ordonnons done d'accomplir
« eette affaire avec antant de secret qu'il vous
c( sera possible, et je promets, sur ma parole de
í( Roi et de chretien , d'accorder tont ce que vous




DU LONG PARLEl\IENT.297
c( aurez jugé a pro pos de promettre en lnon nom,
« a tous ceux de ces catholiquesconfédérés qui,
« par leurs services, auront alnplement mani-
eí festé leur zele ponr nous et notre cause. Donné
ce a Oxford, sous notre sceau royal, le 12 lnars,
e( et la vingtielne année de notre regne. »


Il travailla a faire entrer les Irlandais, non-
seulement en Angleterre, mais en Écosse, et il y
parvint, au grand dommage de ce malheureux
pays, vers le commencement de l'année 1644,
par le moyen du comte de Montrose. Lorsque les
covenal1taires écossais entrerent en Angleterre
pour secourir le parlemel1t, Montrose se rendit
a Oxford pres du Roí pour luí offrir ses ser-
vices contre eux. Le ROÍ, pour le rendre propre
a l'emploi dont il voulaít le charger, le créa
Inarquís, et lui don na une commissíon de lord-
gouverneur d'Écosse et général de tOldes ses
troupes. Le Roí manda aussi le comte d' Antrinl
pour aider Montrose de ses conseils; ils se. COl1-
fédérerent en présence du Roí, el le cornte s'en-
gagea a envoyer a l\fontrose, an mois d'avril sui--
vant, dix mille Irlandais dans le comté d'Argylc,
(lui n'était séparé de l'Irlande que par un conrt
trajet de mero Antrirn exécuta, an telnps marqué,
une partie de sa promesse; mais il fut loin d'en-
voyer le ~ombre des soldats prOlnis, cal', au lien
de dixmille, iI en arriva a peine douze cents, sous
la conduite de Macdonald. Cependant, avec ces




2~8 HISTOIHE
soldats auxquels il joignit ceux de son comté (1' A~
thol , 1-"1ontrose se forma une armée sufIisantede
pillards, avec laqueHe il tonlbait subitement sur
les pays environnans, dévastait tout , dépouil1ait
les maisons et brulaít le blé partout 011 il pas-
sait; ensorte 'qu'ilfallait de grandes armées pour
s'opposer a ses déprédations, tandís que les mon-
fagnes escarpées du comté d' Athol, ses forets et
ses déserts, assuraient a ces montagnards et aux
Irlandais des rctraites impénétrables.


lVlontrose vécut ainsi pendant pres de deux ans
dans le sein de son pays, comlne un fléau destruc-
1eur. Ses retraites étaíent si sures et ses excnr-
sions si audacieuses, qu'il ne fallait pas IlWillS
de douze mille ilommes pour défendre les pro-
v iuces contre lui.


Cependant il fut balloué par les vicissitudes de
la fortune. Dans l' été guí sui vit son arrívée en
Écosse, la négligence des troupes du comte el' Ar-
gyle luí permít de frapper un grand coup contre
ce seigneur aquí il tua ou fit prisonniers guinze
eents hommes. Le parlement d'Écosse leva contre
lni une armée de dix 1l1ille hommes ~ et le pro-
clama, ainsi que quelques autres, traitre et eu-
I1cnIi du pays. l\lontrose fut ensuite completemcnt
hattu par Hurry, et forcé de fui!' clans ses re-
traites escarpées. Peu de temps apres, il fut en-
core baUu par Hurry pres de Dundee, et forcé (le
se cacher dalls ses anciel1s repaires J el' oi! cepen-




DU LON G PARLEMENT. 2~)9
dant, peu de tClnps apres, il reparut de nouveau,
et si formidable qu'il enveloppa toute l'Écosse
dans les plus déplorables calarnités.


])ans ces temps -la, le synode d'Édimhourg
éCl'ivit au nom de l'Église d'Écosse, des lettres
qui contenaient une sérieuse admonition; et
comme l'admonition d'une Église nationale peut
paraitre une chose de quelque, importance, nous
la donnerons ici textuéllement, omettant seule-
luellt la préface a cause de sa longueur, bien
(Iu'elle soit écrite d'un ton fort humhle.


( L'inquiétude de 110S creurs redouble, et nos
(e craintes pour VotrcMajesté vont croissant,
« depuis que Hons voyons la patience de votre
« peuple tentée outre lnesure. Elle est mainte-
« nant comlne une charrette trop chargée et pres
(( de se rompre; cal' outre les nombreux efforts
« déja faitspour attirer sur nous la destruction,
« et qu'a déjoués la Iniraculeuse providence de
« Dieu, cOl1une nous espérons qu'elle fera tou-
(e jours a l'avenir, nous voyons maintenant notre
« pays dévasté, le sang de nos freres répandu,
ce et d'horribles cruautés cOlnmises par ces 111au-
« (lites bandesdc rebelJes Irlandais, qui, trouvant
( des complices dans ce royaume, y sont arrivés
(1 son8 la conduite de gens munis de brevets et
« de commissions de Votre JUajesté. Nons ne pon-
c( vons, sans devenir infideles enyers Dieu et Votre
j( :\Ia jesté elle-Inelne, lui dissitnulcl' un autl'C




500 HISl'OIRE


« danger encore hien plus grand-{lue le déplaisir
(e de votre peuple. Ainsi donc, nous serviteurs
« du Dieu tout-puissant, et loyaux sujets de Votre
« l\lajesté, dans l'hulnilité et la tristesse de nos
c( creurs, au nom de notre Seigneur Jésus-Christ
ce qui jugera dans sa justice le lnonde entier, pe-
ce tits et grands, COillllle aussi au nom de cette
« Église nationale que nous représentons, nous
(e osons avertir librement Votre Majesté que le
« crillle qui menace de s'attacher a son tronc
c( est tel que, si le repentir ne vient a temps, iJ.
( ne saurait manquer de vous envelopper, vous
« et votre postérité, dan s le tourbillon de la co-
c( lere de Dieu; et ce sera en vain que de l<).chcs
ce prédicateurs ou cl'infideles conseillers vous pro-
c( nlettront le contraire, car le sang d'une mul-
ee titude des meilleurs sujets de Votre Majesté
ce couIe par ses ordres. Vous permettez la messc
« et d'autres idoh\trics, soit dan s votrc famille,
(e soit dans vos royaumes. Vous autoriscz dan s le
« livre des divertissenlens, la profanation du jOll1'
« du Seigneur; YOUS ne punissez, ni dans votre
c( eour, ni au dehors, les seándales pubIies. Vous
(e fermez l'oreille aux hum bies et justes désirs de
ce vos sujets. Vous avez ponr le partí papiste des
« complaisances de toutes sortes, comme vous
ce l'avez prouvé récemment en concluantune treve
( cn Irlande. Vous suivez les eonseils de gens <Jul
(e Be vons entretiennent ni de Dieu ni de votre




DU LONG PAH.LEMENT. 501


({ propre bien. Vous c01nh~ttez la cause dont le
« succes importe si fort a la gloire de Dieu, a
c( votre propre honneur et a la paix de vos États.
« Nous pourrions vous rappeler heaucoup d'au-
ce tres causes de ruine, que Votre J\fajesté con-
C( nait lnieux que nous, et que lui révelera sa
ce propre conscience. Nous n'en aurions rappelé
ce aucune en particulier, si ceBes dont nous avons
c( parlé n'étaient publiques et connues de tous.
C\ Il est done grand temps que Votre J\fajesté se
« courbe devant le nieu des cieux, reconnaisse
C( ses offenses, ouvreson ame au repentir, fasse
(( la paix avec Dieu par la lnédiation de Jésus-
( Christ ~ dont le sang peut laver les plus grands
c( péchés, et ne s'oppose plus enfin a ce que le fils
c{ de Dieu regne sur son royaunle, selon les pures
C( lois de son cuIte et du gouvernement de son
( ÉgI ise. »


Le synode termine en protestant de sa persé-
vérance dans une cause si juste, quelques obsta-
eles qu'il doive rencontrer. eette admonition de
l'Église d'Écosse fut envoyée d'abord aux COln-
lnissaires écossais a Londres et relnise par eux au
secrétaire du Roi. Mais, dans le feu de la guerre,
des censures ecclési astiques étaien t de peu de
valeur.


A l'approche du printemps, elle recommen(,'u
avec unegrandeardeur des deux parts. Lord "Essex
avait résigné sa commisslon , et sir Thomus }'air-




HJSTOIRE


f¿lX se rendit a 'Vindsor, aupres de l'armée réor-
ganisée. C'était une armée nou velle en effet,
formée de quelques débris de l'ancienne, et de
troupes récemment levées dans les comtés; une
armée qui semblait puiser hien peu d'éclat, soit
dans la qualité de ses chefs, soitdans le renom
de ses soldats. Jalnais troupes, en partant pour la
guerre, n'inspirerent moins de confiance a leurs
amis, et plus de dédain a leurs ennemis; et ce-
pendant cette double attente fut déple, et on
vit la vanité des conjectures humaines; cal', dan s
toutes les campagnes suivantes, ces recrues de-
vinrent de si excellens solclats que l'antiquité,
parmi tous ses héros, aurait grande peine- a en
trouver qui pussent leur etre cornparés.


Quiconque examinera d'un ooil attentif les suc-
ces de ces soldats, dans le cours de l'année sui-
vante, contre de hraves et nombreux ennemis, la
grancleur des cJlOses qu'ils accomplirent, cOll1bieu
de batailles gagnées, combien de villes emportées
el de garnisons prisonnieres, aura peine a croire
fIue ce soit la l'ouvrage d'une année, ou qu'on
puisse appeler cela une campagne.


A la vue de tant d'exploits, iL faut se hien gar-
del' d'en aUribuer trop exclusivement l'honneur
a ceux qui en supporterent le travail; c'est a Dieu
que cet honneur appartient; et, en considérant.
la conduite et la discipline de ces soldats, on pou-
vait d'avance espérer, jusqu'a un certain point,




DU LONG PARLEMENT. 503


rette protection ({ni éclata si miraculeusement
dans la suite; les vices ordinaires des camps ne
se rencontraient point parmi eux; la discipline
était rigoúreuse ; le moindre vol, la moindre dé-
bauche, les juremens, les diseou 1'S profanes,
étaient aussitot séverement punis·; aussi pass a-
t-il en proverbe qu'il y avait, a traverser ce
e~mp et a y commercer, autant de sureté que
dans une viHe· bien réglée.


La prelniere expédition du général Fairfax, d'a-
}n-es l'ordre du comité des deux royaurnes, fut
(lirigée dans l'ouest pour secourir Taunton. ecHe
ville, ou commandait le gouverneur Blake, avait
soutenu, avee une constance incroyable, un siége
vi vement poussé par sir Richard Greenville, et
OH eut dit qu'eUe voulait ilniter, mais avec plus
de bonheur, la fidélité de l'ancienne Sagunte. Le
général du parlement ne dirigea pas lui~meme
eette entreprise. Elle fut confiée au eolonel \Vel-
den, qui Dlarcha vers Taunton avec sept mille
hommes de la nouvelle armée. Fairfax fut rap-
pelé pour recevoir l'orclre de se porter ailleurs.


·Le ROL avait ordonné au prince Robert de ve-
nir le joindre a Oxford, pour entrer en campagne
avec leurs forces réunies. Fairfax, avant de quit-
ter \Vindsor, envoya Cromwell (1), ave e un


(1) On yerra dans les Mémoires de Hollis cOIllment, en
dépit de }'ordonnance du renoncement a sOi-nH~l1le,




IlISTOIRE


partí de c~valerie, pour empecher l'accomplisse-
ment de ce dessein, et Cromwell, apres une
lnarche rapide, eut le honheur de disperser, a
Islipbridge, une partie des troupes royales, dont
plusieurs chefs tOluherent entre ses lnains. Le
reste de ce corps s'enfuit el Bletchington-House,
ou Cromwell l'assiégea et le contraignit de se
rendre. Poussant ses succes jusqu'a Bampton-
hush, il prit Vaughan et LiUleton, apres avoir
mis leurs troupes en déroute.


Cromwell avait été continué dans son emploi. Peu de temps
mcme avant cette expédition, Fairfax et les principaux offi-
ciers de son armée avaient demandé qu'on le nommat lieu-
tenant-général 'de la cavalerie. Les lords déciderent- qu'ils
prendraient la chose en considération le lendemain, et or-
donnerent que tous les membres fussent avertis de venir.
Cependant on ne trouve plus, dans leur journal, aucune
trace de cette affaire, qui fut Jécidée par les communes ,
dans le sens de l'armée et en faveur de Cromwell. Quel-
<{ues jours auparavant, a l'occasion des succes de l'armée
Ju Roi, le conseil commun de la cité avait adressé a la
cllambre des lords une pétition dans le ton d'une remon-
trance, ou, en reprochant au parlement sa négligence a
l'ecruter l'armée de sir Thomas Fairfax , on lui prescrivait
plusieurs mesures a prendre, et entre autres ceIle de don-
Ilel' a Cromwell le commandement des comtés confédérés.
1( Cromwell, dit Whitelocke, commen~a a croltre dans la
« faveur du peuple et de l'armée, et a devenir assez grana
(\ pour exciter l'envie de plusieurs.)) (Whitel. pago 144,
Ilistoire parlementaire , tomo 3, col. 366 et suiv.)
. . ( Note de I'Editc>ur.)




DU LONG PARLE~ENT. '505
Le Roi, que les princes Rohert et Maurice


avaient rejoint, dirigeait sa nlarcbe vers l'est,
pour s'emparer de l'ile d'Ely, qúe quelques
bommes de son parti avaient promis de lui li-
vrer. Cromwell et le major-général Brown, gou-
verneur d' Abingdon, eurent ordre de le suivre;'
Inais, trop faibles pour engager une action, ils
farent bientot l~appelés, cal' Fairfax , qui venait
de recevoir l'ordre d'assiéger Oxford, avait he-
soin de leur secours. I.Je cOlnité, qui reconnut que
cette derniere entreprise était mal con~ue, la
contre-manda, mais trop tardo Dans l'intervalle,
le Roi, marchant sans obstacles vers le nord,
avec son armée, s'était emparé de l'importante
ville de Leicester.


Rappelé du siége d'Oxford, et apres que CrOln-
well eut été envoyé au secours des comtés de l'est,
Fairfax se décida a suivre le Roi avec t<;mtes ses
troupes. On n'eut pas a attendre long-temps la
terrible bataille, ou, dans l' opinion de tout le
public, la question de savoir ce que devien-
draient les lois et les libertés de l' Angleterre ,
ainsi que le pouvoir et la prérogative du Roi,
devait etre jugée par le glaive. La plaine de
Naseby, non loin de Northampton, fut le lieu ou
se déciderent les destins de notre pays (1). Le 14


(1) Le projet de Charles Jvait été d'abord d'auendre a
Leicester les recrues qui allaient lui arriver de diff~rens


2. 20




506 HISTOIRE
juin fut ce jour mé~orahle. La force des deux
armées n'était pas tres-inégale, ni leur ordre de
bataille tres-différent (1). Les royalistes étaient
un peu plus forts en cavalerie, et ils mirent en


eotés; mais, dans le partí royaliste, un projet tenait rare-
ment jusqu'au moment de 1'exécution. Chaqnc intéret indi-
viduel secroyait en droit d'influer sur la marche généraJe ,
et chacun était écouté a son tour; les cris de détresse que
poussaient les femmes et les gens de la cour demeurés a
Oxford ou ils craignaient d' etre eernés par l' ennemi, le
défaut de nouvel1es eertaines sur la marche de l' armée de
Fairfax, l'incorrigible mépris des eavaliers pour les troupes
parlementaires , mépris qui avait redou1lé depuis la nou-
velle organisation de l'armée du parlement, en6n la p~nte
fatale d'un parti que tout précipitait a sa perte, déciderent
le Roi a chercher un ennemi que l' on . croyait a peine en
état d'attendre l'attaque. Le prince Robert eut, eomme a
son ordinaire, une grande part a eette funeste résolution ,
combattue par les hommes sages et les vieux militaires.
( Histoire de la Rébellion, tomo 8, pago 51. - Mémoires
de Whitelocke, pago 145.) (Note de l'Editeur.)


(1) Il n'y avait pas, dit Whitelocke, 500 hommes de dif-
férence d'un coté ou de l'autre; l'armée royale était d'abord
tres-avantageusement postée; mais, sur le bruit que l' en-
nemi se retirait, le prince Robert, ayant pris les devants
avec un corps de cavalerie, aper~ut de loin les troupes par-
lementaires, et, trompé, soit par un faux mouvement de
l'ennemi, soit par sa propre préoccupation, crut en effet
les voir en retraite. Alors iI envoya dire au reste de l'armée
de venir le joindre en toute hate, en sorte qu'elIe s'avanfa
perdant sa position. et gardant, eomme elle pouvait, son




DU LONG PARLEMENT. 507
avant leurs meilleurs escadrons, l'infanterie for-
mant la seconde ligne. L'aile droite était com-
mandée par les princes Rohert et Maurice,' l'aile
gauche par sir Jacoh AshIey. D'autres officiers de
distinction étaient dispersés dans les rangs.


L'infanterie parlementaire occupait le centre,
les ailes étaient couvertes par lacavalerie. Crom-
well, qui, a la grande joie de toute .l'armée ,
était arrivé la veille de la bataille ,commandait
l'aile droite, l'aile gauehe était sous les ordres
d'Ireton. Le colonel Rossiter, hrave oflieier, quel-
ques momens avant l'aetion, arriva avec son régi-
ment et prit place a l'aile droite, aupres de Cronl-
weIl. L'infanterie, divisée en deux corps, était
conduite par le major Skippon. Le mot de rallie-
ment des parlementaires était, Dieu avee nous;
eelui des royalistes, Dieu et la reine Marie.


I.la fortune, comme en quelques autres occa-
sions, parut d'abord favorab~e au parti du Roj.
L'aile. gauche de notre armée fut mise en dé-
sordre, son eommandant Ireton, atteint de deux
blessures, fut fait prisonnier et retenu pendant
toute l'action. Le prince Robert poursuivit avec
fureur cette aile enfoncée, et la j ournée eut été


ordre de bataille, tandis que Fairfax, qui la voyait arri-
ver, eut le loisir de prendre ses avantages. (Histoire de la
Rébellion, tomo 8, pago 55. - Mémoires de Whitelocke,
pago 145.) (Note de l'Editeur.)


20.




508 HISTOIRE
perdue, si Cromwell, qui avait atta qué avec la
meme vígueur, n'eut pareillement enfoncé l'aile
gauche de l'armée du Roí. L'affaire sembla ainsi
en suspens, et, les deux ailes des deux partis se
trouvant dispersées, on combattit quelque temps
sans que rien se décidAt. Le brave Skippon, grie-
vement hlessé, ne voulut pas se retirer du champ
de bataille (1), et continua ses efforts, jusqu'au
moment ou la fortune pencha ensulte de notre
coté. Le corps d'armée de Faírfax (2) chargea si


(1) Il avait re~u un coup de feu dans le cOté; pressé de se
}'etirer ,il déclara qu'il ne bougerait pas tan! qu'un seullzommf!
tiendraitferme. Il avait été blessé soutenant avec son infan-
terie un corps de cavalerie qui avait été surpris en désordre
dans un .moment OU iI s'arretait a piller. Mais le gout du
pillage était encore plus fatal a l'armée du Roi; il retint,
comme a la balaille d'Edge-Hill , le prince Robert trop long-
temps hors du champ de balaille, ce qui fut cause en grande
partie de la défaite. Clarendon nous a}lprend aussi que l'ar-
mée du Roi était aIors diminuée de tous ceux qui étaient
allés mettre en sureté le butin qu'ils avaienl fait a la bataille
de Leicester. (Histoire de la Rébellioll, tomo 8, pago 52.
- Mémoires de Whitel., pago J 45.) (Note de l' Editeur. )


(1) Fairfax avait eu son casque enlevé dans la bataille.
Cornrne iI parcourait le champ de bataille tete nue, Charles
d'Oyley, colonel de sa garde, vint l'engager a se moins expo-
ser, et lui proposa son casque: CI C'est bien comme cela,
Charles, 11 lui dit Fairfax, et ille refusa. Voyant alors un
corps de l'infanlerie royale encore enticr, il demanda a
d'Oyley s'il ne l'avait pas chargé. D'Oy1ey répondit Cfu'il




DU LONG PARLEl\'lENT. 509
rudement les l"oyalistes qu'ils ne purent soute-
nir le choc; leur cavalerie, completement rom-
pue, prit la ruite du coté de Leicester et aban ..
donna toute l'infanterie, qui, cernée par les no-
tres, jeta has les armes en demandant quartier.
IJs furen! tous faits prisonniers. .


eeHe hataille fut, de toutes, la plus heureuse
pour le parlement. La victoire fut complete et ne
laissa aucuo (Ioute. 00 conduisit a Londres pres
de cinq mille prisonniers. On prit l'étendard du
Roi, les drapeaux de cent réginlens ~ toute l'artil-
lerie, un riche hutin el une grande quantité d'or el.
d'argent. De plus, toute la correspondance du Roi
lomJJa entre les Juains des v.ainqueurs. Cepen-
dant il périt si peu de monde dans la bataille,
qu'on peut s'étooner qu'il y ait en tant de pri..:..
sonniers et tant de butin avec si peu de sang
versé (1); car il y eut a peine quatre cents morts


l'avait cllargé deux foís sans pouvoir le rompre. Fairfax lui
mdouna de le eharger de nouveau en tete, tandis que luí le
prendrait en queue, el qu'ils se rejoiudraient au milieu. Ce
fluí fut dit fut fait; ils se retrouverent au milieu de ce eorps
dispersé, el la Fairfax tua de sa main le porte-<mseigllc. Un
des trompettes de d'Oyley ayant ramassé le drapeau al1ait se
vantant d'avoir tué eelui qui le portait. D'Oyley voululle
réprimander. 11 Laissez-Ie faire, dit Faírfax; j'aí de I'hon-
« neur assez, qu'il prenne eelui-Ia })our lui. )) (Mémoircs
de Whiteloeke, p. 145.) (Note de l'Edit.)


(1) VVhitelocke dit au coutraire que la batailIc fut trüs~




HISTOIRE


du coté du Roi, et cent du coté du parlement;
Cromwell poursuivit, avec sa cavalerie, les roya-
listes qui fuyaient rapidement et se dirigeaient
vers leurs places fortes. Illeurfit un grand nombre
de prisonniers et vint ensuite rejoindre le gé-
l1éral qui marchait, avec son armée victorieuse,
vers Leicester. CeUe ville se rendit bientot a lui.
Fairfax y laissa une garnÍson, et, pour rendre sa
victoire utile au })ays et empecher le Roi de ra-
masser de nouvelles forces qui 1 ui donnassent
les moyens de prolonger cette funeste guerre, il
résolut de le suÍvre de tres-preso Il marcha done
vers l'ouest, dans le douhle hut de poursuivre le
Roi et de faire lever le siége de Taunton.


Les leUres du Roí que ron avaít prises a Na-
seby, furent lues a Londres devant une grande
assemblée de citoyens, dans laquelle se trou-
vaient plusieurs memhres des deux chambres.
On laissa a qui voulut la liberté de les parcourir
et de s'assurer qu'elles étaient de la lnain du Roi,


sanglante, et qu'il y eut du coté du parlement plus de milI e
tués ou blessés, tant officiers que soldats. Clarendon, sans
parler du nombre de soldats que perdit le parti du Roi, dit
qu'il resta sur le champ de bataille plus de cent cinquante
officiers et gentilshommes du plus haut rang; il ajoute qu'il
y eut dans la poursuite plus de cent femmes tuées, entre
autres quelques femmes d' officiers, gens de qualité. (His-
toire de la Rébellion, tomo 8, pago 59. - M¿moircs de
Whitelocke, pago 145.) (Note de l'Edit. )




DU LONG PARLEMENT. 511
pour réfuter les calomnies de ceux qui préten-
«aient qu'elles étaient contrefaites. On imprima
a part, par ordre du parlelnent, un certain nom-
bre des plus importantes.


La lecture de ces lettres devint le sujet des en-
tretiens du public; cal" on y découvrit les négo-
ciations du Roi avec les révoItés d'Irlande, et ses
instances a la Reine pour ohtenir des secours de
la France et du duc de Lorraine. Beaucoup d'hon-
netes gens s'affiigerent de voir que les actions du
Roi fussent si peu d'accord avec ses paroles, et
que pendant qu'il protestait devant Dieu, avec
(l'horribles imprécatiol1s, qu'il n'avait rien tant
a cmur que la conservation de la religion protes-
tante et l'extirpation du papisme, iI promettait
sous main, aux rehelles Irlandais , d'ahroger les
lois portées contre eux, ce qui était contraire aux
promesses qu'il avait si récemment exprimées en
ces paroles : Je n~ abrogerai ja17zais les loís contre
les papístes. 11 a vait dit aussi : J~ a blwrre la pen-
sée d~introduire des so/dats étrangers dans le
royaume; et cependant il sollicitait les secours
du due de Lorraine , des Fran({ais, des Danois ,
et nH~me des Irlandais. Ils virent aussi avee mé-
contentement que le Roí se laissait tellement gou-
verner par la 'Volonté de sa femme qu'il ne fit
rien que selon qu' elle le 1 ui prescri vai t, et qu' elle
eilt a sa disposition la paix, la guerre, la reli-
gion et le parlement.




512 HISTOIRE


On vit d'ailleurs par ces leUres daos quelles
intentions le Roi avait traité avec le parlement
a Uxhridge, et ce qu'il y avait eu a espérer de
cette négoeiation. Il mande a la Reine que si, dans
son conseil, il avait pu avoir deux voix de plus en
faveur de S011 opinion, il n'aurait pas donné aux
gens de Westminster le nom de parlement, et
qu'illle s'est réuni enfin a ceux qui voulaient le
lenr donner qne paree que ce n' était pas la meme
chose de les appeler parlement et de les reconnaítre
pour tel~; et, poul" eette raison, ce qui était hien
propre a déplaire a son partí, il appelle son par-
lement d'Oxford un parlement nzétis.


Le Roi, apres sa défaite de Nasehy, s'enfuít él
Lichtfield, d'ou il se l"endit ensuite a Hereford,
pour lever de nouvelles troupes dans le pays de
GalIes, le cornté de Cornouailles et d'autres en-
droits, particulierementde l'infanterie,earil avait
toujours une brillante eavalerie qui l'avait rejoínt
apres la hataille; nlaís rien durant l'année suivante
lle prospéra au Roí. La fortnne se rangea entiere-
ment du coté du parlement, dont Díeu témoigna
qu'il approuvait la cause par les extraordinaires
et signalées victoires qu'ilvoulut lui accorder.
La valenr (les royalistes ne leur servit de rien, et
leurs efforts n'eurent aucun resultat.


Le général, apres la bataille de Nasehy, se
rendit a grandes journées dan s l'onest (1). Le bruit


(1) C'est en suivant cette marche de Fairfax vers l'ouest,




DU LONG PARLEMENT.
de son approche suffit pour délivrer Taunton. Le
colonel Goring leva le siége et s'éloigna. Les cou-


que ron rencontre un des faits les plus singuliers }Jeut-etre
de toute la guerre eivile, la levée des c!uómen des comtés de
Wilts, Dorset, etc., au nombre de vingt-cinq mille homllles,
réunis dans le seul dessein d'empecher la guerre, l'effu-
sion du sang, et de se préserver du pillage. Ces intentions
pacifiques, et les preuves qu'ils en donnerent par leur cou-
duite, sont attestées dans la leUre ou Fairfax rend eompte
au parlement de ce nouvel obstacJe, et des embarras qu'il
luieause ;~(Voir les Eclaircisse112ens historiques.) monument
d'autant plus eroyable, que, selon la maxime des partís ~
Qui n' est pas pour nous est contre nous, Fairfax accuse les
club112en de malveillance envers le parlement. D'ailleurs,
comme on I'a déja observé, la nature de l'association des
clubmen les portait nécessairement a se prononeer contre le
parti vainqueur; ainsi les suites de la batailIe de :N aseby
devaient ctre une résistance plus marquée aux troupes du
parlement. De plus, les gentilshommes du pays s'étaient
mis, pour la plupart, ala teté de cette nouvelIe organisation,
et pouva-ient lui donner au moins une apparenee plus roya-
liste. Comme a son ordinaire, le parlement temporisa, pour
se donner le temps de se préparer a frapper. Depuis le 3
juillet, date de la lettre de Fairfax, on ne trouve dans
l'histoire parlementaire aueune mesure prise contre les
club112cn; mais Whitelocke, qui donne plus de détails sur
l'intérieur de son parti, sans expliquer le secret des opéra-
tions, nous montre, des le 8 juillet, Fairfax en pourparlcr
avec les c!uómen, qui viennent lui demander des sauf-
conduits ponr envoyer leurs députés, d'un coté, au Roi,
de l'autre, au parlement, afin de les amener a traiter. En
aLtendant, ils demandent une sus}Jension d'annes, et la




HISTOIRE


rageux habitan s de cette ville avaient été réduits
a de grandes extrémités. Ils avaient heaucoup
souffert et fait de grandes choses contre de puis-


remise entre leurs mains des villes et forts du Wiltshire et
du Dorsetshire. F:iirfax, en refusant leurs demandes, tache
de les adoueir et de les gagner par une promesse d'empe-.
cher ses soldats de maltraiter le pays ; le 15, iI se rend a
une réunion d'environ deux mille clubmen, pour leur de-
mander de ne pas secourir Bridgewater, qu'il se propose
d'assiéger, promettant qu'on paiera tout ce qu'on ]eurpren-
dra, et qu'on fera droit a toutes les plaintes qu'ils auraient
a porter contre les offieiers et les soldats de l'armée. Il ne
parait pOllrtantpasobtenir alorsle sueces qu'il s'était promis;
mais, a un second rendez-vous, iI leur propose de t,i beBes
eonditions, qu'il engage la plupart de ces homrues a rentrer
chez eux, et en débauehe meme plusieurs, entre autres leur
premief artilleur qui sort de Bridgewater et viellt se joindre
aux assiégeans. Les négociations continuent sur différens
points. Cromwell reneontre dix mille clubmcn, qu'il dis-
perse avee de bonnes paroles; obligé. eepelldant quelque
temps apres d'en venir aux mains avec un autre })arti de
deux mille d' entre eux , iI leur fait trois cents prisonniers,
qu'il renvoie ehez eux , ne gardant que les gentilshommes
qui étaient a leur tete. Cependant diverses nOllvelles arri-
vent de la meilleure disposition. des clubmen; enfin, le
23 aout, le parlement les déclare traitres, et acheve ainsi,
selon toute apparence, de dissiper eette force qu'il ayait
corumencé par désorganiser. On ne voit plus paraitre les
clubmen qu'en petit nombre, et presque toujours comme
auxiliairesduparlement. (Hist.parl., tomo 3, col. 380,
~)0.-1I1t!moires de Whitelocke, pago ¡51, 154, 155, 161,
167, etc.) (NOI~ de l' Editeur. )




DU LONG PARLEMENT. 515
sans ennemis; lDals ils ne pouvaient plus tenir
long-temps s'il ne Ieur était arrivé de secours. Le
})arlement se réjouit heaucoup de la délivrance de
eette ville. Dans cette année, et l' année précédente ,
trols des garnisons parlementaires,.celles de Lyme,
dePlymouth et de Taunton s'étaientcondultes avec
un courage et une constance dignes d'etre célé-
hrés dans une histoire plus étendue. Toutes les
trols, assiégées a plnsieurs reprises par le prince
Maurice, les généraux Greenville et Goring, et
d'autresencore,avaient non-seulement ten n contre
ces puissans ennemis, mais avaient mis leurs
troupes fort en désordre.


Ce sont des choses merveilleuses que ce que 6t
dans 1'année suivante cette nouvelle armée sous la
eondnite de Fairfax. Elle ne prit ancnn repos
pendant toute la durée de ce froid et rigonreux
hiver. L'histoire particuliere de chaque niois de
eette année racontera tout ce qu' elle a pris de
fortes·villes et de eitadelles, tout ce qu'elle a ga-
gné de victoires en rase carrlpagne. Les faits ayant
été rapportés avec plus de détails par d'autres
pluInes que la n1Íenne, j'en ferai seulement icí
mention en peu de paroles; cal', dans l'espace
d'une seute année, de grandes armées sous la con-
duite du prince Robert et des généraux Green-
ville, Hopton et Goring furent entierement vain-
eues et réduites a rien; en sorte que tout l'ouest




HISTOIRE
de l' Angleterre se trouva sounlÍs a l' obéissance du
parlement.


Bath et Sherburne furent pris dans les mois
d'aolit et de septenlbre, et la ville meme de Bris-
tol, la plus grande et la plus riche de l'ouest, fut
rendue par le prince Robert au général Fair.fax.


L'armée, souvent divisée en plusieurs por-
tions pour suffire a tout ce qu'il y avait a faire,
ne se signala pas moins en tous lieux par ses
sucees. Cromwell prit Willchester et Basing; les
Devizes et Barday furent.pris par d'autres géné-
raux. Fairfax en personne marcha, au creur de
ce rigoureux mois de décemhre, dan s le Devon-,
shire, ou iI prit Tiverton. n enleva ensuite ·d'as-
saut, avec un étrange honheur, la ville de Dart-
lnouth; puis repoussa les armées du Rol. jusque
dans le conlté de Cornouailles, OU illes poursuivit,
et fit, pres de Torrington, éprouver a Hopton une
grande défaite. Dans le nl0is de février il entra
avec son armée vietorieuse dan s le comté de COI'':'
nouailles.Lacraintequ'il inspira au princeCharles,
for~a celui-ci de fuir dans l'ile de Scilly. Au
mois suivant, Fairfax vainqueur ordonna que
toutes les troupes de Hopton fussent lieenciées et
renvoyées, et tout le eomté de Cornouailles fut.
sounlis a l'ohéissance du parlenlent.


En avril, Exeter et Barllstable se rendirent ¡.
Fairfax. Bridgewater fut emporté (l'assaut; mais




DU LONG PARLEMENT. 51 7
la garnison ayant ensuite mis has les arnles, on
lui fit quartier. Saint-Michael's-Mount, dans le
coin le plus reculé du comté de Cornouailles , se
rendit aussi an colonel Hanllnond. Ainsi Fairfax,
vainqueur de l' ouest, et ayant disposé toutes choses
dans le dessein de terminer la guerre, se mit en
marche pour aller assiéger Oxford. Le capitaine
Rainshorough s'était déja rendu maitrede Wood-
stock.


Pendant que le général faisait de si grandes
choses dans l'ouest ,les autres officiers du parle-
ment n'étaient pas malheureux dans le nord, ni
dans les corntés de l'intérieur; car les destíns pa-
raissaient alors s'etre déclarés pour ce parti. Vers
le milieu de l'été, sir ThOlnas Glenham, gouver-
neur de Carlisle, rendit cette ville a l'armée écos-
saise, sous le cOlnrnandernent du cornte de Leven,
quí y lnit une garnison d'Écossais. Les Anglais
s'en plaignirent cornme d'une chose contraire au
covenant, et le parlement écrivit au cornte de
Leven pour l'engager a re~dre Carlisle aux An-
glais, non qu'ils formassent aucun soupc;on contre
leurs freres, mais parce qu'il fallait que les con-
ditions du covenant fussent observées, afin de
ferlner la bouche aux malintentionnés, toujours
trop prets a crier que les Écossais venaient en
A ngleterre non comme anzis -' mais comme jliblU;-
tiers; et, a compter de ce moment, le parlement
décida qu.'ilauraitdes cOlnmissaires a Édimbourg,




HISTOIRE


pour y assister au parlement d'Écosse, comme les
Éeossais avaient les leurs a Londres. On ehoisit
pour eonlmissaires le eomte de Rutland et le lord
Wharton, et dans la ehambre des eommunes sir
Henri VaDe, le pere, sir William ArnlÍn , :M. Hat-
cher et 1\1. Goodwin. Apres la reddition de Car-
lisie, Glenham se rendit avee ses troupes a Ne-
wark. Les Éeossais allerent presque aussitot y
mettre le siége sous la conduite du comte de Le-
ven; Dlais la eavalerie écossaise n'y put demeurer
long-temps, et fut obligée de retourner dans le
Dord au secours de son pays, alors amigé des
plus grands désastres; ear le parlement d' Angle-
terre eut, au milieu de sa prospérité, a dé-
plorer les ealamités de l'Écosse, calamités aussi
grandes que surprenantes et inattendues, et OU se
vit un mémorable exemple de la fragilité des
choses humaines et de la chance des royaumes.
Toute l'Écosse fut, dans l'espace d'un nlOis, per-
due et reeouvrée, entierelnent abattue et relevée
de nouveau.


Celui de qui l'Éeosse eut tant a souffrir était
le comte de 1\fontrose, homme sur qui se repo-
saient si entierement a cette époque les espé-
rances du ROÍ, que, pour le rejoindre, il marcha
vers le nord avec un eorps de bonne cavalerie;
mais les troupes de Pointz, Gell, Rosoiter et
autres arreterent la marche du Roi, qui ne put
opérer sa jonction avec Montrose. Il avait été con-




DU LONG PARLEMENT. 5I9


ven u entre eux qu'en meme temps que le Roi
marcherait du inidi vers le nord, le comte se
dirigerait du nord vers le midi, en sorte que la
cavalerie du Roi, réunie a l'infanterie de Mon-
trose, aurait formé une armée considérable ;
mais le Roi essaya vainement plusieurs moyens
de passer. Montrose, n'oubliant pas sa promesse,
fondit sur le nord de l'Écosse avec plus de suc-
ces qu'il n'aurait pu l'espérer; car, entre ses
montagnards et les Irlandais, il comptait a peine
quatre mille hommes.


Montrose s'était posté dan s un líeu, pres de
Kilsith, que des lllontagnes escarpées et des gor-
ges étroites rendaient tres"propre a y placer des
emhuscades. L'armée du gouvernement écossais,
pleine de confiance dan s ses forces, poursuivant
imprudelnnlent dans ces passages les pillards des
montagnes, tomha dans l'emhuscade habilement
dressée par Montrose, qui la mit en déroute et
en fit un carnage déplorable. Illui tua plus de
cinq 11iille hommes, et il n'échappa, pour ainsi
dire, que ceux que les vainqueurs trop fatigués
n' eurent pas la force de massacrer; car le cruel
Montrose n'épargna personne, et criait a ses sol-
dats qu~ils n' avaient que faire de prisonniers.


La défaite de Kilsith aurait, en une seule ha-
taille, entierement détruit le gouvernement d'É-
cosse si, environ un mois apres, David Lesley
ne l'avait relevé par l'entiere défaite de Montrose.




I1ISTOIRE
Apres l'affaire inattendue de Kilsith, le gouver ..
nement écossais n'ayant ni armée de l'éserve, ni
troupes en état d'arreter le vainqueur, pres-
que toutes les villes se soumirent a lui. Les }la-
pistes et les malintentionnés, tous les indiffé--
rens et eeux qui avaient jusqu'alors dissimulé
leurs sentimens s' étant rangés de son partí, le
reste fut écrasé, et tous les principaux nobles
du parti des eovenantaires furent forcés de fuir
en Angleterre.


Les Anglais déplorerent, par un jeune puhlic
et des lnortifications, les malheurs de leurs fre ...
res d'Écosse. Le général Fairfax et les principaux
officiers de l'armée écrivirent a· Leven qu'ils re-
gardaient le malheur de l'Écosse comme lé leur,
et que, si l'état de leurs affaires en Angleterre
le lenr permettait, et que le parlement leur en
donmlt l'ordre, ils entreprendraient ave e ardeur
eette guerre , et exposeraient leur vie d'aussi hon
ereur pour les Écossais que pon!' les Anglais,
jusqu'a ce que les ennemis des trois royauInes
fussent entierement vaincus.


Mais le regne sanguinaire de Montrose ne dura
pas long:-' temps, a peine l'espace d'un mois.
Pour délivrer l'Écosse, iI suffit de David Lesley
qui, arrivant a Selkirk avec sa eavalerie, défit
si completement Montrose, qu' on put regarder
Kilsith conlme entierement vengé. Ce fut assez
d'une heure poup aceomplir eette victoire, et,




DU'LONG PARLEMENT, 5:.H


COnl111e l'ohserve un écrivain allenHlntl, elle eut
lieu le jour OU la reine d'Angleter~e faisait chan-
ter a Paris un Te Deullz pour la vietoire de
Kilsith.


Ainsi I'Écosse fut recouvrée avant que le Roi
put rejoindre Montrose, ce qu'il tenta cependant
peu de telnps apres; se dirigeant vers le nord
avec des forees assez eonsidérables, et accom-
pagné de Gérard et de Langdale ~ iI se rendit a
Routenheath. Son projet était, s'il ne pouvait
rejoindre Montrose, de faire au moins lever le
siége de Chester. Le Roi tenait excessivement a
demeurer nlaitre de eette ville, qui lui fournis-
sait le port le plus eonvenable pour y reeevoit,
les tral1sports de soldats irlandais qu'il attendait
en vain depuis si long-temps. Mais cette expédition
fut extremement malheureuse pour I~Ii;. cal' il
fut Latín a Routenheath par Pointz, qui COln-
lnandait l'armée du parlelnent, et eut huit cents
homnies de tués.


La tel1tative du lord Dighy pour rejoindre
l\lol1trose n'eut pas plus de sllcces. Ce fut le
nlOis suivant que Langdale et l~i, ayant réuni
nlilIe chevaux, marcherent vers le nord dans
cette intention; mais, arrivés a Sherburne, dans
le eomté d'York, ils furent battus et mis en fuite
par Pointz, Copley et d'autres parlementaires.
H fnt ensuite défait a Carlisle par Brown et Lesley,
et, ayant perdu tuntes ses troupes, prit la fuite


2. 21




522 I11STOII\E


et alla retrouver le CODIte tIe Dcrhy dans l'He de
lHan, d'ou peu apres ii passa en Irlande. Apres
la défaite de Dighy a Sherhurne, 011 prit encore
des lettres et papiers du Roí, ou étaient exposés
plusieurs de ses projets, et OU ron décollvrit
aussi plusieurs choses relatives a ses négocia-
tions avec les Irlandais et autres. Les royalistes
d'Oxford hlamerent heaucoup la négligence de
Digby, pou!' avoir porté avec lui dan s une ha-
taille de sem.blahles papiers, qu'il auraitdu croire
a peine assez en sureté dans la plus forte citadelle,
surtont quand on se rappelait <Iuel hrnit avait
fait le parlelnent des lettres prises a Naseby.


Dighy était done arrivé en Irlande, et, VCI'S la
fin de décembre, s'occupait avec Orl1lond a trai-
ter de la paix avec les lrlandais, quand tont a
coup les affaires cln Roi se trouverent extreme-
lnent cOlnprornises par la connaissullce que l'on
eut des négociations secretes de Glul1l0rgan avcc
les rehelles. Ormond et Dighy craignirent, si eeHe
découverte se répandait trop généralcl1lent, qu' elle
l1e donnat erédit a ce qu'on avait dit précédem-
roent que le Roi était anteur de la rébellion el'Ir-
lande, et cherchait a consolider le papisme; ce
qui aurait pu exciter une révolte générale parmi
les protestans. Quoique Dighy eonmIt Glanlorgan
pour un hornme dépourvu de prudenee, eepen-
dant il ne pouvait le supposer assez insensé ponr
avoir entrepris· une pareille dlOse sans aucune




DU LONG PARLE11El\T.


autorisation. n fut done eonvcnu entre eux, dans
la crainte que, lorsque le hruit en serait plus
généralelTIentrépandu, il ne fut trop tard pourjus-
tifier le Roi, que Dighy aceuserait immédiatement
GlaIllorgal1 de trahison. Une chqse cependant les
inquiétait tous deux. On avait la promesse que
trois mille Irlandais iraient secourir Ches ter, et
on avait peur, en cherchan~ ITIal a propos a jus-
tifier le Roi, de perdre ce secours, et par suite
la ville de Chester. Mais ayant appris que, d'a-
pres le traité fait par Glamorgan, ces Irlandais
ne devaient se rendre en Angleterre que lorsque
le Roi aurait confirnlé les conditions avantageuses
que lenr avait pro mises Glaluorgan, et ratifié la
paix; lorsqu'ils surent aussi que, tandis qu'ils
étaient a délibérer sur ceHe elubarrassante affaire,
les bruits déja répandus avaient excité une grande
révolte parmi les protestans de Dublin, et qu'un
petit nombre d'heures pouvait amener les der-
niers-malheurs, si le danger n'était promptement
prévenu, Dighy fut forcé de se hater, et d'accuser
Glamorgan de haute trahison. Celui-ci, sachant
que c'était uniquelTIent pour tromper le peuple,
ne fut nullement effrayé : il se rendit en prison
avec beaucoup de promptitude et de confiance,
assurant qu'il ne craignait pas de rendre compte,
a Londres ou elevant le parlement, de ce qu'il
avait fait avec l'autorisation du Roi; mais ceHe
leínfe accusatioll de haute trahison produisit un


21.




IlISTOIll E


changemcnt surprcnunt parmi les protestans de
Dublin, el les murlnures s'apaiserent.


Il restait encore a surnlonter une autre difJi-
culté. Ormolld craignai t que les Irlalldais, irri-
t~s de l'injure faite a Glamorgan, ne courussent
aussitüt aux armes avant que les troupes du Roi
ne fussent pretes a les recevoir. l~our prévenir ce
(langer, il écrivit a l\fuskerry pour lui expliquer
les raisons ele cctte mesure et l'extreme l1écessité
qui les y avait contraints. En mClne temps iI ap-
prouvait les conditions proposées par les rebelles,
et les envoyait a Kilkenny, pour ctrc plus ample-
Jnent eliscutées, mais sans se montl'er entieremcnt
certain du succes. Cela elonnait respoi.r de gagner
du temps jusqu'a ce qu'on eut trouvé quelque
110uveau Inoyen ele délivrer Chesler, ou de secou-
rir le Roi el'une autre lnaniere.


J\;lais tons ces artifices furent illutiles au Roi:
tous ces projets furent déjoués, et Dieu, protec-
teur de ce royaume, perIl1it qu'avant que les ré-·
voltés pussent amener en Angleterre une arnlée
d'Irlandais, de Lorrains ou de Danois, ses troupes
fussent partout vaillcues et enun entierement sou-
lníses par le parlement. Dans le nlois de février
suivant cette meme ville de Chester, elont il avait
été si occupé, si souvent assiégée, et eette fois si
10ng-tClups eléfendue par Byron, tOlllha an pou-
voir du parlement. 13yron, son gouverneur, la
rendít a Rrereto'n a des conditiollS honorahles.




)) LJ L o ~ G PAR L E ~l E ~ T.
Le partí du Roí n'était pas plus heureux dalls


les autl'es corntés de l' Angleterl'e, cal', outl'e que,
dalls cet hiver et dans le printemps suivant, Fair-
fax, par plusieurs batailles gagnées et plusieurs
prises de villes , s'était entiel'enle~t rendu lnaitre
de l'ouest, dans les cOlntés de l'intérieur, clans le
nord et dans le pays de Galles, les royalistes,
pendant ce Ineme intervalle de tenlps, avaient
été vaincus en plusienrs batailles par quelques
uns des officiers les plus distingués du parlement,
cornme J\Iassey, !loiJltz, llrown, Rossitcr, l\IilLon,
Gell, I~reretoll, Langhorn, etc., et dans le lllois
de mars sir Jacob Ashley, général dll Hoi, fu t
vaincu par l\Iorgan dans unebataiIle lllémorahle,
la derniel'e qui vaille la peine d'etl'e rapportée,
et fait priso1111ier avec 1600 de ses soldats. Ashley,
lorsflu'il fut pris, dit tout hallt ces paroles : I/vlls
ave::, f¿ni volre o{t(Jrage el entierCTllent váillclt le
partí da Rol.J el I/wins que vous !le le reüwiez par
,vos clissellsions.


A cette époque l,evell, })ointz el Hossiter, lUireut
le siége devant Newark, la plus forte des villes
el ni tenaient pour le ltoi, et d' OU depuís long-
temps 011 infeslait Cl'Uellelllellt les environs, et le
général }"'airfax, apres a voir sOlunis l'ouest et
s'etre pourvu de ce qui lui était nécessaíre, alla
assiéger Oxfortl, chef-lícn de la guerreo Il ne res-
ta it alors uu Hoi que Banhury, 'VallingCord,
\rol'ccster" Haghuul et }lendennis. Ces v ¡Hcs furenl




1lISTOIH.E


t.outes prises peu de temps apres, et purent scu-
lement se vallter d'avoir cédé plus tar<1 qu'Ox-
ford.


Quoique la peste ravageat Newark et que les
assiégeans commen<;assent a manquer de vivres,
ils étaient soutenus par l'espérance que quelques
différends s'éleveraient bientot entre les Anglais
et les Écossais; car les Écossais commen<;aient a
se plaindre du défaut de paie. Ils disaient aussi
qu'on négligeait le gouvernement de l'Église et le
covenant. Le parlenlent répontlit que l'arJnée écos-
suise a"vait, en deux ans, re<;u plus de 200,000 liv.
de solde, san s compter une grosse sornme d'ar-
gent qu'elle avait extorquée de force aux pau-vres
et désolés habitans du nord de l'Angleterre. Il
a joutait que, nlalgré tout cela, cette armée n'a-
vait pas répondu a l'attente des Anglais, n1ais
t;tait dem.enrée oisive dans la rneilleure saison de
l'année. On dClnandait ensuite pourquoi les Écos-
sais, si séveres ~t exiger l'ohservation du covenant,
avaient, contre ce covenant, mis des garnisons
dans Newcastle, Tinl110uth et Carlisle. On faisait
ohserver d'ailleurs que les reproches des Écossais
au sujet de la religion étaient dénués de toute jus-
tice, puisqu'ils savaicnt bien que le parlement
s'en occupait, et que cette affaire demandait du
temps et une mure délibération. Le Roi espérait
retirer quelque a,'antage de ces différends; et
e0ll1l11e Ireton e't Fleetwood comlnen~aient a blo-




...


BU LOl'4G PAB.LEl\1ENT. ~l:'~7


quer Oxford, et qU'Oll attendait chaque jou!'
l'arrivée de Fairfax, qui devait l'assiéger l)lus
étroitement, le Roi résolut de . sortir d'Oxford
a vant ce moment, et, conununiqnaut ses inten-
tions a quelques uns de ses conseillers les plus
intimes, iI choisit l~ camp des Écossais, C0l111ne
le lieu ou il pouvait le plus espérer de sureté ponr
sa personne et les moyens de reeou vrer quelquc
portion de son autorité royale. Il envoya done aux
Éeossais ealnpés devant Newark l'ambassadeur
de :France lUontreuil, et hientot aprt~s, sorta11t
lui-meme incognito d~Oxforcl, sous 1'11ahit d'un
des dorlleSliques de son favori, 1VI. John Ashburl1-
hum, avec un porLe-lnanteau, derriere lui, il se
rendít a Newark.


Quelques amis de leur pays ehereherent a dis-
suader le Roi de eeHe entreprise , et le pressel'enl,
de se rellclre plutot a l;'airfax, ce qui aurait pl'O-
hahlemcllt flui la guerre (1); rnais le Roí s' ohstina


(t) Clarendotl rapporLe qne le Roi avait envoyé ycrs deux
des chefs les plus émiuens de l'armée quí assíégealt Oxford ,
Jeur offrant (le se remeLtre entre leurs mains s'ils voulaient
lui prornetlre de le conduire sur-Ie-champ au parlement ,
et qu'ils l'avaient refusé. La plus graude craínle du parle-
menl, c'élait que le Roí ne dllt a Londres, OU íl arait alors
un parti tres-puissant. Aprcs plusicurs messages pour de-
mander la paix, derncurés tous ians réponse , le Roí 3yait
eufin ofierl de débander son armée, el de vcnir se rcjoindre
all parlcll1ent, sans autrc cOlldilioll <lu'uuc prolllcssc g:éné-




IIISTOIHE


tlans son projet, ne doutant pas que, l'aigl'eul'
auglnentant chaque jour entre les deux nations,
sa présence ne fut tres-agréah1e aux Écossais, qui
le l11ettraient a I'abri de tout danger et lui donne-
raient les moyens, soit de faire la paix aux con-
ditions qui lui conviendraient, soit de rallumer
une nouvelle guerreo


Le Roi se rendit d'abord a la maison de l\1on-
treuil , et, de la a Southwell, clans le cam p
écossais. Les habitans de Ne\vark, ayant appris
l'arrivée du Roi a l'armée et se trouvant réduits


rale qui luí garantlt sa ~i\reté , sa liberté, ses biens et ceux
de ses partísans, et le parlernent avait rejeté cette offre.
Craignant cependant que, malgré ce refus, Charles- ne se
hasardat de venir 11 Londres, la charribre des cornmUlles
donna de$ ordres ponr qu'en ce cas on mIt sa personne en
súreté. La chalnbre des lords consentít 11 ce vote en y ajou-
tant les rnots contre tout danger. On ordonna aussi 11 tous
les catholiques, a tous les ofliciers de forlulIe, et a tous
ceux qui avaient porté les armes ponr le Roí, de quitter
Londres daus l'espace de trois jonrs , el les plus grandes
précautions furent prises ponr empecher les érneutes.
Lorsqu'on sut que le Roí s'était échappé d'Oxford , Faírfax
ayant écrit qu'on le croyait réfugié a Londres, on fit
publíer 11 son de trompe une déclaration portant que qui-
conque le cacherait, ou connaItrait le líen de sa retraile
sans le déclarer sur-le-champ, serait pnni de mort el verrait
ses biens confisqués. (lIistoirc parlementaire , tomo 3, col.
451 et suiv.-Mémoires de Whitelocke, pago 209. -Ilis-
loire de la Rébellion, tomo 8, pago 256.)


(N(J[c de [' Edileur.)




DO LO~G PARLEl\IENT. 52~)
a de grandes extt~én1ités, pl'eterent l'orcille ~l des
propositions et rendirent leul' ville (1).


Les Écossais parurent tl'es-étol1nés de l'arl'ivée
inopinée du Roí parnli eux, et ce fut ainsi qu'ils'
s'en expli(!I1' '''nt aux cOllnnissaires anglais, rési-
daut aNpres de l'armée. 011 éCl,ivit aussitot a
Londres et a Édimbourg. Le parlement anglais
demanda aux Écossais de retenir le Roi a South-
,vell; nlais, nlalgré cet ordre , ils l'emnlenerent
~\ Keiham, ou était la plus grande partie de leur
armée, et, bientot arres, sans en attendre de
llouveaux, iIs lev(~rent leur camp, marcherent
vers le nord et enllnenerent le Roi a Newcastle.


Les Écossais s'excusel"ent de leur départ, sur
ce qu'apres la reddition de Newark , iis n'avaient
plus rien a faire, et iis dirent e( que, de meme
e( que le Roi était venu a eux de son propre con-
e( sentelnent et sans ctl'e attendu, il suivait de
e( Illclne leul' armée sans qu'ils l'en priassent ou
ce l'en empcchassent; » mais leur clépart avait
été lIcité, a ce qu'on croit, par la nouvelle vraic


(1) Newark se rcndit, non point a des })ropositions,
mais sur les ordres du Roi, qUÍ ofTrit de remeltre cctte
"ille au comité réuni d'Écosse et d'AlIgleterre; les Écoss;:¡}s
pour éYÍter les méfiances aimcrent mieux qu'illa rernit á
la seule armée du })arlemellt. (llistoire parlcmclllairc,
tomo 3, col. !¡G¡.)


(Notc de l'Edilcllr. )




530
ou fausse que Cronnvell lnarcltait vers ellX avcc
toute sa cayalerie. '
, Les Anglais se plaignircnt bcancoup des Écos-
sais et du Roí. Ils accusaient les Écossais d'avoir
violé le covenant et le traité, et c'était, disaicnf-
ils, de la part du Roí, une grande preuye tIe haine
et de ressentinlent contre la nation anglaise, qu'il
a vait si long-temps outragée, que de se déterlll i-
nel', dans son infortune et au sein de l'Angletcrre,
a abandonner le parlement d'Angleterre, pour
aller se joindre aux Écossais que le parlenlellt
tenait a sa solde. S'il tIésirait la paix, pourqlloi
ne l'acceptait-il pas? Elle lui était offerte a (les
conditions que les nécessités de sa situation, aussi
hien que le salut de son peupIe, devaient l'en-
gager a recevoir, pIutot que de s'en aller chercher
partont a allUlner de nouvelles discordes entre
les deux nations confédérées.


Au COlTIlnencement de lnai, le général :Fairfax
arriva ayec toute son armée a la vue d'Oxford,
disposa son calnp autour de la ville et somlna le
g<Juverneur, sir Thomas Glenham, de se rendre.
Glenharll répondit qu'il devait d'abord envoyer
,'ers le Roi, ct que, quand il saurait ses intell-
tions, iI ferait ce qu'il y aurait ~l faire. }'ail'f¿lX
ne se contenta pas de eette réponse; cependant son
opinion, ainsi que celle de ses oflicicrs, était que
]a vine se trouvait en étal de soutenil' un long
sié3c. Elle était tres-bien forLiGée ~ défenaue par




UU LONG PARLEMENT. S3!
une forte garnison d'au moins cinq nlille hommes,
pour la plupart vieux soldats, et abondamment
fournie pour long-temps de vivrcs, armes et mu-
nitions. Il pensa donc qu'il fallait plutot s'en
rendre maltre au lnoyen des di~isions qui ré-
gllaitJ_ 'lans l'intérieur de la ville et dont il
a vait été instruit par des leUres ou par quelques
uns de ses espions. La plus grande partie des ha-
1Jitans:J particulierement ceux qui appartenaient
a la noblesse, désira ien t qu' elle se rendit:J afín
d'obtenir, pendant qu'il en était epcore temps,
des couditions honorables. On COnlmell(ja donc a
tl'aiter, el l'affaire fut débaUue, non-seulement
entre l'armée et la ville, mais aussi dans le par-
lernent. U fut enfin décidé qu'il valait mieux ac-
cordel' aux assiégés les meilleures conditions, que
de laisser une si précieuse armée se consumer
devant une ville aussi forte:J au risque de ce qui:J
dan s cet intervalle, pourrait survenir de facheux
a la cause puhlique.


J\Iais la principale raison, pour accorder de si
honnes conditions, fut le désir, comme on était
alors au milieu de l'été, de pouvoir transporter
en Irlande l'armée victorÍeuse, afin de délivrer
ce ma lheureux pays des harbares et sanguinaires
rebelles auxquels il était livré. Cependant ce
pieux dessein du parlelnent fut entierement dé-
joué par la démarche que fit le Roi, d'al1er se
réunir aux Écossais, avec lesquels le parlelUel1t




552 HlSTOlnE
avait alors quel{lues diffél'entls. Les leUres que
le Roi écrivit a Ormond, avant de quiaer Ox-
ford, et qui furent interceptées, donncrent lien
de croire que c'était clans eette intention que le
Roi s'était rendu au camp écossais. Nous espé-
rous, disait le Roi dans ces lettres, que ce des-
sein, quoiqu'il puisse paraitre dangereux pour
notre personne, tournera a l'avantage. oe 1'11'-
laude, en empechant les rebelles (e'est du lJarle-
lllent qu'il parle ainsi) de faire passer des trollpes
dans ce royaume.


Oxford se rendit, et, au jou!' fixé, la garnisoll
défila devant l'armée de fairfax, les dcux partis
gardant le plus profond silence et se contIu isant
avec une grande lnodération. Le due d'York fut
respeetueusement conduit a Londres, ou étaient
(léjil deux des enfans du Roi. ''fous les gentils-
hommes s'y rendirent également, cal' la perm is-
sion n'en fut refusée a aucun de eeux quí sortaiellt
tl'Oxford, mais les prince Robert et l\laurice qui
avaient re',{u l'ordre de s'éloigner d'Angletel're,
se préparerent a partir (1). .


Le grand-sceau d'Augleterre et les autres insi-


(1) Six mois auparavallt, apres la ret1dition de Bristol, le
prÍllce Robert disgracié par le Boí avait demandé au parle-
ment un passe-port pon .. quitter l'Auglelerre ;:¡vec SOll
frt~re le priucc l\Iallrice; lllais, I'cntré:i en gdce depuis, il"
étaienl relourués á ·Ox'fon.1. (Note de I'Erlltelll'.)




DU LONG PAHLEMENT. 333
gnes de la royauté furent déposés dans la 13i-
bliotheqne d'Oxford et portés ensuite a Londres,
ou le parlement quí , trois ans auparavant, avait
fait faire un nOllveau granel-scean, ol'clQnna que
celui-ci fut brisé, ainsi que les petits-sceaux.


Vers la nH~me époque, le pi~ince Charles,
voyant le nlallvais état de son parti, s'enfuit de
Scil1y avec quelques Ul1S de ses conseillers intimes
et passa a Jersey, dans le dessein de se rendre de
la en :France, aupres de la Reine sa mere. Pen-
dant que le prince était a Jersey, les commissaires
d'Angleterre et d'Écosse supplierent le Roi d'or-
tlonner (P!e le prince, son fils, ne s'éloigmit pas
du roya u me , de peur que, s'il passait en France ,
son absence ne fut un obstacle a la paix ; mais le
Roi, aprt~s avoir prolnis d'y penser, écrivit a u
prince cette courte leure.


( Charles, je vous écris seulelnent pour vous
« faire savoir Oil je suis et que je me porte bien,
« non pour diriger en quoi que ce soit votrc
( cOllduite. J'ai déja écrit a votre lnere ce que
c( je désirais que vous fissiez. Obéissez-l ui en toutes
c( dIoses, excepté en Jnatiere de religion, ou je
c( sais qu'elle ne vous inquiétera pas, et n'allez
(( nulle part san s son ordre ou le nlÍen. Écrivez-
c( mOl souvent, Dieu vous conserve votre tendre
« pere. » C. R.


CeHe leUre, qu'un petit hátimcnt portait de




534 HISTOIRE
Newcastle a Jersey, fut interccptée et lue en par-
leInent, au granel chagrin du partí.


La reddition d'Oxford amena la fin de cette
terrible guerreo ,¡y orcester, "Vallingford, Pen-
dennis et Raglanel, se soum1rent aussi au vain-
queur. La paix semblait rétablie dans toute l'An-
gleterre ~ mais la sécurité n'y régnait point. Le
parlement, apres la défaite de l'ennemi commun,
se .vit cruellement divisé par les factions con-
uues SOllS les nOlns de presbytériens et d'indé-
pendans, et ce n'était pas seulemenL en .ce qui
touchait le gouvernement de l'Église, lnais dans
les affaÍres de tout genre, qu'ils se 11 vraient anx
plus violens débats et votaient les uns cOlltre les
autres (1).


eette division agitait non-seulement les cham-
bres, mais la cité, le pays et me me les camps.
Aussi présageait-elle les plus sérieux dangers. Le
parlement craignit que les troupes de l\Iassey,
alors cantonnées aux Dev izes, et qui avaient si
bien mérité de la république, n'entl'assent en in-
surrection. Le général Fairfax fut envoyé dans
l' ouest pour licencier ce corps, qui éL : - ~!e deux
nlÍlle cinq cents chevaux. Le licencienlent se íit
en huit jours sans aucun désordre, et les soldats
quitterent leurs drapeanx avec la plus prompte
soumission, quoiqu'ils n'eussent pas re~u tonte


(r) Voir les lJfhnoires de n ollis, de Ludlow, cle.




nu LONG PARLE~IENT. 555
lenr pa ie. l\Iassey, {[ui les ava tt exhortés a obéir
sans résistance aux ortlres du parlelnent, lnérita
par la les plus grands éloges. La guerre ainsi ter-
m inée , 11'airfax, le san veur du parlement, revint
a Londres vers le milieu de novembre. Tous les
hons citoyeus tlésiraient urdeml~ent de voir cet
illustre soldat, dont la valeur les avait délivl'és
des plus tristes 111aUX et leur prOlnettait enfin
l' ,. nérunce d'une heureuse paix.


Le lendemaill de l'arrivée de l'airfax a Londres,
le parlement voulut lui témoigner sa reconnais-
sance. La chambre des pairs envoya son orateur,
lord Manchester, accompagné des comtes de Nor-
tlmmberland, de Pernhroke et d'autres pairs,
pour le féliciter sur son retour et le renlercier
solennellelnent des loyaux et heureux services
qu'il avait rendus a l'État.


Apres le départ des lords, Lenthall,orateur
de la chalnhre des COffilnunes, avec trois cents
membres de cette chambre, vint complimellter
le gélléral. Illui adressa un discours en l'honneur
de ses grandes actions, les comparant aux exploits
des plus famenx héros de l'antiquité. c( La pos-
e( térité, noble général , luí dit-il, vous portera
c( une admiration et un respect sans hornes , et
c( le peuple anglais, qui ne peut vous remercier
« selon vos nlérites, déclare hautelnent qu'il vous
« a des obligations infinies, car Dieu s'cst servi




536 IIISTOIHE
« de vous ponr mettre fin hnos gncrrcs avec un
« incroyable bonheur. » Le lJ10deste Fairfax ré-
pondit en peu de mots, qu'il était iudigue de
tant d'honneur, et qu'il offrait au parlement ses
humbles actions de graces, regardant comme la
gloirede sa vie, la part que Dieuavaithien voulu
lui accorder dans le salut de son pays.


Le général ne demeura pas long-temps a Lon-
dres, il partít pour aller dans le nord portel' aux
Ecossais les sornmes d'argent dont je parlerai tout
11 l'heure. Je reviens aux affaires du Iloi.


Le 6 nlai 1646, long-temps avant la reddition
d'Oxford, le parleluent apprit que. le Roi s'était
rendu aux Écossais, et que ceux-ci Jl'avaient pas
exécuté les ordres qu'ils avaient rec;us des cham-
bres. Ces o~'dres portaient que les Écossais gar-
deraient le Roi a Southwell, et qu'Ashhurnham ,
avec les autres personnes de la suite du ROl, se-
rait envoyé a Londres; nlais les Éeossais laisse-
rent évader Ashhurnharn avec fous les autres, et
ramenerent le Roi dans le nord. Ile parlelnent
apres un long débat déclaraque les deux cham-
bres avaient seules droit de disposer de la per-
sonne du Roi; mais les Éeossais refusant de le
1 i vrer, iI s'ensuivit eutre les deux nations une
violente querelle, qui donna heaueonp d'es1)é-
ranee aux royalistes, et parut menaeer le repus
des (leux royaumes. Les accusations réeipn)({ucs




DU LONG PAI\.LEl\1ENT. 537
se succéderent rapideIuent, et, pendant plusieurs
mois, on publia des deux parts heaucoup d'écrits
pleins de reproches et d'invectives (1).


Les Écossais alléguaient que Charles n'étaitpas
Illoins roi d'Écosse que d' Angleterre, et que lenr
pays avait aussi le droit de disposer de lui. Les
Anglais soutenaient que le gouverneluent du
~ Jyaume ou le roi se trouvait alors avait seul
autorité sur sa personnc. N'était-ce pas, disaient-
ils, une chose étrange, qu'une armée écossaise ,
})ayée par le parlenlent anglais, et qui, d'apres les
traités, devait ohéir aux commÍssaires des denx
royaumes, reptt de son chef le roi d' Angleterre,
a l'insu et san s l'aveu (les comlnissaires anglais,
l'elnmemlt a Newcastle, ville anglaise, et l'y re-
tint contre le gré du parlement anglais?


L'ennemi commun s'effor~a d'aggraver ces dis-
sensions; mais quelques hommes sages les ména-
't t t l' t '11 ' , . geren avec an (ar qu e es n amenerent pOlnt


de conséquences funestes. Toutes les affaires qui
importaient au bien puhlic :furent traitées el'un
commun accord entre les deux peuples. On résolut,
entre autres choses, el' envoyer des propositions
au Roi, pour assurer enfin le rétablisseluent de
la paix. Ces propositions, rédigées en dix - neuf
articles , aprt~s un long débat, lui furent présen-
téesa Newcastle, le 15 juillet 1646, par le conlte


(1) Voir les Mémoires de Hollis.
2. 22




538 HISTOIRE
de Pembroke, le cOlnte de Denbigh , et lord Mon-
taigue, de la part des pairs, et six lnelnbres de
la chambre des communes. Les commissaires
du parlement d'Écosse étaient présens et y don-
nerent leur adhésion.


Afin que le Roi ne put croire qu'on le traitait
en captif vaincu et non en Roi, les deux parle-
mens ajouterent a leurs propositions le préam-
hule suivant! c( Plaise a Dieu que ceci soit agréé
« de Votre Majesté! »


c( Nous, les lords et communes réunis dans le
( parlement d'Angleterre, au nom des royaumes
( d'Angleterre et d'Irlande, et nous commissail"'es
ce du parlement d'Écosse, au nom de ce derniel'"
« royaunle, nous pl"'ésentons hUlnblement a Votre
ce Majesté nos respectueux désirs pour la con-o
c( clusion d'une solide paix, ainsi que les pro-
« positions agréées par les parlemens desdits
« royaumes. Nous sollicitons l'assentiment de
« Votl"'e Majesté , et delnandons que ces pl"'oposi-
« tions, ainsi que tous les bilIs qui lui seront
« présentés poul'" en assul"'el'" l' exécution, rec;oivent
« sa sanction royale, et soient ainsi convertís en
c( statuts et actes du parlement pour valoil'" a
ce Jamals. »


Les lord~ et députés, cornmissaires du parle-
lneut anglais, demeul"'erent long-temps avec le
Roi a Newcastle, le suppliant d'accepter ces pro-
positions, qui i1'étaiel1t pas heaucoup plus dures




DU LONG PARLEMENT. 559
que ceHes qu'on lui avait offertes a Uxbridge,
quand la chance de la guerre était encore do u-
teuse. Les commissaires du parlement d'Écosse
luí adressaient les memes supplications, et cha~
que jour arrivaient d'Édimhou~~g des gens qui
venaient joindre des prieres aux leurs.


Mais les prieres des deux royaumes furent
vaines; le Roi persista obstinément a refuser son
adhésion; il faisait chaque jour des objections
contre tel ou tel article (1), et ainsi s' écoulerent


(1) Les díflieuItés, comme on le yerra dans les Mémoires
de Hollis , ne venaient pas seulement du Roi. (( Beaucoup
({ d'hornrnes sages, amis de la paix, dit "\'Vhiteloeke,


1'( auraient vivement désiré qU61'on se rendit, autant qu'on
1\ le })ouvait faire avec sureté , a ce que le Roí propo-sait a
(( Newcastle; mais la majorité de la charnbre fut contraire
« a ce vreu. Les membres nouvelIement élus se joígnirent
n á ceux qui ne voulaient pas qu'on cédat aux propositions
(( de Sa Majcsté , et leur nombre eut un grand poids dans
l( la .questioll. 1I (Jfémoires de WhiteIocke, pago 212. )
Ces membres élus a la plaee de ceux qu'avait expulsés la
chambre pour avoir suivi le parti du Roí, étaient lous
dans le sens des meneurs indépendans. Tel étaÍt alors l'état
des choses qu'un aceommodement queleonque était né-
cessairement la destruction de I'une des partjes contrac-
tan tes ; ríen ne pouvait done etre proposé dans I'Íntéret de
l'une des deux qui eonvint aussÍ a l'autre. Les commissaires
des deux royaumes a Neweastle, mandaient qu'ils avaient
en vain supplié le Roi, a genoux, de signer les propositions.
Ce qu'il voulait, C:était de pouvoir négocier, et, ayant de-
mandé aux cornmissaires, de me me que dans les confé-


22.




BISTOIRE
plusieurs mois, au grand détriment des deux
pays; car, non-seulement on craignait avec rai-
son de nouveaux déhats entre les Écossais et les
Anglais, au sujet des garnisons, de la solde, etc.,
mais la divísiol1 des presbytériells et des indé-
pendans allait toujours croissant dans le parle-
ment et dans la cité de Londres, ce qui donnait
a l'ennelni cornmun des espérances assez fondées.
C'était peut-etre la le motif des continuels dé-
lais du Roi (1).


l\fais les espérances de nos ennemis s' évanoui-
rent bientot, et l'opposítion meme du Roí servit,
jusqu'a un cerfain point, a calnler les dissensions
du parlement. Les deux partís cornmencerent a
délibérer enselnble sur les moyens d'arranger les
affaires des deux royaumes, puisqu'ils ne pou-
vaient l'éviter, san s la participation du Roi. Ainsi
on discuta, dans le parleInent d'Angleterre, ce
qu'on paierait aux Écossais pour les secours qu'ils
avaíent pretés dans cette gnerre, et il fut enfin
convenu qu'ils recevraient quatre cent núlle li-


renees qui préeéderent eelles d'Uxbridge , s'ils avaiellt
pouvoir de traiter; sur Ieur réponse négative , il leur répli-
flua a peu pres dans les memes termes : (( En ce cas, sanf
« l'honneur de la chose, un honnete trompette en aurait
« faÍt autant. )) (Whitelocke, pago 223. )


(Note de I'Editeur.)
(1) Voir les Mémoires de Hollis et de Berldcy.




DU LONG PARLEMENT. 541
yres, dont moitié sur-Ie-champ, et, en recevant
eette somme, les Écossais devaient rendre au par-
lement d' Angleterre, COlllme on en était convenu,
Berwick, Carlisle et Newcastle. On débattit aussi
la question de savoir OU ron conduirait le ROÍ,
en cas qu'il refusat absolumenfde consentir aux
propositions. CeUe affaire fut longue et difficile.
Le parlement consentit volontiers a ceque les Écos-
sais conduisissent le Roi, si cela leur plaisait, a
Édimbourg; mais ceux-ci le refuserent, assurant
que sa présence dans un royaume agité ne ferait
qu'exciter de nouveaux trouhles. Et comme si
sa présence n'eut pas été aussi dangereuse pour
l'An5leterre, ils préférerent, et c'était aussi le
désir duRoi, qu'il fut conduit dans le midi de
l' Angleterre et habitat quelqu'un de ses palais
proche de Londres, ce qu'ils regardaient comme
plus commode pour traiter de la paix.: si bien
que, dans le cours de ce débat, il parut qu'on
disputait, non pas a qui aurait le Roi, nlais a
qui ne l'aurait paso


Vers la fin d'aout, tandis qu'on traitait de ces
dIoses, et que les deux royaumes suppliaient
bumhlement le Roi, chaque jour, de consentir
aux propositions, le comte de Lowden, chancelier
d'Écosse, fit, en présence des commissaires des
deux royaumes, un discours au Roi que nous in-
sérerons ici comme servant en quelque maniere
d'introduction a toute cette affaire.




HISTOIRE
(( Il plut a Votre Majesté, lundi dernier, de


cc faire appeler devant elle les commissaires du
c( parlement d'Écosse, de leur faire part des pro-
ce positions, et de leur promettre que vous lenr
« communiqueriez également votre réponse avant
(e de l'envoyer. Le temps fixé aux commissaires
C( est si court, et le salut ou la ruine de votre cou-
ce rOl1l1e et de vos royaumes dépend tellement de
ce la réponse de Votre l\fajesté, que nousserions
(e coupables envers Dieu et nos commettans , si
« nous l1e représentions a Votre l\1ajesté com-
« bien, dans ces conjonctures, il est nécessaire
ce que vous accordiez votre assentiment a ces pro-
C( positions, et de quelle incurable maladie ,- de
c( quelle prompte ruine serait néeessairenlent
« suivi votre refus. Je commeneeraipar nl'ex-
c( pliquer sur la maladie, et parlerai ensuite du
« remede. Les différends élevés entre Votre Ma-
ce jesté et le parlement sont, vous le savez mieux
ce que personne, arrivés maintenant a tel point,
ce qu'apres tant et de si sanglantes batailles, iI
« n'y a plus moyen de s'accorder ni de prévenir
ce une ruine certaine , si la paix ne se fait promp-
ce tement. Le parlenlent est en possession de votre
ce fiotte, de toutes les villes, chateaux et forts
ce d'Angleterre; il jouit, de plus, de tous vos re-
cc venus actuellement séquestrés. C' est par son
(e autorité que se U~vent les soldats et les taxes,
(e et, apres tanfde vietoircs et de sucees, il a sur




DU LONG PARLE.MENT. 343
(( pied une armée puissante qui, par la force
« qu'elle lui donne, le lneten état d'exécuter, dans
c( I'Église ou dans le gouvernement, tout ce qu'il
ce lui plaira. De plus, quelques uns craignent
c( tellement de se retrouver soumis au pouvoir
« de Votre Majesté, d'autres répugnent tellenlent
c( a le reeonnaitre, qu'ils désirent que ni vous,
{e ni personne de votre postérité, ne regne plus
« sur eux. A la vérité le peuple, las de la guerre,
« et gémissant sous le poids des taxes, bien qu'il
te désire la paix, est cependant si opposé au ren-
c( versement de la monarchie sous laquelle iI
ce a long-temps prospéré, que eeux qui sont fa-
t( tigués de votre gouvernement n'osent pas se
(e hasarder a le renverser avant d'avoir, une fois
« au moins, fait a Votre Majesté des propositions
ce de paix, dans la crainte que le peuple, sans
« le eoncours duquel ils ne sauraient réussir dans
{( leurs desseins, ne vienne a se séparer d' eux. Ainsi
(e done le peuple entier, fatigué de la guerre, dé-
f( sirant obten ir des garanties contre l' oppressioll
ce et le gouvernenlCnt arbitraire, les tres-hono-
« rabIes chambres du parlement ont consenti a
ce présenter a Votre Ma jesté ees propositions , dont
« l'aeceptation est, aux yeux de la plus grande par-
ee tie du peuple, indispensable a la paixet au salut
ce du royaume. C'estpourquoilesalnisde Votrel\fa-
c( jesté et les eOffilnissaires d'Éeosse ont été foreés,
« non sans quelque répugnanee, de consentir, sous




544 HISTOIRE
« peine d'encourir la haine publique comme enne ..
ce nlÍsdela paix, ~l vous envoyer ces propositions, les
ce seules qui pussent vous etre faltes. Maintenant,
c( Sire, si Votre l\Iajesté, ce qu'a Dieu ne plaise,
ce refúsait de signer ces propositions, vous per-
« driez tous vos amis, soit dans la cité, soit dans
«( le pays; toute l'Angleterre s'éleverait contre
(( vous comme un seul hOlnme, et il serait ~l
« craindre que, toute espérance de réconcilia-
« tion une fois perdue, vous ne fussiez mis en
c( jugement, déposé, et qu'on n'étahlit un autre
«( gouvernement. De plus, les Anglais nous re-
« querrollt de remettre Votre l\1ajesté entre leurs
(e mains, de leur rendre leurs places fortes, et de
« faire sortir notre armée d' Angleterre. Enfin, si
( Votre Majesté persiste a refuser, les deux royau-
C( files seront forcés, pour leur si\reté mutuelle,
« de concourÍr sans vous au rétablissement de
« la paix, ce qui, a notre inexprimable dou-
ce leur, serait la ruine de Votre l\fajesté et de
({ sa postérité. Si Votre l\fajesté méprise les
(e conseils que nons lui donnons, 110US qui ne
« désirons rien au monde plus que l'affermisse-
« ment du trone de Votre l\fajesté, et si , par son
ce obstination, elle perd l'Angleterre, on ne per-
c( mettra pas a Votre Majest.é d'entrer en Écosse
«( l)our la ruine de ce pays. Sire, 110US avons mis


({ nos lnains sur nos cceurs, nous avons prié Dieu
( de nous diriger-, et avons sérieusement cherché




DU LONG PARLEMENT.
« le relnede a ces maux; mais dans l'état ou sont
c( les cllOses, nousn'enavons pastrouvéd'autrequi
«( put sauver votre couronne et son royaume, que
C( l'adhésion de Votre l\lajesté a ces propositions.
« Elles sont, en quelques points , l~OUS l'avouons,
« plus dures que nous ne les eussions faites, si
« nos désirs eussent été suivÍs; lnais voyant qu'il
« n'est plus d'autre nloyen de guérir les })laies du
« royaume et de renouer les liens rompus entre
« Votre Majesté et son parlement, nous conseil-
« lons, en toute hUlnilité et loyauté, a Votre Ma-
« jcsté, de vouloir bien, dans sa gracieuse honté,
« y consentir, cornme au seul remede qui vous
H soit laissé pour alnener une solide et heureuse
( paix, d'ou vous retirerez aussÍ beaucoup d'a-
« vantages, etc. »


l\1ais ni le discours de Lowden, ni tous les
efforts des deux parlelnens, ne purent parvenir
a changer la déternúnatiol1 du Roi. Les commis-
saires n'abandonnerent cependant pas leurs espé-
rances, et continuerent a le solliciter. eette affaire
se prolongea ainsi durant plusieurs mois, et con-
duisit jusqu'au milieu de l'hiver. Ils ne purent,
durant cet espace de temps, persuader au Roí
d'entendte precher devant lui aUCUl1 des ministres
du synode. Il demeura ferme a ne vouloir écouter
que ses propres chapelains. On commenc;a donc
¿l s'occuper de fortifier l'union entre les deux
royatlmes, afin qu'cn l'état OU étaient les choses,




HISTOIRE
ils pussent arranger paisiblenlent leurs afl'aires
sans le conCOllrs elu Roi.


Ce fut alors qu'apres quelques débats entre le
})arlement d' Angleterre et les commissaires d'É-
cosse, on convint, comIne 011 l'a déja dit, de lenr
payer 200,000 livres. Le général Fairfax en per-
sonne se chargea, a la tete d'une partie de ses
troupes, de conduire cet argent hors de Londres;
il confia ensuite le soin de l'escorter au major-
général Skippon, qui, avec six régimens, se mit
en marche au milieu de l'hiver, et arriva au nlOis
de janvier, avec l'argent, a Newcastle sur la
Tyne.


Les Écossais, lorsqu'ils eurent re',{u leur ar-
gent, remirent aux Anglais, ainsi qu'on en était
convenu, les villes de Berw·ick, Carlisle et New-
castle, et retournerent paisiblement en Écosse.
lis remirent aussi le Roi entre les mains des com-
lnissaires anglais chargés de le conduire dans le
midi. Il futrec;u avec beaucoup de respect par les
comtes de Pembroke, Denbigh et les autres COl11-
missaires du parlement qui demeurerent aupres
de luí a son palais de I-Iolmsby, dans le cOInté de
Northampton, ou ils luí rendirent tous les hon-
neurs dus a son rang, et lui donnerent une garde
convenable. Cela se passa dans le .mois de février.
A la Ineme époque, le cOlnte de Stamford ~
M. Godwin et M. Ashurst, de la chambre des
communes, furent envoyés conll1lissaires par le




DU LONG PARLEMENT. 347
parlement en Écosse, ponr s' entendre a Edim-
hourg avec le parlelnent écossais, concernant les
affaires des deux royaumes. .


Bien que le parti du Roi qui avait comhattu
le parlement et la liberté, fut absol:ument vaincu,
cependant la victoire ne pouvait procurer sur-Ie-
champ une liberté et une tranquillité complete;
la guerre civile finie, il s'éleva, parmi les vain-
queurs, des discussions plus que civiles, et encore
plus douloureuses a tous les gens de bien, car
elles portaient la division entre des hommes qu'on
avait vus, peu auparavant, unis d'affectiol1s et de
désirs, hasarder ensemble leur vie et leur for-
tune contre l'ennemi comlnun, et que la meme
cause, la llH~me ferveur pour la réforme de la
religion et le rétablissement de la liberté, que
le meme cuite enfin avaient liés les uns aux autres
par les plus étroits devoirs de conscience ..


Cette division des alnis de la liberté, sous les
l10ms . de presbytériens et d'indépendans, venant
continuellement a s'accroitre, les esprits s'ai-
grirent chaque jour sans lnesureo Les uns re pro-
chaient a leurs adversaires de vi oler le covenant,
les autres dene pas l'interpréter dans S011 véri-
table sen s , et duns un sens conforme a l'intéret
publico Il y avait dans les deux partis des honlmes
de grande réputatiol1o


Cependal1t ils ne parurent pas d'abord se sé-
pare~> tellement qu'ils ne se lllontrassent également




HISTOIRE


ardens a défendre la cause C0l111TIUne COl1tre le
parti du Roi appelé celui des lnalintentiollnés. Ce
ne fut que lorsque l'action du temps eut travaillé
leseonsciences du partí le plus faíble, que celui-cí
put etre amené par degrés a demander un appui
aux lualintentíonnés, toujours prets a se joindre
a l'un ou l'autre partí, quel qu'íl fut, pour par-
venir a les détruire tous deux. Bien que désarmé,
le parti presbytérien était alors devenu le plus
nombreux, beaueoup ele gens ayantété éloígnés de
l'autre, soit parquelquesgriefs partieuliers ou par
le poíds des taxes. Un grand n0111bre des eitoyens
de Londres, non pas de la derniere classe, mais du
plus haut rang, avaient renoncé a leurs premiers
principes, si bien que les habitans de cette ville, OU
les vietoires de F airfax, obtenues sans répanclre de
sang, avaient faitrefluer toutes les garnisons roya-
listes, se trouvaient tellement en force, que le
parlement n'y pouvait demeurer en sureté sans le
secours de l'armée. COlllme les 1110tifs et les in;"
tentions des hommes ne peuvent jamais etre assez
connus, nous traiterons ces dissensions des pres-
bytériens et des indépendans plus sérieusement
que les faits de guerre, bien que ceux-ci saient
aussi racontés ici en abrégé.


Il serait trap long et trap difficile de répéter ici
toutes les calaffinies répandues par les presbyté-
riens contre eette armée qu'an avait d'abord tant
admil:ée, et qri'on accusait lnaintenant de sautenir




DU LONG PAHLEMENT. 54 9
la faction indépendante (1) ; je ne saurais dire COln-
bien de péti tions furen t rédigées et de signatures re-
cueillies avee empressement dans le comté d'Essex,
eontre les troupes qu'on avait eantonnées vers le
nlOis d'avril aux environs de 'Valden. Les choses
alterent rneme si loin clan s le parlement, et les
débats eoneernant le lieeneiement de eette armée
y furent eonduits de telle sorte, que les soldats,
instruits désormais a connaitre leur propre mé-
rite, se regarderent cornme tres-outragés, et, au
nlOis de mai, ils présentel'ent a lenr général une
pétition, dans laquelle ils demandaient a etre
rassurés, non-seulement sur la paie qui leu!' était
cIne en qualité de solcIats, mais'sur les choses re-
latives aux libertés publiques pour lesquelles ils
avaient combaUu, et dans lesquelles ils étaient
intéressés eomme hommes libres et fils de la na-
tion. La faction opposée se plaignit hautelnent de
cette pétition. Les altereations en vinrent enfin au
point que, vers le comrneneement de juin, ces
soldats, poussés par des projets et des inquiétucles
dont je laisse au leeteur le soin de juger, enle-
verent le Roi de Holmsby, et, le tirant des 111ains
des commissaires du parlement, le nlenerent avec
eux a l'armée, poul' qu'il demeurat en quelque
ville ou palais voisin de leurs quartiers. Lorsque
cela fut connu, les deux chalnhres ordonnel'ent :


(1) Voir les Mcfmoires de lIollis.
!




550 HISTOIRE
10. Que le Roi résiclerait a Richnlond .
.2°. Qu'il y serait entouré des 111enleS perSOlll1e!j


qu'a Holmsby.
5°. Qu'il serait garclé par le régiment de Ros ..


siter.
Cet ordre fut envoyé au généraJ.
Mais le jour suivant le général et son conseil


d'officiers envoyerent au parIement une accusation
contre onze membres de la chambredes com-
munes, la plupart hommes tres-honorés. Ces
membres étaient MM. Hollis, Stapleton, Waller,
Glynn, Massey, Maynard, Lewis, Clotworthy,
Long, Harley et Nicholas. On leur reprochait pIu ..
sieurs choses relatives aux troubles de l'Irlande,
des entraves apportées au cours de la justice,
quelques actions contre l'armée et contre les lois
el' Angleterre. Les lnembres accusés se déclarerent
prets a répondre a tout ce qui pourrait leur etre
imputé; mais une autre requete, venue de l'ar-
lnée, demanda que les membres accusés fussent
privés du droit de siéger au parlement jusqu'a ce
qu'ils eussent réponclu sur l'accusation. Cela fut
refusé d'abord comme une trop haute prétention
et trop contraire aux priviléges du parlement;
mais, lorsque l'arInée eut réitéré sa demande, les
luembres accusés eurent permission du parlement
de se retirer pendant six 11lOis. Quant a l'ordre
du parlement pour envoyer le Roi a Riclunond,
le général denl'anda a en (~tre dispensé jusqu'a ce




DU LONG PARLEMENT.


que les choses fussent plus tranquilles, et pria
le parlement de ne pas assigner au Roi une rési-
dence plus proche de Londres que les cantonne-
lnens de l'armée. Le Roi fut d'apres cela envoyé
a Roystol1, de la a IIatfielJ, et peu de temps
apres a Causham, tandís que l'armée était can-
tonllée a Reading. De Causham, lorsque le général
marcha avec son armée vers Bedford, le Roi aUa
a la maison du comte de Bedford, pres de Wo-
burn.


A cette époque le bruit se répandit qu'il exis-
tait une conspiration tres-dangereuse des citoyens,
apprentis et autres Ilahitans de Londres, contre
l'armée. On disait que plusieurs citoyens et ap-
prentis et autres habitans s'étaient inscrits pour
former un corps en état de luí résister. Le géné-
ral, en ayant été instruít, affirma la chose aux
cornmissaires de la cité quí étaient alors avec lui
a son quartier-général, et qui se rendirent en di-
ligence a Londres pour s'informer de ce qui en
était et apaiser les trouhles. De la présence des
deux factions animées l'une contre l'autre il ne
pouvait naitre que des méfiances et des scenes tu-
lnultueuses. Ces méfiances croissant chaque jour,
le 22 juillet, le parlement ordonna que la milice
de Londres, organisée le 4 nlai, serait changée
et remplacée llar une autre milice affectionnée a
l'armée. Cet ordre irrita étrangeluent les citoyens




HISTOIRE


de la faction opposée. Le 26 juillet ils présen"
terent a la charnhre une pétition rédigée dans le
ton d'un ordre. Elle fut portée et suivie par une
lllultitude désordonnée de citoyens, d'apprentis
et d'autres hornlnes sans frein quí, se pressant
aux portes du parlement, criaient d'un t0!llllena-
~ant qu'avant que la chambre se séparat il fallait
qu'elle fit droit a leur pétition. Ils l'ernporterent
par cette violence au point d'arracher au parle ..
ment un ordre pour le rétablíssement de la milice;
lnais, non contens d'un pareil succes, au moment
ou la c11anlbre se séparait, ils pl'irent l'orateur,
le forcerent rudenlent a se rasseoir, et, cltose
inoute jusqu'alors dans le parlement, le retinrent
sur son siége ainsi que le reste des membres, jus-
qu'a ce qu'ils leur eussent extorqué un autre ordre
pour faire venir le Roí a Londres.


Les chalnbres, apres cette brutale violation de
leurs priviléges, s'ajournerent au vendredi sui-
vant, qui était le 15 juillet. Ce jour-Ia, les deu!
orateurs se trouverent absens; ils avaient quitté
Londres avec la plus grande partie des lllemhres
du parlelnent, et s'étaient retirés vers l'arlnée.
On choisit done de nouveaux orateurs; le lord
Hllnsdon et J\i. Henri Pelhalll, avocat; et le meme
jour, par leur organe, on rendit les ordres sui ..
vans:


1°. Que le Roí reviendrait a Londres.




DU LONG PARLEl\lENT. 553
2°. Que la luilice de Londres serait autorisée ~t


luettre des troupes sur pied ponr la défense de la
cité;


5°. Que la luilice serait autorisée a se choisir
un général.


Il fut ordonné aussi que les onze melubres ac-
cusés par l'armée viendraient reprendre leu!"
place dan s le l)arlement. Les citoyens, armés de
ces ordres, comlnencerent a organiser des troupes,
et choisiren t Massey pour lenr général.


Cependant ceux des membres des chambres qui
avaient quitté Londres, d'accord avec le général
et les principaux ofliciers de l'armée, rendirent un
ordre portant « que tous les actes et décrets passés
(( le 26 juillet, etdepuis, seraient regardés COlluue
c( nuls et de nuI effet, et qu'ils continuaient d'ad-
« hérer a la déclaration du général et du conseil
C( de l'armée. » Il était également décrété que le
général nlarcherait sur Londres.


Lorsque les citoyens apprirent que l'armée
approchait, leur courage parut s'abaUre, et les
opinions du conseil commun étaient si peu d'ac-
cord (IU'il y parut impossible de lever sur-Ie-
champ ce qu'il fallait de troupes pour résister a
l'arnlée. On envoya vers le général pour lui de-
mander la paix, que, par le consentemen t des
lnembres du parlement qu'il avait alors avec lui,
il accorda a ces conditions :


2.




IIlSTOIHE
tOo Qu'on se séparerait du parlement alors sié-


geant et des onze Jnembres accusés;
2°. Qu'on révoqueraitlesdernieres déclarations;
5°. Que la Inilice actuelle serait dissoute; qu'on


1 ivrerait au général tous les forts et la Tour de
IJondres;


4°. Que toutes les troupes qu'on venait de lever
sera ¡ent licel1clées;


Et que ron ferait tout ce qui serait nécessaire
d'ailleurs pour la tranquillité publique. Personne
l1'osant refuser ces conditions, elles furent rati-
fiées sur-Ie-champ.


Le 6 aout, le général, a la tete de son armée,
vint a Westminster, accompagné des orateurs et
des membres des deux chambres qu'il rétablit
dans leurs siéges. Les deu~. orateurs adresserent
au général des renlerclmens au nom de tout le
parlement. On lui donna le commandement de
toutes les troupes de l' Angleterre et du pays de
Galles, et on le nomma constable de la Tour de .
Londres. L'armée re~ut une gratification d'un
mois de paie. Le lendemain, le général Fairfax,
le lieutenant-général Cromwel1, le major-général
Skippon et le reste des officiers, a la tete de l'ar-
mée, traverserent Londres depuis sa pa rtie occi-
dentale jusqu'a la Tour, ou 1'0n donna quelques
ordres aux officiers, et ou ron organisa autrement
la lnilice. Pour réduire la trop grande puissance




DU LONG PARLEMENT. 555
de la cité, un ordre du parlement divisa sa mi-
lice en plusieurs corps, et Westminster, South-
wark et les quartiers situés aux environs de la
Tour, furent autorisés a disposer de leur propre
lnilice.


Ainsi fut réprimée la faction presbytérienne,
et le parlement, ainsi rétabli, s' occupa tres-acti-
vement a annuler les actes extorqués en son
absence par la violence populaire, et a punir les
auteurs de ces séditions.




356 11ISTOIRE


,


LIVRE QUATRIEME.


Cou.rl exposé de l~ origine et des progres de la
seconde guerre civile.


Apres que le parlement eut été rétabli , la mÍ-
.lice de Londres organisée, et qu'on eut dísposé
convenablelnent des autres commandemens, le
général Fairfax quitta Londres, et logea son ar-
mée dans les villes et viHages adjacens, laissant
seulement quelques régiolens autour de Whitc-
hall et des murs, pour la défense du parlement;
ii établit son quartier-général a Putney. Le Roi,
vers le milieu d'aout, fut conduit a Hampton-
Court , le plus magnifique de ses palais.


Le Roi , a Hampton-Court, ne parut nullement
sous l'apparence d'un prisonnier, mais pIutot
comlne . un prince vivant au lnilieu d'une conr
splendide; tant il était librement abordé par tons
ceux qui se présentaient pour lui baiser les mains
et lui rendre toute sorte d'hommages. Personne
n'était exclu dé sa présence; ce n'étaient pas
seulement les habitans de Londres et des villes
environnantes . qui se rendaient pres de lui; ses




DU LONG PARLEMENT.
partisans y vil1rent aussi d'au .. deH. des mers. Ceux
meme qui avaient été hannis par ordre du par-
lem-ent, et déclarés délinquans, comme Ash-
hurnham, Eerkley et les autres, purent, par la
pcnnission de l'armée, cOlllmuniquer librement
avec luí. lleaucoup de gens se demanderent ayec
étonnement par quelle raison ou dans quel des-
sein cette perrnission avait été accordée (1).


Encouragés par cet exemple, ou peut - etrc
nleme lnandés par le Roi, les lords qui avaient
composé son conseil a Oxford, le duc de Rich-
lllond, le lllUrquis de Hertford, les comtes de
Southampton et de Dorset, ainsi que le lord Sey-
11lour, se rendirent pres elu Roi vers le conl-
mencenlent tl'octobre, corome pour consulter
avec Iui , et lui donner leur avis sur les propo-
sitions du parlement ou sur d'autres affaires.
Cela déplut au parlement, et l'arlllée ne voulut
pas non plus le souffrir plus long-temps, le Roi
n'ayant encore satisfait en ríen aux demandes elu
parlement. On le dit a ces lorels qui, apres
dcux jours de séjour a Hanlpton-Court, rctour-
nerent chez eux.


Le 7 septembre, on envoya au Roi, a Halnp-
ton-Court, des propositions concerLées dans les


(1) C'était le commencement des llégociations de l'armée
avcc le Roi. Voir, a ce sujct , les M(!moires de Ilollís el de
Berkley. (Note de I'Editcur.)




558 HISTOIRE
deux chalnbres, et auxquelles avaient aussi con-
couru les commissaires du royaume d'Écosse. Sa
Majesté fut humblelnent suppliée de donner sa
réponse dans l'espace de six jours. Les commis-
saires nommés par le parlement d' Angleterre ,
pour traiter cette affaire, furent le cornte de
Pembroke, lord l\fontaigue, sir James Harring-
ton, sirJohn Cook, sir John Holland et le major-
général Brown. Ceux d'Écosse étaient lord Lau-
derdale et sir Charles Erskine.


Le Roi, quoiqu'il refusat comme auparavant
de consentir a' ces propositions, répondit cepen-
dant au parlement qu'il pouvait consentir aquel-
ques unes des dIoses proposées, savoir : l'éta-
hlissement de la religion presbytérienne pour
trois ans, et l'organisation de la milice telle
qu'elle lui avait été proposée d'ahord; maÍs, sur
les autres points, il n'était nulIement d'accord
avec le parlement. Il disait qu'il aimerait lnieux
preter l'oreille aux propositions de l'arnlée; cal'
l'armée avait dernierement puhlié quelques pro-
positiollS dans la forme de ceHes du gouverne ..
ment, et ayant égalelnent pour hut de rétablir
la paix clans le royaume, et elle demandait au
parlement d'examiller ces propositions.


Le parlemellt, sans se laisser décourager par
ces refus répétés du Roi, entra en discussion sur
les nouvelles pr~positions qui pouvaient lui etre
faites; mais les commissaires d'Écosse a Londres,




DU LONG PAULEMENT. 359
apres une entrevue particuliere qu'avaient eue
avec le Roi, a Hampton-Court, Lowden et Lanerk,
nouvellement revenus d'Écosse, écrivirent au
parlement pour lui demander que le Roi pul Ye-
nir a Londres, et traiter en personne avec le par-
lement sur les points alors en discussion. C'élaient
ces m~mes ÉcossaÍs qui, peu de tenlps aupara-
vant, dans leurs discours et dans leurs lettres,
niaient ( qu'il fut juste ou conforme an bien pu-
« b1 ic que le Roi put etre rec;u a Londres, et
(e admis a traiter en personne avec le parlemellt,
c( avant d'avoir donné au peuple satisfaction et
ce garantie. )1 Ces memes Écossais qui refusaient
de recevoir le Roi en Écosse, dans la crainte qu'il
n'élevat des troubles dans leur pays, auraient
voulu luaintel1ant qu'ol1l'amenat a Londres, ville
remplie de malintentiol1nés, oill'on pouvaÍt ex,-
citer tous les gen res de tumulte, et dans laquelle
le parlement ltti-nH~me ne pouvait siéger en su-
reté -que sous la garde d'une armée. Ce qui les
avait engagés, dirent-ils, a faire cette demande,
c'est que le Roí avait été enlevé de Holmsby contre
sa volonté, par la violence des soldats, et se
trouvait encore au pouvoir d'une armée, privé
de cette liberté convenable a un Roi qui traitait
de si grandes affaires.


A la fin de lenr lettre, les Écossais paraissaient
dirc que si l'on refusait de recevoir le Roi a Lon-
(lres, il suOll'ait qu'il pllt séjourner a Hampton-




5Go HISTOIRE
court, l11ais de luaniere a n'y pas etre au pouvoir
de l'arnlée, et en situation de traiter librement
avec les cOlllmissaires des deux parlemens.
Le parlelnent s'occupait de nouveau a rédiger
des propositions un peu nlOdifiées, pour les
adresser au Roí, lorsque tout- a-coup une nou-
vclle inaUendue vint le surprendre; l'orateur
recut au milieu de la nuít des leUres de Crom-


:.


'\Vell, qui annol1<;aient que le Roí s'était enfui
secretemel1t de Hamptoll-Court, le 12 llovembre.
Les conl1uissaires du parlement, et le colonel
\Vhaley, qui c01111nandait la garde, attendaient
que le Roí sortit de sa chanlhre pour souper, et
s'étonnaíent qu'il tardat si long-temps. Enfin:, a
neuf heures, quelques uns d' eux entrerent dans
la chambre , et n'y trouverel1t plus le Roi. II n'y
restait que son lnal1teau et une leUre de sa main,
écrite aux conllnissaires avec ordre de la commu-
níquel' au parlement. Apres quelques phrases
sur sa captivité et le charme de la liberté, il
protestait devant Dieu que, s'il s~échappait, ce
n'était point pour troubler la paix publique, ni
interrompre les traités dont il était l'objet; qu'il
voulait seulement pourvoir asa sureté menacée,
disait-il, par un complot. n terminaít sa lettre
par ces paroles :


«( Ne pouvant nier que lna sureté personnelle
\( ne soit la cause ~irecte de lna retraite, je prends
« Dieu a témoin que la paix puhlique n'occupe




DU LONG PARLEi\lENT. 56(
( pas nlOins ma pensée, et je ne sais pas de
( meilleur moyen de prouver que cette protes-
c( tation est sincere, que d'insister ponr qne tous
« les principaux intérets maintenant en présence
ce soient entendus, de telle sorte que l'artnée ob~
« tienne une juste satiSL'lction.· L'arIllée, par
« exemple ( cal' les autres points, bien qu'indis-
(( pensahles, ne me paraissent pas clifficiles a ré-
(( glér), doit, a mon avis, jouir de la liberté de
c( conscience, obtenir un acte d'amnistie, qui
« s'étendrait aussi a tous mes autres sujets, et
(( recevoir promptement les arrérages de sa solde.
« C'est la ce que je m'efforcerai d'accolllplir, si
c( je suis écouté dans lnes oITres, et si l' Oll ne
« ln'empeche pas d'employer les lnoyens légitimes
« et sages que je choisirai. Ponr conclusion, que
(1 je puisse llle faire entendre avec liherté, hon-
« neur et sllreté, je sortirai aussitot de ma re-
« traite, et me montrerai pret a etre Pater
«( pa/rice.


« CHARLES, Roi. »)


Le parlenlent, fort troublé de cette nouvelle
imprévue, et craignant que la paix du royaume
ne fut gravelnent comprOlnise, envoya sur-le-
champ clans tous les ports de mel" des homlnes
de confIance, de peur que le Roi ne passtlt en pays
étranger; et le brnit s'étant répandu a tort que
le Roi était caché dans la cité de Londres, les




HISTOIRE


chambres déeréterent que tont homme qni re-
tiendrait la personne du Roi, et ne révélerait
pas sa retraite au parlement, serait puni de lllOrt
et de la perte de ses hiens.


Ce nuage se dissipa bieniOt. Le eolonel Ham-
nlond, que les deux ehanlbres avaient nom.mé tont
récemment gouverneur de l'ile de Wight, écrivit
que le Roi s'était rendu dans eette He, et s'était
mis sous sa proteetion. I1ammond sedéclarait
pret a obéir a tous les ordres du parlement. Les
ehambres, en le louant de son zele, lui ordonne-
l'ent de garder tres-soigneusement le Roí, et de
le traiter avee toute sorte de respects, promettant
que rien ne manquerait pour son service, et qu'oll
enverrait de l'argent pour subvenir a toutes ses
dépenses.


Tandís que le parlement délibérait de nouveau
sur les propositions qu'il devait adresser au Roí,
iI en re«;;ut une longue leUre , intitulée : ce A 1'0-
«( rateur de la chalubre des lords, pour etre aussi
«( communiquée a la chalubre des communes. »
Elle fut lue le 18 novembre. Le Roí yexprimait
son opinion sur quelques unes des premieres pro-
positions, entre autres sur l'abolition de l'épis-
copat, discutait les raisons de conscience pour s'y
refuser, et touchait aussi, en passant, plusieurs
autres sujets. II espérait ~ ajoutait-il , qu'il ferait
agréer au parlement les l11oti(-; de sa conduite.
s'il pouvait les 'lui exposer lui- ruelllc. Il dcman-




DU LONG PARLEl\1ENT. 5G5
dait donc forternent a etre re«;{u avec honneur,
su reté et liberté, a traiter personnellernent a Lon-
dres. Les cornmissaires d'Écosse . insisterent avec
la derniere véhémence pour qu' on obtempérat au
désir du Roí.


Daos une situation si difficile , les deux cham-
hres craignant de se trahir elles-luemes aÍnsÍ
que leurs amis, en consentant a traiter avec le
Roi en personne dans Londres, ,ville si malin-
tionnée, avant qu'il eut donné aucune garantie,
et apres tous les nlaux que son obstination avait
causés a l'État, se déciderent a adopter un lnoyen
terme.


Le 26 novembre , apres un long débat, il fut
arreté que quatre propositions, rédigées en forme
d'acte , seraient envoyées au Roi dan s rile de
'Vight, et oifertes a sa signature; que lorsque le
Roí les aurait signées, il serait adrnis a traiter en
personne a Londres avec le parlement, son ad-
hésiQll a ces quatre articles pouvant elre alors
considérée comIne une garantie de ce qu'il ferait
sur tous les autres. Les quatre propositions por ..
taient:


1°. Que Sa Y\lajesté passerait un bill poul" l'é-
tablissement de la milice du royaume;


2°, Qu'elle rapporterait également par un bill
toutes les déclarations, proclaluations et injonc-
tions par elle publiées contre le parlement et ses
adhérens-;




364 HISTOIRE
3°. Qu'elle passerait un acte portant que toutes


les personnes par elle élevées a la pairie, depuis
que le grand-seeau avait été emporté a Oxford,
seraient incapables de siéger dans la chambre des
palrs ;


40 • Que les deux ehambres auraient le pouvoir
de s'ajourner an terme qu'elles jugeraient con-
vcnable.


Les commissaires d'Ecosse ne voulurent point
consentir a l'envoi d,e ces quatre articles, avant
<lue le Roi eút re«;u l'autorisation de venir a Lon-
dres, et, dans une longue décIaration, iJs protes-
terent contre cette luesure. Cependant le 24 dé-
cembre, des commissaires des deux charnbres
présenterent les bills an Roí an chatean de Ca-
risbrooke. Maís le Roi, instruít de la résistanee des
Éeossais, et des factions qui agitaient Londres,
refusa absolument de signer ces propositions, et
les commissaires revinrent a Londres avec la nou-
velle de son refus.


I.Je 3 janvier, la chambre des communes déli-
])éra sur ce refus du Roi. Le débat fut long, vio ..
lent, et de la plus grave importance. On y traita
de la situation et du gouvernement du pays; OIl
cxposa sans dé tour l'incurable obstination elu Roi,
et la patience déja trop longue elu peuple. Le Roi,
dit-on, par son elernier refus, avait refusé sa pro-
tection a la nation anglaisc, proteetioll quí était
le scnllllotif de Tobéissancc des sujcts. L'ohéis-




DU LONG PARLEl\1ENT. 365
sanee cessait d'etre due, puisCfue sa cause avait
disparu. II serait injuste et absurde, ajoutait-on,
que le pélrlement, apres avoÍr tantde foÍs sondé
les intentions du Roi, livrat a son ennemi impla-
cable sa propre sureté et ceBe de ses amis, quí
avaient courageusement hasardé, dans la plus
juste des causes, leur fortune et leur vie. Les
chambres n'avaient done plus qu'a prendre soin
de leur propre destinée, de ceHe de leurs parti-
sans, et a réglcr l'État sans le Roi, puisqu'on ne
pouvait y réussir avec lui. .


Le 17 janvier, les deux chalnhres voterent done
la déclaration suivante :


( Les lords et communes assenlhlés en parle-
C( lnent ,apres avoir présenté a Sa MaJesté un
{( gl,'and nombre d'adresses, soit pour prévenir ,
« soit pour ternliner cette guerre intestine parelIe
« excitée contre le parlement et le royau.me , lui
« 011t envoyé dernierement quatre bilIs, qui con-
« tenaient les propositions les plus Ílnportantes
« pour la su reté du parlement et du pays; s'en
« remettant pour la conclusion des autres diffé-
« rends, a une négociation personnelle avec Sa
« l\fajesté. Comnle ils ont rec;u un refus positif,
« ilsse jugent obligés de faire les derniers efforts,
c( ponr régler san s retard le gouvernement, de
« telle sorte que les citoyens puissent jouir sans
c( trouble de leurs 10Ís et de leur liberté. En
(( conséquence, et pour qu'aucune interruption




566 HISTOIRE
« ni délai ne soient apportés a ee granel travail, les
« lords et les eomnlunes ont voté et décretent :


ce 10.. Qu'ils ne feront plus aueune adresse ni
« proposltion au Roi ;


« 2°. Qu'aueune personne, quelle qu'elle soit,
{( ne pourra présenter au Roi aueune adresse ni
ce message sans la permission des ehambres;


ce 5°. Que tous eeux qui eontreviendront all
c( present déeret seront eonsidérés eomme eoupa-
ce bIes de haute trahison ;


C( 4°. Que les ehambres ne recevront plus au-
ce eun nlessage du ROÍ, et que nul ne pourra re-
« eevoir ou porter aueun message du Roi, soit
ce aux deux ehanlbres, soit a l'une ({'elles, so.it a
ce toute autre personne. »


Peu d~ jours apres la publication de ces réso-
lutions, le général et le grand eonseil de l'armée,
dont le quartier-général était a Windsor, pré-
senterent au parlement une déclaration eon~ue
dans les tenues suivans, et qui leur valut les re-
lllercimens des deux ehambres.


Déclaration de Son Excellence sir Thonl,as Fair-
fax et du conseil général de 1" armée, conlenant
leur résolution d~ adhérer au parlement dans
tout ce qu~il Jera ti P égard du Roí.


« Malgré tant de 'tiolations des droits et li-
« hertés du royaume , et les efforts tentés durant




DU LONG PAR LEM ENT. 367
( le regne actuel, pou,' étouffer tous les intérets
c( du royaume au profit du pouvoir et de la vo-
« Ion té d'un Roi, malgré les résolutions annon-
« cées par le parlement, de combattre pour la
ce défensedu royaume contre de pareils abus; le
ce parlement cédant a la nécessiié, a toujours
cc agi envers le Roi, toules les fois qu'il a été
(( question de ses droits ou de l'ohéissance a lui
ee rendre, avec une affection dont rendent témoi-
« gnage la protestation, le covenant et les diffé-
« rentes déclarationsqu'il a publiées. Il a ap-
« porté la plus soigneuse ¡rttent,on el la conserva"","
(e tion de la personne du 1\oi et de ses justes droits,
ce s'appliquant a les concilier avec la conserva-
c( tion et la défense des intérets publics et le salut
c( du royaume. La suite de ses aétions envers le
(e Roi et les nombreuses et humhles adresses qu'il
C( lui a présentées pour le salut et la pacification
c( générale, ont dan s notre opinion amplement
« manifesté la sincérité et l'innocence de ses in-
H tentions a son égard, et nous y avons toujours
« évidemment reconnu l'intention de s'efforcer a.
« conserver la personne et les droits particuliers
( du Roi, tant qu'un pareil so in pouvait s'ac-
« cordel', et non se trouver en contradiction avec
« les intérets plus grands et plus sacrés de la re-
c( ligion, des droits, libertés et salut du royaume ,
(e et non autrement.


c( En conséquence, dans les dernieres déclara-




5G8 IIISTOIRF:.
« tions et écrits que cette arnlée a eu occasiol1
ce de publier relativement a notre désir d'établir
« la paix de ce royaume, nous avons exprimé
c( nos vreux sinceres pour que le Roi, s'il voulait
c( concourir aux choses nécessaires et essentielles
« a l'établissement et a la garantie de ces in-
c( térets publics, pour les mettre a l'abri de
fe toute contestation -' put voir ses droits pris en
« considération et assurés, autant qu'il se IJeut
« faire san s compromettre les droits supérieurs
« du public et leur sureté contre toutes les
« atteintes qu'on pourrait leur porter a l'a-
« venIr.


« Notre plus sincere désir, notre atlente et
« tous nos efforts, ont tendu a ce que nous et les
ce autres attendissent patiemlnent que, par une
ce adresse au Roí, uniqnement relative a ces
« grands intérets publics, 011 parvint a démeler
ce clairement, par l'examen, jusqu'a quel point
« nous pouvions accorJer la conservation de la
« personne du Roi et de ses intérets avec la sl1-
ce reté de tous les autres.


c( Maintenant Hons voyons que, dans ses der-
(( nieres adres ses au Roi, le parlement ll'a insisté
« que sur un petit nonlbre de points essentiels a
« l'intéret du royaume, pou!' lequel il a combattu
(( jusqu'a présent, et qu'il n'en peut demander
C( uloins sans exposer le salut de ce royaume,
c( sans s'exposer lui-meme et tout ce qui s'est en-




UU LONG PARLEl\'lENT. 569
c( gagé avec lui pour la meme cause, sans renier
« le témoignage de Dieu, manifesté par l' événe-
{( ment de eette guerre, et que, ces choses une fois
c( accordées, il a offert de traiter sur le reste.


c( Ainsi la grande question de la pacification
( du royaume et de la garantie des intérets pu-
c( hlies, en tant qu'elles se peuvent obtenir par
c( le Roi et avec son eoneours, nous parait, d'a-
c( pres le refus que le Roi a fait de ces ehoses, si
c( elairement déeidée, que nous ne voyons plus
« aucune espéranee de paix ou de garantie pos-
e( sible a obtenir paree moyen.


c( Ainsi done, apprenant que sur ee refus, ajouté
c( a tant d'autres, l'honorable ehambre des com·
c( munes adécidé, lundi dernier, par plusieurs
« votes, qu'elle ne ferait plus aueune aclresse
« ou proposition au Roi, n'en reeevrait aucune de
( lui et ne souffrÍrait pas que d'autres en ,fissent
c( ou en re~ussent, nous déclarons librement,


A 1"
c( pour nous-memes et pou!" armee, que nous
« somInes résolus, par la grace de Dieu, d'adhé-
« rer fermement aux déeisions du parlement,
« dans tout ce qu'il a voté lundi dernier relati-
c( vement au Roí, et dans tout ee qui sera néces-
c( saire pour le -maintien de ses déeisions et pour
ce la paix et la sureté du parlement et du royaume,
c( sans le Roi et contre, Lui, ou quiconque pren-
( drait désormais son parti.


C( Windsor, 9 janvier 1647. »
2.




HISTOIRE


Le parlement fit aussi, vers le eomlnencement
de février, une déclaration publique ponr expli-
quer les motif s de ees votes. Outre les premiers
méfaits du Roi, exposés déja dans d'autres re-
montrances, on y racontait combien de foís déja le
parlement avait essayé de traiter avec lui, et que,
bien qu'on n'eut jamais été dans la llécessité de
négocier, on avait adressé sept fois au Roi des
propositions renfermant uniquement ce qui était
nécessaire a la paix et a la su reté du royaume,
qu'on lui en avait adressé a Oxford, pnis a Ux-
bridge, puis ensuite lorsqu'il avait été tout-a-fait
vaincu par les armes, a Newcastle, et, enfin, apres
le départ des Écossais, a Hampton-Court, et qu'il
les avait toutes et toujours refusées.


Cette déclaration du parlement avait pour ob-
jet d'apaiser les esprits agités. Mais ni raisons, ni
déerets ne servirent de rien pour calmer la fu-
reur du peuple et prévenir les tempetes pretes a
éclater. Il ne resta plus d'autres moycns que la
force et la nomination de sages conseils employés
a la recherche des eonspirations. On cantonna
done une partie de l'armée aux environs de West·
nlÍnster, des Mews et autres lieux de la ville; et,
dan s le mois qui précéda ces grandes mesures, on
choisit dans les deux chambres quelques membres
pour en former un comité de su reté publique quí
se rassembla a Derby-House, Hl OU avait déja
siégé le conlÍt~ réuni d' Angleterre et d'Écosse. On




DU LONG PARLEMENT. 37 1
donna a ce comité les pouvoirs llécessaires pour
réprimer les tumultes et insurrections, et pour
lever, dans ce but, autant de troupes qu'ille ju-
gerait nécessaire.


Ce comité fut composé de sept lords; les conltes
de N orthumberland, de Kent , de \tVarwick et de
Manchester; les lords Say, Wharton et Roberts;
et de treize membres de la chambre des COlll-
munes, M. Pierpoint, M. Fines, les ·deux Vane,
pere et fils, sir WilliaJll Armin, sir Arthur Has-
lerig, sir Gilhert Gerrard, sir J ohn Evelyn, le
lieutenant-général Cromwell, M. Saint-John,
M. Wallop, M. Crew et M. Brown.


Le parlement, bien que victorieux, bien que
gardé par. une vaillante artnée, bien qu'il ne
parut·· contre lui aucune . force visible, n'a-
vait jamais été en si grand danger. Des le prin-
temps, tont le monde prédisait que l'été serait
chaud. Sous le point de vue de la guerre, Oll
voyait le pays divisé en factions ,-les Écossais écla ..
tant en menaces et la ville de Londres remplie
d'agitateurs; et ce qu'on ne voyait pas semblait
encore plus a eraindre. Chaque jour le penple
était effrayé par des bruits de complots seerets et
d'asselnblées de eonspirateurs, d'ou 1'0n eonl-
men~a a pré~oir le carnage et la gu.erre, eomme
les mariniers oot eoutume de Noír la tempete ([tú
s é\eve;




HISTOIRE


el/m longo per multa volumina Iractu
.AE sluat un da minax ) jlatusqlle incerta futuri
Turbida testantur conceptos cequora ventO$.


Le parti du Roi comnlem;a a s'enfler d'espé-
rance eta se regarder, non comme vaincu, mais
comme vainqueur. Il ne pouvait contenir ses
vanteries et parlait sans cesse du rétablissement
du Roi et de la chute du parlement. Ceux qu'on
appelait preshytériens semblaient s'unir dans les
memes vooux et se montraient prets a se sacrifier,
eux-memes et Ieur cause, a leur haine contre les
indépendans. lIs désiraient voir détruire ce qu'ils
De pouvaient faire par eux-memes, et auraient
mieux aimé voir la liberté renversée par le Roi:1
que soutenue par les indépendans.


Le Roi lui-meme, bien que mis de coté et con-
finé dans l'ile de Wight , était alors plus l'edou-
table qu'il ne l'avait jamais été ~ lorsqu'il se voyait
a la tete de ses plus puissantes armées. Le nom
de Roi agissait maintenant plus puissamment que
jamais, et la pitié du vulgaire rendait sa personne
plus imposante. Le prince Charles aussi, par
son absence qu' on qualifiai t de bannissement,
était devenu plus cher a la multitud e , et les
cODlmissions que lui envoyait secretement son
pere semblaient le revetir d'un pouvoir légal, au
moyen duquel il pouvait facilement se faire ohéir
de tous ceux qui en avaient la bonne volonté,




DU LONG PARLEMENT. 57 3
el.sous son 110m, exciter ainsi, eomme on le yerra
bientot, non-seulelnent des troubles, mais' des
gnerres.


Cela eommen«;a par des soulevemens dans la
cité, qui furent bientot suivis d'insurreetions
dans les eomtés adjaeens. Des apprentis et de
jeunes libertins se divertissant ensemble a Moor-
fields, un dimanehe 9 avril, se jeterent, au
luépris de l'autorité des magistrats, sur un eapi-
taine de la miliee, et le ehasserent a eoups de
pierre; puis, prenant ses drapeaux, ils les suivi-
rent en désordre, rassemblant , a mesure qu'ils
s'avan~aient, toute l'éeume du peuple des-1ieux 00.
ils passaient, et arriverent ainsi a W esftn~lls.ter ,
crian! qu'ils étaicnt pour le, Roi Charles. Un es-
cadron de cavalerie, sorti des murs; les eut
bientot dispersés; mais ils rentrerent a Itondres,
ou d'autres séditieux se joignirent a eUK. lIs de-
meurerent assemblés toute la nuit, et rem.plirent
la ville de terreur, si bien que le lord - maire ,
homme sineerement aUaché au' parlement., fut
forcé de s'échapper secretement de sa maison,
et de se réfugier a la Tour. Le matin, le général
Fairfax, pou!' arreter le mal dans son origine,
et avant que des pervers en profitassent pour
rendre la plaie incurable, envoya une partie de
son armée dans la cité. Cette arrnée, agissant
a vec autant de valenr que de prudence, vainquit
les séditieux ~ les repoussa jusque dans' Leaden-




HISTOIRE


hall, en fit quelques nns prísonniers, et apaisa
ainsi le tUlnulte. Le parlement et les gens hon-
netes et sages remercierent le général, pour avoir
délivré la ville d'un si 110rrible danger. Les sol-
dats rec;urent une gratification de mille livres.


Dans ce temps malintentionné, les pétitions
])H~meS ne respiraient que guerre et sédition,
eomnie on pent le voir dans ceHes des eomtés
de Surrey et de Kent. Un eorps d'environ trois
lnille hommes vint de Surreya 'V'estminster, le
.26 mai, apportant a u parlement une pétition
conc;ue en termes hautains, dans laquelle ils
commandaient, piutot qu'ils ne demandaient,
qu' on rétablit im médiatement le Roi dan s sa
premiere dignité, et qu'on le laissat revenir a
'Vestminster avec honneur, liberté et sureté;
que I'armée fil.t promptement lieeneiée, et que le
peuple libre de l' Angleterre fut gouverné par ses
lois et statuts reconnus, et d'autres choses de
eette nature. Les gens de Surrey, qui avaient ap-
porté eette pétition, ne voulaient consentir a au-
eun délai, pas meme pour donner au parlement
le temps de la discuter; mais ils montraient la
plus grande insolence, maudissaient et injuriaient
ouvertement le parlement, et, se jetant sur les
soldats de sa garde, en blesserent plusieurs et
en tuerent un. Sur quoi un escadron de eavalerie
fut envoyé des Mews avec quelques hornmes de
pied au secours de ses camarades. Les gens




nu LONG PAULE,\lENT.


tle'campagne furent bientot vaincus et dispersés,
et OIl en tua quelques uns. Ainsi finit l'affaire
~le la séditieuse pétition de Surrey.


A la mcrne époque, les habitans du comté de
Kent se nlirent en route pour c;lpporter an par-
tement une pétition du me me genre. Ils étaient
assez 11001lbreux pour former une armée formi-
dable, et semblaient de loin menacer le parle-
ment : ils avaient été ¡rrités par le sévere cha-
timent récemment infligé a quelques uns de leurs
~ompatriotes, pour une sédition qui n'avait eu
aucune suite. Le parlement ne crnt pas trop faire
(l'employer contre les habitans de Kent le général
fairfax lui-nleme, qui, a la tete de sept régi-
mens, marcha a Blackheath , pres de Greel1w icho
Nous dirons hientot qnels furent ses succes.


Le parlcIUellt avait en d'ahord le projet de
faire Inarcher le général Fairfax a la défense du
llord; mais des dangers plus pressans le retinrent
tlans le nlidi , cal', a cette époqlle, a peine était-il
cn Angletcrrc un lien tranquilIe. Partont on était
Jllenacé de tumultes, d'illsurrections et de guerres;
rna is, cItose merveillcllse, une senle armée, par
les gt'andes hénédictions que Dicll a répandnes
sur elle, a sufli pour tout apaiser. De nH~me
que eeHe 31'11lée, lors<lu'clle avait été raSseHl-
hlée.~ avait, cn une seule année, 1646" elltiere-
iuent détruit ct dissipé les brillantes armées du




HISTOIRE


Roi, et soumis tout le royaume a l'obéissance du
parlement; de meme, quoíque dispersée en dif-
férentes parties sur tous les points du royaulne,
elle demeura victorieuse par son courage et son
honheur; tellement que, comme l'ame dans le
corps huma in , la valeur et la fortune sernhIe-
l~ent résider dan s tout le corps de l'arrrlée et dans
chacune de ses parties. Cal', outre les légeres
et peu redoutables insurrections du comté de
Suffolk dans l'est, de Stafford dans l'intérieur
<Iu royaume, réprimées par le colonel Wait
et quelques autres, et ceHe de Cornouailles
dal1s l'ouest, réprilnée par sir Hardress Wal-
ler, iI s'en éleva dans le nord et dan s le pays
de Galles de heaucoup plus graves et heaucoup
plus formidables.


Dans le commencement de mai, le nord fut
infesté par quelques uns des partisans du Roi.
Sir Thomas Glenhanl, qui avait déja cOlnmandé
tant de villes pour le Roí, comIne Carlisle, York,
Oxford, et les avait toutes perdues, s'était lnain-
tenant de 110uveau emparé de Carlisle; mais il
ne fut pas plus heureux a la garder. Dans le
lneme temps, sir Marmaduke Langdale s' était
emparé de Berwick, et l'avait fortifiée. Les roya-
listes prirent aussi le fort chateau de Pomfret,
dont ils aVi,lient tué le gouverneur en trahison.
On laissa dans le nord quelques régimens de




DU LONG PARLEMENT. 577
l'arnlée de Fairfax, sous le cOlnmandement de
Lambert, officier intrépide, et qui fut chargé du
soin de cette guerreo


Mais le parlement parut menacé, dans le pays de
Galles, de dangers hien plus horriples, l1on-seule-
lllent de la part des anciens ennemis qu'il avait déja
vaincus, maisde la partde plusieurs homnles qui,
apres l'avoir servi , abandonnerent la cause qu'ils
avaient choisie: entre autres, les colonels Poyer
et Po,vell, et un homme qui avait s.ouventbien mé-
rité du parlement, Langh.orn lui-nH~me. P.oyer
qui avait jusqu'al.ors tenu p.our le parlement la
ville et le fort chateau de Pembr.oke, mainte-
lJant appuyé d'un grand nOlllbre de malinten-
tionnés, les défendait contre lui avec anim.osité.
Langhorn, .officier tres-estimé dans le pays, y avait
levé une vaillante arlnée dans laquelle servait le
col.onel P.owcll. En peu de temps les Gallois s'em-
pressant él se réunir él lui, iI se trouva él la tete
de huit mille hOlnmes. On a su depuis que Lan-
gh.orn et Poyer avaient entrepris cette guerre avec
unecommissi.ol1 du prince Charles, d.ont, au reste,
les délégués ne prospérerent pas plus que ceux
de s.on pere. Le colon el Horton s'avaIH;a vers eux
avec une petite partie de l'année de Fairfax et
quelques autres tr.oupes qu'il avait levées, C.om-
posant en tout trois mille h.ommes. Il plut él Dieu,
JlJaitre cte la vict.oire, de ne pas régler lesucces
sur le nombre. Le 8 111 a 1 , Horton en vint aux




HISTOIRE


lnains avec l.ianghorn, entre les deux villes de
:Fagans et de Peterstone , défit et mit et fuite toute
son armée forte de huit mille hOlnmes, tant ca-
valerie qu'ínfanterie. On tua beaucoup de monde
sur le champ de bataille, et le nombre des pri-
sonníers s'éleva a trois milI e , nonlbre égal a
celui des vainqueurs. Parmi ces prisollniers il se
trouva environ cent cinquante officiers. On prit
aussi un grand nombre de drapeaux, une grande
quantité d'armes et tous les canoos.


Dans l'état des choses, rien ne pouvait etre plus
heureux pour le parlement que cette victoire. 00
en rendít, par ordre du parlelnent, de puhliques
actions de graces. Langhornet Powell, s'"étant
sauvés par la fui te , allerent rejoilldre Poyer dans
le chateau de Pembroke. Cromwell en personne,
fut envoyé, vers le coml1Wl1cement de maí, dans
le pays de Galles avec quelques régimens. Le 11
de ce mois, il arriva devant le chatea u de Cheps-
tow, dont iI résolut de faire le siége; lllais, vou-
lant arriver promptenwl1t a Pelnbroke, il Jaissa
devant Chepstow le colonel Ewers quí, au hout de
quinze jours, prit le chateau et tua Kemish a qui
la place avait été quelque temps auparavallt Ji-
vrée en trahison. Cromwell arriva le 20 muí de-
vant Pemhroke.


Poyer se fiant a la force de la place, et sachant
d'ailleurs comh.ien le temps était précíeux aupar-
lcment ell1barrassé alors d'un si gl'aIlll nombre




DU LONG PARLEMENT.
de difficultés, refusa toutes les conditions qui lui
furent offertes; mais Cromwell, qui n'était pas
accoutumé a désespérer de rien, se prépara a
l'assiéger. Les opérations furent grandement ac-
célérées par l'activité de sir George Ayscough qui
commandait une escadre dans ces parages. Il tira
de Eristol et autres lieux des pieces d'artillerie,
des lTIunitions de toutes sortes~ et les autres choses
nécessaires a un siége, qu'il lit ensuite passer par
lner a Cromwell.


Tandis que ces choses se passaient dans le pays
de Galles, le général Fairfax, envoyé, COllune on
1'a dit, avec sept régimens, contre les rehelles
du comté de Kent, les poursuivait du coté de
nochester. Ils s'étaient réunis en grand nonlbre
l)res de Gravesend OU ils formaient une arnlée dans
laquelle se trouvaient plus de vingt chevaliers,
écuyers et gentilshommes du comté, dont plu-
sieurs avaient été officiers dans l'armée du Roí.
Bien qu'ils fussent les plus l1ombreux, ils n'ose-
rent livrer bataille au général, mais quelques
uns se retirerent du coté de Maidstone. Un petit
nombre demeura assemhlé aux environs de Ro-
chester, une autre partie marcha sur Douvres et
assiégea ce chateau. Le général envoya le colonel
Rich et sir Michel Levesey pour faire lever le siége,
ce qu'ils exécuterent avec beaucoup de succes.


I.Je général marcha a la tete de son armée vers
!Uaidstone. Deux lnille des révoItés s'étaient ren-




580 HISTOIRE
fernlés dans cette ville, résolus a le défendre; le
général se prepara a les assiéger. Jamais le co~
rage de Fairfax et de ses soldats ne les avait ex-
posés a plus de hasards, et jamais une victoire ne
fut achetée par plus de dangers; car, lorsque les
soldats eurent pris la ville avec heaucoup de
peine, ils trouverent la guerre danstoutes les rues,
partout des canons dirigés contre eux, pas un
coin de la ville quí pil.t etre emporté sans conl-
bato Elle fut prise a la fin. Le général y perdít
quarante de ses soldats, en tua six cents a l'en-
nemi et leur fit environ quatorze cents prison-
niers. Il prit aussi quatre cel1ts chevaux et deux
ntille armes. Ce qu'il y eut de surprenan.t ~ c'est
qu'nne arluée de plusieurs milliers des révoltés
de Kent, plus nOlpbreuse que l'armée du général,
vint de Rochester pour seconder ceux de Maids-
tone, et cependant lorsqu'ils s'en furent appro-
chés, ils n'oserent rien tenter pour les secourir,
et demeurerent tranquilles spectateurs de la
prise de la ville. Le parlement ordonna que cette
victoire fut célébrée par des actions de graces.


Tont le comté de Kent paraissait soumis, ex-
cepté un petit nombre de chftteaux qui, peu de
temps apres, furent pris aussi, ou se rendirent au
parlement. Mais tout a coup cette hydrepoussa une
nouvelle tete. Le lord Goring ayant ramassé quel-
ques restes de. l'arnlée de Kent, s'avan~a avec
environ deux mille hommcs jusqu'a GreenvilIe ,




DO LONG PARLEMENT. 581
tt'on il envoya plusieurs des siens s'informer a
quel point les citoyens de Londres étaient dis-
posés 'en sa faveur; mais tandis 'qu'il attendait
une réponse, quelques escadrol1s de l'armée
du parlement ayant paru, Goring s'enfuit avec
tout son monde. La cavalerie le poursuivit, prit
quelque butin et fit plusieurs prisol1l1iers. Les
gens de Kent s'en retournerent pour la plupart
chez eux; le lord Goring, fuyant de Greenville
avec environ cinq cents chevaux J prit des ha-
teaux, traversa la Tamise et passa dans le comté
d'Essex,ou, comme si les destinées avaient v:ou1u
préparer partout des victoires a Fairfax, le lor(l
CapeIl avec des troupes du comté de Hertford, et
sir CharlesLucas avec un corps de cavalerie, re-
joignirent Goring a Chelmsford. Peu de temps
apres, revinrent se réunir a eux plusieurs sol--
dats de l'armée du Roi, ainsi qu'un grand nomhre
d'habitans de Londres. lIs furent aussi rejoints
par plusieurs personnages d'ull plus haut rang,
comme M. Hastings, frere du COlute de Hunting-
don, et M. Compton, frere du comte de Nor-
thampton.


Le général Fairfax traversa la Tamise a Grave-
send, passa, avec une partie de son armée, dans
le comté d'Essex, et, ayant fait venir le reste de
Kent et de Londres, se mit a la poursuite des en-
l1emis. Illes repoussa, a la fin, dan s Colchester
et les y assiégea. Comme ce siége fut de Iongue




HISTOIRE


durée, nous allons l'y laisser quelque teInps et
passer a d'autres aetions.


C' était du 110rd que venaient alors les plus grands
dangers du parlement, et non pas seulement de la
part des Anglais, mais de eeHe du royaume d'É-
eosse. Le major-général Lambert, général des
troupes du nord, travaillait a réprilner Glenham
et Langdale, et il fit si bien qu'il parvint a les
contenir dan s les bornes du Cumberland et de
Westmoreland; mais ils attendaient l'arrivée de
l'armée d'Éeosse, a laquelle ils eomptaient se
joindre. Lambert, trop faible pour s'opposer a de
si grandes forees, s'oceupa, sans perdre de temps,
a augmenter les siennes, a l'aide des comtés voi-
sin s , tres-zélés a le seeonder; surtout le cOlnté
de Laneaster qui leva deux régimen s de eavaleric
et quatre d'infanterie, que le major-général Ash-
ton conduisit a Lambert, auquel il se réunit dalls
le eonlté d'York. Les malintentionnés anglais n'au-
raient pas été redoutables dans le nord, si le
royaurne d'Éeosse ne s' était réuni a eux eontre le
parlement. La guerre nous fut apportée d'un autre
royaume, afin que Cromwell put remporter la
'vietoire sur des étrangers, aussi bien que sur des
Anglais.


La faetion du due de Halnilton, qui dominait
alorsdansleparlementd'Éeosse,avaiteombinédes
projets dangereux aux deux royaumes, contraires
a la paix, et, selon le jugement de I'Église d'É-




DU LONG PARLEMENT. 383
cosse, contraires au covenant meme. On devait en-
vahir l' Angleterre et lever une grande armée , sous
le cO'rnmandement du duc de HamiltO'n, homme
adrO'it et ambitieux. Les nlalintentiO'nnés anglais
furent invités a se jO'indre a lUÍ; car O'n publiait
qu'il prenait les arInes pO'ur le RO'í, et ceux quí
devaient servir dan s cette armée, avaient la
prO'messe de recevO'ir une paie. Tout cela se fit
lnalgré les protestations d' Argyle, Lowden et des
lords du bon parti. L'Église d'Écosse maudit cette
guerre comme lmple.


Mais le parti le plus uOlnbreux prévalut et prit.,
avec une sor te de droit, le titre de Parlelnent d~ É-
cosse. On nomma, pour réprimer la faction cO'n-
fraire , un comité a qui O'n donna pouvO'ir de pu-
nir ceux qui entreprendraient quelque chO'se
cO'ntre les décrets du parlement, et I'O'n pronon<;a
des peines coutre tous les ministres qui, de le u!'
chaire, precheraient le peuple dans un sen s cO'n-
traire. Il en arriva que quelques ministres furent
réduits au silence et d'autres punis, et que quel-
ques lords du parti le plus faible se retirerent
dan s leurs chateaux forts. Cependant O'n ne put
fermer la bouche a tO'ns les ministres. Quelques
uns se mQntrerent cO'nstamment zélés a menacer
l'armée d'Hamilton de la eO'lere de Dieu, et le
manvais succes de cette malheureuse armée put
dO'nner lieu de penser que Les lnalédictions de
l'Église n'avaient pas été prO'nO'ncées en vain, pas




HISTOIRE
plus que ne le furent autrefoiscellesdu trihunro-
main contre l'expédition des Parthes, entreprise
par le triumvir Marcus Crassus.


Ce n'était pas assez des conspirations sur
terre, bien qu'elles couvrissent toute l'ile; il
s'y joignit aussi, contre le parlement, des ré-
voltes maritimes. Plusieurs des principaux équi-
pages de la fIotte royale se souleverent, au ~om­
mencement de juin, et mirent a terre le vice-
amiral Rainshorough, déclarant qu'ils étaient
pour le Roi et décidés a servir le prince Charles.
lIs firent voile pour la Hollande, 011 était alors le
prince avec son frere le duc d'York, qui, peu de
temps auparavant, sollicité par les lettres du Roi
son pere, s'était échappé secretement de Londres,
ou le parlement le faisait garder avec heaucoup
de respect et de magnificence.


Le parlement fut extremement troublé de la
révolte de ces vaisseaux, qu'on regardait conlme
tres-dangereuse. II envoya le comte de \JVarwick
prendre le commandement de ce qui restait de la
fIotte, en le chargeant de ra Inener les rehelles ,
s'ille pouvait. Warwick accepta de hon creur cet
emploi et futnommé par le parlement lord grand-
amiral d'Angleterre, titre qu'il avait déja porté
au commencement de la guerreo


Tandis que Warwick servait le parlement, le
malheur voulut que le comte de Holland, son
frere, prit les armes contre lUÍ, jugeant, a ce




nu LONG PARLEMENT. 585
qu'il parait, la circonstance favorable, a cause
de la révolte de l' armée et de l' absence de }'airfax
et de Cromwell, occupés alors , l'un dans le comté
de Kent, l'autre dans le pays de Galles. Il comp-
tait aussi sur les dispositiol1s des habitan s de
Londres, en sorte que le jeune °duc de Buckin-
gham, son frere et plusieurs autres s'étant joints
a lui, ils parurent en armes pres de Kingston,
a la tete de cinq cents chevaux; mais sir Michel
Levesey et quelques autres, prenant l'occasion
aux cheveux, les mirent en fuite. Lord Francis
Villiers fut tué; lord Holland, fuyant avec le reste
de sa cavalerie, fut entierement défait, quelques
jours apres, él la ville de Saint-Needs, pal' le
colonel Scroop, que le général avait envoyé de
Colchester dans cette intention. Dalbier et quel-
ques autres gentilshommes furent tués. Hollan(l
lui-meme fut fait prisonnier, et le parlement le
fit enfermer au chateau de Warwick.


Dans le meme telnps , Rossiter ohtint aussi pour
le parlement une brillante victoire sur les troupes
de la garnison de Pomfret, qui, au nonlhre de
nlille chevaux, pillaient le pays et le dévastaient
dans tous les sens. Rossiter tomba sur eux, les
vainquit, prit tous leurs officiers, ainsi que toutcs
leurs armes et leurs bagages. La joie de eette vic-
toire fut, pour quelque temps, diminuée par le
danger de Rossiter grievement blessé; mais il se
guérit.
?~ ~5




586 HISTOIRE
Les victoires obtenues de tous cotés, par le par-


lement, bien que quelques unes puissent paraitre
peu eonsidérables, sont cependant d'une grande
ünportance et dignes de commémoration aux
yeux de quiconque songera en quel danger eut
été jetée la république par la perte d'une seule
de ces batailles. Le parlement lui-meme, lors-
qu'il réfléehira sur le nombre et la "Variété des
périls qu'il a courus, pourra eonnaitre ce qu'il
doit a la constante providence de Dieu, dont la
nwin a toujours été avec lui. D'ailleurs ces petites
actions préparerent la voie a de plus importans
succes et a l'abaissement total des ennemis, qui
s'opéra miraculeusement environ a eette époq.ue.


'Cal" ce fut alors que le chateau de Pembroke se
rendit tres a pro pos a Cromwell. Poyer et Lan-
ghorn, comptant sur la force de la place, s'y
étaient long-telups défendus avec opiniatreté;
mais a la fin, réduits aux dernieres extrémités ,
ils se rendirent prisonniers, sans eondition et a
discrétion. Les destins qui appelaient Cromwell
a de plus grands exploits firent tamber cet évé-
ment au 'moment OU le duc de Hanúlton, a la tete
d'une nombreuse armée d'Écossais, venait d' entrer
en Angleterre, et vers le commencement de juillet
avait vu ses forces accrues par la jonction de
Langdale. Hamilton s'avanc;a a la tete de plus de
vingt-cinq mille hommes , répandant partout la
terreur. A peine dans tout le cours de ces guerres




DO LONG PAnLEMENT.
peut-on trouver une armée qui ait exercé de plus
grandes cruautés sur les pauvres habitans de l' All-
gleterre , et cependant lorsque le parlement dis-
cuta cette affaire, ce fut ayec beaucoup de difii-
culté que la chambre des lords put se décider a
la déclarer ennemie. La chalubre des communes
avait déclaré c( que l'arnlée écossaise qui, sous
(( le dnc de Hamilton, avait envahi l'Angleterre,
c( était enhemie, et que tous les Anglais qui se
( joindraient a elle seraient traitres a leur pays. »
La cham,bre des lords, apres de longs débats,
consentit enfin a ce vote. Les principaux citoyens
de Londres, et tous ceux qui portaient le nom de
presbytériens, bien que les presbytériens écossais
eussent cette armée en abomination, ne faisaient
pas pOllr son sued~s des vreux moins ardens {Iue
les malintentionnés; par la le lecteur peut juger
des temps.


Lambert, bien que, selon toutes les apparences,
iIne fut pas de force a résister a d'aussi puissans
ennemis, ne se laissa point décourager; mais ré-
soln de faire tete au danger, ii se prépara, s'iL
était nécessaire, a eOlnbattre les Écossais. Cepell-
dant il attendaitjournellement l'arrivée de Crom-
well a qui était réservée eette victoire. Aussi par
de prudentes retraites et quelques escarmouches
llon-seulement avec Langdale, mais avec Hamilton
lui-meme, il trouva moyen de trainer tellement
en longueur, que la grande armée de Hamilton


25.




588 HISTOIRE
étant entrée le 20 aout dans le eomté de IJan-
easter, Cromwell s'y trouva arrivé avee toutes
ses troupes qui, réunies a celles de Lambert, com ..
poserent une armée de pres de dix mille hommes.


Ce fut aux environs de Preston, dans le comté
de Lancaster, que se livra eette fameuse bataille
dan s 1 aquelle fu rent défaites et mises en fui te to utes
les troupes de Hamilton et de Langdale. Le vain-
queur les poursuivit jusqu'a Warrington, c'est-a-
dire durant un espace d'environ vingt lnilles, leur
tua beaucoup de monde, et fit prisonnier le lieute-
nantgénéral Baillie, avee une grande partie de I'ar-
mée écossaise '" ne leur faisant quartier que de la
vie. Il y eut dans eette bataille trois milIe Ecossais
tués et environ neuf lnille pris. Le due de Hamil-
ton lui-meme, qui s'était enfui avec un nombreux
parti de cavalerie a Utoxeter, fut fait prisonnier
quelques jours apres par le lord Grey et le eolouel
'Vait. 011 prit avee lui environ trois mille hommes
de eavalerie. Langdale fut aussi fait prisonnier
pen de temps apres, dans un petit village, par
Widmerpool, eapitaine du parlement. Tel fut le
résu.Jtat de l'invasion de Hamilton en Angleterre.


Anssitot apres eette fameuse vietoire de Crom-
well, Colehester se rendít au général Fairfax. Le
général était demeuré pres de trois moís devant
eette ville avec une armée peu eonsidérable, eu
égard au nOlnbre des assiégés, et par un temps
déplorable qui "n'éprouva pas rnoil~~ la patience




DU LONGPARLEMENT. 589
des soldats que leur courage. Goring, Capell, Has-
tings, Lucas et les autres officiers, ne voulurent
point entendre parler de se rendre jusqu'a ce
qu'ils fussent réduits aux dernieres extrémités, et
rejeterent avec mépris toute proposition, pensant
avoir peu a craindrc d'une armée aussi peu 110m-
breuse que ceHe qui les assiégeait; ils furent d'ail-
leurs soutenus long-temps par de vaines espé-
rances de secours, par ceHes qu'ils fondaient sur
les insurrections de Londres, su r les succes de
Hamilton, de Langdale, du comte de Holland,
et surtont par l'assistance qu'ils espél'aient rece-
voir par mer du prince Charles, alors maitre
de ces vaisseaux qui avaient quitté le parti da
parlelnent, et qui, s'étant emparé de plusieurs
vaisseaux marchands, se trouvait en personne
dans la Manche, a la tete d'une floue assez con-
sidérable.


l\Iais vers la fin d'aoilt, les assiégés de Colches-
ter,-désespérant d'etre secourus et réduits a de
telles extrémités que depuis long-temps ils se
llourrissaient de chair de cheval, se rendirent a
discrétion au vainqueur. Deux seulement furent
fusillés, sir Georges Lucas et sir Georges LisIe.
Goring, Capell et Hastings furent envoyés en pri-
son pour y attendre que le parlement pronol)(;at
sur leur sort.


Ainsi le parlement obtint partont la victoire
sur terre, et il ne fut pas non plus lnalheureux




590 1llSTOIRE
sur mer; cal" lorsqu' on considere cette révolte de
la fIoue, on doit regarder comme un grand bon-
heur qu'elle ne se fut pas étendue a un plus grand
nomhre de vaisseaux et qu'il n'en fut pas résulté
plus de lnal; le comte de Warwick montra une
grande prudence, et il plut a Dieu d'avertir le
parlement par la frayeur qu'illui causa, pIutot
que par une grande perte, de l'incertitude de sa
situation.


Versla fin d'aotH, Warwick était avee une as-
sez nombreuse floUe dans la Tamise, quand le
prince Charles, plus fort que lui et a la tete d'en-
virol1 vingt voiles, s'avanc;a sur luí, dans la ri-
viere, et lui envoya l'ordre d'abaisser son pavil-
Ion et de lui rendre ohéissanee, eomme grand-
amiral et revetu de cette dignité par le Roi; mais
Warwiek, fidele au parlement, n'ohéit point a la
sOlnmation. Cependant, eomme il n'y avait point
de place dan s cet étt'oit canal pour y livrer un
combat naval, surtout avee de gros vaisseaux,
et que la fIoUe de Warwick n'était pas de force
a se lnesurer avee eeHe .Iu prinee, il attendit l'ar-
rivée de ceHe de Portsmouth. IJe commanderríent
et la eonduite de ectte floUe avaient été remis a sir
Georges Ayscough ; mais le lord-amiral Warwick
ne savait pas bien eertainement ce qu'était de-
venue eette fIoUe, et si elle ne s' étai t pas révoltée
comnlC le reste~ cal' le bruit s'en répandait chaque
jour a Londres. n est sur que les marins en géné-




DU LONG PARLEMENT. 39 1
ral étaient tres-mal disposés pour le parlement, et
d' ailleurs séduits continuellement par les hahitans
de Portsmouth; en sorte que, sans la prudence de
sir Georges Ayscough, sa considération parlui les
marins et l'afTection qu'ils avai~nt pour lui, la
fIoUe aurait été perdue, ce qui aurait entrainé
I'impossibilíté de conserver les autres. Il sonda
prudemment leurs dispositions, et, renvoyant les
plus mauvais pour empecher la contagion de se
répandre, il parvint a la fin, avec heaucoup d'ef-
forts et de grandes difficultés, a raffermír dans la
fIoUe le pouvoír du parlement; et, a yant heureu-
sement longé pendant la nuít la fIoUe du prínce
Charles, iI amena tous ses vaisseaux au comle
de "\;Varwick. Celui-ci, renforcé par l'arrivée
d' Ayscough., résolut d'avancervers l'ennemi; mais
le prince, fante de vivres, avait été obligé de
virer de hord et de faire voile vers la Hollande.
IlIe suivit avec toute sa flotte et l'atteígnit, pen
de temps apres, a Gorée., sur la cote de Hol-
lande.


Cromwell, poursuivant sa victoire sur Hanlil-
ton, entra en Écosse poul' aller secourir Argyle
et Leven -' contre les forces de l\fonroe et de La-
nerk, ce qu'il exécuta heureusement, et il remit
sons le pouvoir du parlement Berwick et Car-
lisie, dont s'étaient emparés les Écossais unís aux
malintentionnés d'Angleterre. De la il alla a Édim-




HISTOIRE


hourg pour y dtHibérer sur les mesures a I)rendre
pour le bien des deux royaumes. Il y fut re~u
avec de grands honneurs. Plusieurs melnbres de
la haute et moyenne noblesse d'Écosse furent en-
voyés, par le comité des Etats-, au devant de Crom-
"vell, et, apres des harangues de félicitation, le
conduisirent a f:dimbourg, ou Argyle, Leven et
d'autres lords, lui donnerent dans le chateau,
ainsi qu'aux autres officiers, un magnifique han-
quet. Les ministres lui rendirent 'des actions de
graces et le nOlnmerent, apres Dieu, le sauveur
de l'Écosse. Te! est aussi le témoignage que reod
a CrOlnwell le comité, dans ses leures au par-
lernent d' Angleterre. Aussitot apres, on licencia
les troupes de Monroe et de Lanerk et toutes les
autres, . a l'e,xception de quinze cents hommes,
cavalerie et infanterie, qui furent mis sous le
cOlnmandement de Leven ponr y demeurer jus-
(lu'au rétablissement de l'ordre dans le royaume.
n fut anssi décrété, par le comité des États et l'as-
selnblée de l'ÉgIise, c( pour le maintien de la re-
u ligion et de l'amitié fraternelle avec la nation
(( anglaise,» qu'aucun de ceux qui avaient slúvi
Harnilton dans la derniere invasion, ne pourrait
siéger dans le nouveau parlelnent que 1'0n con-
voquait alors, ni dans l'assemblée de l'Église;
cal' la faction de Hamilton fut déclarée ennemie
de la religion e~ des deux royaumes.




DU LONG PARLEMENT. 393
Ce fut une chose digne de" remarque,," de voir


cette armée anglaise, que le parti religieux de
l'Écosse avait désignée comme un ramas de see-
taires, et insultée des noms les plus outrageans,
maintenant reconl1ue, par ces mef!1es Écossais,
pour etre l'instrument de Dieu et le vengeur de
l'Église et du royaume d'Éeosse. Les plus puissans
pairs d'Éeosse s'aecuserent ingénument d'erreur
et de préeipitation pour avoir, l'année préeé-
dente, traité eette armée de rebelle, par la raison
qu' elle faisait, en Angleterre, les memes choses
([u'ils étaient aetuellement obligés de faire en
Écosse pour le salut de ce royaume.


Ce grand changement dans le conseil d'Écosse
aurait été bien faít pour exciter la surprise, si le
changement qui s'opéra alors dans le parlement
d' Angleterre n'eut présenté encore un plus grand
miracle. Qui pourra concevoir que CrOlDwell,
déclaré le sauveur de l'Écosse pour avoír vaincu
une armée écossaise et avoir préservé, par la,
l' Angleterre du plus grand des malheurs, n'ait
pas été, pour ce meme fait, déclaré le sauveur
de l' Angleterre , et que cette victoire sur les Écos-
sais, dont se réjouissaient les preshytériens d'É-
eosse, pOU1' l' amour de la religion, ai t, précisé-
ment pour l'amour de leur religion, déplu aux
presbytériens d'Angleterre? OEdipe lui-meme ne
parviendrait pas a débrouiller une pareille
énigme, surtout s'il en voulait juger d'apres sa




594 HISTOIRE
raison, el non d'apres les sentilnens cl'envie et de
haine qui naissent de l'aigreur des factions (1).


La face du parlement anglais se trouva alors
changée tout a coup, et les résolutions prises
l' année précédente de ne pI us faire d' adresses
au Roi, ces résolutions, dont le parlement avait,
par une déclaration, expliqué au public les rnO-
tifs et la nécessité, furent déclarées nulles et de
nul effet. La direction était complétement chan-
gée, et les nlembres accusés ayant été remis en
possession de leurs siéges, on se résolut, avec un
empressement plus sournis que jamais, a renou-
veler les adresses au Roí. Les chambres lnirent
alors en discussion la rédaction des proposi-tions,
et on se disposa, san s que le Roi eut donné au
peuple aucune satisfaction ou garantie, a le lais-
ser venir a Londres, pour y négocier en personne
avec honneur, liberté et sureté.


Cependant ce point ne put etre emporté. On


(J) Cette énigme s' expliquera facilement par la Iecture
des Mémoires de Rollis, et par des notes ajoutées a ces Mé-
moires et a ceux de Ludlow, relativement a l'époque que
May indique ici en passant. Les éclaircissemens que nous
aurions pu donner ici , dans des notes, n'auraient pu sup-
pléer a la brieveté du récit de May, sans le secours des
deux autres ouvrages; le meme motif nous a engagés a
nous abstenir de notes sur toute la partie de l'abrégé de
May, qui se rapporte aux faits traités dans les Mémoires de
Hollis. (Note de l'Editcur.)




DU LONG PARLEMENT. 395
vota seulement que des négociations seraient ou-
vertes dans l'ile de Wight et que le Roi choisirait
dans eette He le lieu qui lui conviendrait. En
eonséquence, le 4 aout, le eomte de Middlesex
fut envoyé au Roi avec deux rnembres de la
chambre des communes. Le Roi répondit qu'il
était pret a traiter de la paix, et choisit Newport
pour le lieu des négociations. On nomIna, pour
traiter, des commissaires dans les deux cham-
hres, cinq pairs : Northumherland, Pemhroke,
Salisbury, l\-liddlesex et Say; dix membres de la
chamhre des comrnunes : lord Wainrnan, Hollis,
Pierpoint, Vane le fils, Grimstone, Potts, Brown,
Crew, Glynn et Buckley.


Le Roí, pendant ces négociations, fut non-seu-
lement traité, par les cornrnissaires, avec heau-
coup de respect et de cérémonie; lnais sa maison
fut eeHe d'un prince, et on lui permit de s'en-
tourer de ceux de ses serviteurs qu'il voulut choi-
sirpourrelever lasplencleur de sa cour. Le duc de
Richrnond, le roarquis de Hertforel, les corotes de
Southarnpton et de Lindsey, et d'autres gentils-
hornmes de marque, vinrent, en granel nombre,
se rendre pres de lui. On lui permit d'y appeleI'
ses chapelains et plusieurs des jurisconsultes qui
lui étaient attachés, pour lui servir de conseil
vendant les négociations.


Mais tandis qu'elles se prolongeaient, ctapres
(fue plusieurs JJlOiseurent été consumés en dé-




596 HISTOIRE
h o fi 01" ats, conceSSlOns et re us, VOl a qu un nouveau
et étrange changement fit retomber le Roi, du
plus haut point de grandeur dan s le dernier de-
gré de l'ahaissement, tant un contraire en pro-
voque un autre. Tandis que quelques uns tra-
vaillaient a remettre le Roi sur son trone, a de
légeres conditions, ou peut-etre sans conditions,
d'autres, méditant sU:r ce que le Roí avait fait
et sur ce que la république, et particülierement
les amis du parlelnent, auraíent a souffrir s'il
venait a régner de nouveau, et toujours le nH~nle,
désirerent qu'il put etre entierement écarté. De
nombreuses et fréquentes pétitions, dan s ce sens,
furent présentées au parlement, et quelques unes
au général Fairfax, demandant qu'on mit en ju-
gement toute personne, sans exception 1 qui se se:'"
raít rendue coupable envers la république.


La premiere. pétition de ce gen re fut présentée
au parlelnent le 11 septembre, avecce titre ;


AUX TRES-HONORABLES COMMUNES n' ANGLETERRE, .A.SSElh-


BLÉES EN P ARLEl\1ENT ;


Humble pétition de plusieurs nLÍlliers de citoyens
bien intentionnés des villes de Londres el de
Westlninster ~ da bourg de Southwark et des
'fJillages voisins.
Lorsque c~tte pétition eut rompu la glace,


elle fut suivie, dans l'espace d'un luois, de pln-




DU LONG PAl\LEMENT. 597
sieurs autres, venues de divers comtés de l' An-
gleterre et de plusieurs régimens de l'armée. Il
en vint, le 50 septernbre, une du comté d'Oxford;
le 2 octobre, une du comté de Leicester; le 4 oc-
tobre, une d'un grand nOJllbre d'officiers de l'ar-
mée. Il en vint trois le 10 octobre ;'le 18 octobre,
il en arriva une du régiment d'Ireton, et une
autre, le 21, du régiment d'Ingoldsby.


Toutes ces pétitionsdemandaientla meme chose;
elles voulaient toutes que justice fut faite de ceux
qui avaient fait répandre tant de sang anglais et
causé tant de calamités a la nation, nommé-
ment de ceux qui avaient excité cette seconde
guerre, Hamilton, Holland, Capell, Goring, et
les autres alors au pouvoir du parlement; mais
elles insistaient surtout pour qu'on mit en juge-
ment le Roi, le premier de tous les coupables, le
promoteur de la guerre et l'auteur de toutes les
calamités de l' Angleterre. On demandait au par-
]ement la perJoission de lui rappeler la décla-
ration c( que le parlement lui-meme avait faite
c( l' année précédente contre le ROÍ, ceHe de l'f>
( glise d'Écosse, en 1646, contre ce meme Roi,
c( dans lesquelleson l'accusaitde plusieurscrimes,
c( et, entre autres, de l'effusion du sang de pln-
c( sieurs milliers de ses meilleurs sujets; choses
c( qui, si elles étaient vraies et ne recevaient point
C( leur cheltiment, ou qu'il n'en fut fait aucune
c( satisfaction, devaient, il Y avait tout lieu de le




5g8 HISTOIRE DU LONG PARLEl\1ENT.
«( craindre, provoquer, par cette extreme injus-
c( tice, la colere de Dieu, qui, apres une guerre si
le sanglante, avait livré ce Roi entre leurs mains.
« On suppliait donc humblement le parlement
c( de ne pas rejeter avec ingratitude les miracu-
« leux secours qu'il avait re<;us du Tout-Puissant,
c( et de ne pas se trahir lui-meme et ses fideles
ce amis, en se laissant aller aux perfides négocia-
ce tions d'un ennemi implacable. »


Tel était le sens de toutes ces pétitions qui,
durant les négociations, étaient journellement
présentées au parlement et mises par lui de coté.
Cependant, a la fin, les désirs fIu' elles expri-
maient l'emporterent, surtout lorsque la remon-
trance du lord-général et du conseil-général des
officiers, tenu a Saint-Albans le 16novembre 1648,
eut été présentée au parlement, le 20 du meme
n1OIS.


Je n'essaierai pas de raconter par quels moyens
et par quels degrés les choses en vinrent enfin a
ce point que le Roi fut jugé, condamné et dé-
capité. L'examen et le récit d'une si grande af-
faire fourniraient a eux seuls la matiere d'une
histoire, et ne peuvent etre convenahlement con-
tenus dans cet abrégé OU j'ai déja renfermé un si
long espace de temps, que je crois devoir le ter-


. ..


uuner ICI.


FIN DE L'HISTOIRE DU LONG-PARLEMENT.




ÉCLAIRCISSEMENS
ET


,


PIECES HISTORIQUES.






ÉCLAIRCISSEMENS
ET


" PIECES HISTORIQUES.


1.


Sur le protes et la mort de t archevéque Laud.
( 10 janvier 1645.)


La condámilation de Strafford avait été une victoire de
parti; ceHe de Lapd eut surtout le caractere d'une ven-
geance, et les animosités religieuses yeurent la plus grande
part. Pendant toute sa vie, Laud avait été l'ennemi déclaré
des dogmes calvinistes, adoptés par les puritains, et le zélé
partisan de la hiérarchie ecclésiastique, qu'il soutint avec
la violence despotiqne de son caractere. Attaqué et traversé
dans la premiere partie de sa carriere par le parti calvÍ-
niste, alors tres-puissant dans le clergé du second ordre,
il ne dut ensuite son avancement qu'a l'effroi que commen-
faieni a inspirer a la cour les progres de Ce parti. La
faveur que lui accorda le duc de Buckingham dut faire
vorter d'abord sur lui une partie de la haine que s'était atoo
tirée le duc. Laud prit soin, pour aÍnsi dire, de cultiver
cette disposition malveillante ; violent dans ses actes, hall'-
tain et emporté dans ses discours, incapable de se laisser
distraire par aueune considération de la passion qui le do-
minait, iI se livrait avec d1autant plus de confiance aux
impuIsions d'u'ne volonté impérieuse et arbitraire que,
persuadé de la droiture de ses intentions, iI pretait aux
penchans de son caractere l'appui d'une idée de devoir.


2. 26




ECL AIRCISSE~) ENS
L:l part qu'il put dall~ tüulc:'. le~ Illcsun's ycxatoires (¡tu
~ignalerent le régne de Charles 1, avait exalté au dcrnicr
Jegré la haÍne poPlIlaire , en 1l1eme temps que son appiica-
tian a faire tourner du moins au }Jrofit da Roí le fruil des
pxactions au gouyernement, toujours pret á se perdre dans
les mains des courLisans 7 luí avait fait des ennemi3 de
presque tous les hommes de la cour, dont il recherchait
d'ailleurs ayec une sévérité presque maligne, et poursuivait
(lVCC éc1at les désordres et les scandales.


Strauord abattu, la puissance passa toute entiere entre
les mains du parlement; Laud a la Tour ne pouvait plus
inspirer de crainte ; aussi y demeura-t-il trois années en-
tí eres (depuis le 20 février 164 1 , jusqu'au 12 mars lG4,'I) ,
avant qu'on commen~at son proceSo A l'époque OU on }'en-
rreprit, on se proposait proLablement de ranimer par la
les animosités populaires, trop dísposées peut-eLre a céJer
él tl beso in de la }Jaix; sa~s quoi il faüdrait attrib"uer la
JJlaniere dont ce proces fut conduit a l'aigreur du fanatisme,
et au dés.Í.r de satisfaire des ressentimens l)ersonnels.


Au mois de mai 1643, on avait défendu a l'archeve(lue
de Cautorbery de disposer d'aucun des Lénéfices a sa 110-
mination, si ce n'est par l'ordre du parlement et en faveur
des persoaues qu'on lui désignerait. Sur &onrefus, on le
dépouil1a de ses lJouvoirs et de ses revellUS, qui furcllL
mis sous le séquestre ; et delmis cette époque , malgré ses p~­
titions au parlement pour représel1ter l'état de détresse oh
ii se trouvait, et les charges que lui imposait son proces
( chacun de ses voyages de la Tour a Westll1inster lui coú-
tait, comme il nous l'apprend luí - meme, 6 ou '] li\Tes
sterling) , il ne put obtenir qu'une seule foís un secours
de 200 livres. La bonne volonLé des lords a cet égard était
toujours ,repoussée IJar les communes. Un des orateurs de
eeHe chambre dít une fois, entr'autres, qu'il fallaitsavoir ce
(lu'on ferait de La:ud, avant de s'embarrasser des moyeus




ET prECES BIS TOBIQUES.
de llourvoir a sa subsistance. Transporté Cfuatre-vingls foís
de la Tour au parlement , il ne comparut que vingt fois; les
autres jours, apres avoir attendu plusieurs heures, il était
renvoyé sans qu'on l'eilt entendu, á cause ou sous prétexte
de la multiplicité des aifaires; et, presque toutes les fois ,
iI était exposé aux plus grossÍcres et aux plus violentes in-
sultesde la populace. On peut s'en convairicre par le compte
qu'il a rendu lui-meme de son proces, et- qui va jusqu'.au
Jlloment ou il re~ut sa sentence. La populace ne se melait
meme pas seule de l'injurier; le premier jour OU .ilcompa-
rut, ayant cité, pour se défendre contre l'accusation de
papisme, vingt-deux personnes qu'il avait ramenées a la
reIigion }Jrotesl.ante qu'elIes étaient pres de quitter pour
le catholicisme, il fut assailli , au sortir de la salle, par les
invectives de l'alderman Moyle et de plusieurs autres spec-
tateurs indígnés, a ce qu'iI paraít, de ce qu'il avait })rétendu
a se défendre. Hugh Peters, surtout, animé sans doute
tI'une sorte de jalousie de rilétier, le suivit en grande hate
dans la salle du comité ce OU il commens:a , dit Laud, a me
1\ maltraiter de paroles, et m'assura que luí et d'autres
11 ministres pouvaient nommer des milliers de personnes
c~ qn'ils avaient converties. J e ne le connaissais pas, ne
« l'ayant, autant qu'il m'en souvienne, jamais vu de ma vi e,
CI quoique j'eusse beaucoup entendu parler de lui. Comme
« j'aIlais lui répondre, un de mes conseils, M. Hearne,
« se mit entre nous, et lui représenta que c'était se con-
1< duire avec moi d'une maniere bien inconvenante dans
« mon affiiction; et véritablement il s'avan!jait comme s'il
(1 avait voulu me frapper.» Le comte d'Essex, étant en-
tré en ce moment , réprimanda Peters et le 6.t sortir; mais
il parut ensuite,. par différentes circonstances, que ces
vingt - deux conversions avaient singulit:~renlent déplu au
parti , et surtout a H ugh Peters. En effet, soit ce long mal-
henr. soit que sa défense tonjours spiritueIlc, coutageusp


26.




ÉCLAIRCISSEMENS
et plus modérée qu'on ne l'aurait attendue de lui , produisít
quelque impression sur les esprits , plusieurs fois, durant.le
cours de ce prod~s, le peuple parut se relacher de 5a vio-
lence. Les injures et les cris diminuerent sur le passage de
l'archeveque; mais, pour entretenir l'échauffement, on
avait soin d'imprimer, dans des pamphlets distribués au
peuple, les charges portées contre luí ,sans jamais faire
mention de ses I'éponses; en sorte que chaque accusation
était refue dans le publie comme prouvée. Il s'en plaignít,
mais sanspouvoir obtenir satisfaction. Une fois entr'antres,
on l'accusa d'avoir, a l'avenement de CharlesI, altéré le
serment du couronnement pour le rendre moins favorable
aux droits du peuple. Bien qu'il eat répondu a eette al1é-
gation , on la répandit le JONr meme dans toute ]a ville , et
de la dans les provinces, avee une incroyable rapidité; et
on tint pour certain que l'archeveque de Canforbery avait
altéré ]e serment du 'couronnement, el méritait ponr ceja
seul de perdre la vie. « Voyant, dit-il, comme a ce sujet
Cl le feuprenait partout, je crus devoir, la premiere fois
el que je eomparus ensuite a la chambre, demander que
cc les livres du couronnement des rois précédens, el en
tf particulier ceux de la reine Élisabeth el du roi Jacques,
t( fussent vus et comparés, et qu'on apportata la coar les.
CI exemplaires quí étaient a l'échiquier, et ceux qui se trou-
(( vaient dans mon cabinet a Lambeth, afin qu'il fat fait
cc un examen eomplet de eette affaire, dans Iaquel1e j'étais
ce aussi innocent que quand ma mere me mit au monde. On
ce enregistra ma protestation , et ehaque fois que je revins
te ensuite a la barre, je réc1amai de nouveau; m::tis eeux
ti qui soutenaient l'aeeusation protestant toujours une ehose
ti ou l'autre, je ne pus gueres que le derníer jour obtenir
CI qu'on apportat les livres, ou qu'il fat faít quelque chose·
ce a cet égard; et alors on ne put trouver, ni a l'échíquie~
K ni dans mon eabine~, d'autre livre que eeluí du roi Jae-




ET prECES HISTORIQUES. 405
~{ ques, bien qu'íl y en eut plusieurs chez moi lorsqu'on
« me prit r.p.es clefs, cornme cela est altesté par les. votes
(( imprimés du parlement. Il y en avait ~mtr'autres un cou-
« vert de satin bleu de ciel, qui alors ne se trouva plus;
« et quant a celui du roi Jacclues , si mon secrétaire qui le
C( cOllnaissait ne l'et1t pas vu tomber du 'sac de M. Prynne
'" (chargé de la saisie ) , je ne réponds pas qu'on ne l'eut
e( <.:acl1é comme les autres. )) Les livres comparés, le ser-
ment de Charles se trouva parfaitement conf9rme a celui
de son pere.


Les charges intentées conLre Laud portaient, les unes sur
des faits politiques et des actes arbitraires, les autres sur les
faits religieux et les soups;ons de papisme. Toutes les ridi-
cnles susceptibilités, toutes les malveillantes interprétations
du fanatisme trouverent leur place dans le tissu d'absur-
dités dont se compose cette deruiere partie de l'accusation.
I.Je~ ornemens de la couverture de ses livres, quelques
tableaux placés dans sa demeure devinrent des motifs d'in-
culpation. Laud s'étollna avec raison de l'aecusation de pa-
pisllle portée eontre un de ces tableaux , qui faisait allusion
a ces· paroles de Jésus-Christ : « Le berger entre dans la ber-
I( gerie par la porte; mais ceux qui l'escaladent, pour y
(( entrer par une autre voie, sont des voleurs et des brigands. 11
Le tableau représentait le pape el les moines grimpant pour
entrer par les fenetres. C'était en effet, ce semble, une
piece a décharge, s'il en fut jamais.


On produisit de llouveau contre Laud la note de sir Henri
V ~me, déja produite eontre Stratford. Cependant il fut im-
possible detrouver aucun délit approehant du crime de
baute trahison. Le sergent Wild , l'un des accusateurs, en
comínt: (( Jamais, dit-il, nous n~avons prétendu qu'aucun
" des desseins de l'éveque arrivat a ]a trahison ou a la fé-
1( lonie; mais uous disons que tous les délits de l'éveque
" mis ensemble, eomposent, par voie d'accumulatiou, plu-




/íoO É CLAIHC ISSE M EJ\ S
« sieurs grandes Lrahisons.-Je vous demande pardon, mon
« bon monsieur le sergent, reprit Hearne, conseil de }'ar-
« cheveque, mais je n'avais jamais entendu dire que deux
¡( cents couples de Iapins noirs fissent un cheval noir. )) Ce-
pendant les communes prononcerent sans hésiter l'ordon-
nance d' attainder. Les lords y résisterent pendant six. se-
m~ines, bien qu'en leur portant l'ordonnance, on les elit
avertis, a la fin du message, que s'ils ne l'acceptaient ras de
bonne gr!ce, le pezple 1Jicndrait la lellr arracher. Le vieux
eorote de Pemhroke, }'un des plus brutaux du partí, s'in-
dignant d'un pareil délai, disait: (1 A (luoi nous arrctons-
(( nons donc? irons-nous penser qu'en rendant cette ordon-
« nance les communes aient manqué de consciellce? vrai-
« ment elles savaient hien ce qu'elles faisaiellt. » Et les
lords ayant demandé aux COlmnunes llne conférence ponr
délibérerde nouveau avec elles sur ce sujet, le sergent Wild
s'étonnait avec ses amis que les lords se méfiassent assez du
jugemen,t des communes pour avoir besoin d'une confé-
rence. Ni l'archeveque , ni son conseil , ne furent admis a la
conférence , et plusieurs des vingt lords qni composáient
alors a pen pres toute la charnhre des pairs, paraissent s'cu
ctre ahsentés. Le résultat fut la condamnation définitive de
l'archevcque, fondée sur l'accusation de tyrannie , d'efforts
pour renverser les lois et la religion, pour irriter le Roí
contre les }Jarlemens, etc., et terminée, comme la sentenee
de Strafford, par une réservo en fareur des délinquans a
venir, défendant a tous j uges, queIs qu'ils fussent, d'inter-
})réter les lois portées sur la trahison, alllremen,~ qu'ils n' al/-
raienl dd le faire allallt eelle ordolllzancc, el si ccitt> o,.doll~
nance n'edt jamais ¿téfalie. Laud~ queIque espoir qll'il elit
con~ervé j usqu'au dernier moment, se prépara avec couragu
a subir sa sentence; cependant, pour tenter encore un effort,
il enroya aux lord s un acle de grace, que le Roi lui avaít
envoyé deux ans auparayant. Ce moyen, comme on le peut




ET PIECES IUSTOIUQUES.
pcnser, u'cut allenne valeur aupres de ses juges;alors iI
se borna a demander qll'on lui épargnat le supplice igno-
minieux de la polenee ; et refusé d'abord par les ,cornmunes,
il ne l'ohtint qu'it une secollde requete par l'interccssion des
lords.


Son disconrs de IllOrt préparé, iI le mO~ltra ¡¡ son conseil
M. Rearne, et ,"oyant celui-ei placer son doigt sur un en-
droit crni paraissait l'ancter, ii voulut savoir de quoi il s'a-
lJissait. Laud avait écrit: « Je suis non-seulement le premíer
(( archevcque, mais le premier homme qui ait jamais été
(( mis a 11lOrt par une ordonnance de traítres. )) Hearne
eut heaucollp de peine a lui faire suhstituer a ces dernien
mots ccux-ci : par une ordonnance du parlemellt. Hearne
ayant ensuite remarqué qn'il paraissait affecté, l'archeve-
fine en convint, mais l'assura que son trouble venait uni-
({nement de ses inqui~tlldes pOllr le Roi. « J e dois monrir,
(( dit-il, le 10 janvier, mais j' ai bien peur que ce mois de
« janvier ne soit fatal aussi au Roí mon maltre. J e prie Dieu
« qu'il n'en soit pas ainsi. II Ces détails ont été eOllsignés de
la main de I-Iearne dalls le manuscrit de la défense oe I'ar-
cheveque.


L'archereque oormit profondément la uuit qui pn:céda
son supplice , et marcha a la mort avec une grande fermeté.
L'échafaud était tellement encombré de peuple, qu'il de-
manda a ceux qui le conduisaient, de tui laisser la place di'
mO!lrir, el pria les exécnteurs de faire écarter ceux qui se
trouvaient précisément au-dessous, ne VOll]ant pas, dit-il ,
que son sang retomb;lt sur la tete de ce peuple, Son dis-
cou 1'S, qu'il appela son oernier sermon, fut touchan t et ferme.
On y trouve plusieurs traces OU gout du temps. Ainsi iI se
compare aux IsraeIites })rets á traverser la mer Rouge , et
prédit la Yengeancc de Dieu sur ceux c¡ui I'y font entrer,
r,omlllc elle tomha sur les Egyptiem quí poursuivarellt les
)sraditcs.




ECLAIRCISSEl\fENS
Il avait demandé, avant de mourir, qu'on lui accordat


sur ses revenus séquestrés, une légere somme qui pftt le
mettre en état de subvenir aux frais de sa sépulture. Il ne
l'obtint point, et fut enterré aux dépens de ses amis.
(Clarendon, Hist. de la Rébellion; State-Trials, tomo 4,
col. 3 1 5~26. )




ET PIE CES HISTORIQUES. 409


11.


Sur la prise d' armes et les intentiolls des clubmen, dans
les comtés de Wilts et de Dorset~ en 1645.


La lettre oh Fairfax rend compte au parlernent de la
prise d'armes des clubmen dans les corntés de Wilts et de
Dorset, et les pieces qui y sont jointes, nous ont paru si
curieuses, que nous avons cru devoir les insérer ici textuel-
lernent. Rien ne fait aussi bien connahre l'esprit qui animait
cette singuliere et pacifique association.


10. Lettre de F airfax al/, comité des deur royaumes.


el Milordset messieurs, mes précédentes lettres ont in-
formé vos seigneuries de ma résolution de marcher vers
l'ouest pour secourir Taunton, et d'apres laquelle je me suis
avancé jusqu'a Blandford. Je n'ai pu jusqu'a présent rendre
cornpte a vos seigneuries de l'état des comtés deWilts et
de Dorset, acluellement en armes sous le nom de clubmen.
Ces gens-la ne prétendent qu'il se défendre du pillage, san s
se ranger du coté du Roi ni de celui du parlernent, et en
recevant également les deux partis. Leurs chefs sont tous,
autant que je puis le savoir, des hommes qui ont servi dans
l'armée du Roi, ou sont connus pour favoriser ce parti;
quelques uns memes tiennent actuellement du Roi des em-
}Jloís militaires. On dit qu'ils ont dressé et signé des régle-
mens pour la conduite et le maintien de leur nouveau partí.
lIs ont rédigé deux pétitions adressées l'une au Roi, l'autre
au parlement, dont j'envoie des copies a vos seigneuries.
Leurs chefs ont négocié avec "les comrnandans des villes de
~arnisons, soit du Roí, soit du parlement, qui se trouvaient




ÉCLAIRCISSElUE~ S
daus leur voisinage, et sont COllvcnus de lcul' payer dc~
contributions. On m'a dit que c'était 50 livres sterling a
Tolson-House, et autant a Langhorn-House. lis ont nomnH~
parmi eux des trésoriers, chargé5 de recevoir et de payel'
cessommes, ctles garnisonss'cngagcnt, a raisonde ce traité,
a nc pas lever de contributions par elIes-memes. J' envoie it
vos seigneuries un de leurs warrants pour les levées d' ar-
gent, et pour que remise en soít faite á 1\I. HoIlis de SaJis-
bury. lIs donnent des ordres de passe aux Jeurs, qu'iis
nomment associés, afin de leur donner moyen de voyager
dalls le pays sans inconvénieut. lIs s'enroIent sóus le com-
mandement de divers ofiiciers, se réunissent journel1ement
en grands corps, au lieu de leur rendez-yous , et se vanten t
de pouvoir rassembler viugt mille hommcs en ,'ingt-quatre
hellres. Pour les réunir, leurs chefs envoÍent dans différentes
villes; et au moyen du son des cloches et des messagers
qui passent d'un líeu de rendez-vous a l'autre, ils 3ssenlblent
des corps nombreux; ils portent pour marque distinctive des
rubans blancs en signe, disent-ils, de leur désir de paix.
lIs ont des tambours, des drapeaux, sont armés de mous-
({uets, dont quelques un s, m'a-t-on dit, leur out été en-
voyés de Sherburne, des fusils de chasse, des piques, dcs
hallehardes, de gros maiUets et autres armes du meme
genre. lIs s'interposent entre les garnisons des deux partis,
et si quelques hommes de nos troulJes et des troulles royales
yiennent a se rencontrer daus des lieux OU les cluúmen se
tt'ouvent en force, comme a Salisbury et autres lieux pa-
l'eils, ils ne lenr permettent pas de se battre, mais iIs les
font boire ensemble, et les renvoient ensuite chacun á sa
garnison. lIs entrent dans nos quartiers de cavulerie , volent
les ~hevaux qu'ils trouyent a }'herbe et les ernmcnent dans
les bois. lIs n'obéissent a aucun ordre OUl1S ces deux cornt(:s,
et ue COl1sentent jamais, ;.1 moins d'y (~lre forcé:.;, a clIlmeurr
des vivres pOll1' l'ármée, ni des chcvaux pour 11.'1' c]larroi:;.




ET PIECES HISTORIQUES. 4 11
115 sont beaucoup plus affectionnés a l'ennemi qu'au l)arlc-
ment, et déclarent publiqnement que, quel que soit le })arti
qni tombe sur eux, ils se joindront a l'autre. Ceux des ha-
bitans de ces comtés qui sont rée]]ement affectionnés au
parlement, et refusent de se joindre a eux, en sont jour-
nellement menacés et craignent beaucouJ) que cela ne finisse
mal. J'ai devant moi l'ennemi, yers Jequel je marche en
toute l1ate, el je ne sais ce que pourraient tenter ces gens-
la, nombreux eomme ils le sont, et conduits par des hommes
aussi dangereux que le sont la plupart de leurs chefs. Je
désire done avoÍr l'avis de vos seigneuries sur eette affaire,
nc sachant a quoi me décider tant que je n'aurai pas reyl.l
de vos nouvelles. J'ai soin d'empecher qu'aucun désordre
de ]'armée ne doune au pays de j llstes motifs de crier,
et j'espere qu'on s'occupera de non s envoyer de l'argent afin
que nous puissions satisfaire le peuple, en payant les frais
de notre séjour. Je ne doute nullement, si on pouvait
trouver promptement les moyens de réprimer ou d'apaiser
ces gens-la, que cela ne filt assez facile , mais on ne sait ce
que cela pourrait devenir ayec le temps. lIs me paraissent
généralement pleins de confiance dans leur cause et dans
leur parti, et s'ils en "enaient a s'ingérer de faire la loi
aux armées comme ils la font aux garnisons, iI en pourrait
résult-er de facheuses conséquences. Quant a présent je pro-
1)oserai a vos seigneuries d'envoyer dans ces cantons les
n~gimens de cavalerie du colon el Fiennes et du coJonel
Norton, ce qui, avec l'assistance du colonel Ludlow, shériff
d u Wiltshire, et celle des garnisons, les empecherait au
moins de se rassembler en grands corps, et de troubler ainsi
le pays. Je prie vos seigneuries de me répondre prompte-
ment, et suis, elc., TH. FAIRFAX.


Blandford, 3 juillet, 1645. H




ÉCLAlllCISSElUENS
Voici les pieces qui étaient jointes a cette lettre.


2°. Interrogatoire de Christophe Dale, clubman.


(( Christophe Dale, de Salisbury, interrogé, a dit que '1
quand il avait été pris hier comme espion au hout de ]a ville
de Salisbury par un soldat de l'armée, il s'en revenait de
Wicanton a Salisbury avec pIusieurs bouchers de ceUe viHe,
avec lesquels iI était allé p'Our se faire rendre sa jument,
qn'iI ramenait alors a Salisbury. Il a nié qu'il fut venu dans
l'intention d'ohserver l'armée, ou qu'il se soit détourné pou1'
cet ohjet de son chemin de Wicanton a Salisbury. Mais il
arriva que, comme il était en route, l'a1'mée vint a traverse1'
le chemin qu'il suivait, et il continua sa route a t1'avers 1'a1'-
lllée sans s'arreter a l'ohserver. 11 avoue qu'il a porté les
armes pour le Roi et a seni dans le parti ennemi en qualité
de quartie1'-malt1'e sous les ordres du colonel Bampfield.
Mais il dit qu'il a quilté les armes iI y a environ neuf mois ,
et depuis ce temps 11'a servi ni dans l'un ni dans l'aulre partí.
l\Iais il dit que dernierement iI s'est associé avec ceux qu'on
appelle les clubmen de Salishury, qu'il ne connait pas, aux
memhres de cette association, d'autre dessein que de se dé-
fendre, eux et leurs propriétés, cont1'e tous les pillards,
lIlais non de comhattre l'une ou l'autre armée; que pour
la vine de Salishury on a choisi seize hommes, savoir quatre
de chaque paroisse, pour leur servir de chefs, les guider et
les diriger, et que M. Hollis est au-dessus de tous les autres.
11 juge qu'il ya aux environs de Salishury envíron sept cents
cluhmen qui se sont montrés endifférentes foís; mais, d'apres
:.on opinion, iI Y en a un plus grand nomhre d'associés. !I
croit que la víHe est en état d'armer ces clubmen, (luelques
UllS de piques et de mousquets , d'autres de carahines et de
pistolets; il peuse que la meme association de c1uhmen
existe sur tout le comté de Wilts, et que plusieurs gentils-
hommes sont a la" tete de leurs différenles paroisscs; maÍs




ET PIECES HISTORIQUES. 415
íl ne peut nommer certainement que M. le j uge Bennet ,
M. Gold, M. Ashton, et M. Ed. Topp. lIs se sont trouvés
a p]usieurs rendez-vous. II était a un rendez-vous a Gro-
veley, ou se sont réunis les dubmen de SaIisbury et que!-
ques autres d'une partie de ce comté. lis se trouverent au
nombre d'environ quatre mille. On disait ~t croyait génér .. -
lement qu'outre ce rendez-vous il y en avait eu d'autres in-
diqués pour d'autres parties du comté, savoir Warminster,
Stonage, White-Parish et Uphaven; mais il ne sait pas 11:-'
nombre de ceux qui se sont trouvés a ces rendez-vous. A eeluí
de Groveley on ]eur ]ut et on leur proposa quelques articles,
auxque]s iIs donnerent tous leur consentement par une
aedamation. Mais iI ne pourrait dire que ces art.icIes COl~­
tinssent rien de plus que des moyens de se défendre contre
tous pillards. On dit aIors qu'ils seraient envoyés au Roí et
au parlement pour savoir ce qu'ils en pensaient; et, deux
ou trois jours apres, queIques militaires des garnisons de
Forceley et de Langford eurent une conférence a Salisbury
avec les dubmen sur l'invitation de ceux-ci. On lui a dit
qu'on y avait de nouveau proposé les articIes , et que, pour
conclusion, ii avait été convenu que les cIubmen donne-
raient 50 livres par semaine achaque garnison jusqu'a ce
que le R.oi et le parlement eussent répondu a leurs articles. )~


3°. Warrant des clubmen.


ti Comme les habitans du cornté ont 16 projet de s'en-
tendre sur des pétitions pour la paix, destinées a etre pri-
sentées l'une aSa Majesté , el l'autre aux chambres du par-
lement, pIusieurs gentiIshommes et autres habitans de la
division de Sarum, déja d'accord et associés pour cet objet,
ont pensé que, jusqu'a ce qu'on eut répondu a ces pétitions,
iI serait a propos de prendre, par voie de négociation entre
ces gentilshommes et habitan s , et les commandans des gar-
nisons de Langford et Fallersdown, de }Jl'omptes mesures,




ÉCLA lRe ISSEl\IENS
tant pour le repos et la sllreté soit des habitans de ladile di-
vision, ou de ceux des autres divisions sur qui pesent les
contributions, ou qui se trouvent, de quelque maniere que
ce soit, ineommodés ou tourmentés par l'une de ces garni-
sons, que pour la subsistance desdiLes garnisons. Sur l'avis
qui leur en a été donné, plusieurs gentilshommes et habitans
de ladite division se sont réunis, le 13 de ce mois de juin, á
une conférence avec les commandans des garnisons situées
dans la division de Sarum, et sont convenus de plusieurs
articles ayant pour objet de pourvoir a la sureté et au repos
d u comté, ainsi qu' a la subsistance et a l' entretien des deux
garnisons. Ces articles ont été revetus de la signature des
gentilshommes et l¡abitans de ]adite division et de celle des
commandans desdites garnisons, et confirmés, pour ]a garni-
son de Fallersdown, par les membres du comité lors siégeant
dans cette vilIe. Vous done, habitans de la paroisse d'Eb-
besbourne-Wake, etes priés par les gentilshommes soussignés
de payer ou faire payer, le 21 du courant ou auparavant,
au juré .constable de la centurie , la sommede ~ liv. 18 seh.
4 den. pour la semaine derniere, afin que le constable puisse
]a remettre et payer a John Hollis de New Sarum, député
par les gentilshommes et habitans ponr recevoir celte somme,
destinée a acquitter les paiemens promis aux garnisons. Ce-
1 ui-ci devra en rendre compte lorsqu'il en sera requis , et re-
mettre ]e reste de la recette, s'il s'en trouve un, a qui iI sera
ordonné. Vous enregistrerez aussi les noms des personnes im-
110sées dans votre décurie, ainsi que le montant de la taxe
de chacune, et les noms de ceux CJui refuscl'aient ou négli-
geraient de payer. Vos amis, ctc.


, Signés Tno1\TA.s BENNET, TnoMAs HOLLIS, et.c.




ET prECES HISTORIQUES. 415


í". PélitiOll adrcss(Jc au Roi par les clubmell des comtés
de lFilts et de Dorse!.


I( Vos su})plians ayant plus profon.dément senti qu'au-
cune autre partie du royaume ~ les miseres de cette guerre
dénaturée el intestine , aggravée pour eux par le poids d'un
grand nombre de garnisons établies dans ces'comtés et les
comtés voisins, et par le continuel passage des armées op-
posées, avaient dernierement espéré que le traité proposé
a U xbridge, par VoLre l\lajcsté, anx honorables chambres
du parlement, leur permettrait enfin de recueillir, de
nouveau, les fruits chéris de la l)aix, depuis si long-temps
perdus, en terminant, llar un heurenx accommodement, les
diiférends actuels, sans nouvelle effusioll de sang chrétien.
'Iais se trouvant entieremcnt déyus de ces espérances, et
n'ayant ainsi que trop lien de craindre que l'exces des ca-
l <lmités, que doit lJroduire la continuation de cette guerre
sanglallte, ne devienne chaque jour plus insupportable , si
quelque prompt accommodement n'arrele a temps nos di-
visions , si conlraires au christianisme, ils commencenl par
assurer franchelllent, avec douleur el confusion, devant
Dieu el devant les hom~l1es, que de meme que leur ex-
treme i~gratitude, le peu de cas et }'abus qn'ils ont fait de
la paix dont ils jouissaient ,les ont justement privés de cet
inestimable bienfait, ce sonl leurs nombre uses indignités
qui la tiennent éJoignée d'eux; en raison de quoi, soumis
aux dispositions de la clémence aiyine,. iIs ne cessent de
lu'ier Dieu du fona du c<rur , de vouloir bien, lorsqu'il en
sera temps, répondre llar sa grace aux continuelles suppli-
cations que luí adresse son Eglise pour son heureux réta-
blissement et celui de la paix. Et pour ne ríen négliger dans
la recherche el la poursuite des Ipoyens qui peuvent amener
un si heureux retour, il:-; se jettent également aux pieds de
Yotre royale l\Iajesté. la con jur:mt lwmh!emcllt de pretcr




ÉCLAIRCI8SEMENS
une oreille favorable aux ouvertures de paix qui seraient
faites a Votre Maj esté par les deux chambres du patlernent;
auxquelles vos pétionnaires s'adressent également pour les
engager a en faire la proposition, afin qu'il se puisse rétablir
enfin parmi nous une paix solide, et telle qu'elle }Juisse con-
tribuer a la gloire de Dieu et au maintien de la vraie reli-
gion protestante réformée , a la garantie de la personne, de
l'honneur et des propriétés de V otre royale Majesté , a la
sécurité des priviléges et immunités du parlement, et au
maintien des libertés et propriétés des sujets ; ce qu'ils re-
gardent comme les quatre principaux articlesde la protes-
tation générale jurée autrefois par tout le corps du royaurue.
Et bien qu'ils n'osent prendre la hardiesse, de s'entremettre
dans la discussion de ces deux grands mysteres d'Etat , les
prérogatives inséparables de la personne el du pouvoir
royal de Votre Majesté, et les justes priviTéges du parle-
ment, également l'objet de leurs prieres, qui en so1JicÍtent
la fixation et l'heureuse combinaison; cependant, ils se
croient obligés en conscience, d'abord et surtout comme
chrétie~s , de soutenir et faire prospérer, aux plus grands
périls de leur vie et de leur fortune, la vraie religion pro-
testante réformée; et ensuite, comme Anglais libres de nais-
sance , de ne poin~ dégénérer des vertus de leurs peres, el
de défendre et soutenir, par tous les moyens possibles et
légitimes, les lois , Jibertés el propriétés qui sont Jeur héri-
tage naturel, et auxquelles ils attachent autant de prix qu'á
la vie meme. Lesdits pétitionnaites demandent encore hum-
blement que, dans le cas OU 1'00 consentirait mutuellement
el de bonne foi a des négociations , V otre Majesté pour sa
part voulÜt bien de sa grace hater la suspension d'armes,
durant ces négociations, et que les deux chambres au par-
lement consentissent a en faire autant, afin qu'un traité
de paix ne ffrt pas négocié au milieu du sang; et eomme-
vos pétitionnaires ne' sont pas en état de se soumettre plus




E'f PlEe ES HISTORIQUES.
J'Ong-temps a l'observation impossible de tant d'ordres con-
traires, imposés par toutes ces garnisons et ces différentes
armées qui, sous prétexte de contributions, et conlre les¡
proclamations de Votre Majesté a ce sujet, ont, par des taxes
démesllrées, de continuels Jogemens de soldats, et des }Jil-
lages sans reMche, Jaissé a peine a vos pauvres supplians les
moyens de soutenir leur vie, ils supplient tres-humblement
Votre tres-sacrée Majesté de vouloir bien, llar votre royale
c1érnence, accoutumée a ressentir les maux de vos pauvres
sujets dans la détresse, leur faire la grace de diminuer le
nombre de vos garnisons dans ces comtés, dans le cas ou
les deux chambres du parlement, sur la pétition que leur
présentent a cet égard vos sujets, consentiraient a dimi-
nuer aussi le nombre des leurs, et de remettre entre leurs
mains toutes les viHes ou, pour la défense de ces contrées ,
il vous paraitra nécessaire d'enlretenir des garnisons, afin
que ces viHes soient gardées a la charge des habitan s , qui
ne les remettront a personne qu'a ceux que Votre Majesté
et le parlement auront d'un commun accord autorisés a
les recevoir. Et ils vous demandent humblement que, du-
rant le temps du service qu'ils auront a faire pour la garde
de ces vilIes, Votre Majesté veuille bien leur faire ]a grace
de les exempter de tout paiement et autre charge que celles
qlli seront nécessaires au logement de vos armées, lors-
qu'eIles se rendront en d'autres ]ieux. Et comme une fou]e
de personnes licencieuses, a ]a faveur du désordre des temps
et de la faiblesse oh est tombée la justice , commettent sans
répression de grands crimes, au mépris du Dieu tout-puis-
sant et du gouvernement de Votre Majesté, tel qu'il est
établi par les lois du royaume, ils vous supplient de faire
en sorte que tous les acles du parlement, rendus conlre
de tels attentats, soient mis a exécution par les officiers
qui en sont chargés, sans que nuI ait le droít de s'y op-
poser, et que tous ceux qui, apres avoir lJris les armes ou
~. 27




ÉCLAIH.CISSEi\lENS, etc.
porté secours dans cette mal henrense guerre a l'un ou a
l'anlre parti , ont quitté le lien de leur demeure habituelle,
ou sont retenus en prison ponr avoir secondo le parti opposé,
aient la l)ermission de retourner en paix dans ]eurs mai-
50ns, pour y vivre conformément aux lois. Les pétition-
naires conjurent Votre l\1ajesté d'etre persuadée que leurs
fréquentes réunions n'ont eu jusqu'ici, comme on le voit
bien, aucun autre but que de 5aisir l'occasioll de présen-
ter en commun leurs griefs a Votre Majesté , par l'humble
et innocente voie d'une pétition , ainsi que de s'unir, comme
ils s'y croient légalemcl1t aUlorisés, aux termes de la pro-
clamalion de Votre l\1ajesté en Ieur faveur, ponr]a défense
de leur religion , de leurs lois, de leurs libertés et de leurs
Liens, contre tonte violence et pillage queIconque , en at-
tendant qu'il plaise au Dieu tout-puissant de mettre un
terme a ces tristes dissensions. Enfin, pOllr prévenir tOllt
malentendu , et pour que les pacifiques intentions des -péti-
tionnaires puissent etre pleinement ex})liquées, ils suppliel1t
Votre Majesté de leur accorder un sauf-conduit pour la ga-
rantie de ceux qui seront employés h ces communications
avec elle. 1)


La meme pétitiol1 , adressée au parlement par les cluó.
men, mutatis mutandis, est insérée dans le journal de la
chambre des Iords. (Hisloire parlementaire, tomo 3, col.
380 el suiv. )




,


TABLE DES MATIERES
CONTENUES


DANS CE VOLUME.


HISTOIRE DU LONG-PARLEl\IENT.
LIVRE SECOND.


e II A P 1 T R E VI. Récz't abrégé de ce qui se passa dan s
les dffJerens comtés d'Angleterre ~ lorsque l'ordon-
nance du parlement pour la milice et la commission
d' enrúlement du Roi y jurent mises a exécution.
Noms de qllelqlles lords el azLlres personnes qui
s'employi:rent dans l'un Oll dans ['autre sens. Le
lord-mazre de Londres est mis a la Tour et con-
damné par le parlement. Quelqlles déclarations,
messages et n(ponses entre le Roi et les deux
cJzambres.


L 1 V n E T H O 1 S 1 E 1\1 E.
CHAPITRE Jer. Le prince Robert et le prince Mallrice


arrivent en Angleterre. Le comte d'Essex prend
congé du parlement , pour se rendre a son comman-
demento Les jorces du Roi s'accroissent il Slzrews-
bU/y. Rencontre t'l Tf7orcester. Grande bataille de
Keynton. 51


e nA PI T RE 1 I. Le parlemen t pro pose au Roi un ac-
commodemellt. Combat ti Brentford. Alllre négocia-
iion commencée avec le Roi el rompue. Readzil{{
assiégé par le général Essex , se rend ir lui. Com-
plot formé pour livrer Brislol. COTlspiratiolt contrc
le parlement el la cité de Londres, décollverlc el
pr/v[>l1lw. ~)5




., ,'lo




TABLE DES MATIERES.
CHAPITRE lB. Affaires d'Etat traitées dans le parle-


mento Assemblée ecclésiastique. Onfait un nouveau
grand sceau. La Reine est accllsée de haute trahisoll .
et autres délits. Le lord-général Essex, apres quel-
ques marches, revient cantonner son armée malade
aux environs de !úngston. Les troZljJes du Roí sont
en possession de l'ouest. Puissance du comte de
Newcastle dans le nord. Quelques 1110ts du comte
de Cumberland et du lord Fairfax. '44


CHAPITRE IV. Quelqlles actions de sir Thomas Fair-
fax dans le nord. La Reine débarque en Angleterre.
Dtffection de sir Hugh Clzolmleyet des deux l/o-
tham. État de la {Jllerre dans l'ouest. Sitllation des
comtés confédérés. Relation abrégée des actions de
sir Tf7illiam P!7aller, du colonel Cromwell , de sir
lFilliam Brereton et de sir Jolzn Gell.


CHAPITRE V. Mort de lord Brooke etdu comte de Nor-
thampton. Rencontres dans divers corneés. Triste
condition du parlement a cette époque. Siége de


1'"10
J


Glocester. 207
CHAPITRE VI. Expédition du comte d'Essex pour la


délivrance de Glocester. Récit de la grande bataille
de Newbury. 241


LIVHE QUATRIEl\IE.
Court exposé de ['origine el des progres de la seconde


guerre civile. 356


ÉCLAIRCISSEMENS ET PIECES HISTORIQUES.


J. Sur le pro ces el la mort de l'archevéque Laud.
(10 janvier 16~5. ) 401


1 l. Sur la prise d' armes el les intentions des clubmen,
dans les comtés de TFilts et de Dorset, en 1645. 409


:FIN DE LA T ABLE.